PROJET AUTOBLOG


Global Voices (fr)

Archivé

source: Global Voices (fr)

⇐ retour index

Ce qui s'est passé quand la justice russe a condamné un réalisateur ukrainien à 20 ans de prison

mercredi 2 septembre 2015 à 09:31
Protesters outside the Russian embassy in Kiev demand the release of Oleg Sentsov and Aleksander Kolchenko on August 25, 2015. Photo by Inna Sokolovska from Demotix.

Manifestation devant l'ambassade russe à Kiev pour demander la libération d'Oleg Sentsov et d'Aleksander Kolchenko, le 25 août 2015. Photo Inna Sokolovska, Demotix.

Un tribunal militaire de Rostov-sur-le-Don, en Russie, a condamné le cinéaste ukrainien Oleg Sentsov à vingt ans de travaux forcés en quartier de haute sécurité pour préparation d'«attentat terroriste» en Crimée. Son coaccusé, Alexander Kolchenko, a été condamné à dix ans de prison. RuNet Echo a recensé les réactions de la Toile au procès et au verdict, et leurs réflexions sur l'état de la justice en Russie.

Sentsov, natif de Crimée, est un cinéaste indépendant et un militant pro-ukrainien. Il nie toutes les charges qui pèsent contre lui et affirme que cette affaire est «motivée par des raisons politiques et falsifiée». Sentsov dit aussi qu'il a été torturé et frappé lors de sa détention par la police russe, et menacé de viol pendant sa garde à vue. Les procureurs russes ont aussi dénié à Sentsov la nationalité ukrainienne, arguant qu'il était un ressortissant russe puisque la Crimée «appartient dorénavant à la Russie».

Selon l'enquête, au printemps 2014 (peu après l'annexion de la Crimée par la Russie), Oleg Sentsov «aurait donné l'ordre à ses complices de faire sauter une statue de Lénine à Simféropol, en Crimée». La police a aussi prétendu que Sentsov préparait une autre attaque contre le mémorial de la Flamme éternelle de Simféropol. Kolchenko, lui, a été accusé d'avoir lancé un cocktail Molotov contre le bureau de Russie unie à Simféropol, ce qu'il a reconnu, tout en niant les charges de «terrorisme».

Plus tôt au mois d'août, plus de mille membres de l'Académie européenne du cinéma, parmi lesquels des réalisateurs de premier plan tels que Wim Wenders, Ken Loach et Mike Leigh ont signé une lettre ouverte au président russe Vladimir Poutine pour demander la libération des deux hommes.

Quand la sentence a été prononcée, le 25 août, la seule réaction des accusés, selon les témoins, a été de sourire et d'entonner l'hymne national ukrainien en plein tribunal, comme le montre cette vidéo largement partagée sur les réseaux sociaux.

A l'annonce du verdict de culpabilité, #Sentsov et #Koltchenko se mettant à chanter l'hymne ukrainien. Comme par défi.

Sentsov a été félicité pour son comportement au tribunal durant le procès, particulièrement pour ses poignants «derniers mots» après la lecture du verdict. «Sentsovien», selon le néologisme utilisé par l'ambassadeur américain auprès de l'OSCE Daniel Baer pour qualifier l'attitude du réalisateur.

Procès honteux; verdict honteux; tribunal honteux. #Néologisme #Sentsovien : (adj.) Qui a du courage, de la tenue, de la dignité sous la contrainte. Daniel Baer (@danbbaer)

Partagée par les internautes, la déclaration de Sentsov est très vite devenue virale. Certaines citations ont même fini sur des tee-shirts.

Lisez ça, et vous verrez que Sentsov est plus courageux que les quelque 100 millions de personnes qui peuplent la Russie. Andrii Olefirov (@AndriiOlefirov)

La plus grande faute en ce monde, c'est la lâcheté. Oleg Sentsov chante l'hymne ukrainien en entendant sa condamnation à 20 ans de prison. 25 août 2015. Euromaidan Press (@EuromaidanPress)

Les derniers mots d'Oleg Sentsov repris dans des citations [T-shirt: «Pourquoi créer une nouvelle génération d'esclaves ?»]

