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27-28 avril 1789 : les émeutes prérévolutionnaires à Paris

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Si la prise de la Bastille le 14 juillet 1789 demeure l'événement symbolique retenu comme point de départ de la Révolution française, quelques semaines plus tôt les habitant·e·s des faubourgs s'étaient déjà soulevé·e·s. Une des principales raisons de ce soulèvement réside notamment dans le fait que quelques riches industriels se soient plaints publiquement de ce que les patrons d'aujourd'hui nomment « coût du travail ». Retour sur ces journées d'avril et « l'affaire Réveillon », du nom du manufacturier qui vit ses propriétés pillées et incendiées.

Article initialement publié le 28 avril 2019 à l'occasion des 230 ans de ces événements.

Le 28 avril 1789, la révolution commença ainsi : on pilla la belle demeure, on brisa les vitres, on arracha les baldaquins des lits, on griffa les tapisseries des murs. Tout fut cassé, détruit. On abattit les arbres ; on éleva trois immenses bûchers dans le jardin.
Des milliers d'hommes et de femmes, d'enfants saccagèrent le palais. Ils voulaient faire chanter les lustres, ils voulaient danser parmi les voilettes, mais surtout, ils désiraient savoir jusqu'où l'on peut aller, ce qu'une multitude si nombreuse peut faire. [1]

Nous sommes en 1789 : alors que depuis plusieurs années le royaume de France s'enfonce dans une grave crise, le roi Louis XVI a décidé de convoquer une réunion des états généraux, qui s'ouvriront le 4 mai. Partout, la population semble à bout et les émeutes contre l'augmentation du prix du pain se multiplient dans les provinces durant les premiers mois de l'année.
Parallèlement à cette colère, des assemblées se tiennent dans tous les districts afin de rédiger des cahiers de doléances et élire les 1 200 députés qui seront envoyés aux États Généraux.

Le 23 avril à Paris, à l'occasion de l'assemblée électorale du district de Sainte-Marguerite – sur le faubourg Saint-Antoine – le propriétaire de la manufacture de papiers peints Réveillon expose ses considérations sur le niveau des salaires.
Quels ont été exactement ses propos ? Les versions divergent : certains rapportent qu'il aurait ouvertement appelé à les abaisser à 15 sous par jour [2], d'autres qu'il aurait simplement évoqué avec regrets le « bon vieux temps » où les salaires étaient moins élevés [3]. Le même jour, dans une autre assemblée du district voisin des Enfants-Trouvés, le manufacturier Henriot aurait tenu des propos similaires [4].
Bien que d'abord timide, la réaction à ces déclarations fut néanmoins immédiate de la part des salariés du faubourg, comme le rapporte le lieutenant de police Thiroux de Crosne :

Il y a eu hier sur les dix heures un peu de rumeur dans un canton du faubourg Saint-Antoine ; il n'était que l'effet du mécontentement que quelques ouvriers marquaient contre deux entrepreneurs de manufacture qui, dans l'assemblée de Sainte-Marguerite, avaient fait des observations inconsidérées sur le taux des salaires. [5]

Les jours suivants, la nouvelle de ces « observations » patronales se répand auprès de la population des faubourgs, si bien que le 27 avril ce sont plusieurs centaines d'ouvriers qui se rassemblent à la Bastille, certains ont pris le soin de confectionner des mannequins à l'effigie de Henriot et Réveillon, on pend ce dernier à une potence. La foule promène ensuite ce faux pendu dans différents quartiers de la ville, rejointe sur son parcours par des centaines d'autres personnes.
Au plus fort de cette déambulation, alors que la foule se rassemble sur la place de Grève [6], un témoin de l'époque rapporte le chiffre de 3 000 personnes [7]. Se tient alors le procès populaire des deux manufacturiers, qui se termine par l'incendie des mannequins.
Après quelques atermoiements et moments de dispersion, un attroupement se reforme en fin de journée rue de Montreuil devant la maison de Réveillon. Cette dernière étant bien gardée par des hommes en arme, la foule se reporte sur la demeure de Henriot à quelques centaines de mètres de là, la pille et la saccage. La troupe finit par intervenir pour disperser la populace et met provisoirement fin à l'émeute.

