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Assemblée de lutte et mouvement pour la Palestine

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Appel à une assemblée de lutte commune contre le génocide en Palestine le 8 décembre. Multiplions les formes de mobilisations.

Trois semaines depuis la première assemblée pour la Palestine sont passées.

Entre temps, nous avons organisé plusieurs cortèges et actions. Les étudiant·es ont notamment rejoint la lutte avec des blocages et mobilisations. Les artistes aussi. Des comités de quartier voient le jour et des initiatives portées par des camardes juifves antisionistes ne cessent de se multiplier.

La marche du 25 novembre a vu plusieurs cortèges pour la Palestine dans le monde grâce à Accion Global Feminista*. Et évidemment, plusieurs dynamiques comme celle de Urgence Palestine continuent de travailler sans relâche pour renforcer et amplifier le mouvement.

Les bombardements ont pourtant repris. Il n'est pas temps de relâcher. Au contraire, il faudrait passer à la vitesse supérieure.

Rejoignez-nous lors de la prochaine assemblée pour réfléchir à comment amplifier la pression. Plus d'infos à venir quant au programme de l'assemblée.

« Tout ce que nous voulons pour Noël est la libération de la Palestine »

Internationalists United
@internationalists_united

إذا كنت لا تعرف ما العمل، إذا كنت غاضب/ة ولم تعد ترغب/ين الشعور بالعجز، إذا كنت تريد/ي التحرك بدلاً من مشاهدة الموت على الشاشات، انضم/ي إلينا !

If you want to act but don't know what to do, if you are angry and you no longer want to feel helpless, if you want to get moving instead of watching death on screens, join us !

* Appel de Accion Global Féminista en plusieurs langues à signer ici
https://docs.google.com/document/d/1AhVO1EL4rLp3o-bgqETDDlCilNpfDNIVO031rZkEmdQ/edit

@accionglobalfeminista

La captation du mot « juif » par l'Occident ou la deuxième mort d'un monde

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

C'est le gauchisme familial qui m'a fait depuis toujours propalestinien. Dans le groupe mao qui jusqu'au milieu des années 1980 prenait une grande place dans ma vie, militaient des ouvriers marocains – Salem, par ex. – et de jeunes femmes juives, dont deux étaient filles de résistantes de la MOI. Celles-ci étaient antisionistes. C'était aussi leur héritage familial révolutionnaire. Ma pensée politique doit tant à tous ces gens. Je dédie ce texte à Cécile Winter, disparue il y a deux ans.

Sylvain Jean

La guerre que mène le monde dit libre au peuple palestinien à travers son dominion sioniste – l'État d'Israël – ne tient, dans la pensée mais aussi, par conséquent, dans ses actes abominables (massacres de masse depuis 1947, politique génocidaire en ce moment contre les habitants de la bande de Gaza), que par la mise en avant du nom « Juif ».

La raison ultime, l'argument d'autorité, que l'Occident jette à la face de quiconque s'émeut et/ou se révolte devant le calvaire sans fin du peuple palestinien, c'est le nom « Juif ». Si tu es propalestinien, en vérité, tu es antisémite. Et si tu es antisémite, tu es nazi. Et si la cause palestinienne est nazie, alors les hommes, les femmes et les enfants palestiniens peuvent mourir de la pire des manières, comme « des animaux humains » ainsi que l'a dit un ministre israélien, puisqu'ils ne font pas partie de l'humanité.

« Juif » est donc mis en avant pour couper court à toute considération en pensée, politique, de la situation. Juif n'est plus qu'une entité indistincte, comme sous le nazisme (« Les juifs sont notre malheur » disait la propagande électorale nazie – dire qu'ils seraient, par ex. le bonheur de l'Occident n'en serait que l'énoncé renversé en miroir). Il faudrait considérer « les Juifs » comme une masse homogène de victimes pour l'éternité et oublier que, précisément, la révolte héroïque, intrépide, du Ghetto de Varsovie en 1943, notamment menée par Marek Edelman, juif bundiste antisioniste, avait pour premier dessein politique pour ses combattants de refuser de mourir comme des chiens ou comme des victimes résignées des nazis.

La question de la dignité, du refus désespéré et héroïque de l'assignation antisémite déshumanisante nazie, est essentielle pour comprendre l'Insurrection du Ghetto de Varsovie. Les partisans juifs tiennent trois semaines face à une machine de mort nazie dont l'objectif est de tous les exterminer.

Vingt-sept jours durant, des partisans juifs dos au mur et mal équipés mettent en difficulté l'une des plus puissantes armées du monde d'alors. De fait, le soulèvement du Ghetto relève d'une guerre populaire singulière puisqu'exclusivement urbaine.

