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L’Australie doute de la guerre contre les drogues

mercredi 11 janvier 2017 à 10:22
Nimbin H.E.M.P. Embassy

L'ambassade de H.E.M.P. à Nimbin (hemp = le chanvre – Nimbin est un village australien connu pour sa communauté de hippies) – Avec l'aimable autorisation de Nimal Skandhakumar sur Flickr (CC BY-NC-ND 2.0)

[Article d'origine publié en anglais le 7 décembre 2016] Nombre d’Australiens ont soutenu dans sa démarche Richard Di Natale, chef de file du parti des Verts, quand il a appelé récemment de ses voeux la fin de la guerre contre les drogues. Les Verts sont un parti minoritaire en faveur de la protection de l’environnement, d’une politique environnementale responsable dont fait partie la lutte contre le réchauffement climatique, et de la justice sociale.

Opposition farouche ou encadrement ? Le désaccord entre politiciens, décideurs et professionnels de santé dure depuis des années quant à la stratégie à adopter face à la consommation récréative de drogue, alors même que l’opposition classique entre partisans d’un durcissement des lois et de la dépénalisation fait partie des sentiers battus.

Bien évidemment, l’opinion publique s'intéresse plus que passagèrement au programme de dépénalisation des Verts puisque celui-ci comprend notamment la distribution de kits lors de festivals de musique. Ceux-ci permettraient aux spectateurs de tester la composition des substances qu’ils ont achetées. Le mouvement #JustOneLife, qui soutient cette proposition, est sous le feu des critiques après avoir testé ces kits de tests légaux cet été.

Sur Twitter, les réactions de la part de professionnels de santé ont été très nombreuses, tandis que d’autres ont vu en certains projets de loi tels que celui de la Thaïlande, qui s’apprête à dépénaliser les méthamphétamines, la preuve que l’on assiste à l’émergence d’un mouvement d’envergure mondiale.

L'essai courageux par la Thaïlande d'une approche à contre-courant de la soi-disant “guerre contre les drogues” mérite  qu'on en recommande l'adoption…

La Société médicale australienne, à en croire son président le docteur Dr Michael Gannon, rejette la dépénalisation de drogues illicites dont le cannabis, mais souhaite qu'on ne s'arrête pas là :

L'AMA est favorable à la substitution, à la réhabilitation, au traitement. Tout relâchement de la loi sur le cannabis doit être accompagné d'une éducation précise, bien dotée en ressources

The Age, parmi les quotidiens australiens les plus lus, soutient cette démarche; d’après le journal, la guerre contre les drogues ‘‘devrait être abandonnée en faveur d’une politique de limitation des risques fondée sur la dépénalisation, la régulation et l’éducation.’’ Il ajoute, ‘’nous soutenons fermement cette proposition, et nous estimons que les ressources gaspillées par cette ‘guerre’ malavisée et indéfendable devraient être redistribuées de la justice vers la santé, car il faut davantage de centres de traitement et d’accompagnement pour aider les personnes ayant des problèmes de drogues à en guérir.’’

De nombreux tweets ont renvoyé à cet éditorial. L'utilisateur de Twitter et médecin Alex Wodak, partisan d'une réforme de la législation sur les drogues, est très déçu de l'inaction des politiques :

Dans les média, de plus en plus d'éditoriaux et de tribunes réclamant une réforme urgente de la législation sur les drogues, mais beaucoup de responsables restent dans le déni.

Le mouvement Harm Reduction Australia (‘Limiter les risques Australie’] a mis en ligne un communiqué qui évoque ce qu’il appelle ‘l’hystérie autour des drogues’ :

’Lorsque les Verts ont fait part de leur volonté d’abandonner leur opposition farouche à la légalisation des drogues en faveur d’une approche plus empirique et régulatrice, les réactions ont été mal fondées et parfois très étranges.

… L’arrestation, la condamnation et dans certains cas l’emprisonnement ont un impact permanent sur la vie de dizaines de milliers de personnes chaque année, et il s’agit d’une démarche coûteuse, contreproductive et dangereuse.

De plus, nous observons une nouvelle fois une inquiétante augmentation du nombre de décès par overdose.

Quelques rares réactions en ligne ont critiqué la proposition des Verts. Peut-être une expression de la majorité silencieuse, dont le commentaire de Shooglebunny sous un article du Guardian pourrait bien représenter l'opinion :

Oui, il est toujours temps pour une ‘conversation adulte’ qui devra évidemment conclure que la légalisation des drogues sera ce qu'il y a de mieux depuis l'invention de l'eau chaude.

Il est essentiel que la classe moyenne puisse accéder facilement à l'herbe et aux drogues douces, sans possibilité d'être criminalisés et qu'une sorte de contrôle qualité soit imposé.

De cette façon ils peuvent fumer, sniffer et avaler comme bon leur semble. Peu importent les conséquences sociales négatives pour les moins privilégiés; ceux-là ne comptent pas de toute façon.

Tout cela peut paraître vain pour le moment, puisque les grands partis n'ont guère montré d'intérêt à discuter la proposition des Verts. La ministre fédérale de la Santé, Sussan Ley, a balayé les “appels au changement” des Verts. Le parti Travailliste dans l'opposition n'approuve pas actuellement la dépénalisation, et argumente plutôt pour davantage de possibilités de traitement et un renforcement des politiques de minimisation des risques.