Peu après que le verdict a été rendu public, Ukrainiens et Russes ont organisé des piquets de manifestation en soutien de Sentsov et Kolchentko à Kiev, Kharkiv, et même à Moscou. De nombreuses photos des rassemblements ont été vues sur les réseaux sociaux.

A l'ambassade de Russie pour protester après le verdict de culpabilité pour #Sentsov #Kolchenko. Hromadske Int. (@Hromadske), 25 août 2015.

Les quelques humains qui restent sont venus manifester à Moscou. [Pancarte: «Vos peines (de prison) seront plus lourdes»].

A #Kharkiv près du consulat de Russie, action de soutien à O. Sentsov et A. Kolchenko.

Côté ukrainien comme russe, les internautes se sont montrés choqués et en colère, mais pas surpris. Les autorités ukrainiennes, dont le président Petro Porochenko et l'ambassadeur des Nations unies Youri Serguéïev, ont aussitôt condamné ce verdict.

Tiens bon, Oleg. Le temps viendra où ceux qui ont organisé ce procès inique seront à leur tour dans le box des accusés !

Russie ? Justice ? Totalement incompatible ! #FreeKolchenko #FreeSentsov #FreeSavchenko. Yuriy Sergeyev (@Yuriy_Sergeyev), 25 août 2015.

Les internautes ont comparé la sentence sévère rendue contre Sentsov à celles punissant d'autres délits ou au sort d'individus relaxés alors qu'ils auraient dû écoper d'une peine.

Alors que le sergent Zaïtsev, qui a tué le commandant ukrainien Karachevski en Crimée, n'a pris que deux ans.

“Sentsov, pour avoir mis le feu à une permanence de Russie unie : deux ans. Kadyrov, pour avoir fait la guerre à la Russie : un poste de président, un statut de héros, l'immunité, la richesse.

Certains ont apprécié cette coïncidence : le jour où était rendu public le verdict contre Sentsov, une ancienne fonctionnaire du ministère de la Défense Evguénia Vassilieva était libérée sur parole, après avoir purgé seulement quatre mois sur les cinq ans de prison auxquels elle a été condamnée pour fraude immoblière.

Conditionnelle et 300 millions de roubles à rembourser pour Vassilieva

20 ans en quartier haute sécurité pour Sentsov

Salauds

Je ne peux pas m'empêcher de penser qu'ils ont fait exprès de rendre les deux jugements le même jour. Pour se f… de la g… du monde.

La journaliste d'Echo de Moscou Ioulia Latynina a surpris beaucoup de monde en déclarant sur les ondes que selon elle, l'Etat russe avait des “preuves tout à fait sérieuses” de la culpabilité de Sentsov, et qu'il était justifié de harceler et d'«emprisonner quelqu'un non pas pour ce qu'il a fait, mais pour nier qu'il l'a fait». Après avoir soulevé une vague de consternation chez les internautes et chez ses collègues, Mme Latynina a rétropédalé et concédé que la sentence était «dingue» et qu'elle avait honte d'un pays qui punissait de vingt ans de prison le fait d'être un «patriote d'Ukraine».

Pour d'autres internautes, le procès de Sentsov et Kolchenko illustre bien le combat à mener pour la justice en Russie – et de rappeler quà Moscou Themis, la déesse de la Justice, ne porte pas son fameux bandeau.

Le terrorisme ukrainien ressemble fort à la justice russe.

Je vous rappelle que la Themis russe n'a pas de bandeau sur les yeux.

