Rassurez-vous, je ne suis pas allé installer un système quelconque ou même fait un projet domotique démentiel avec ma chaudière ; je l’ai simplement réparé plusieurs fois moi-même et je trouve que c’est un bon parallèle à faire avec les ordinateurs que nous aimons trifouiller pour y mettre nos systèmes libres favoris.
Lorsque je suis arrivé dans ma maison il y a un peu plus de 6 ans, je me suis rendu compte rapidement que lorsque l’on devient propriétaire, soit on se met à l’entretien et au bricolage (surtout si on envisage quelques travaux), soit il faudra prévoir un budget assez conséquent. L’exemple bête : la chaudière à gaz qui ne veut plus démarrer au bout de quelques mois. On appelle le technicien qui passe plusieurs jours plus tard (vaut mieux pas qu’il fasse trop froid), passe un coup d’aspirateur dedans, fait quelques tests et vous dit qu’il n’y avait pas de problème particulier. Il repart en vous ayant fait payer 90€ et en vous ayant proposé diverses formules de contrats d’entretien.
Bien entendu, le problème n’avait pas été réglé et lors de grands froids, il fallait plusieurs fois redémarrer la chaudière pour qu’elle veuille bien démarrer la chauffe. Deux conclusions : payer 100€ d’entretien annuel pour un coup d’aspirateur, c’est plutôt cher payé et pour régler les problèmes, il vaut parfois mieux aller mettre les mains dedans pour voir si on ne peut pas faire ça soi-même. D’autant que comme pour les forums Linux, il y a aussi de très bons forums d’entraide pour les réparations diverses et variées.
Je vous passe toutes mes aventures avec ma chaudière mais disons que depuis j’ai réparé au moins 3 ou 4 pannes sans avoir à rappeler un technicien parce que c’était l’électronique ou les sondes qui déconnaient et entraînaient une mise en alerte ou un refus de démarrer. A force, on commence à connaître la machine et on sait où il faut aller voir, l’entretenir régulièrement, etc.
Tout ça pour dire que l’informatique c’est un peu pareil. Si nous avons monté nos PC ou changé des composants et installé le système de notre choix, c’est qu’à un moment, nous avons voulu prendre les choses en main, on s’est renseigné et on a appris petit à petit. Notre souhait est souvent que le plus grand monde fasse comme nous et nous voudrions les en convaincre mais cela n’intéresse pas tout le monde et surtout, ceux qui auront fait ce choix devront aussi apprendre par eux-mêmes. Si on leur dit tout, on ne fait que rester le dépanneur sur lequel tout repose.
Si je parle de tout ça, c’est que ma motivation et certainement celle de la plupart d’entre vous, c’est le défi de régler un problème et de maîtriser la machine sur laquelle on intervient. Cela se fait par essais, recherches d’informations, échecs, nouvelles tentatives, conseils glanés ici et là et finalement trouver la solution qui convient. Cela se fait seul ; c’est pour cela que nous sommes généralement mauvais pédagogues et que les observateurs éventuels n’y comprennent rien : c’est notre logique qui fait son chemin petit à petit selon l’expérience que l’on a. Comme Cyrille, on peut définir facilement la cause probable d’une panne parce qu’on a déjà eu le cas et que certains indices nous permettent d’éliminer des pistes et d’autres d’en favoriser. Nous avons construits nos diagrammes et les suivons ; ceux qui n’ont pas le même programme ne peuvent ni le comprendre, ni l’exécuter.
Une autre raison pour laquelle j’aborde ce sujet, c’est que mon père s’est récemment mis à installer des distributions sur ses deux PC. Je connais mon père comme s’il m’avait fait, nous avons a peu près les mêmes façons d’agir, on est tous les deux ingénieurs, quand un problème se pointe sous notre nez, on se met en tête de le résoudre et on aime bien bidouiller. La seule différence, c’est que nous ne sommes pas de la même génération. Pour autant, il a attaqué l’informatique dès que les PC se sont démocratisés et à passé une partie de sa carrière à installer l’informatique dans son entreprise alors que ce n’était pas sa formation initiale ; il a bouffé du serveur Unix, Novell et Microsoft pendant toutes les années 90.
Il sait bien que je suis exclusivement sous GNU/Linux depuis 2006 (j’avais même fait les premières tentatives au siècle dernier sur le PC familial) mais les commandes UNIX avant l’existence d’internet lui avaient laissé un goût assez amer (ceux qui comme moi, se sont cassés les dents sur les configurations de xorg.conf il y a une quinzaine d’années compatissent). Pourtant, je savais que cela lui plairait. Il y a 2-3 ans, je lui avais déjà passé un DVD avec Mint dessus parce que je n’en avais plus besoin et que cela pouvait lui permettre d’essayer mais il n’en avait rien fait.
Et puis il y a quelques semaines, je lui ai montré le logiciel que j’utilise pour faire mes comptes parce que le sien n’est plus maintenu. Je lui montre donc Grisbi qui permet de récupérer le format de fichiers du logiciel qu’il utilise et qui a une version Windows (il est en Windows 2000) sans vouloir le convaincre plus que ça de changer d’OS. Pourtant quelques temps plus tard, il m’explique qu’il a installé Ubuntu, tout ça. Je jette un œil et lui donne quelques tuyaux en lui disant tout le bien que je pense de Debian (sachant qu’il préfère un système stable pour plusieurs années que réinstaller tous les 6 mois). Ni une, ni deux, il est passé à Debian.
Je ne sais pas exactement où il en est, comme il veut se débrouiller seul (comme moi, nous ne voulons dépendre de personne et nous débrouiller par nous-mêmes), il ne me demande pas et on se voit une fois par mois. Je pense qu’il doit un peu galérer mais il fait tout le processus dont je parlais au début du billet. Pour Noël, je vais luis offrir un bouquin général sur l’administration système sous GNU/Linux et cela devrait lui permettre de continuer à se faire son expérience.
Tout ça pour conclure que cet état d’esprit ne peut s’apprendre par quelqu’un d’autre. J’aurais bien aimé le guider et j’aurai sans doute l’occasion de lui donner quelques tuyaux mais cet apprentissage se fait seul. Donc on peut convertir des utilisateurs mais nous resterons leur administrateur et on peut donner des pistes de solutions pour ceux qui ont des problèmes mais ils ne les résoudront que s’ils ont le tempérament de vouloir hacker leur machine. Alors dans nos billets de blogueurs, inutile de s’adresser à des gens qui ne veulent pas savoir ou qui ne savent pas chercher les infos, ceux qui nous lisent sont probablement comme nous : ils sont curieux, veulent solutionner des problèmes, cherchent, essaient et trouvent. La seule différence est l’expérience et les domaines de compétence.
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