PROJET AUTOBLOG


Paris-luttes.info

Site original : Paris-luttes.info

⇐ retour index

Mise à jour

Mise à jour de la base de données, veuillez patienter...

27 juin sur le campus Paris 3 – De Saint-Bernard à la loi Darmanin : la longue marche des sans-papiers pour la liberté.

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Soirée hommage à Madjiguène Cissé et Jacques Gaillot organisée par des collectifs de sans-papiers de région parisienne, des étudiant.e.s en lutte de l'université et la Marche des Solidarités.

27 juin sur le campus Paris 3 – De Saint-Bernard à la loi Darmanin : la longue marche des sans-papiers pour la liberté.

Soirée hommage à Madjiguène Cissé et Jacques Gaillot organisée par des collectifs de sans-papiers de région parisienne, des étudiant.e.s de P3 en lutte de l'université et la Marche des Solidarités.

De 17h à 21h, sur le campus Nation de l'université Paris 3 (8 avenue de Saint-Mandé – 75012, Station Nation – métro 1, 2, 6, 9 et RER A)

– 17h à 19h : projection du film la Ballade des sans-Papiers de Mogniss Abdallah

– 19h à 21h : prises de paroles de figures du mouvement des sans-papiers et discussion avec la salle

De février à août 1996, à Paris, des centaines d'étranger·e·s « clandestins » sortent en pleine lumière, occupent des églises, des gymnases, un entrepôt de la SNCF pour obtenir leurs papiers. Ils et elles seront expulsé·e·s violemment de l'église St Bernard par la police le 23 août 1996 mais celles et ceux qui se sont renommé·e·s « sans-papiers » viennent de lancer un mouvement de collectifs sur tout le territoire soutenu par des centaines de milliers de personnes. C'était quelques semaines seulement après le grand mouvement de grèves contre la réforme des retraites de décembre 1995.

En 2023, le combat des sans-papiers pour l'égalité des droits et des papiers pour toutes et tous continue ! Contre le racisme et l'atomisation, contre le projet de loi Darmanin, contre le monde de Macron qui crée de plus en plus d'inégalités, la longue marche des sans-papiers pour la liberté est une lutte pour un autre avenir, une autre société, un autre monde que celui de la pauvreté, des murs, de la guerre et du racisme.

En memoire des réfugié.e.s disparu.e.s, détruisons Frontex !

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Depuis 2004, l'agence Frontex se charge de surveiller les frontières de la forteresse Europe, en accord avec les politiques nationales. Alors que Darmanin nous prévoit un nouveau projet de loi qui n'a rien à envier aux idées de l'extrême droite la plus rance, retour sur une action locale dans le cadre de la Journée Internationale de solidarité avec les réfugié.e.s et de la campagne Abolish Frontex.

C'est un cercueil aux couleurs de l'Europe qui brûle dans un canal parisien, mardi matin. Sur le dessus, le drapeau de l'UE dont les étoiles se sont transformées en barbelés. Des fleurs les recouvrent ensuite : des promesses humanistes de l'UE, il ne reste que le deuil.

Sur les côtés du cercueil, l'inscription « Frontex Murder Force » et « Darmanin complice » - car le Ministre de l'intérieur en France prépare une nouvelle loi immigration qui fragilise les libertés fondamentales des personnes migrantes (renforcement des contrôles et de l'encadrement de la procédure d'asile, instrumentalisation du droit de séjour, rétention administrative des mineurs…).

Après avoir accroché sur un pont une banderole (Frontières : 50.000 morts connues en 30 ans. Abolish Frontex) et d'autres fleurs, en hommage à toutes ces personnes disparues, le cercueil est mis à l'eau, comme un bateau. Il part en fumée sous la banderole et continue sa route emporté par le courant pendant un temps. Des passants peuvent l'observer pendant que des pochoirs sont réalisés autour du lieu de l'action (et plus tard ailleurs dans Paris) : Frontex tue, Frontex finance des dictatures, détruisons Frontex.