L'issue est toutefois écrite. Himmler, dignitaire nazi, est déterminé à détruire le ghetto. Dans un rapport envoyé à Berlin, le SS Stroop écrit : La résistance fournie par les Juifs et les bandits ne put être brisée que grâce à l'action infatigable, de jour et de nuit, des troupes de choc.
Réduire ces combattants à leur seule judéité serait toutefois indigne. Jablonka explique dans son livre que ses grands-parents juifs communistes refusaient d'être assignés à leur seul être-juif, d'une certaine manière, pour être de tous les combats de l'émancipation des opprimés. De ce point de vue, au moment où le Ghetto de Varsovie s'insurge, il est frère des esclaves de Saint-Domingue et de Guadeloupe contre Bonaparte et Leclerc voulant rétablir l'esclavage, des Aztèques assassinés par Cortès ou encore des Arméniens massacrés en 1915. Il est frère des Palestiniens insurgés contre la création d'un « état juif » sur décision de l'ONU en 1947.

Marek Edelman et ses camarades, dont d'ailleurs quelques sionistes refusent la passivité ou la collaboration d'autres Juifs du Ghetto qui pensent, comme les membres du Judenrat, que l'on peut négocier avec les nazis, qu'en baissant la tête, on pourra adoucir leur folie meurtrière.

Balancer le nom « Juif » pour justifier l'hybris israélien, demander comme Léa Salamé de France inter il y a quelques jours « Pourquoi cette insensibilité quand il s'agit des Juifs ? » à deux invités pro-israéliens alors qu'il est question d'Israël et non « des Juifs » est une insulte à la mémoire des Juifs d'Europe exterminés d'abord par l'Allemagne mais aussi par la France – dont l'État, défait dès 1940, collabora avec zèle avec les nazis – et les nationalistes ukrainiens qui par antisoviétisme collaborèrent avec les nazis et sont coupables du massacre de Babi Yar qui s'inscrit dans la Shoah par balles.

Pour effroyable qu'il soit, Auschwitz, faut-il le rappeler, est un nom hélas essentiel de l'Occident. Dans la généalogie de la violence occidentale, il parachève par sa dimension industrielle d'autres génocides ou crimes de masses. Dans ses syllabes sanglantes, comme l'écrit Aragon, on entend aussi les indiens du Pérou assassinés, les Aborigènes de Tasmanie éradiqués du vrai monde, les suppliciés de la traite transatlantique, les Arabes d'Algérie et les coolies de l'Inde dont parle Césaire dans son Discours sur le colonialisme ou encore les Kanaks que Macron vient de traiter peu ou prou comme Robert Lacoste les Algériens spoliés et assassinés par la France.

Le nom « Juif » cherche à intimider la raison dans toute sa probité à propos du « conflit israélo-palestinien ». Cet usage du nom est une injure aux morts du crime nazi. Il n'est pas anodin qu'il soit, en France particulièrement, le fait d'une extrême-droite à l'unisson – à part une poignée d'allumés impolitiques – et d'un gouvernement de droite extrême. Cet usage du nom « Juif » pour justifier un autre crime contre des non-occidentaux aurait bien fait rire les nazis. Du reste, ces derniers étaient très complaisants vis-à-vis des sionistes (ce point est documenté, ne serait-ce que chez l'historien Philippe Burrin) puisque ceux-ci aspiraient aussi à ce que les Juifs fuient l'Europe.

L'usage du nom « Juif » à dessein de justifier l'injustifiable et d'organiser la détestable confusion entre « juif » et « sioniste » n'est possible – et en cela usage obscène – que parce que l'extermination des Juifs a eu lieu. Parmi ces Juifs exterminés, Juifs d'Europe, Ashkénazes, le sionisme n'était pas majoritaire. Il y avait, dans l'Est de l'Europe – Pologne et Russie (Ukraine, Biélorussie, notamment) – quelque chose qui, comme dans certaines contrées de Bolivie encore aujourd'hui, résistait à la modernité capitaliste. Ainsi est-ce la persistance du shtetl, de Juifs religieux et/ou fidèles à la tradition n'ayant rien cédé à la modernité occidentale sur leur foi et sa visibilité notamment vestimentaire, qui a précipité la décision nazie d'exterminer les Juifs d'Europe.

De ce point de vue, quand Jean-Claude Milner écrit dans Les penchants criminels de l'Europe démocratique que la destruction des Juifs d'Europe est le cadeau de Hitler à l'Europe, on ne peut que lui donner raison.

L'Europe démocratique, libérale, a liquidé la métaphysique juive, fût-elle celle de l'étude ou du messianisme révolutionnaire qu'incarnaient par exemple Henoch devenu Henri Krasucki ou les grands-parents d'Yvan Jablonka mais aussi la révolution communiste en Russie. Le yiddish y fut déclaré langue officielle.

Dire « Les Juifs » pour défendre les crimes israéliens est insupportable.
Cette assignation foule une seconde fois les sépultures de Trotsky, de Rosa Luxemburg ou de Maksymilian Horwitz et plus généralement des juifs du Yiddishland révolutionnaire assassinés par les nazis. Tous ces gens étaient socialistes bundistes, communistes et antisionistes.