Les Verts comptent neuf sénateurs et un député au Parlement fédéral. Comme le gouvernement n'a pas de majorité au Sénat, ils ont la possibilité de maintenir la question à l'ordre du jour national.

La révolution russe de 1917 en réalité virtuelle, mais avec les mêmes œillères qu'à l'époque

mardi 10 janvier 2017 à 13:31
The October Revolution meets virtual reality. Photo edited by Kevin Rothrock.

La révolution d'octobre rencontre la réalité virtuelle. Photomontage de Kevin Rothrock.

2017 est l'année du centenaire de la révolution russe, ce qui ne manquera pas de susciter des réflexions en tous sens sur son héritage et sa mémoire. Après tout, il s'est agi d'un événement de l'histoire mondiale, dont la commémoration dépasse la Russie.

Néanmoins, c'est bien l'empire tsariste qui a vu naître la grande expérimentation des bolcheviks, et leur révolution devait définir la Russie pour les quelque soixante-dix années qui ont suivi. Pourtant, l'URSS s'est effondrée il y a presque trente ans, et on ne sait pas trop comment réagira en 2017 la Russie actuelle.

A une époque où le gouvernement de Vladimir Poutine privilégie un récit historique lisse dépeignant un Etat russe éternel, difficile de prédire comment le Kremlin appliquera une suture narrative à l'une des périodes les plus déchirées de l'histoire humaine. Et le casse-tête n'est pas seulement celui du pouvoir. A l'approche du centenaire, les Russes seront nombreux à vouloir comprendre l'histoire et l'héritage de leur révolution. Mais comment ? Comment raconte-t-on la révolution russe ?

Mikhail Zygar. Photo: Facebook

Une tentative est le projet en ligne “1917: Histoire en Liberté”, qui raconte à neuf les événements de 1917 par la publication quotidienne de lettres, d'entrées de journaux intimes, d'articles, de poésie, de vidéos et d'images se rapportant à quelque 1.500 personnages-clés de la période. Mikhaïl Zygar, ancien rédacteur en chef de la télévision Dojd et auteur de “Les hommes du Kremlin : Dans la Cour de Vladimir Poutine”, est le créateur du projet, pour lequel il a recruté une centaine de journalistes, universitaires, artistes, et autres contributeurs. “1917 : Histoire en Liberté” impressionne aussi par ses sponsors : le géant du moteur de recherche Yandex, la Sberbank, la galerie Tretiakov, le journal Kommersant, le Musée Historique d'Etat, les Archives d'Etat de la Fédération de Russie, et les Archives d'Etat de Littérature et d'Art — et on en oublie.

Selon Zygar, l'objectif du projet est de “recréer la réalité telle qu'elle était il y a cent ans” si l'Internet avait existé. Ce qu'on obtient, c'est une sorte de “réalité virtuelle” de la révolution :

Наша цель — популяризировать историю. Нам хочется, чтобы люди видели в ней не какую-то скучную дисциплину, совершенно оторванную от реальности и не имеющую к ним прямого отношения. Наоборот, мы хотим показать, что история — это и есть жизнь. Это такие же люди, как и мы. И история объясняет многое не только про то, что случилось, но и про нас самих. У каждого есть возможность понять, что он сталкивается с теми же проблемами и мыслями, с какими сталкивался человек, писавший в свой дневник сто лет назад.

Notre but est de populariser l'histoire. Nous avons envie que les gens n'y voient pas une discipline ennuyeuse totalement dissociée de la réalité et dépourvue de toute relation directe avec eux. Au contraire, nous voulons montrer que l'histoire, c'est la vie. Ces gens sont comme nous. Et l'histoire explique beaucoup, non seulement sur ce qui s'est passé, mais aussi sur nous-mêmes. Chacun a la possibilité de comprendre qu'il est confronté aux mêmes problèmes et idées que la personne qui écrivait dans son journal il y a cent ans.

“1917 : Histoire en Liberté” est certes un projet impressionnant, particulièrement pour ceux qui s'intéressent aux sources primaire de cette époque. C'est ainsi que l'on peut lire ce qui suit dans un texte écrit par la Douairière Maria Fedorovna, la mère de Nicolas II le 9 décembre 1916 :

5 градусов мороза, из дому совсем не выходила. Приняла несчастную женщину, отца которой в чем-то обвиняют и он сидит в тюрьме. Она просила помочь. После завтрака встретилась с фрекен Крупенской. В 4 часа пополудни приехала милая моя Беби, одетая словно настоящая леди, выглядит такой счастливой. Обедали вдвоем с Сандро, поскольку все остальные были в театре.

Il fait 5 degrés sous zéro, je ne suis pas sortie du tout. J'ai reçu une malheureuse dont le père a été inculpé de quelque chose et est en prison. Elle demandait de l'aide. Après le petit déjeuner nous avons rencontré la demoiselle Kroupenskaïa. A 4 heures de l'après-midi est arrivée ma chère Baby [sa fille la Grande-Duchess Olga Alexandrovna] vêtue comme une vraie lady, elle semble si heureuse. Nous avons dîné à deux avec Sandro [le Grand-Duc Alexandre Mikhaïlovitch, beau-frère de Nicolas II] parce que tous les autres étaient au théâtre.