Arrestations et dissolution des Soulèvements de la Terre : rassemblement ce soir à Hôtel de Ville

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Rendez-vous à partir de 19h devant l'Hôtel de Ville de Paris en soutien aux personnes arrêtées hier matin.

Communiqué des Soulèvements de la Terre

Tôt ce matin, au moins 18 personnes ont été arrêtées et mises en garde à vue dans une dizaine de lieux différents à travers la France, notamment à Notre-Dame-des-Landes. Cette opération policière de grande envergure - à la veille de la dissolution annoncée des Soulèvements de la terre - est avant tout une opération de communication et d'intimidation contre le mouvement social dans son ensemble.

Les motifs ne nous sont pas encore entièrement connus, mais ont été mentionnés par les forces de l'ordre durant leurs interventions notamment l'action contre l'usine Lafarge à Bouc-bel-air en décembre dernier et la manifestation de Ste Soline.

Rien ne permet d'affirmer à ce stade sur quels éléments matériels se fonde la procédure, cependant nous avons pu constater que des moyens relevant de l'anti-terrorisme ont été employés pour défendre les intérêts de ceux-la même condamnés pour financement du terrorisme et nuisant au plus haut point aux conditions d'habitabilité sur Terre.

La SDAT (Sous-Direction Anti-Terroriste) était présente lors de certaines arrestations. Certaines personnes sont aujourd'hui-meme détenues dans les locaux de la sous-direction anti-terroriste à Levallois-Perret. Lorsque Darmanin traite le mouvement écologiste d'eco-terroriste, il entraîne une intensification des pratiques répressives avec l'utilisation des moyens anti-terroristes.

Il y a celleux qui veulent empêcher la destruction du vivant et ceux qui l'exploitent et le ravagent. La disproportion de la vague répressive en cours ne peut qu'alerter sur la gravité du basculement autoritaire en cours.

Ces arrestations confirment la fébrilité du gouvernement et sa crainte d'un mouvement toujours plus populaire et légitime. À l'heure où le réchauffement climatique s'accélère, où l'agro-industrie et les lobbies s'approprient l'eau et les terres, l'urgence est à une réappropriation collective des biens communs et à un partage des ressources qui se raréfient.

Rien n'arrêtera celles et ceux qui se soulèvent contre cette injustice flagrante. Nous le savons, la véritable association de malfaiteurs, c'est celle entre le gouvernement, le lobby agro-industriel et le secteur du BTP qui est en passe de détruire la terre de manière irréversible.

Essayer de faire taire les Soulèvements de la terre est une vaine tentative de casser le thermomètre plutot que de s'inquiéter de la température.

Nous rappelons que nous soutenons les actions passées comme futures pour le partage de l'eau et des terres, qu'elles sont fatalement amenées à s'amplifier tant que les responsables continueront leurs destructions et leurs accaparements.

De notre côté, nous préparons notre défense contre la dissolution, loin des épouvantails créés par la communication gouvernementale. Nous rappelons la présomption d'innocence des personnes arrêtées. Nous irons devant la justice et croyons dans la possibilité d'une victoire juridique pour casser cette décision inique, comme ce fut le cas pour d'autres dissolutions pour motif politique des dernières années.

Nous dénonçons notamment l'arrestation d'un des portes paroles des Soulèvements de la terre invité au même moment dans plusieurs médias. Cette arrestation, la veille de la publication du décret de dissolution, vise directement à l'empêcher de s'exprimer publiquement : une tentative inacceptable de museler la liberté d'expression. La notification de dissolution lui avait été remise personnellement. Cela constitue une entrave au contradictoire lors de cette procédure de dissolution que nous ne laisserons pas passer.

  • Nous appelons à maintenir et amplifier les rassemblements prévus partout en France devant les préfectures dès demain soir, le 21 juin à 19h
  • Mais aussi le 28 juin au soir partout en France également.

Récit d'une arrestation arbitraire : « si on vous stresse trop, vous la lâchez, on en trouvera une autre. »

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Récit d'une arrestation, garde-à-vue et expulsion du territoire suite à la manif du 1er mai à Paris.