Le lendemain, malgré le déploiement de renforts dans le faubourg, la foule revient encore plus nombreuse devant la propriété de Réveillon, qui a lui été invité par l'administration à se mettre en sécurité à la Bastille.
D'autres attroupements se forment également dans différents quartiers ; nobles et bourgeois en carrosse sont régulièrement invectivés et parfois forcés à lâcher quelques pièces pour pouvoir poursuivre leur trajet.
Devant la Folie Titon – nom de la propriété abritant la manufacture de Réveillon – la troupe réussit à contenir les débordements une grande partie de la journée, mais en début de soirée les barrages sont forcés. La maison de Réveillon est à son tour prise d'assaut, copieusement pillée et saccagée. La troupe tente néanmoins d'intervenir, ordre est donné de tirer mais les émeutier·e·s ripostent : tuiles, pavés, mobilier... Les gardes reçoivent une pluie de projectiles, les affrontements durent plusieurs heures.
Au soir du 28 avril, alors que le calme revient, on dénombre plusieurs dizaines de morts du côté des émeutier·e·s contre une douzaine chez les soldats.
La Révolution venait de commencer.

Un enfant du faubourg

1er décembre 2018 à Paris, GJ acte III, un hôtel particulier a subi le même sort que celui de Réveillon près de 230 ans auparavant

[1] Eric Vuillard, 14 juillet, Actes Sud, 2016.

[2] Le salaire moyen journalier de l'époque dans les manufactures se situait plutôt aux alentours de 20 sous.

[3] Après les événements, Réveillon s'est lui défendu d'avoir tenu toutes sortes de propos à ce sujet, lire son Exposé justificatif en ligne.

[4] Pour ce récit des faits, nous nous basons principalement sur les travaux de George Rudé, La Foule dans la Révolution française, Maspéro, 1982, p. 51-53.

[5] Cité par George Rudé, ibid

[6] Actuel parvis de l'Hôtel de Ville, la place de Grève était le lieu ordinaire des exécutions à Paris sous l'Ancien Régime.

À lire également, le billet de Guillaume Lancereau : Merci patron 1780, l'affaire Réveillon

Ces événements donnèrent lieu par la suite à différents types d'interprétations : expression de la lutte des classes ou bien dernière émeute de l'Ancien Régime ? Sans avoir l'intention de s'inscrire ici dans ces débats historiographiques, nous partagerons toutefois ce qu'en disait Kropotkine :

Eh bien, les journées des 24-28 avril sont les signes avant-coureurs des 11, 12, 13 et 14 juillet. Le peuple de Paris vint affirmer dès lors son esprit révolutionnaire qui venait des couches ouvrières des faubourgs.
À côté du Palais-Royal, foyer de révolution de la bourgeoisie, se dressaient les faubourgs – centre de l'émeute populaire.
Dès lors Paris devient l'appui principal de la Révolution, et les États-Généraux, qui vont se réunir à Versailles, auront les yeux tournés vers Paris, pour y chercher la force qui pourra les soutenir et les inciter à marcher de l'avant dans leurs revendications et leurs luttes contre la Cour.

Pierre Kropotkine, La Grande Révolution (1789-1793), 1909 .

« AUX ARMES » - proposition d'intervention pour le 1er mai

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Proposition d'intervention pour le 1er mai et plus si affinités

Y'a plus qu'à cherche à sortir de la confidentialité due à sa diffusion marginale pour proposer au terrain militant une forme d'intervention artistico-politique pour le 1er mai et au-delà parce que la situation politique ne semble pas prête de d'arranger...

« La maturité de l'homme, cela veut dire avoir retrouvé le sérieux qu'enfant, on mettait dans ses jeux » Nietzsche

Aux gens qui ne sont rien, aux doux dingues, aux grands enfants, aux artistes qui s'ignorent, aux fêlés qui laissent passer la lumière, à celles et ceux qui ne craignent pas de rire du vieux monde en décomposition. Il y a nos luttes pour la justice et les communs, nos espoirs, nos objectifs, nos idéaux, nos joies, nos colères et la complémentarité de nos modes d'action.