Ou encore ce passage de Nikolaï Astrov, secrétaire à la Douma de Moscou et membre du Parti Constitutionnel démocratique (KD), du 12 décembre :

На этом совещании было очень мало народу, были только по особым приглашениям. Среди присутствующих были кн. Львов, Кишкин, кажется, Маклаков, я. На этом совещании после заявления кн. Львова о том, что все сообщаемое им должно быть сохранено в тайне, он довольно подробно рассказал о настроениях Петрограда. По его словам, в ближайшем будущем можно ожидать дворцового переворота. В этом замысле участвуют и военные круги, и великие князья, и политические деятели. Нужно быть готовым к последствиям. В очень туманных выражениях было указано, что предполагается, по-видимому, устранить Николая II и Александру Федоровну. Торопливая речь кн. Львова была неясна. Уточнять ее было неловко. Тем более что казалось, что сам Львов не знает ничего точно, ибо сам лишь поставлен в известность о готовящемся.

Il y a eu très peu de monde à cette réunion, seulement sur invitation particulière. Parmi les présents, il y avait les princes Lvov, Kichkine, Maklakov, et moi-même. Après une déclaration du prince Lvov demandant à tous de garder le secret, il parla en grand détail de l'humeur à Petrograd. Selon lui, on peut s'attendre dans un avenir proche à une révolution de palais. A ce plan participent cercles militaires, grands princes et acteurs politiques. Il faut se préparer aux suites. En termes très vagues il fit état qu'il se tramait apparemment d'écarter Nicolas II et Alexandra Feodorovna. Le discours hâtif du prince était confus. Il était difficile de le définir, d'autant plus que Lvov semblait lui-même ne rien savoir de précis car il avait seulement été informé de sa préparation.

Ces entrées, qui vont des mondanités aux conspirations, démontrent à la fois la distance et la peur des principaux acteurs de l'époque. Elles fournissent aussi de fascinants instantanés quotidiens des événements de février 2017 que nous connaissons tous (l'abdication de Nicolas II, et l'instauration du pouvoir bicéphale du Gouvernement Provisoire et du Soviet de Petrograd).

Le site comporte aussi des ressources importantes et innovantes, telles qu'un “Guide des Romanov” donnant une généalogie de la famille au tournant du siècle. Plus intéressante et utile encore peut-être, la section “Qui est lié à qui”, où un clic sur un personnage montre le réseau de ceux qu'il ou elle aimait, détestait, n'aimait pas, avait en amitié, rivalisait avec, et épousait. Une merveilleuse façon de cartographier les diverses intrigues personnelles de la famille régnante et sa cour.

Seulement voilà, la riche collection de ces voix laisse un silence béant à côté de toutes ces entrées : les voix des individus des classes roturières qui ont participé au processus révolutionnaire, l'ont vécu, et y sont nés à la vie politique : intellectuels, artistes, et intelligentsia reflètent eux-mêmes le vécu de leurs géniteurs. C'est dommage. La recherche historique des 25 dernières années a montré que les archives de la Russie contiennent une abondance de textes qui transmettent les voix des “gens” sous forme de lettres, journaux intimes, journalisme, art visuel et poésie.

Ce silence pourrait être le principal paradoxe dans la tentative du site web de créer une mémoire de la révolution. L'ignorance des voix et de la volonté historique des gens ordinaires a précisément fait la perte d'une grande part des élites russes en 1917. Un siècle plus tard, les descendants de cette classe décimée font la même erreur en réalité virtuelle, malgré toutes leurs bonnes intentions.

Gholamreza Takhti, le sportif iranien bien-aimé qui lutta contre le Shah

lundi 9 janvier 2017 à 22:08
Gholamreza Takhti (middle) in an undated picture in Iran. (Source Wikimedia Commons)

Gholamreza Takhti (au centre) sur une photo non datée, en Iran. (Source Wikimedia Commons)

[Tous les liens sont en anglais]

Le 7 janvier dernier a marqué l’anniversaire de la mort de l’un des plus héroïques athlètes d’Iran, Gholamreza Takhti. L’héritage de Takhti est remarquable, non seulement en raison de ses exploits sportifs sur la scène mondiale de la lutte, mais aussi pour son humilité, ses idéaux politiques et son combat pour la liberté, mené contre la dictature du Shah. Sa vie et sa mort symbolisent la lutte du peuple iranien, dont beaucoup de ses membres ont sacrifié une vie de confort et de privilèges pour porter haut leurs principes.

Né en 1930 au sein d’une famille pauvre de Téhéran, Takhti a rapidement trouvé sa vocation : la lutte. Il devint alors très vite l’un des plus talentueux athlètes d’Iran. En 1950, il remporta ses premiers championnats d’Iran, puis la médaille d’or olympique en 1956.