Témoignage Arrestation/ Gedächnisprotokoll

L'arrestation s'est faite vers 16h encore sur le parcours de la manif, plus très loin de Nation. Une rangée de CRS rentre dans la manif, charge et commence à courir vers notre côté. Tout le monde commence à courir, moi inclue. Je trébuche et je sens déjà les coups de matraques sur mes épaules et,mon dos. Un ami essaye de me tirer vers lui et reçoit un gros coup sur la tête. Je me fais matraquer par terre et trois CRS se mettent sur moi, genoux sur la nuque. On me met un serflex.

Assez vite, ils me remettent debout et nous marchons direction Nation pour après rentrer dans la prochaine rue débouchant sur la Place, où des voitures de police sont garées. Tout le long du chemin, un des CRS qui me tient, essaye de me provoquer avec des remarques du genre « Tu es quoi toi, homme ou femme ? Ça ne se voit pas et on a besoin de savoir. Je dis salope ou pas ? » ou « J'ai fracassé la tête de ton pote ». À un moment, la manif se rapproche de nous et met la pression aux CRS qui sont en train de m'emporter. Ils me remontent les bras dans le dos, pour pouvoir me manier rapidement, chaque petite résistance de ma part produit une douleur dans les épaules. Leur chef de compagnie leur dira juste après cette situation : « Si on vous stresse trop, vous la lâchez, on en trouvera une autre. »

Pendant la marche, nous passons dans des nuées de gaz lacrymo et je n'arrive plus à respirer, comme on m'a enlevé toutes les protections, les CRS en portent toujours. À un moment, je crache devant moi, à cause du gaz et le CRS, qui me provoquait déjà sans cesse dit qu'il avait pris le crachat comme un outrage à sa personne. Il notera sur la fiche d'interpellation que je lui ai craché sur les chaussures.
On arrive aux voitures de police et on m'oblige à m'asseoir par terre contre une des voitures. Je m'accroupis pour ne pas m'asseoir sur le sol mouillé, ils me poussent à terre. Ils vident mes affaires et parlent « d'explosifs » en trouvant des petits pétards. Ils noteront cela sur la fiche d'interpellation. Puis ils me remettent à trois policiers de la gendarmerie qui m'embarquent dans une voiture. Un de ces policiers lit ma fiche d'interpellation et s'énerve, parce que ses collègues n'ont pas coché les faits qui me sont reprochés. Au final, c'est lui qui va les cocher, en débattant avec ses collègues, quelles cases cocher : « On va pas lui mettre le port d'armes, non ? Par contre, on lui met jet de projectiles ». Tout cela me semble complètement arbitraire. Ils mettent la sirène sur le toit et on roule à 100 km/h dans les rues de Paris. À chaque voiture, qui ne sort pas assez vite du chemin les trois agents s'énervent et lancent des insultes : « petit connard », « bâtard », etc. Je me sens mal à l'aise.