Certains habillent les murs de traits d'esprit bien sentis quand d'autres ont acquis une parfaite maitrise dans l'art du lancé de pavé. Leurs œuvres font la une des chaines d'information qui espèrent ainsi retourner l'opinion. L'aspiration au chaos exerce son pouvoir de fascination. Dans le même temps, d'autres rêvent de faire la révolution armés de fleurs et de couleurs…

On sait qui détient le monopole de la violence légitime et au service de quels intérêts. On paye cher le prix de notre insoumission : répression, humiliations, intimidations, arrestations, interdictions, assignations, prisons, centres de rétention, gueules cassées, mains arrachées, vies volées. Il y a les combats pour la justice et la vérité, et la peur qui doit changer de camp.

Le premier mai en bande organisée et en mode lutte armée, on fera un pas de côté. Inspirés par la force satirique de Charles Chaplin et son magnifique foutage de gueule des porteurs d'uniformes, on adoptera la posture de Schwarzenegger dans Terminator, parés de simulacres d'armes énormes et super classes. On toisera les forces du désordre en y mettant du sens car on ne manque ni de talent ni d'idées pour transformer des détritus en œuvres d'arts, et on a la culture de la caricature dans le sang.

Armés jusqu'aux dents, on prendra la pose pour produire de l'image aussi séduisante pour les médias que dérangeante pour le pouvoir. On le fera sérieusement, et pince sans-rire, munis de ces impressionnants équipements, on moquera les RoboCops, on raillera l'usage d'armes de guerre dans la répression de nos mouvements. Fort.es, fier.es et déter.es, ça tombe bien, on sait faire.

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Cette proposition d'intervention alternative ne pourra se réaliser que si elle te donne le désir d'en être, c'est le jeu. Le prototype de MAXI GUN V-23 a été réalisé, le tuto-tract sera diffusé pendant la performance du 1er mai est téléchargeable ici : https://www.yaplusqua.org/aux-armes/ avec l'idée de déposer une alternative pour compléter la panoplie des modes d'actions dénonçant la militarisation du maintien de l'ordre au vu de l'autoritarisme (pour ne pas dire le fascisme) qui progresse et qui ne semble pas prêt de s'arrêter...

Un atelier aura lieu le 27 avril pour réaliser les MAXI GUN V-23 : Y'a plus qu'à cherche à composer une bande armée de 5 personnes pour commencer à jouer le 1er mai, nous sommes déjà 3. Le recrutement est lancé, contacter : yaplusqua@protonmail.com

les informations complémentaires suivront par mail.

Y'a plus qu'à est un blog rassemblant de courts billets qui s'écrivent et se complètent les uns les autres avec le temps, car tout est lié. Y'a plus qu'à s'écrit après 10 années de terrain militant, après l'animation de plusieurs collectifs éphémères, fatiguée par l'individualisme et le narcissisme. Y'a plus qu'à prétexte l'intime pour parler d'éthique et de politique, au sens noble, sur la base de l'affirmation le monde est à l'envers, et animé par un désir révolutionnaire, il s'agit de le remettre à l'endroit. https://www.yaplusqua.org

Archives autonomies : debout les morts !

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Présentation d'une des plus grandes bases d'archives francophones numérisées de l'autonomie politique et de la gauche radicale et/ou extraparlementaire.

Depuis plusieurs années, le collectif Archives autonomies s'attelle à rassembler et mettre en ligne des milliers de documents en lien avec l'histoire du mouvement ouvrier, des révoltes et résistances contre toutes les formes de domination. Sur leur site internet, le collectif se présente de cette façon :

[…]
Notre collectif est né en juin-juillet 2012 dans le prolongement de la démarche impulsée par le site Gougligoubla.wordpress.com [aujourd'hui fermé] dont l'initiateur souhaitait mettre en ligne des documents d'archives sur l'autonomie politique en France entre la fin des années 1970 et la fin des années 1990. Parmi ces matériaux historiques, dont certains avaient été rassemblés au cours d'une recherche universitaire, figuraient par exemple quelques écrits de groupes tels que Camarades, Marge, Matin d'un Blues pour les plus anciens, différents collectifs anticarcéraux, l'Assemblée de Jussieu ou la scène squat parisienne des années 1990 pour les plus récents. Cette démarche individuelle partait d'un constat : alors que l'autonomie politique (ses formes d'interventions et ses idées) connaissait un regain d'intérêt depuis un peu moins d'une dizaine d'années, on pouvait observer qu'il était extrêmement difficile pour les individus et collectifs intéressés par ces cheminements théoriques ou pratiques d'avoir accès aux écrits produits par les groupes et regroupements qui les avaient précédés.