Jablonka, dans son livre Histoire des grands-parents que je n'ai pas eus qui constitue une sépulture digne pour ses grands-parents exterminés, raconte que ces derniers, morts à Auschwitz probablement en 1944, disaient « Les sionistes avant les fascistes ! ».

De fait, toute une littérature juive antisioniste annonçait ce que serait la création d'un état « juif », ses conséquences dramatiques, meurtrières. Marek Edelman, du Bund, resta en Pologne après la guerre. Il parla, après 1945, de « partisans palestiniens » et fut, de ce fait, indésirable en Israël.

Le chantage à l'antisémitisme pour criminaliser le mouvement propalestinien assassine une deuxième fois la judéité révolutionnaire.

C'est parce qu'à ses yeux, Hitler a mis fin au « problème juif » que toute l'extrême-droite n'a que la stigmatisation « Antisémite ! » à la bouche dès lors que l'on défend le combat légitime du peuple palestinien.

Ciotti ni Meyer Habib ou Jérôme Guedj n'accuseraient un contempteur de Trotsky ou de Sverdlov d'être antisémite. Non tant parce que la révolution a poussé ces deux héros à en assumer toute la grave âpreté mais d'abord parce que ces illustres révolutionnaires, comme l'UJFP en France aujourd'hui ou Jewish voice for peace aux États-Unis, refusaient l'inégalité du monde et la rapine impérialiste et coloniale.

L'apologie par le ministre Ben Gvir de la LDJ ou de Baruch Goldstein ne dérange pas nos parlementaires « philo-antisémites » comme dit Julien Théry. Le sujet juif révolutionnaire disparu, emportant avec lui la contestation des états-nations bourgeois et racistes européens et occidentaux, la Révolution française à reprendre dans quelque Internationale, nos partisans féroces de l'État d'Israël peuvent se déclarer philosémites.

L'antisémitisme est une passion criminelle européenne. Ses avatars en Orient – le Farhoud en Iraq par ex. – proviennent directement de cette matrice

Ainsi, un démocrate comme Balfour, jugeant que la Révolution bolchévique était une révolution juive en quelque sorte, promit un Foyer national juif en Palestine. Pour liquider l'internationalisme révolutionnaire juif, intégrer « les Juifs » à l'impérialisme dans une sorte de décret Crémieux à l'international était une idée certes sinistre mais très astucieuse.

Jablonka explique ainsi que si tous les Juifs polonais n'étaient pas communistes, presque tous les communistes (d'avant-guerre) étaient néanmoins juifs, à l'image de ses grands-parents. Ce continent, cette humanité, ce qu'on appelle le Yiddishland révolutionnaire, liquidés, Léa Salamé peut interroger ses invités sur « l'insensibilité » du monde à l'égard des Juifs.

On rappellera toutefois que ce sont les États-Unis qui ont refoulé les passagers juifs fuyant l'Allemagne nazie sur le paquebot Saint-Louis, que c'est le ministre Chautemps qui en 1938 alertait la République française contre l'afflux « d'étrangers israélites » sur le sol national et que c'est Raymond Barre qui opposa des « Français innocents » à des « Israélites » lors de l'attentat contre la synagogue de la rue Copernic le 3 octobre 1980.

À l'inverse, lorsque dans l'Algérie française, Vichy abrogea le décret Crémieux, les autorités musulmanes locales interdirent à quiconque de leur communauté de s'approprier des biens juifs. Aucun indigène musulman d'Algérie ne fit défaut. Les moult lettres de dénonciation antisémites étaient strictement françaises.

Lorsque Houria Bouteldja écrit dans son premier livre Les Blancs, les Juifs et nous (Vers une politique de l'amour révolutionnaire) que le décret Crémieux puis l'exil de la plupart des Juifs d'Algérie l'ont dépossédé de sa judéité, elle évoque un monde disparu qui n'afflige pas uniquement les premiers concernés.

De ce point de vue, le crime nazi est un pas radical pour l'ordre racial blanc, le capitalisme. Le monde qu'il abolit ne se limite pas aux seuls Juifs réels, si l'on peut dire. Il abat l'aube révolutionnaire, le jour couleur d'orange dont parle Aragon dans Le Fou d'Elsa.

Advient à la place le monde du théoricien du management, l'ancien SS Reinhart Höhn, ou celui du patron des patrons allemands, Hanns-Martin Schleyer, assassiné en 1977 par la Fraction armée rouge allemande.

Schleyer, ancien SS lui aussi, impliqué dans des crimes de masse en Tchécoslovaquie, eut droit à des obsèques nationales ou quasi en RFA avec tout le gratin libéral européen en pleurs devant son cercueil. La RAF, propalestinienne, était qualifiée d'antisémite par les endeuillés.