La Garde à Vue

Arrivés au commissariat, je demande où on se retrouve et on me dit seulement que je suis dans le 8e. Mes affaires sont à nouveau fouillées et une policière me fouille à nu. Elle garde mes lacets et mon soutien gorge (qui n'a pas de partie en plastique/métal). Je ne sais plus exactement dans quel ordre temporel se font les choses. Mais en tout cas, on m'emmène pour des photos. La première fois je tire des grimaces (en Allemagne cela fonctionne parfois) et le policier s'énerve et se chauffe en m'insultant : « Petite conne, ne fais pas chier », « Tu vas rester ici longtemps ». Il me ramène en cellule. L'OPJ (officier de police judiciaire) vient me voir pour l'appel d'un proche et le nom d'une avocate. Je lui donne un numéro allemand, il dit qu'il va voir mais que probablement ça ne sera pas possible, parce que l'appel va coûter plus cher. J'essaye de lui donner le numéro de la legal team (le seul numéro français que j'ai en tête), mais il le reconnaît et me dit que se n'est pas un proche. C'est ainsi que je me retrouve sans appel. En tant que choix d‘avocates, je lui donne les noms d'Alice Becker et de Hannah Rajbenbach. Il semble les reconnaître, car il fait le commentaire qu'elles doivent être débordées en ce moment. Il a donc bien reconnu le noms des avocates de la legal team.
On me met dans une cellule prévue pour une personne avec une deuxième femme, qui elle est déjà là depuis le matin pour une bagarre avec son amoureuse. La cellule est immonde, il y a des déchets de personnes antérieures qui jonchent le sol. Les toilettes dans la cellule sont dégueulasses et on a pas de chaussures pour y aller. Il y a un banc qui fait peut-être 70 cm avec un matelas et un plaid pour deux. On va passer la nuit allongées l'une à côté de l'autre sur les 70 cm pour pouvoir partager le plaid. On nous donne aucun kit hygiénique. Aucune lumière du jour ne rentre dans les cellules et le couloir, du coup on a aucune notion du temps.

On me ressort de la cellule et je les laisse prendre des photos et mes empreintes. Plus tard, je dormais déjà, l'agent qui avait pris les photos et les empreintes entre dans la cellule avec un bâtonnet dans la main. Il me dit d'ouvrir la bouche. En demi-sommeil, je ne capte pas directement et j'ouvre la bouche en pensant que c'est un test covid. Ce n'est que quand j'ai déjà le bâton de coton dans la bouche, que je réalise, que c'est une prise d'ADN. Il ne l'a annoncée à aucun moment. Je lui prends le bâton des mains et je dis que je refuse. Il essaye de me reprendre le bâton et une petite échauffourée éclate entre nous. Il me sort de la cellule. J'ai le bâton de coton dans la main et je répète que je refuse, en essayant d'essuyer le bâton sur tout ce qui passe. Au final, je le lance dans une poubelle, qu'il y a à côté de moi. Le policier m'insulte tout au long en me disant que ça allait me coûter cher et que j'allais rester plusieurs jours. Je ne sais pas s'il a ressorti le bâton de la poubelle. Je me retrouve dans la cellule, complètement abasourdie par toute la situation.

Vers 10h le lendemain (le 2 mai), on m'annonce que j'ai 30 minutes pour parler avec une avocate commise d'office, comme ils n'ont pas pu joindre mon avocate désignée. Je ne me rappelle pas du nom de l'avocate, elle est correcte et me soutient dans ma décision de garder le silence sur l'arrestation. Elle m'encourage à répondre aux questions en rapport avec mon séjour en France. Camille la félicitera plus tard pour cela. Puis vient l‘audition par une agent de police, qui bien sûr s'énerve quand je ne réponds pas aux questions et me dit que dans ce cas là, je vais sûrement être déférrée et que je vais passer en comparution immédiate et que tout cela rallongerait ma remise en liberté.

Le déferrement

Vers 13h, on vient me chercher pour me déférrer au tribunal. On me remet en cellule là-bas et je ne reçois aucune réponse à ma question, quand j'allais passer en comparution immédiate. Je n'en peux plus d'attendre seule dans une cellule, sans notion de temps. À aucun moment je ne suis avertie de la procédure qui m'attend. Ce n'est que lorsqu'on vient me chercher et qu'on me met dans un petit box vitré et que le délégué du procureur arrive que je réalise que je ne passe pas en comparution immédiate. Le délégué me fait comprendre, dès la première minute, qu'il n'a pas de temps à perdre. Il me dit qu'il n'allait pas me lire tous les faits qui me sont reprochés parce que ça allait trop durer, que je risquais 2 ans de prison et 30 000 € d'amende si je ne signais pas l'APP (avertissement pénal probatoire) qu'il me met sous le nez. Je lui dis que je n'allais rien signer avant d'avoir parlé à mon avocate. Il me dit qu'il a déjà téléphoné à Hannah Rajbenbach avant de me voir. Je répète que je n'allais rien faire avant de ne pas avoir pu parler avec elle. Il s'énerve et me demande si je ne savais pas prendre de décision toute seule. Je m'énerve à mon tour en lui disant que j'ai le droit de parler à une avocate et que non, je ne connaissais pas le droit pénal français par cœur. Il finit pas appeler Hannah. Elle me soutient dans mon choix de refuser l'APP. On raccroche et d'abord le délégué veut me faire signer l'APP sans avoir noté sur le papier que je refuse. Il s'énerve encore et finit par noter le refus sur l'APP, je signe. Il me dit que j'allais être libérée. Puis il passe dans le prochain box vitré, à côté de moi. En moins de 30 minutes, il fait signer des APP à trois personnes, qui, elles, peuvent partir directement après avoir signé. Du coup, je demande pourquoi je ne suis pas libérée et c'est là qu'on m'annonce, que le préfet a signé une OQTF et que j‘allais être transférée en centre de rétention administrative. Je me retrouve en apathie.