Cette démarche individuelle a rapidement agrégé autour d'elle plusieurs complices, membres plus ou moins formels de ce qui constitue désormais un collectif, nous amenant à élargir les bases du projet initial, uniquement centré sur l'aire de l'autonomie, pour englober désormais l'ensemble de ce que nous appelons la « gauche radicale et/ou extraparlementaire » [1] et des différents courants qui la constituent. […]

Nos objectifs diffèrent peu de ceux que nous avions au départ :

  • Collecter des textes, journaux, revues, fanzines, brochures, tracts, livres et autres productions écrites, graphiques ou audiovisuelles ;
  • Proposer en libre accès ces documents en vue de leur libre utilisation ;
  • Impulser une réflexion individuelle et collective sur le rapport des groupes et individus impliqués dans des pratiques de rupture au sein du mouvement révolutionnaire aux expériences passées et plus largement à l'histoire du mouvement ouvrier ;
  • Produire des brochures et textes de synthèse sur l'histoire de la gauche radicale et plus particulièrement sur des itinéraires collectifs ou individuels, des luttes et des interventions, de préférence largement méconnue.

Cet appel vers l'extérieur nous pousse à préciser plusieurs choses :

  • Notre collectif est indépendant de tout parti, syndicat, association ou institution. De même, notre démarche ne s'inscrit pas dans le prolongement d'une ligne politique définie ou à définir. De ce point de vue, nous n'entendons pas nous limiter à un courant théorique ou pratique particulier. Vous trouverez donc sur ce site des documents d'archives issus de différents courants/"mouvances"/scènes/aires politiques : anarchisme, communisme-libertaire, gauches communistes, autonomies, inorganisés, non dogmatiques, etc.
  • Cette démarche ne saurait être interprétée comme porteuse d'un discours affirmant la nécessité, pour tout individu ou collectif d'individus engagé dans un cheminement théorique et/ou pratique révolutionnaire, de connaître l'histoire de celles et ceux qui l'ont précédé. Au contraire, nous estimons qu'il s'agit là d'une question relativement secondaire, qui ne conditionne en rien l'émergence de pratiques et de luttes de rupture.
  • De ce point de vue, et nous le répéterons à plusieurs reprises dans ces pages tant cet aspect nous semble signifier où nous nous positionnons vis-à-vis de la question de la transmission du savoir, le contenu du site se veut une simple agrégation d'outils théoriques, de documents et sources historiques destinés à celles et ceux qui seraient intéressés par les réponses théoriques ou pratiques apportées par des mouvements, luttes, individus ou collectifs qui leur sont antérieurs.
  • Surtout, tous les documents diffusés par notre collectif ne sont pas notre propriété. Ils sont librement diffusables et reproductibles. Nous vous invitons d'ailleurs à vous les approprier de la manière que vous jugerez nécessaire. Toutefois, ils ne sauraient être utilisés à des fins commerciales, quelles qu‘elles soient. Nous vous invitons aussi à mentionner, si vous le souhaitez, leur origine afin que les individus ou collectifs intéressés par notre projet puissent entrer en contact avec nous.

Nous invitons nos lecteur·rice·s à se montrer patient·e·s et à ne pas hésiter à apporter leur contribution afin de combler les vides ou les lacunes de ce site [2].