Surnommé “Pahlevan” (champion) en raison de ses performances héroïques, de sa dignité et de sa réputation sans tache, Takhti était également reconnu pour son comportement chevaleresque, sur et hors des tapis de lutte. Son penchant pour l’équité et la justice lui ont permis de gagner le respect de ses adversaires et l’amour du public. Pas question pour lui de tirer parti des blessures de ses concurrents, athlètes et familles étaient ainsi traités avec égard.

Outre les prouesses inégalables de Takhti, ce sont surtout les activités politiques de ce lutteur qui ont fait de lui une figure mythique en Iran.

Takhti soutenait activement le Dr. Mohammad Mossadegh et ses efforts pour nationaliser le pétrole iranien et obtenir l’indépendance. De fait, ses convictions politiques lui ont souvent valu la désapprobation du Shah. Après le séisme de Qazvin en 1962, Takhti s’employa à trouver de l’aide pour les habitants, quitte à contourner les efforts du Shah pour collecter des fonds. Des actes de défiance envers la dictature qui imputa à Takhti la réputation d'un Robin des Bois parmi la population iranienne.

Son opposition au régime le mena aussi à sa perte. Le 7 janvier 1968, son corps sans vie fut retrouvé dans une chambre d’hôtel. Les autorités attestèrent d’un suicide, mais ses combats politiques ont amené nombre de ses supporters à croire à un assassinat commandité par la SAVAK, la police secrète du Shah.

En 2013, la cérémonie célébrant le 45ème anniversaire de la mort de Gholamreza Takhti se tint au cimetière Ibn-e Babouyeh, au sud de Téhéran, où il fut inhumé. Photo de Mehr News.

Le potentiel non exploité de Takhti et sa foi inébranlable en ses principes est symbolique du passé et du présent de l’Iran. Les Iraniens ont ainsi effectué d’importants sacrifices dans leur lutte contre le Shah, pour voir en fin de compte Khomeini voler leur révolution. Toutefois, des légendes comme Takhti continuent d’inspirer les générations futures dans la défense de leurs convictions, et dans le rejet d’une vie de confort face à l’inégalité et l’injustice.

Gholamreza Takhti ne devrait pas seulement être distingué pour son incroyable carrière sportive, mais aussi pour ses qualités humaines, lui qui usa de ses dons et de sa bonne fortune pour venir en aide aux plus démunis et pour défier l’injustice et la répression. Takhti était un héros, sacrifié sur le chemin de la liberté et de la démocratie.

La Turquie découvre les artistes syriens

dimanche 8 janvier 2017 à 13:49
'Arthere' in Istanbul's Kadıköy district. Source: SyriaUntold

Arthere, dans le quartier de Kadiköy à Istanbul, est un espace artistique indépendant. Photo de Derya Yücel/SyriaUntold, 12 décembre 2016

Cet article, initialement écrit pour Syria Untold par est reproduit ici dans le cadre d'un accord de partenariat de contenus. 

Le marché de l'art et la scène artistique d'Istanbul s’ouvrent graduellement depuis le milieu des années 90 aux contacts avec d'autres pays. Pourtant les échanges avec la Syrie étaient encore inexistants il y a cinq ans.

Quelques individus et collectifs, constitués surtout de Syriens mais aussi de Turcs, et de ressortissants arabes et européens, en montant des structures pour promouvoir la culture syrienne oeuvrent à la création de ponts avec la communauté et la scène artistique locale hôte, et fournissent des lieux de rencontre pour les réfugiés syriens d'Istanbul, dont le nombre était estimé à 330.000 en 2014. Ils aident aussi les artistes nouvellement arrivés.

A l'exception du début des années 2000, les relations turco-syriennes sont tendues depuis des décennies, et en raison de l'absence de langue commune, très limitées. Le paysage politique turc s'est encore davantage polarisé ces dernières années. C'est sur un tel fond que les artistes syriens, représentant une scène artistique avec laquelle les publics et acteurs culturels turcs n'étaient ni familiers ni connectés, ont commencé à s'établir dans la mégapole.

Pages, la première librairie arabe d'Istanbul, a ouvert ses portes pour répondre à la demande des Syriens de la ville, et rapprocher la communauté hôte des immigrants arabes. Créée par des artistes et éditeurs syriens aux côtés de partenaires turcs et non-turcs, elle dispose d'un café et d'un espace pour enfants, et héberge des événements culturels.

Une pièce confortable remplie de livres en arabe, turc, anglais et français accueille les visiteurs par un froid soir de décembre. A l'étage, le café retentit de voix arabes. “Chaque jeudi nous proposons des conseils juridiques gratuits [aux réfugiés syriens],” explique un bénévole.

Pages Bookshop Café is Istanbul’s first Arabic bookstore and has become an important meeting place bringing both Syrians and Turks together for cultural and other events. Taken in Istanbul, Turkey on December 1, 2016 by Nathalie Rosa Bucher/SyriaUntold

La librairie-café Pages, première librairie arabe d'Istanbul, est devenu un important lieu de rencontre rapprochant Syriens et Turcs pour des événements culturels et autres. Photo de Nathalie Rosa Bucher/SyriaUntold, 1er décembre 2016

Installé en 2014, Arthere Istanbul, qui a un statut commercial, est un centre d'art et café à Kadıköy qui a récemment commencé à proposer des résidences d'artistes. Dès le départ, il a cherché les relations avec la communauté artistique locale et l'expérimentation artistique y est la bienvenue.