Le CRA

Je suis remise en voiture et on m'emmène au CRA du Mesnil-Amelot. Les policiers dans la voiture parlent de bouffe et de musique et ça m'énerve. La seule femme du groupe essaye de relier avec moi contre les deux agents mecs et ça me fait encore plus chier. On arrive au CRA, re-fouille, re-palpation (3e fois). On refait une photo de moi pour ma carte, sinon aucune explication de règlement. Je reçois un téléphone, mais pas de carte SIM. Je leur dis que ma carte ne fonctionne pas et ils me disent : « Faudra que tu empruntes aux femmes alors ». Si je me souviens bien, ils ne me disent pas que je peux acheter une carte SIM le lendemain. En chemin, vers la cour des femmes et vers ma chambre, un des agents de la PAF (police aux frontières) veut me faire peur en disant : « Donc toi tu as fais la manif du 1er mai ? Tu as lancé des projectiles sur les collègues, c'est ça ? Tu es donc anti-flics ? Faudra faire attention ici, ici il y a plein de flics. Fais attention à toi. »... Welcome.

Un autre article analyse la parodie de procès dont Julie a fait l'objet.

Le 1er juillet prochain, un évènement festif aura lieu à la caboteuse pour soutenir nos outils de luttes, la legal team, et nos camarades qui connaissent des injustices. Venez nombreux.ses pour fêter nos moyens de défense !!

L'OQTF, un outil pour réprimer la solidarité internationale

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Julie a participé à la manifestation du 1er mai dernier à Paris. Dans la cohue, elle est violemment interpellée par les flics. S'ensuit une série d'actes honteux. Mensonges, insultes sexistes, intimidations, tentative de prise d'ADN sans consentemment et pour finir placement en CRA montrent ce qu'est la définition de la justice de l'État français et de ses sbires face à quiconque s'oppose à eux. Julie nous a transmis son témoignage.

Julia a été arrêtée au gré de la vindicte policière lors du 1er mai dernier à Paris. Son témoignage sur sa gav est publié ici. Elle a fait l'objet d'une OQTF et été placée en CRA, des prisons illégales qui servent déjà depuis trop longtemps à enfermer les exilé.e.s. On fait le point ici sur les moyens employés par l'État pour intimider et enfermer celleux qui s'opposent à lui.

Mardi 18 mai. Cela faisait désormais une semaine que notre camarade Julia*, ressortissante européenne non-française, était enfermée au CRA du Mesnil Amelot. Elle en sort tout juste. On connaissait le rôle abject de ces traumatisantes quasi-prisons pour le traitement des « étrangers en situation irrégulière », notons désormais qu'ils servent aussi à réprimer les militants internationaux. À l'occasion d'une charge de CRS, Julia trébuche. Elle est attrapée, un ami qui tente de l'aider reçoit un violent coup de matraque sur le crâne. Les policiers s'asseyent à trois sur elle, la frappent au sol, genoux sur la nuque et l'immobilisent avec un serflex. Emmenée hors du cortège, les insultes sexistes fusent : « T'es quoi toi ? homme ou femme ? Ça se voit pas et on a besoin de savoir. Je dis salope ou pas ? » « J'ai fracassé la tête de ton pote. »