Petite astuce de recherche

Le site est très bien organisé, avec un classement détaillé et un moteur de recherche interne permettant de retrouver par mots-clés de nombreux documents grâce à leur titre, leur descriptif ou encore le texte qu'ils contiennent. Cependant dans ce dernier cas, pour tous les documents qui sont numérisés au format PDF (notamment certains journaux), malheureusement le moteur de recherche ne permet pas d'interroger directement leur contenu (ce qu'on appelle la recherche « plein texte »).
Par exemple, si vous recherchez le terme « virus » dans le moteur de recherche du site, vous n'aurez comme résultat que 26 articles. Heureusement, il existe une petite astuce pour rechercher directement dans tous les textes que contiennent ces fichiers PDF, grâce à notre ami Google. Le moteur de recherche Google a en effet une puissance d'indexation assez ouf, et scanne à peu près tout le web en permanence. Il existe ainsi une commande permettant de rechercher tout ce que contient un site, y compris dans les fichiers au format PDF. Il suffit de taper dans Google « site:urldusite » avec l'URL du site en question, puis le ou les mots-clés recherchés.
Dans notre cas, ça donne donc « site:https://www.archivesautonomies.org virus » et là hop ce ne sont plus 26 mais entre 70 et 80 résultats qui sont donnés (ce chiffre varie légèrement selon la langue utilisée dans Google, allez savoir pourquoi…) !
Il est également possible d'utiliser cette commande pour rechercher plus spécifiquement dans une rubrique du site, en copiant entièrement l'URL correspondante après « site:urldusite ». De cette façon, pour une recherche dans la rubrique « Anarchisme(s) » il faut entrer la commande « site:https://www.archivesautonomies.org/spip.php?rubrique3 mots-clés recherchés »).

Un dernier mot : les recherches historiques ne sont (heureusement) pas encore réprimées par la loi, néanmoins, par les temps qui courent, on ne prend jamais trop de précautions. Alors, si vous vous intéressez par exemple à comment les anarchistes au XIXe siècle période propagande par le fait fabriquaient leurs explosifs et que vous utilisez Google pour chercher dans ces archives… on recommandera fortement de passer par Tor ou a minima un VPN ;) .

Bonne exploration du passé !

C.B.


[1] Par extraparlementaire, nous entendons qui refuse, en principe et en acte, de participer à un quelconque processus électoral.

[2] Texte de présentation en entier ici

Pour contacter le collectif, par ailleurs toujours en recherche de raretés qui pourraient être cachées dans vote grenier : collectifaut (at) archivesautonomies.org ou via le formulaire de contact sur leur site.

Vers la généralisation des drones

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Le Conseil Constitutionnel s'y était opposé en 2021, le gouvernement vient d'officialiser l'usage des drones policiers. Article de Contre-Attaque

Le décret sur l'utilisation des drones équipés de caméras, notamment pour le maintien de l'ordre et la surveillance des frontières, a été publié jeudi 20 avril au Journal Officiel.

Le texte autorise l'utilisation de drones par les policiers, gendarmes, douaniers ou militaires, dans un grand nombre de cas et avec des termes assez flous : pour « la prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés », pour « la sécurité des rassemblements » sur la voie publique, ainsi qu'en « appui » des agents « au sol » « en vue de leur permettre de maintenir ou de rétablir l'ordre public ». Bref, c'est la généralisation de l'usage des drones par la police.

Pour rappel, ce déploiement s'est fait en plusieurs étapes. En pleine crise sanitaire, le 27 mars 2020, le gouvernement avait lancé une grande commande d'environ 200 drones pour un déploiement rapide sur le territoire. En parallèle, des préfets comme Didier Lallement à Paris avaient utilisé des drones de surveillance en-dehors du cadre légal contre des manifestations.

Ce cadre légal avait été prévu par la loi « sécurité globale » fin 2020. La fameuse loi de Darmanin, qui prévoyait d'interdire de filmer les policiers et qui avait mis des centaines de milliers de personnes dans la rue. Le Conseil Constitutionnel avait retoqué l'autorisation des drones dans cette loi. Le Conseil d'État et la CNIL avaient aussi condamné l'usage de drones.

Mais ce revers n'avait pas arrêté le gouvernement, preuve qu'il se moque bien du Conseil Constitutionnel lorsqu'il ne va pas dans son sens. Un an plus tard, en décembre 2022, les macronistes faisaient passer la « loi sur la responsabilité pénale et la sécurité intérieure », une énième batterie de mesures sécuritaire. L'occasion de faire passer les mesures refusées par le Conseil Constitutionnel l'année précédente. Cette fois c'est la bonne. Après 3 revers, le décret sur les drones est passé.

Ce déploiement s'accompagne de mesures sur la reconnaissance faciale. Dans une indifférence générale, un « projet de loi JO 2024 » a été déposé en toute discrétion, pendant les fêtes de fin d'année 2022. Il prévoit une vidéosurveillance de masse appuyée par l'Intelligence Artificielle. L'article 7 autorise « à titre expérimental » l'utilisation en temps réel de systèmes d'intelligence artificielle pour analyser les images des drones et des caméras de surveillance. Une première en France et en Europe.