Le logement social de Londres s'écroule

mardi 1 septembre 2015 à 22:25
IMG_4366aa

Manifestation contre l'embourgeoisement de Brixton, 2013. Photo : John Lubbock

De 2013 à 2014, j'ai travaillé en tant qu'organisateur communautaire dans un quartier de logements sociaux dans le sud de Londres. Si vous n'avez jamais vu la pauvreté dans le “Premier Monde”, vous pensez probablement qu'être pauvre en Occident n'est pas un si gros problème. Vivre à Londres coûte cher. Si votre travail vous paye mal, il va vous falloir être incroyablement bien organisé et attentif à votre argent (en plus des travaux ménagers, de votre travail et de l'éducation de vos enfants) pour pouvoir payer toutes vos factures et obtenir les aides auxquelles vous avez droit.

Le vieux système de logement social de Londres est en train de s'effondrer. Depuis que le gouvernement Thatcher a encouragé les locataires à devenir propriétaires de leur logement social dans les années 80, le nombre de logements sociaux a chuté mais l'argent que le gouvernement a reçu de ces achats n'a pas été réinvesti dans la construction de nouveaux logements. Depuis cette époque, les gouvernements se sont basés sur l'hypothèse que le secteur privé pouvait répondre à cette demande.

Sauf que ce dernier en est incapable. Les entreprises privées veulent faire du profit, et les marges à court terme sur les logements sociaux sont faibles. A la place, la location privée a explosé et la facture des aides au logement avec elle. Au lieu de loger ces gens lui-même, le gouvernement transfère maintenant l'argent directement dans les poches des propriétaires. Certains politiciens ayant soutenu cette politique sont eux-mêmes propriétaires immobiliers.

Le coût de la vie s'élève à travers tout Londres, surtout pour les locataires et beaucoup, incapables de suivre, se sont retrouvés à vivre sous le seuil de pauvreté.  Cet effet a été exacerbé par l'impôt sur la sous-occupation des logements (“Bedroom Tax“), qui supprime 25 % d'une aide au logement d'un locataire de logement social si celui ou celle-ci vit dans un logement dont au moins deux pièces sont inoccupées. Lors d'une réunion publique à laquelle j'ai assisté à l'Hôtel de Ville de Brixton, une femme a ainsi expliqué comment ses aides avaient été réduites après qu'elle a été diagnostiquée d'un cancer en phase terminale, parce que sa fille avait quitté la maison pour aller à l'Université et qu'elle avait donc une chambre libre. Son association d'aide au logement lui a proposé un nouvel appartement dans une ville à plusieurs heures de Londres.

Ceci est en train d'arriver dans toute la ville, dans un mouvement que les gens appellent du “nettoyage social”. Alors que l'argent coule à flot dans les quartiers centraux de Londres, les gens aux revenus réduits sont poussés dehors quand de riches investisseurs achètent des propriétés dans ces quartiers. Parmi ces achats, beaucoup sont une forme de “réserve d'argent internationale” utilisés pour blanchir de l'argent. Ce problème est largement reconnu, comme dans le cas d'officiels étrangers douteux venant de dictatures partout dans le monde, qui enfouissent leurs gains mal acquis dans d'immenses portfolios immobiliers. La plupart de ces propriétés restent vacantes.

IMG_9783aa

Les murs humides d'un appartement de Clapham Park Estate, dans le sud de Londres. Photo : John Lubbock.

Les conséquences de l'embourgeoisement génèrent une colère en grande partie dirigée contre les autorités locales. Ceci frustre les élus locaux à qui j'ai parlé et pour qui cette colère se trompe de cible. Les mairies sont à court d'argent et doivent faire des choix douloureux, disent-ils. Et en l'absence de tout mécanisme de contrôle des loyers, les conseillers municipaux ne peuvent pas faire grand chose quand un quartier devient à la mode et que les loyers privés montent en flèche.

Il n'est donc pas surprenant que le Fonds Trussel, qui aide à gérer un réseau d'environ mille trois cent banques alimentaires dans le Royaume Uni (qui représente environ 40% des banques alimentaires du pays) ait vu une énorme augmentation du nombre de gens qui les utilisent. Selon Trussel, le nombre total d'utilisateurs des banques alimentaires qu'ils aident a augmenté de 25 899 en 2008-2009 à plus de un million en 2014-2015.