Au rez-de-chaussée, derrière une cloison vitrée, se trouvent des tables et une kitchenette self-service. Le premier étage est un studio d'art et le sous-sol, une chambre sans fenêtre avec une couchette pour un hébergement d'urgence.

Co-initiateur d'Arthere,  le photographe syrien Omar Berakdar a accueilli une multitude d'artistes syriens. Beaucoup d'entre eux ont choisi de quitter la Turquie, et laissé à Arthere instruments, chaussures et une collection de valises. Berakdar a aussi monté un archivage pour sauvegarder les oeuvres d'artistes à l'étranger ou en fréquent déplacement, afin de les empêcher de s'abîmer.

Istanbul, comme Beyrouth, est devenu un point de ravitaillement pour les artistes syriens. Le peintre Hasko Hasko s'y est établi avant d’aller en Allemagne, et Mohammed Zaza, également peintre venu à l'origine rendre visite à un ami, a décidé de rester — pour un temps.

L'artiste visuel syrien Ali Abdulkerim, connu sous le nom de ʻAli Omarʼ, a déclaré que sa volonté serait de rester à Istanbul, mais qu'il affronte des contraintes financières. “Où que ce soit dans le monde, gagner sa vie avec l'art n'est pas aisé, c'est peut-être encore plus difficile en Turquie, et j'en étais pleinement conscient quand j'ai fait le choix d'être un artiste. Le marché à Istanbul n'est pas aussi développé, il y a moins d'acheteurs et peu en ont les moyens. Ceci affecte tous les artistes, y compris les artistes turcs”, explique-t-il.

Son travail récent – de grands portraits aux riches couleurs – faisait partie des dessins et peintures exposés à Arthere lorsqu'un groupe d'étudiants turcs en gestion de l'art de l'Université Bilgi sont venus visiter avec leur maître de conférences Derya Yücel le 1er décembre 2016.

“Cela a été une expérience très intéressante pour mes étudiants que de découvrir Arthere”, a commenté après-coup Yücel. “Les étudiants se sont intéressés à certaines oeuvres. Ils m'ont même dit vouloir revenir à Arthere. Mes étudiants n'avaient encore jamais connu avant de tels groupes d'artistes, et pour cette raison ces rencontres les enthousiasment”.

“Cette année nous voulons travailler avec Arthere sur le projet que nous préparons dans le cours. Ce projet permettra à plus d'étudiants de rencontrer des artistes syriens. Nous ferons une publicité et des membres de la scène artistique turque participeront en tant que public. Ce qui augmentera la reconnaissance”, a esquissé Yücel.

Turkish Art Management students listening to a presentation by Arthere co-initiator Omar Berakdar. Arthere is an art centre and café in Kadıköy that recently started to offer art residencies. Taken in Istanbul, Turkey on December 1, 2016 by Derya Yücel/SyriaUntold

Des étudiants turcs en gestion de l'art écoutent une présentation du co-initiateur d'Arthere Omar Berakdar. Arthere est un cenre d'art avec café à Kadıköy qui a récemment commencé à proposer des résidences d'art. Photo de Derya Yücel/SyriaUntold, 1er décembre 2016

Interrogée sur les connexions des institutions artistiques turques avec l'art arabe et plus particulièrement syrien avant 2011, Asena Günal, coordinatrice de programme à Depo Istanbul, répond : “Peu d'entre nous parlent arabe, nous étions supposés laisser derrière nous notre passé ottoman [conformément à l'héritage d'Ataturk] et les Turcs se se sentent des orientalistes quand il s'agit des Arabes…”

Depo est l'une des rares institutions à collaborer ou exposer de l'art syrien. La succursale de Galata de la très fréquentée galerie SALT a hébergé Apricots from Damascus, un projet de fanzine et exposition sur les diasporas passées et présentes, organisée par Atıf Akın et Dilek Winchester il y a quelques mois, souligne Günal. Au printemps, Depo a fait équipe avec Şenay Özden, un participant de Hamisch, maison de culture fondée par des artistes et intellectuels syriens et turcs, pour SaturDox 2016.

“Et les voix syriennes ?”, demande Günal, “On n'en entend pas ! On n'entend pas de bonnes représentations des Syriens, depuis les médias turcs ou occidentaux. Nous avons donc organisé six projections de documentaires sur la Syrie [SaturDox] toutes suivies de débats. C'était vraiment instructif”.

Les décennies de liberté d'information restreinte ont laissé une empreinte indélébile sur les artistes syriens et leur production. “Il y avait la censure du cinéma pendant le régime Assad, cela soulève les questions des restrictions expresses et non-dites et de l'auto-censure. Nous avons, par exemple, projeté le Cinéma Silencieux de Meyar al-Roumi dans le cadre de notre série Synema en octobre 2016. Il est essentiel de trouver un moyen de contourner les restrictions et barrières pour délivrer un message honnête ; poser des questions, et non fournir des réponses”, défend Berakdar.

“Avoir des collaborations turco-syriennes est crucial aussi du fait que les artistes syriens, notamment les cinéastes, ont dû depuis des décennies trouver les moyens de contourner des conditions de travail prohibitives”.