Si les circonstances violentes et arbitraires de son interpellation sont communes par des dizaines de manifestant-es français-es, Julia ne subira pourtant pas le même traitement. Après son arrestation, elle est placée en garde à vue (gav). Celle-ci ne s'éternisera pas, il faut dire qu'il n'y avait pas grand-chose contre elle. Elle est donc déférrée dès le lendemain midi et comparait devant un délégué du procureur (DPR) au TGI de porte de Clichy. Comme beaucoup, elle reçoit un simple avertissement pénal probatoire. Mais au lieu de sortir du tribunal, elle est isolée dans un box sans aucune justification. On ne lui notifie que bien plus tard qu'elle est sous le coup d'une Obligation de quitter le territoire Français (OQTF) ainsi qu'une ICTF (Interdiction de circuler sur le territoire Français) pour une durée maximale de 3 ans – équivalent à l'IRTF pour les ressortissant-es non européen-nes – qui n'ont été délivrées par la préfecture qu'après son entrevue avec le DPR. Si une observation stricte du droit avait été respectée, Julia aurait dû être libérée. Sa rétention dans le box aura été arbitraire et témoigne d'une largesse certainement accordée par le parquet à la préfecture en attendant d'éditer l'OQTF.

Si représenter une menace à l'ordre public constitue un motif d'OqtF pour un-e étranger-e résidant en France, il faut néanmoins que celle-ci soit qualifiée de « menace réelle, sérieuse et suffisamment grave à un intérêt fondamental de la société » pour que l'OQTF soit délivrée. Déclarer qu'un.e étranger-re interpellée à l'aveugle dans le cadre d'une manifestation constituerait une telle menace est alarmant. Pour l'État, s'engager dans une telle voie, c'est affirmer ouvertement aux étranger-es participant à des manifestations en France qu'iels représentent une menace et qu'iels sont passibles d'expulsion. Pour un État n'ayant que faire d'avoir récemment été maintes fois épinglé par des acteurs étrangers pour son non-respect des droits humains dans la gestion des conflits sociaux, c'est la position-miroir sur le territoire d'un pouvoir qui, à échelle mondiale, se
replie sur lui-même. Cela ne vise rien de moins qu'à criminaliser la solidarité internationale.

<style type="text/css"> .balise-lien-modele article { padding-top: 0.5rem; padding-right: 0.5rem; padding-bottom: 0.5rem; background-color: #f6f6f6; border-width: 2px 0px 2px 0px; border-style: solid; border-color: #a30006; margin-bottom: 1rem; margin-left: 1rem; } .balise-lien-modele a { display: inline-block; text-decoration: none !important; } .balise-lien-modele h4 { display: inline; margin: 0; font-size: 1.1rem; line-height: 1.6rem; font-weight: 400; color:#a30006; } .balise-lien-modele h4 span { color: #696969; } .balise-lien-modele img.logo-article-modele { margin-left: 5px; } .balise-lien-modele p { font-size: 0.889rem; line-height: 1.5rem; margin-top: 0.4rem; } .balise-lien-modele time { font-size: 0.889rem; color: #696969; font-style: normal; }

A sa sortie du TGI, Julia est placée en Centre de rétention administrative (CRA). Si « l'éloignement » (bel euphémisme) n'a pas pu avoir lieu dans les 48 heures, le Juge des libertés et de la détention (JLD) peut être sollicité pour prolonger la détention de 28 jours renouvelables deux fois (90 jours en tout maximum). Les recours et demandes d'appel étant suspensifs, la rétention de Julia sera prolongé une première fois, celle-ci ayant immédiatement contesté l'OQTF et l'ICTF devant le tribunal administratif.

Un premier juge statuera sur le respect du cadre légal de la procédure de placement en CRA ; un second, sur le volet pénal et la légitimité d'attribution de « mesures d'éloignements » (ici OQTFet ICTF) aux vu des éléments retenus contre elle.