Untitled

Aujourd'hui, la compagnie d'électricité nPower travaille avec le Fonds Trussel pour fournir des bons aux gens vivant dans la pauvreté énergétique afin qu'ils puissent chauffer leur maison l'hiver. Les essais des banques énergétiques ont déjà aidé environ sept cent cinquante personnes qui avaient déjà été envoyées aux banques alimentaires. NPower considère cette initiative comme faisant partie de sa responsabilité d'entreprise et de l’Energy Company Obligation, sous laquelle il a dépensé soixante-cinq millions de livres sterling l'hiver dernier en travaux d'amélioration de l'isolation et de réparations de chaudières.

Mais cette aide n'est disponible que pour les locataires du secteur privé et les propriétaires. J'ai vu moi-même la façon dont la pauvreté énergétique affecte les gens vivant dans des logements sociaux à cause du coût élevé du chauffage d'appartements sans isolation. Souvent, les associations de logements privées veulent démolir les vieux immeubles pour construire de nouveaux appartements. Certains pourraient être vendus comme investissement locatif pour financer les unités à bas coût qu'elles sont obligées d'offrir. Les locataires sont des années sans savoir si ou quand leurs maisons vont être démolies ou s'ils seront relogés de façon adéquate. Logement, nourriture, pauvreté énergétique sont imbriqués et rendent les vies de ceux qui vivent dans la pauvreté insoutenable.

Le directeur du réseau de banques alimentaires du Fonds Trussel, Adrian Curtis, explique que l'objectif de son organisation n'est pas de remplacer les aides sociales, et que le Fonds cherche à influencer les politiques uniquement à travers la publication de données sur l'utilisation des banques alimentaires. Mais on peut vraiment se demander si le nouveau gouvernement conservateur est capable d'identifier, et encore moins de s'attaquer aux causes de la pauvreté. Leur politique actuelle consiste à continuer de vendre les logements sociaux et  espérer que le secteur privé construira davantage de “logements abordables”, qui peuvent coûter jusqu'à 80% du taux du marché immobilier.

Mais ceci ne serait pas d'une grande aide à tous ceux qui vivent dans des logements de mauvaise qualité. Le gouvernement du New Labour de Tony Blair avait promis un standard de “maisons décentes”, lequel imposait aux autorités locales de s'assurer que leurs logements sociaux atteignaient le niveau minimum en 2010. Cette promesse n'a jamais été tenue.

Si les gouvernements qui ont suivi s'étaient un tant soit peu préoccupés d'investir dans des logements à bas coût, il n'y aurait pas autant de gens à faibles revenus qui luttent pour payer leur loyer. Vivre à Londres coûte maintenant tellement cher que cette ville pourrait tout aussi bien être un parc d'attractions pour oligarques et afficher des pancartes avertissant que “Vous devez être riches pour entrer”.

A paraître, le récit en BD d'une séquestration par les séparatistes pro-russes de Donetsk

mardi 1 septembre 2015 à 22:07
One of the draft images from the comic book detailing Zakharov's kidnapping and imprisonment by "DNR" militants. Image from the artist on Facebook.

Une des esquisses de la bande dessinée racontant l'enlèvemet et la séquestration de Zakharov par les miliciens de la “RPD”. Source image : page Facebook de l'artiste.

Un artiste ukrainien capturé par les miliciens pro-russes de la “République populaire de Donetsk” pour ses créations irrévérentes de guérilla artistique travaille actuellement à un livre de bande dessinée qui racontera son enlèvement et mettra en lumière le sort des prisonniers politiques dans l'Ukraine orientale.

Sergueï Zakharov a commencé à réaliser des oeuvres ridiculisant l'auto-proclamée “République populaire de Donetsk” en juillet 2014, en collaborant avec des collègues artistes pour disséminer à travers la ville des figurines en contreplaqué de séparatistes arborant maquillages de clowns et tenues de camouflage. Accrochées aux clôtures et bâtiments, les silhouettes caricaturales ont été immédiatement remarquées et leurs photos ont fleuri sur les réseaux sociaux, provoquant inévitablement l'ire des séparatistes de la “RPD”.