Günal définit Depo comme “un espace alternatif, où les voix dissidentes et syriennes sont au programme. Participants à l'exposition de Mohammad Zaza, qui à l'instar de nombreux artistes a voulu montrer son travail à des publics turcs, nous avons profité de cette occasion pour avoir un débat sur art, oppression et créativité”.

Installé à Istanbul depuis quatre ans, et parlant couramment le turc, Berakdar a conseillé les étudiants de l'Université Bilgi. “Le premier défi que vous rencontrerez est évidemment l'argent. J'ai étudié les média, l'art et la chimie et je fais des boulots à côté pour des compagnies pharmaceutiques qui font rentrer un peu d'argent. […] Les bourses, c'est fini”.

Le lendemain, Berakdar a expliqué que la société turque était encore en train de s'habituer aux artistes syriens. “Les étudiants de hier étaient enthousiastes, il faut donc entrer en contact. Ici en Turquie les gens vont plutôt au concert et au cinéma que dans les galeries et les musées de beaux arts”, dit-il. “Impossible d'attendre le même intérêt et la même fréquentation pour les vernissages d'expositions d'arts visuels qu'au Liban ou en Syrie”.

Arthere has successfully opened to the artistic community and the neighbourhood, allowing for networking and collaborations. Taken in Istanbul, Turkey on December 20, 2016 by Omar Berakdar/SyriaUntold

Arthere s'est ouverte avec succès à la communité artistique et au voisinage, permettant réseautage et collaborations. Photo de Omar Berakdar/SyriaUntold, 21 décembre 2016

Pour valoriser les artistes syriens et élargir leur compréhension de la scène artistique locale, Arthere gère un grand nombre d'ateliers et accueille débats, projections, performances et concerts. Ces derniers notamment ont attiré de nouveaux publics, ainsi pour un medley de musique expérimentale, et divers ensembles — même un orchestre de 15 instrumentistes qui a joué des chants traditionnels turcs.

Istanbul s'enorgueillit d'une scène musicale merveilleusement diverse, qui est à elle seule un de ses plus gros secteurs artistiques. Parmi les artistes syriens venus en Turquie depuis 2011, ce sont évidemment les musiciens qui ont trouvé le plus de facilité à s'installer.

A Arthere, l'artiste syrien Abdulwahed al-Khamrah a fait découvrir au public le patrimoine musical de la Syrie, et le centre Saba Barada, pour présenter le célèbre joueur d'oud Wassim Mukdad, en collaboration avec deux musiciens turcs. La stratégie et l'engagement d'Arthere des deux dernières années a changé, visant à être une agence d'artistes plutôt qu'une galerie.

Une grande partie du travail de Depo est dépendant de financements philanthropiques et européens, mais ces derniers sont à présent menacés, surtout depuis le retrait de la Turquie de Creative Europe en octobre 2016. “Nous avons besoin de lever des fonds pour les expositions et ne recevons aucun financement turc quand il s'agit d'artistes syriens”, dit la coordinatrice de programme de Depo Asena Günal.

Gezi 2013 a été un tournant, la société est devenue hautement polarisée. Dans le cinéma et le théâtre le changement a été drastique — moins pour nous. Ne pas dépendre financièrement de l'Etat nous rend flexibles et en termes de contenus nous ne subissons pas la censure. […] Nous recevons de moins en moins de candidatures de l'étranger pour des collaborations. Beaucoup d'artistes locaux sont découragés, ils ne veulent pas rester ici”.

Sur la question de l'apport des artistes syriens, Günal estime qu'avec l'Occident toujours au centre de l'attention, les artistes syriens ont rendu possibles de nouvelles perspectives et une meilleure connaissance de la production artistique de la Syrie.

Pour Yücel, le maître de conférence de l'Université Bilgi, la présence des artistes syriens se manifeste surtout depuis les deux dernières années. “Il y a eu une prise de conscience des artistes immigrés sur la scène de l'art contemporain à Istanbul aussi grâce aux média. Et des organismes collectifs comme Arthere ont gagné en visibilité. Pas seulement les Syriens, aussi tous les artistes indépendants doivent être soutenus dans l'écosystème artistique d'Istanbul”.

Berakdar pense qu'Arthere a eu un effet sur la scène locale et le voisinage. “Nous avons été les premiers à démarrer un atelier ouvert au public, à travailler ensemble, nous l'avons rendue plus internationale, nous avons amené plein de collaborations avec la communauté turque ici et cela a été bénéfique pour nos artistes. Ils rompent ce sentiment d'aliénation, ils commencent à se sentir plus chez eux ici”.

Après des siècles d'histoire commune et des décennies de séparation, confrontés aux défis — partagés pour certains — les artistes syriens imprègnent la scène artistique turque et créent des institutions et des réseaux importants, tant pour eux-même que pour la communauté hôte.

LibreRouter : Pourquoi acheter un routeur quand on peut construire le sien ?

samedi 7 janvier 2017 à 18:08
Altermundi community network collaborators work on a piece of hardware in Argentina. Photo via Altermundi blog.

Les collaborateurs du réseau communautaire AlterMundi travaillent avec des partenaires au Mexique. Photo du blog d'Altermundi.