Ce point est important. Milner a raison quand il le souligne. Jablonka disant que Hitler a gagné sa guerre contre les Juifs est hélas difficilement contestable. La tentative héroïque et tragique de Pierre Goldman de retenir ce monde qui disparaît, ce monde du « judéo-bolchevisme » qui certes est à la fois une stigmatisation nazie mais aussi, si l'on retourne le stigmate, le nom d'un monde disparu avide de justice où le « Il y aura » des prophètes a peu à peu laissé la place à celui de la promesse révolutionnaire bolchévique, communiste.

C'est parce que ce monde a été liquidé que l'Occident se présente comme « défenseur » (« bouclier » écrit le Rassemblement national dans un clin d'œil à la langue perversement onctueuse des partisans de Vichy, « des Français de confession juive ») des « Juifs ». L'évolution de l'extrême-droite est à cet égard intéressante à étudier.

Rappeler, comme le fait par exemple le Parti socialiste dont le héros Mitterrand, longtemps antisémite assumé, récipiendaire de la Francisque, était à Vichy jusqu'en 1943, que l'extrême-droite soutient Israël pour faire oublier son antisémitisme est d'une pitoyable stupidité. Précisément, une grande partie des antisémites pronazis français ont, après la guerre, soutenu la création de l'État d'Israël parce que le sionisme était la garantie d'une Europe judenrein pour reprendre l'effroyable vocable nazi.

On sait la mansuétude nazie envers le sionisme, on sait aussi qu'Eichmann songea à expulser les Juifs à Madagascar mais aussi en Palestine. Herzl lui-même présentait son projet comme un pied de l'Occident en Orient. Les sionistes, rappelle Omer Bartov dans Anatomie d'un génocide, prenaient modèle sur les nationalismes européens.

Ce qu'on ignore en revanche, du fait d'une gênante conspiration du silence pour ne pas mettre le sionisme à nu, c'est que l'écrivain antisémite Drieu La Rochelle écrivit dans son testament « Je meurs antisémite (respectueux des Juifs sionistes) » ou que Tixier-Vignancour, député en 1940, avocat de Pétain et candidat Algérie française en 1965 avec Jean-Marie Le Pen comme directeur de campagne, s'exclama « À mort les Juifs ! » en voyant Blum entrer dans le Casino de Vichy le 10 juillet 1940, jour du vote des pleins pouvoirs à Pétain, puis « Vive Israël ! » moins de 20 ans plus tard, quand il apercevait Gisèle Halimi, avocate du FLN algérien, au Palais de justice de Paris. Ce « Vive Israël ! » jeté à la face d'une femme juive tunisienne défendant le FLN est plein de sens. « On a perdu Alger mais on a repris Jérusalem » est l'implicite de Tixier. Israël, comme le dirait plus tard Cukierman du CRIF à propos de la présence de Le Pen au second tour de 2002, « apprendra aux musulmans à se tenir tranquilles ».

De fait, Israël réjouit les antisémites qui se sont vautrés dans la collaboration criminelle avec les nazis.

En 1967, lors de la Guerre des six jours, Lucien Rebatet, collabo notoire et auteur du pamphlet antisémite Les décombres, déclara soutenir Israël au nom de la défense de l'Occident. Dans la même veine, la grande manifestation pro-Israël sur les Champs-Élysées compta l'ex-commissaire aux questions juives sous Pétain…

C'est précisément au nom de la défense de l'Occident, de la blanchité impérialiste, que l'extrême-droite soutient Israël et « les Juifs ». De son point de vue, qu'a-t-elle à craindre ? La révolution ? La remise en cause de l'impérialisme, du colonialisme ou, plus généralement, du suprématisme blanc ? Hélas non. Ses rêves les plus fous ont été exaucés via le sionisme et Israël : les Arabes et les musulmans, cousins des Juifs comme nous le rappelle l'Inquisition espagnole, sont spoliés en Palestine et les milieux juifs les plus sionistes votent massivement Zemmour bien que celui-ci absolve Pétain et remette en cause l'innocence d'Alfred Dreyfus. L'UGIF, ce Judenrat à la française, a triomphé en somme. « Les Juifs » sont les tirailleurs de l'Occident. Celui-ci, et notamment sa frange (sa fange) la plus criminelle, veut bien mettre sous le boisseau son antisémitisme pour perpétrer des pogroms islamophobes au nom du bien. La revanche de la Guerre d'Algérie vaut bien quelques flics devant les synagogues.

Dans la situation qui nous occupe, on le voit bien, le nom « Juif » n'a comme effet que de paralyser toute dénonciation de l'infamie que l'Occident inflige à la Palestine.

« Les Juifs » comme « Les Musulmans » comme « Les Indiens d'Amérique », cela n'existe pas. Quel rapport entre Jabotinski et Grigori Zinoviev, pourtant tous deux Juifs d'Ukraine ?

Quel rapport entre Enrico Macias ou Eric Zemmour et le regretté Gérard Chaouat, pro-FLN, pourtant tous trois Juifs d'Algérie ?

Ce qui se passe n'est à penser que du point de vue du droit, de l'émancipation et de la justice. C'est du reste ces principes que défendaient les militants communistes juifs ou les bundistes de Pologne et de Russie il y a un siècle.