L'acharnement du gouvernement paie. Les flics pourront désormais les utiliser à loisir dans l'espace public, et les prochaines mobilisations seront sous un ciel occupé. Quadrillé par ces oiseaux robotisés au service de l'ordre policier.

Cette surveillance n'est pas imbattable. Lors des Gilets Jaunes, les flics chargés de télépiloter des drones « ont dû procéder à quelques replis stratégiques et atterrissages d'urgence pour échapper à la vindicte des goélands ». D'autres attaques ont été organisées par les corneilles, notamment durant les manifestations. Des aigles ont aussi mis hors-service des drones en montagne.

En novembre 2021 au Burkina Faso, un adolescent équipé d'un lance-pierre traditionnel avait abattu un drone français qui surveillait un rassemblement visant à empêcher le passage d'un convoi de l'armée française.

Article repris de Contre-Attaque

NdPLI : sur le même sujet, voir aussi

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Mayotte : la police tire à balles réelles

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

À Mayotte, l'État français fait une démonstration. La démonstration qu'il est capable d'expulser des milliers de personnes, de raser des bidonvilles et de mater les récalcitrants à l'autre bout du monde. Article de Contre-Attaque

Pour cela, il déploie toute sa force : unité du RAID, gendarmes, drones, blindés et équipage de CRS 8 particulièrement violent. Les autorités appellent cette opération « Wuambushu », c'est-à-dire « Reprise en main » ou « Reconquête ». Un clin d'œil évident à l'extrême droite. « On est sur une opération de reconquête du terrain » expliquait un commandant divisionnaire à l'AFP. Cette démonstration sert à la fois les intérêts impérialistes de la France : garder le contrôle sur un archipel stratégique dans l'Océan Indien, et politique en métropole : en montrant la « fermeté » de Macron à l'égard des immigrés.

Le journal Le Monde révélait hier que « 650 grenades lacrymogènes, 85 grenades de désencerclement, 60 tirs de lanceurs de balles de défense (LBD) » ont été tirés avant même le début de l'opération par la seule compagnie de CRS 8, dimanche 23 avril. Tout cela pour disperser « une centaine d'assaillants ». Plusieurs munitions par personne.

Près du village de Tsoundzou, les policiers ont également utilisé des balles réelles. 12 tirs « vers le sol et pour faire fuir ». Comme si le recours à l'arme à feu était un moyen de faire fuir. Même Le Monde souligne que « de tels tirs d'armes de poing sont rarissimes dans un contexte de maintien de l'ordre ou de violences urbaines, même en cas de situation extrêmement dégradée. »

Ce mardi, en direct sur la télévision publique, le Vice-président du Conseil départemental de Mayotte, qualifie les jeunes immigrés Comoriens de « terroristes » et affirme : « Il faut peut-être en tuer. »

En janvier, Darmanin allait féliciter une unité du RAID à Mayotte, section militarisée de la police, en principe réservée au terrorisme et au banditisme. Ces agents lourdement armés sont intégrés aux opérations d'expulsion en cours. À la télévision, on les voit parader au milieu des gendarmes et des CRS. C'est donc une opération militaro-policière, un mélange qui préfigure la généralisation de ce type de répression.

Mayotte, comme les autres territoires colonisés par la France, est un laboratoire. Là-bas, il n'y a presque aucun moyen de vérifier les blessures, l'usage des armes, les exactions de l'État… Ce que la police française ne se permet pas encore en Hexagone contre les manifestations et la population blanche, elle se le permet loin de l'hexagone, sur des corps noirs. Mais cela finira par y arriver. Pour l'instant, peu de gens vont s'émouvoir de tirs à balles réelles face à des « assaillants » à Mayotte. Déjà, quand le RAID avait été envoyé dans les Antilles réprimer les mobilisations contre le Pass Sanitaire, qui s'en inquiétait ?

Aux confins de l'Empire, on habitue les CRS à dégainer, à tirer. Demain, ces pratiques seront intégrées au maintien de l'ordre dans les villes de métropole. En matière de répression, « l'exception » finit toujours pas devenir la norme.

Article repris de Contre-Attaque