Pour se connecter à Internet, la plupart des personnes dans le monde comptent sur des sociétés privées pour leur fournir ce service et le matériel nécessaire – contre paiement . Nous dépendons d'entreprises comme Asus, Cisco, Eriksson et Huawei, qui fabriquent des modems et des routeurs permettant d'accéder au net.

Mais ce n'est pas la seule façon de se connecter. LibreRouter, un nouveau projet développé par un groupe de hackeurs originaires de pays et milieux différents, facilitera dorénavant l'accès sans passer par un fabricant institutionnel.

En août 2016, l’IETF (Internet Engineering Task Force, Groupe de travail d'ingénierie de l'Internet), où sont développées les normes techniques d'Internet, ont reconnu dans un document qu’ « un ensemble de déploiements de réseau alternatifs était apparu ces dix dernières années dans le but d'apporter aux gens la connectivité Internet ou de fournir une infrastructure de communication locale ». Le document souligne que cette classification implique « des architectures et une topologie différentes de celles des réseaux courants et s'appuie sur des modèles économiques et de gouvernance alternatifs ».

Inspiré par les déclarations de l'IETF et rassemblé autour de l'idée commune de fabriquer un matériel qui permette à des réseaux communautaires de croître et de fonctionner, ce groupe a développé LibreRouter. Dans ce groupe, on trouve des réseaux communautaires, c'est-à-dire des réseaux locaux développés par des coalitions de communautés – comme AlterMundi en Argentine, Guifi.net en Catalogne, Ninux en Italie et le Village Telco en Afrique du Sud.

Les réseaux communautaires peuvent jouer différents rôles. AlterMundi, par exemple, est une association civile argentine qui promeut la création de réseaux autonomes permettant aux villes de certains pays d'avoir accès à Internet, là où des opérateurs commerciaux ne voient pas d'intérêt financier à y vendre leurs services. Les leaders du réseau communautaire Ninux expliquent que l'un des catalyseurs ayant initié le projet était l'inquiétude constante face à la centralisation d'Internet.

Découvrir LibreRouter

La création de réseaux requiert un équipement matériel : les routeurs qui jouent un rôle central dans la façon dont les réseaux se connectent entre eux.

L'idée originale de LibreRouter, qui était de fabriquer un routeur pour des réseaux communautaires, a débuté en 2013, lors d'une réunion à Berlin réunissant Steve Song, Elektra, Pau Escrich, Nico Echaniz, Jesica Giudice et Gui Iribarren, qui travaillaient tous sur des réseaux communautaires différents.

Ils ont commencé à travailler ensemble sérieusement quand de nouvelles règles établies par la Commission Fédérale Américaine des Communications ont forcé les fabricants à limiter les routeurs domestiques, empêchant les modifications nécessaires pour créer un réseau communautaire.

La même année, le projet s'est vu attribuer une subvention de la part du Fonds Régional pour l'Innovation Numérique en Amérique Latine et aux Caraïbes, une initiative de  LACNIC (Latin American and Caribbean Network Information Centre) et une autre, de la part du Fonds pour la Recherche et l'Education sur Internet pour aider à son développement.

Gui Iribarren, vice-president de AlterMundi, l'une des organisations dirigeant le projet, en parle dans un entretien avec Global Voices :

GV: Quelles sont les différences entre ce routeur et ceux que l'on peut acheter dans un magasin d'informatique ? Qu'est-ce qui le rend unique ?

GI: La diferencia más fundamental radica en las libertades que ofrece. En primer lugar, evidentemente no implementamos ningún bloqueo sobre el software (como lo hacen el resto de los fabricantes, desde las nuevas regulaciones), de forma que cualquiera puede modificar el firmware de fábrica (LibreMesh, un Software Libre basado en OpenWrt/LEDE), o incluso reemplazarlo completamente por otro (“reflashearlo”) fácilmente.

Por otro lado, es un proyecto de Open-Source Hardware, es decir, publicaremos todos los documentos de diseño de la placa base para que cualquiera pueda entenderla, modificarla y producir su propia versión. No existen muchos routers en el mercado que ofrezcan esta posibilidad, y de hecho la empresa Dragino – que esta a cargo del desarrollo de la placa y tiene años de trayectoria en este rubro – ha liberado los diseños de productos anteriores.

Por último, hay diferencias enormes respecto a las prestaciones del hardware. Los routers que se comercializan (a precios accesibles) hoy en día para realizar enlaces en exterior normalmente incluyen una única radio WiFi. Existen en el mercado routers con 2 radios, pero son de uso hogareño, necesitan modificaciones de software (cada vez más difíciles) y adaptaciones físicas para que soporten la intemperie y tengan mayor alcance.

El LibreRouter está preparado de fábrica para ser instalado en exteriores y trae incluidas 3 radios que son utilizadas inteligentemente por el software LibreMesh para construir “nubes mesh” de alta performance, requieren solamente una correcta orientación de las antenas y pueden establecer dos enlaces simultáneos en la banda de 5ghz, en direcciones independientes.