En outre, Auschwitz ou Buchenwald ne sont pas en Palestine.

Ce n'est pas aux Palestiniens de payer la mauvaise conscience des Allemands, pays de Hitler, et des Français, pays d'Édouard Drumont et de Philippe Henriot qui n'a pas attendu les Allemands pour être antisémite. L'affaire Dreyfus est la matrice du nazisme. Hannah Arendt mais aussi Theodor Herzl l'avaient bien vu.

La question actuelle est celle du colonialisme, de la blanchité impérialiste qui agite perversement le syntagme « Les Juifs », ce signifiant-maître des nouveaux Aryens disait Cécile Winter, pour troubler les esprits et mettre le sort infligé aux Palestiniens en exception de l'horreur coloniale.

Disons-le pourtant.

Israël n'a pas que des colonies, même si dans sa quête d'un Lebensraum, elle colonise même les bantoustans accordés aux Palestiniens par l'ONU en 1947. Israël est lui-même une colonie. Il en a tous les traits et en accomplit tous les crimes : spoliation des terres, pogroms contre les Palestiniens, radicalisation raciste des colons (« Mort aux Arabes ! » est désormais un slogan récurent de manifestations sionistes) et pour finir fascisation.

De ce point de vue, si le putsch des généraux d'Alger a échoué, c'est l'équivalent de ce pouvoir avorté qui est en place à Tel-Aviv. Parmi ses ministres, Ben Gvir, admirateur du rabbin Kahane qui voulait reprendre les « lois » nazies de Nuremberg mais cette fois en faveur des Juifs.

C'est la seule chose à considérer.

Dès lors, les choses sont simples du point de vue des principes et de l'émancipation de l'humanité. Le colonialisme est une abomination, aux Antilles et en Kanaky comme en Israël. Il constitue un crime contre l'humanité. La résistance nationale palestinienne est la cause de toute l'humanité libre, celle des mânes du Yiddishland révolutionnaire comprises.

Être propalestinien, c'est aussi être fidèle à la judéité révolutionnaire pour laquelle communisme était un signifiant essentiel. La violence occidentale détruit des mondes. La singularité nazie est qu'elle commet son crime sur le sol européen.

Au moment où l'Occident libéral justifie et encourage la politique israélienne de liquidation du peuple palestinien, son usage du nom « Juif » sonne comme la deuxième mort d'un monde dont la disparition sans retour nous laisse pour toujours inconsolables.

Sylvain Jean

Le naufrage réactionnaire du mouvement anti-industriel · Histoire de dix ans

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Histoire de dix ans du naufrage réactionnaire d'un mouvement se prétendant « libertaire », à travers ses acteur·ices et ses publications.

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« En temps de crise l'extrême droite a pour stratégie de tenter des rapprochements avec l'autre bord de l'échiquier politique. Nous en appelons donc à la vigilance, afin qu'aucune passerelle ne soit établie entre nos mouvements et des courants antisémites, racistes, antiféministes, nationalistes, conspirationnistes, etc., etc., et les personnes qui pourraient être complaisantes à leur égard. » [1]

C'est par ces mots qu'il y a dix ans les animateurs des éditions L'Échappée - Cédric Biagini, Guillaume Carnino et Patrick Marcolini - répondaient aux critiques qui leur avaient été faites quant à la présence d'un proche d'Alain Soral, Charles Robin, parmi les auteur·ices de leur recueil intitulé Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques. Cet ‘appel à la vigilance' sonnait alors comme une résolution sérieuse, et ferme.

De 2008 à 2013, le groupe anti-industriel Pièces et Main d'Oeuvre (PMO) a dirigé au sein des éditions L'Échappée la collection Négatif. Ce groupe, qui s'était fait connaître pour son opposition aux nanotechnologies, va, autour des années 2013-2014, intensifier ses prises de positions ouvertement antiféministes et transphobes. Celles-ci seront suivies de déclarations islamophobes et de collaborations régulières avec des publications proches de l'extrême-droite telles RageMag, Le Comptoir, ou Limite.

Le développement violemment antiféministe et raciste de PMO, qui dès 2004 attaquait le « popullulationnisme » des « techno-lesbiennes » [2], devint emblématique des glissements réactionnaires potentiels du courant anti-industriel, qui trouvent un terrain propice dans ses tendances à l'essentialisation positive de la « Nature » et sa négation de la pluralité des rapports de domination au profit d'une seule critique, celle du « techno-totalitarisme » des « technocrates » qui menacerait une humanité indifférenciée.

Il aurait été concevable que le courant anti-industriel (qui a émergé au cours des années 1980 avec la revue post-situationniste l'Encyclopédie des Nuisances devenue ensuite maison d'édition), dont de nombreu·ses membres se revendiquent de l'anarchisme, se distingue de ces offensives réactionnaires en leur sein et en produise une critique émancipatrice. Ni l'un ni l'autre n'est arrivé.