Zakharov himself, attaching an artwork to a fence in Donetsk in 2014. Image from Facebook.

Zakharov en personne fixe une de ses œuvres à une grille de Donetsk en 2014. Image : Facebook.

A peine ses créations étaient-elles devenues virales que Zakharov reçut dans son atelier la visite d'hommes armés, qui l'escortèrent jusqu'au bâtiment des Services de Sécurité de Donetsk (un des bastions de la “RPD”), en emportant son ordinateur et son carnet d'esquisses. Zakharov resta séquestré plus d'un mois et fut torturé, selon ses dires. Simulacres d'exécution et passages à tabac étaient routiniers, selon l'artiste.

В середині ночі, іноді охоронці напивалися, вони іноді хапали кого-небудь з ув'язнених і везли в іншу будівлю, де знову били.

Au milieu de la nuit, les gardes s'enivraient, prenaient un des prisonniers et l'emmenaient dans un autre bâtiment pour le frapper à nouveau.

“Simulacre d'exécution.” Autre esquisse de la bande dessinée racontant l'enlèvement de Zakharov et sa séquestration par les miliciens de la “RPD”. Image : Facebook.

A présent l'artiste, qui s'est installé à Kiev, la capitale ukrainienne, pour se protéger des représailles à Donetsk, a choisi la bande dessinée pour raconter la vie dans la ville occupée de Donetsk et ce qu'il a subi aux mains des miliciens de la “RPD”.

“Si j'étais écrivain, je ferais un livre, mais je suis artiste, ce sera donc une bande dessinée”, a dit Zakharov à la télévision Hromadske dans un récent entretien.

Zakharov, surnommé “le Banksy de Donetsk” pour ses peintures de rue irrévérencieuses, a dévoilé quelques esquisses de sa future bande dessinée sur Facebook. Quand certains médias ukrainiens en ont parlé, l'artiste a été approché par des éditeurs pour publier l'ouvrage, et il est en train de finaliser les détails du projet.

“Transféré du bâtiment du bâtiment du Service de Sécurité de Donetsk à une autre prison.” Esquisse d'une planche de la BD de Zakharov. Image : Facebook.

Zakharov tire beaucoup de son inspiration du “Maus” d'Art Spiegelman, une des œuvres les plus marquantes de l'histoire de la bande dessinée, couronnée du prix Pulitzer pour sa description réaliste de la vie dans les camps de concentration nazis. L'artiste ukrainien espère que son projet de bande dessinée sensibilisera à la condition des autres prisonniers et séquestrés qui ont souffert (et souffrent encore) aux mains des autorités séparatistes auto-proclamées de l'Ukraine orientale.

Les “Gardiens du Jihad” menacent de mort les journalistes travaillant au Mali

mardi 1 septembre 2015 à 15:15
Rebels from the militant Islamist sect Ansar Dine in Mali - Public Domain

Des rebelles de la mouvance Ansar Dine au Mali. Domaine public

Des journalistes couvrant l'Afrique de l'ouest ont reçu des menaces de mort après avoir effectué des reportages au nord du Mali.

Dans son message envoyé le 31 aout, un groupe qui se proclame “Les gardiens du Jihad” n'a pas précisé le motif de ses menaces mais a uniquement mentionné que des journalistes étrangers, français en particulier, seront assassinés pour avoir  “répandu des mensonges sur l'islam”.

Voici un extrait du message :

Des journalistes et collaborateurs de presse étrangers au #Mali ont reçu des menaces de mort d'un groupe à ce jour inconnu de jihadistes. Via @Baba_A_ pic.twitter.com/XsltZGvpDM

Deux journalistes, Ghislaine Dupont and Claude Verlon, ont été assasinnés à Bamako, au Mali, en november 2013 par Bayes Ag Bakabo, suspecté d'appartenir à Al-Qaida au Maghreb (AQMI).