De alguna manera, condensa en un único dispositivo las funciones que normalmente se obtienen combinando un router hogareño básico de 2.4ghz, y dos routers de exterior de 5ghz; pero a un costo total menor, con una instalación más sencilla, y ampliando posibilidades de desarrollo futuro.

GI: La différence fondamentale est la liberté qu'il apporte. Tout d'abord, nous ne mettons évidemment aucune forme de blocage sur le logiciel (comme le font les autres fabricants depuis les nouvelles règles), de manière à ce que tout le monde puisse modifier le microprogramme par défaut (LibreMesh, un Logiciel Libre basé sur OpenWrt/LEDE), ou même remplacer totalement le microprogramme par une autre version (“reflash it”) avec beaucoup de facilité.

D'autre part, ce sera un équipement Open source, ce qui signifie que nous publierons tous les documents relatifs à la conception de la carte mère, afin que n'importe quel utilisateur puisse comprendre, changer et créer sa propre version. Il n'y a pas beaucoup de routeurs sur le marché qui offrent cette possibilité et en réalité l'entreprise Dragino, qui est responsable du développement de la carte mère et qui travaille sur cette partie depuis des années, a sorti les documents de conception de ses anciens produits.

Enfin, il y a des différences énormes de performance du matériel. Aujourd'hui, les routeurs qui sont commercialisés (à des prix accessibles) incluent normalement une seule radio WiFi. Il y a des routeurs sur le marché qui ont deux radios, mais pour un usage domestique, il est nécessaire de modifier le logiciel (une tâche de plus en plus difficile) et aussi le matériel pour qu'ils puissent être utilisés en plein air et avoir une meilleure portée.

LibreRouter est prêt pour être installé en plein air et est équipé de trois radios utilisées intelligemment par le logiciel LibreMesh pour fournir une haute performance “Réseaux maillés sans fil”, réclamant juste d'orienter l'antenne correctement et capable de créer deux bandes passantes de 5GHz simultanées dans des directions indépendantes.

D'une certaine façon, il inclut en un seul dispositif des fonctions qui sont normalement obtenues en combinant un routeur domestique basique de 2,4GHz et deux routeurs externes de 5GHz, mais pour un coût beaucoup plus bas, avec une installation plus facile et de multiples possibilités de développement pour l'avenir.

GV: Pourquoi un réseau communautaire comme AlterMundi aurait-t-il besoin d'un LibreRouter?

GI: Las redes que fomentamos desde AlterMundi están construidas y mantenidas por gente relativamente no técnica. Con lo cual, desde el principio nos concentramos en que tanto la puesta en marcha como el mantenimiento de los nodos sean lo más simple posible. Sin embargo, con el escalamiento de las redes fuimos encontrando complejidades (como por ejemplo la necesidad de montar dos o más routers en ciertas ubicaciones) que complican el entendimiento por parte de la población en general, y por eso veníamos dándole vueltas a la idea desde 2013. El punto de inflexión ocurrió con las mencionadas restricciones de fábrica, que directamente hacen inviable la posibilidad de que gente no técnica transforme un router hogareño (económicamente accesible) en un nodo comunitario, poniendo en peligro la continuidad de las redes en todo el mundo.

[Nota de Gui Iribarren: AlterMundi no es en si misma una red comunitaria, sino una
asociación civil que fomenta la creación de redes autónomas, como QuintanaLibre, NonoLibre, etc]

GI: Les réseaux que nous développons avec AlterMundi sont conçus et gérés par des personnes aux compétences technologiques limitées. C'est pour cela que depuis le début, nous nous sommes assurés qu'aussi bien l'installation que l'entretien des nœuds soient aussi simples que possible. Cependant, avec la surtension sur les réseaux, nous avons rencontré quelques problèmes complexes (comme devoir installer deux routeurs ou plus dans certains sites) qui a rendu le fonctionnement du réseau plus difficile pour le grand public, et c'est ainsi que l'idée de LibreRouter a émergé en 2013. Le tournant est intervenu avec les restrictions industrielles précédemment mentionnées qui ont directement rendu impossible pour les gens aux compétences technologiques limitées de transformer un routeur domestique (économiquement accessible) en nœud communautaire, mettant ainsi en danger la continuité des réseaux dans le monde entier.

 [Note de Gui Iribarren: AlterMundi n’est pas un réseau communautaire en soi, mais c’est une association civile qui encourage la création de réseaux communautaires comme QuitanaLibre, NonoLibre etc.]

D’autre part, Pau Escrich, de Guifinet network a écrit un article en espagnol intitulé : « LibreRouter, un Projet qui fait rêver » dans lequel il affirme que si le projet est ambitieux, il répond à un véritable besoin. Selon ses propres mots, « ceci est un vrai défi pour les hackeurs de réseaux libres qui, à mon avis, sont sur le point  de faire un pas important vers la liberté et l'autonomie dans le domaine de la technologie et de la communication ».

On estime que début 2017, la première version de ce routeur sera livrée aux réseaux communautaires soutenus par AlterMundi en Argentine et par le Village Telco en Afrique du Sud. Les bénéficiaires paieront seulement pour le coût de fabrication du matériel (autour de 90 €) qui sera utilisé pour financer la deuxième phase de production, ayant pour but de permettre à tout le monde d'acquérir un LibreRouter.