PMO a continué à évoluer sans encombre au sein du mouvement anti-industriel [3]. Et PMO a essaimé. Des initiatives sont nées, se revendiquant de leur héritage réactionnaire, comme le podcast Floraisons, ainsi que les Éditions Libre et la branche française de Deep Green Resistance (DGR), toutes deux co-fondées par Nicolas Casaux et Kevin Haddock, qui revendiquent une transphobie assumée.

Paul Cudenec, un « anarchiste » transphobe, antisémite et antiféministe

En novembre 2022 est sorti le deuxième numéro de Brasero, la revue des éditions L'Échappée coordonnée par Cédric Biagini et Patrick Marcolini. Au sommaire de la revue, où l'on retrouve des habitué·es de la maison tel·les qu'Anne Steiner et François Jarrige, un article intitulé « Pour la loi de la nature » est signé par un personnage peu connu des lecteur·ices français·es : Paul Cudenec.

Paul Cudenec est présenté par les éditeurs comme un « journaliste, essayiste et romancier anglais, installé depuis 2013 dans les Cévennes, auteur d'une dizaine de livres, [et participant] aux sites Winter Oak et Organics Radicals. »

Paul Cudenec est en effet un essayiste connu en Angleterre pour ses prises de position anarchistes et spiritualistes proches du primitivisme. Winter Oak et Organic Radicals ressemblent quant à eux plus à des blogs personnels qu'à des projets collectifs, de même que Network23 et le Substack à son nom, tous republiant les mêmes articles.

Mais c'est peu dire sur Paul Cudenec que de s'arrêter à cela. Un rapide coup d'œil, à l'aide d'un moteur de recherche, à la production littéraire de ces dernières années de Cudenec interpelle par ses titres évocateurs : Le nouveau visage du Fascisme : Exposer le Great Reset (2021), Qui se cache derrière le gang vacciniste de la fausse-gauche ? (2021), Klaus Schwab et son Great Reset fasciste (2020) [4].

En quelques clics Paul Cudenec nous apprend donc que « Klaus Schwab est un enfant de l'Allemagne d'Adolf Hitler », que George Soros et l'« élite mondialiste » financent le « fascisme pro-technologie » et « vitaphobe » du « transgenrisme » et du « féminisme intersectionnel », tout en controlant Black Lives Matter et les antifascistes, et qu'« Israel est l'un des principaux défenseur du Great Reset ».

Un peu plus loin il dénonce « le totalitarisme du putsh Covid mondial », et les « soi-disant anarchistes » qui auraient soutenu « le confinement fasciste et le port du masque compulsif » qui nous « musèle » et « nous mène droit vers l'enfer transhumaniste » [5]. Cudenec publie également des articles très enthousiastes sur les Convois de la Liberté organisés par l'extrême droite canadienne et les manifestations antivax françaises de l'été 2021, dont des reportages photos [6] mettant à l'honneur des pancartes associant le pass à l'étoile jaune, ou promouvant les réseaux antisémites La Rose Blanche et Réinfocovid [7].

Dans la même veine, il a également publié un éloge du pamphlet de Julien Coupat [8] acclamé par les réseaux néonazis internationaux, le Manifeste conspirationniste (Seuil, 2022). En Allemagne, une version a été publiée en décembre 2022 par une maison d'édition d'extrême droite [9] qui nous informe sur leur site que la traduction « a été établie en étroite collaboration avec la maison d'édition parisienne et les auteurs, qui ont apporté un certain nombre de compléments à l'édition allemande ».

En juillet 2022 dans une interview publiée par le principal groupe anti-industriel italien Resistenze al Nanomondo, Paul Cudenec, entre deux attaques contre le « culte transgenre » et « l'arnaque intersectionnelle », et un appel à libérer « notre sens du sacré », nous raconte son parcours qui l'a conduit de l'anarcho-primitivisme jusqu'à son récent coup de cœur pour les anti-industriels français citant notamment Miguel Amoros et Renaud Garcia.

Se réclamant des penseurs traditionnalistes et fascisants René Guénon et Ernst Junger, Paul Cudenec invite les anarchistes à rejeter les « théories matérialistes » en retrouvant « la sacralité du vivant ». « Le but de la vrai spiritualité », nous dit-il, est « de prendre conscience de [notre] appartenance cosmique » et « de nous permettre de servir de véhicule à l'organisme universel dont nous ne sommes qu'une partie » [10].

En 2013, les éditeurs avait expliqué la présence d'un auteur néofasciste dans leur recueil en ces mots : « Cet auteur, Charles Robin, nous avait été recommandé par une personne de confiance […]. Notre erreur aura été de ne pas nous renseigner sur Charles Robin (nous ne l'avons même pas googlisé !) ».