Les derniers événements au nord du Mali raniment l'inquiétude : le calme reste plus que précaire dans cette région. Le 9 aout, 13 personnes ont été tuées, dont cinq employés de l'ONU, lors du siège d'un hôtel dans la ville de Sevare au centre du Mali. Les forces de l'ONU au Mali ont repris en main la sécurité après le départ des troupes de l'armée française en Juillet 2013. La France est intervenue au Mali quand les combattants extrémistes ont menacé de marcher sur Bamako, en décembre 2012, lors de ce qui a ensuite été appelé l’Operation Serval.

C'est l'une des nombreuses menaces que les journalistes français en particulier reçoivent pour leur travail sur les extrémistes islamistes depuis le massacre de la rédaction de Charlie Hebdo le 7 janvier  2015. En juin, la journaliste française Anna Erelle (un pseudonyme) enquêtait sur les raisons pour lesquelles des jeunes femmes et des adolescents quittaient leur foyer et leur famille pour rejoindre le groupe ISIS en Syrie. Elle avait créé à cet effet un faux profil en ligne et a été approchée par un certain Abou Bilel qui l'a demandée en mariage et l'a invitée à se joindre au groupe. Quand elle a refusé, Abou Bilel lui a fait parvenir des menaces de mort. Dans cette vidéo, Anna Erelle explique la situation actuelle.

Les menaces contre les journalistes s'ajoute à un contexte tendu en France depuis la fusillade évitée à bord du train Thalys Amsterdam-Paris le 21 aout.  Selon le procureur  François Molins, au cours des derniers mois :

  • 1.882 Français sont aujourd'hui impliqués dans le djihad
  • 87 personnes font l'objet d'une information judiciaire
  • 63 d'une enquête judiciaire
  • 209 ont été mises en examen et 125 placées en détention provisoire

Le President François Hollande a déclaré le 25 aout, à la suite de l'attentat déjoué à bord du train Thalys que d'autres attentats sur le sol français était à craindre. François Hollande a cité les groupes ISIS, Boko Haram et le président syrien Bachar al-Assad  comme principales menaces à la sécurité en France. Huit attentats ou faits inquiétants ont eu lieu sur le territoire français en 2015 (voir une frise temporelle ici).

Une avancée au Mexique pour la reconnaissance des couples homosexuels

mardi 1 septembre 2015 à 11:43
12va. Marcha del Orgullo, la Dignidad y la Diversidad Sexual en México. Foto tomada de la cuenta en Flickr de Jesus M. Hernandez.

12ème Marche des Fiertés, pour la dignité et la diversité sexuelle (Mexique) – Photo: compte Flickr de Jesus M. Hernandez.

Le conflit au sujet de l'égalité et du droit à la non-discrimination des couples homosexuels a été tortueux dans le monde entier. Le Mexique ne fait pas exception. Néanmoins, certaines choses ont évolué récemment grâce à deux décisions prises par la Cour suprême de justice de la Nation.

Une affaire, par exemple, a été rejugée. Y était remise en question la légalité d'une ordonnance locale (de Colima, à l'ouest du pays) établissant que le mariage ne peut unir qu'un homme et une femme, en prévoyant toutefois un cas de figure particulier, “l'union conjugale”, pour les couples de même sexe. La première Chambre a décidé de donner raison au demandeur, en expliquant que comparer un cas de figure donné avec le mariage, comme c'est le cas pour l'”union conjugale”, nuit au droit à la non-discrimination:

La première Chambre a annulé le jugement précédent et a assuré le plaignant de son soutien, en décidant que le système distinct de l'union matrimoniale, établi par ledit article constitutionnel et l'article 145 du Code civil mentionné en bas de la rubrique consacrée à l'union conjugale, nuit effectivement à son droit à l'égalité et la non-discrimination. Cela signifie que sont anticonstitutionnelles non seulement ces dispositions, mais également toutes les portées normatives des articles dans lesquels il est question de cette institution.