Lors du premier jugement en cour d'appel, la défense pointe trois vices de procédure.

Premier vice (et non des moindres) : Julia a demandé à voir une avocate, elle donne les noms de deux professionnelles du barreau de Paris, on lui rit au nez en disant que ces avocates sont en ce moment probablement sous l'eau et qu'elles ne pourront pas s'occuper d'elle. Il faut noter ici que cette pratique se généralise : de plus en plus de manifestant-es interpellé-es se voient privé-es du droit de recourir à l'avocat-e de leur choix. Une bavure judiciaire en somme. En somme on lui refuse son avocate. Elle aura une avocate commise d'office qui, heureusement, fait état des insultes que Julia a reçues. Plus gros encore, le mensonge est doublé d'un faux en écriture publique : il sera notifié dans le PV que l'avocate désignée sous un nom légèrement différent a été avisée d'une demande alors que l'avocate en question n'a jamais reçu aucun appel de ces policiers.

Second vice de procédure : la rétention de Julia dans le box correspond, comme nous l'avons détaillé plus haut, à une détention arbitraire et illégale puisqu'elle ne faisait pas encore l'objet d'une obligation de quitter le territoire avant d'y entrer.

Enfin, un troisième vice de procédure qui aurait pu rendre l'ensemble nul est souligné : la police n'a pas émis d'avis du parquet pour notifier du placement en Gav de Julia. Cet avis est normalement obligatoire. C'est la garantie que le parquet (pouvoir judiciaire) est informé de la Gav et se porte garant du respect des droits de la personne détenue. Une simple formalité mais qui, lorsqu'elle est traitée comme telle au point d'être littéralement esquivée, en dit long sur la liberté et les marges de manœuvre accordées à la police pour la conduite des Gav.

Au rendu du délibéré, la juge, bien qu'ayant soigneusement pris note des différents arguments (solides) avancés par la défense, n'a daigné revenir sur aucun d'entre eux. Elle s'est simplement contentée de marteler son accord avec la décision prise par le tribunal en première instance.

Il en sera autrement le lendemain, au tribunal administratif de Melun. La seconde juge donnera finalement le coup d'arrêt aux sanctions judiciaires. Elle s'étonne de la vacuité du dossier, les quelques éléments incriminant contre Julia ne permettent heureusement pas, aux yeux de la Justice, de conclure à une menace sérieuse à l'ordre public. Tombent donc l'OQTF et l'interdiction de séjour.

Conclusion : les entraves administratives aux allées et venues de Julia en France sont annulées. Les frais d'avocat seront à la charge du préfet de Paris. Tout semble rentrer dans l'ordre. Pourtant, il n'en reste pas moins que, du fait de sa nationalité étrangère, Julia aura subi une semaine de rétention.

Finalement, on observe que, « lorsqu'une narration d'État fonctionne » (des étrangers sont venus ce premier mai pour dévaster le pays, les manifestants sont là pour tuer du flic, des migrants abusent du droit d'asile pour coloniser la France etc.), on a, subitement, une perméabilité du judiciaire au profit d'une répression commandée par l'exécutif qui en obtient complaisances et faveurs. La matraque, c'est un travail dur. À côté, le droit c'est pas si grave, ça peut permettre au passage d'infliger adroitement quelques jours de prison.. Cette rétention arbitraire qui s'apparente drôlement à une peine punitive de rétention sans motif légitime sera-t-il un outil de répression judiciaire que l'exécutif pourra désormais dégainer habituellement ? La responsabilité est à la discrétion des JLD.

* le nom a été changé

Le 1er juillet prochain, un évènement festif aura lieu à la caboteuse pour soutenir nos outils de luttes, la legal team, et nos camarades qui connaissent des injustices. Venez nombreux pour fêter nos moyens de défense !!

Ci après : le fameux faux en écriture publique. Hanna Rajbenbach n'a jamais été notifiée de la
demande de Julia et Ana HAGENBACH n'existe pas.