Matthieu Amiech et les éditions La Lenteur

Si les éditions L'Échappée sont un bastion incontestable du mouvement anti-industriel, une autre maison d'édition en est l'héritière principale : les éditions La Lenteur fondées en 2006 par Nicolas Eyguesier et Matthieu Amiech [11], et diffusées, tout comme les Éditions Libre, par Hobo diffusion.

Matthieu Amiech, également membre du Groupe Marcuse et d'Écran Total (groupe contre la numérisation créé en 2013), y a récemment publié L'industrie du complotisme, un livre qui selon la recension enthousiaste de la librairie Quilombo accorde « autant de place à l'instrumentalisation étatique de l'anti-complotisme qu'à la montée du complotisme » [12].

En 2016 Matthieu Amiech avait brièvement pris la lumière médiatique en publiant dans Le Monde une tribune intitulée « Contre l'islamisme, ni “Causeur” ni “Crieur” », dans laquelle, se positionnant nettement du côté des « républicains fervents et martiaux » contre les « amis des musulmans », il reconnaissait aux premiers « un discours relativement lucide sur le péril islamiste, la volonté de sécession d'une fraction des musulmans et la nécessité d'un front le plus large possible pour faire barrage aux revendications identitaires risquant d'aboutir à la dislocation de la société. » [13]

En mars 2021, dans une interview pour Mediapart où il comparait la crise sanitaire à la victoire nazie en juin 1940, Matthieu Amiech faisait part de ses inquiétudes à propos de « la focalisation obsessionnelle sur une vaccination improvisée, biotechnologique et aux effets radicalement incertains » face à ce qu'il décrivait comme « un coronavirus de dangerosité modérée » [14].

En mars 2021 cela faisait plus de 5 mois que l'on comptait en moyenne 300 morts par jour du Covid-19 en France. Morts dont la proportion a toujours été beaucoup plus importante parmi les classes populaires et racisées [15]. Et dès 2020 un nombre considérable de personnes de tous âges rapportaient déjà des séquelles à long terme suite à une infection, même d'apparence « bénigne ».

La pandémie de Covid est devenue un sujet important du mouvement anti-industriel et notamment des éditions La Lenteur qui vont publier une série de mini-brochures dont Souriez, vous êtes soignés de Pierre Bourlier (12/2020), Où est passé la colère ? La politique prétendument sanitaire et ses conséquences de Écran Total (01/2021), et Ceci n'est pas une crise sanitaire de Matthieu Amiech lui-même (09/2021).

Dès le début de son texte Pierre Bourlier nous invite à « remettre en cause la gravité de l'épidémie ». Selon lui la pandémie de Covid-19 est « une peste imaginaire » qui sert une « offensive totalitaire ». Et « l'obligation du port du masque est le symbole de ce muselage ». Amiech quant à lui suit la même ligne tout en intensifiant le propos antivax, affirmant qu' « il n'y a pas de rupture profonde dans l'état de santé de la population depuis mars 2020 à cause du Sars-Cov 2 » et que « les vaccins bio-technologiques achèvent de transformer notre monde en un vaste laboratoire hors-contrôle ». Cette « terreur » exercée à travers l'imposition de « vaccins génétiques » par l'« oligarchie mondiale » aurait pour but « l'informatisation "totale" du monde ».

Pas un mot ne sera consacré aux profondes inégalités d'accès nationales et internationales à un médicament préventif qui réduit drastiquement les formes graves de la maladie et diminue les risques de séquelles. La principale source « scientifique » mobilisée par ces textes est Laurent Mucchielli, directeur de recherche au CNRS devenu un fervent promoteur de Didier Raoult et de ses traitements dangereux, et qui en octobre 2020 a co-fondé le principal réseau de désinformation médicale français Réinfocovid. Lors de la parution du texte d'Amiech, en septembre 2021, l'implantation de Réinfocovid au sein de l'extrême-droite radicale et antisémite est amplement établie et documentée.

Enfin dans son texte Amiech qualifie les prises de position antifascistes comme celle de Sud Education de « sinistre » et d'« anti-populaire ». Le seul clivage politique qui importe est avec ou contre la « technocratie ». Ainsi, selon Amiech « le souci de défendre les plus fragiles face à l'épidémie dissimule mal [...] une approbation des transformations proposées par la technocratie, seringue et smartphone à la main. » Et tout comme dans son interview avec Mediapart, Matthieu Amiech y fait la promotion du groupe raciste, transphobe et antiféministe Pièces et Main d'Oeuvre.

Sans surprise Laurent Mucchielli, co-fondateur de Réinfocovid donc, fit une promotion enthousiaste sur les réseaux sociaux de l'ouvrage de Matthieu Amiech, L'industrie du complotisme.