La première Chambre a ainsi réaffirmé qu'il n'existe aucune justification rationnelle pour interdire le mariage aux couples homosexuels, et quand bien même il existerait un système juridique différencié que ceux-ci pourraient choisir au lieu de se marier, dans lequel figureraient également les mêmes droits que ceux du mariage, puisque ces derniers seraient reconnus aux deux partenaires de manière incomplète, en fonction de leur orientation sexuelle.

Cette décision, qui concerne un ensemble de loi locales (de l'entité de Colima), a conduit les médias traditionnels à montrer le renforcement par la Cour suprême de justice de la Nation de sa position en faveur du mariage gay et lesbien.

Cependant, la prise de position – qui concerne toute la Fédération – de cette cour a été publié officiellement au 19 juin 2015. Elle s'appuie de nouveau sur des raisonnements, ce qui a constitué un critère ou précédent en matière d'application obligatoire: les couples homosexuels connaissent une situation équivalente à celle des couples de sexe opposé. L'on retrouve dans ce précédent une déclaration intéressante au sujet d'une des raisons pour lesquelles les couples gays et lesbiens n'ont pas été protégés:

Si les couples de même sexe n'ont pas été aussi protégés que les couples hétérosexuels, cela n'est pas dû à une négligence du pouvoir législatif,  mais à l'héritage de sévères préjudices traditionnels à leur encontre et aussi à la discrimination historique.

Voici ce que l'on peut lire dans la conclusion:

L'exclusion des couples de même sexe de l'institution matrimoniale perpétue l'idée selon laquelle ceux-ci méritent moins de reconnaissance que les couples hétérosexuels. Cela porte atteinte à leur dignité humaine et à leur intégrité.

Le précédent dont il est question affirme de manière définitive pour le pouvoir judiciaire qu’il n'existe aucune raison constitutionnelle pour ne pas reconnaître la possibilité d'un mariage entre deux personnes du même sexe. Il convient de mentionner que cela ne signifie pas que les lois locales aient été automatiquement réformées. Dans un système de répartition des pouvoirs comme celui que souhaite adopter le Mexique, cette tâche incombe au Pouvoir législatif.

À ce sujet, une membre du Pouvoir législatif local a récemment acquis de la notoriété en raison de ses déclarations de mauvais goût, et contraires aux positions adoptées par la Cour suprême:

Ana María Jiménez Ortiz, députée locale du parti PAN (entité de Puebla), a déclaré la semaine dernière au cours d'un forum se tenant là-bas que “l'on ne peut employer le terme de mariage que pour deux partenaires ayant des relations sexuelles en face à face.”

Ce qui, précisément, dixit cette législatrice, “n'est pas le cas des couples homosexuels”, qui ont des relations en gardant la lumière éteinte; ceux qui ont les yeux bandés sont également coupables, a-t-elle renchéri, en expliquant qu'elle se basait sur le ses méthodes scientifiques pour affirmer cela.

Il s'agit d'une députée du parti conservateur Partido Acción Nacional [en français, Parti action nationale]. Celui-ci, lors des récentes élections fédérales, s'est de nouveau imposé en tant que seconde force politique nationale. L'on peut entendre les déclarations de Ana Jiménez Ortiz sur cette vidéo de YouTube.

Sur Twitter, Adriano Numa a ainsi commenté les déclarations de la députée:

Avec Ana María Jiménez Ortíz, députée du PAN, stupidité et obscurantisme sont au rendez-vous… http://t.co/7USGtG4p8R – Adriano Numa (@adriano_numa), le 18 juin 2015

De son côté, E Páramo a donné ainsi son avis au sujet des mariages entre deux personnes de même sexe:

Si tu es contre le mariage des homosexuels, n'en contracte pas.  #Libertad#SíAlMatrimonioParejasdelMismoSexo – E Páramo (@Param0_), le 19 juin 2015

L'on peut donc affirmer que l'égalité et le droit à la non-discrimination ont gagné d'importantes batailles au Mexique, mais il existe encore des obstacles juridiques et sociaux.