Écran Total et la revue l'Inventaire

Le groupe Écran Total annonce la couleur dès la première page de sa brochure, se vantant de ne pas respecter collectivement les pratiques de réduction des risques. Plus loin iels déclarent : « Nous appelons donc à désobéir au protocole prétendument sanitaire ; ce que nous faisons chacun à notre manière dans notre groupe. Cela signifie prendre le risque de tomber malade nous-mêmes, et que d'autres tombent malades, y compris les plus fragiles. »

Mais les éditions La Lenteur ont également publié une autre brochure, que Matthieu Amiech présenta en octobre 2022 à la fête des Faucheurs Volontaires : Basculement de Paul Kingsnorth, dont le titre original est The Vaccine Moment. Kingsnorth y déploie sa version de ce qu'il nomme « l'apartheid vaccinal », affirmant que « tout le scénario de la pandémie a été répété dans un wargame moins d'un an avant que cela n'arrive » et que « la pandémie de covid s'est avérée être l'expérience contrôlée parfaite pour le déploiement de la prochaine étape de l'évolution de la Machine ».

Matthieu Amiech présente Paul Kingsnorth comme un « écologiste anglais » oubliant de dire que Kingsnorth est un chrétien orthodoxe prosélyte qui dès 2008 se définissait lui-même comme « nationaliste » [16], montrant ensuite un véritable enthousiasme pour le Brexit et la victoire de Donald Trump [17]. Il a depuis pris des positions ouvertement antiféministes et anti-trans, et collabore régulièrement avec des média d'extrême-droite.

Les brochures d'Écran Total ont bénéficié d'une diffusion par l'intermédiaire de la revue L'Inventaire. La revue L'Inventaire, éditée par La Lenteur, est la principale revue du mouvement anti-industriel. Créée en 2014 et comptant aujourd'hui 12 numéros. On peut lire dans ses éditoriaux que « l'islamisme est un problème majeur » (n5/2017), ou qu'« on ne peut qu'éprouver gratitude et respect pour la laborieuse accumulation d'éléments permettant de reconstituer notre arrière-monde » par Pièces et Main d'Oeuvre, mais aussi qu'« il est important de pouvoir souligner partout que la dénonciation du “complotisme” sert d'abord à décourager la réflexion et la recherche d'information » (n11/2021).

À l'automne 2022, L'Inventaire livre dans son n°12 plusieurs « Recensions autour du Covid ». Raphaël Deschamps, membre du comité de rédaction de la revue, commence en nous invitant à lire les essais pandémiques de Giorgio Agamben (qui après avoir dénoncé « l'invention d'une épidémie » a comparé les non-vacciné·es aux « juifs sous le fascisme »), celui du chroniqueur du FigaroVox Matthieu Slama, ou L'idolâtrie de la vie du fasciste Olivier Rey.

Puis il dédie sa recension à tresser les louanges d'Alexandra Laignel-Lavastine et de son essai Le Covid-19 et le Culte de la vie par-dessus tout. Raphaël Deschamps oublie lui aussi de situer le propos de Laignel-Lavastine, raciste militante qui depuis des années multiplie les tribunes dans Valeurs Actuelles et le FigaroVox contre le « fascisme islamique » et la « sphère islamo-gauchiste » [18]. Le magazine libertarien-conservateur Atlantico, a publié des extraits de ce pamphlet contre le « sanitairement correct », promouvant « un essai puissant sans masque ni œillères », quand le Figaro se contente du qualificatif « brillant » [19]. Deschamps termine son texte en nous invitant, avec Laignel-Lavastine, à retrouver « le souci de l'âme » que « le monde de la technique s'est employé à marginaliser ».

Ces recensions se concluent sur un éloge dithyrambique s'étalant sur 6 pages que Raphaël Deschamps consacre à La Doxa du Covid, le recueil de Laurent Mucchielli. Dans ce recueil en deux tomes, Mucchielli réunit tout ce que la France compte de fans de Didier Raoult et d'habitué·es du blog trumpiste FranceSoir, ainsi que des auteur·ices de la maison d'édition radicalement climatonégationniste et identitaire, L'Artilleur [20]. Raphaël Deschamps quant à lui loue le « courage » de « Mucchielli et ses comparses » qui, en « scientifiques », ont « esquissé les contours d'un rapport moins frelaté au réel et à la vérité ».

Le numéro 13, annoncé pour septembre 2023, comprendra une note de lecture du best-seller anti-trans Dommages irréversibles d'Abigail Shrier et une « clinique » du film Petite fille par la psychanalyste Bénédicte Vidaillet.

Ce numéro s'ouvrira avec un article sur l'« écofascisme », signé par Paul Kingsnorth.

Bertrand Louart et le site Sniadecki

Cet article de Paul Kingsnorth intitulé « La vérité sur l'écofascisme » [21] a déjà fait l'objet d'une publication en janvier 2023 sur le principal site internet du mouvement anti-industriel, le site Sniadecki édité par Bertrand Louart [22]. Bertrand Louart est auteur de deux ouvrages aux éditions La Lenteur, qui publient également sa revue Notes & Morceaux choisis, mais aussi contributeur de L'Inventaire et animateur de l'émission Racine de Moins Un sur Radio Zinzine, quand il n'est pas occupé à harceler des gens sur Twitter sous le pseudonyme verlanisé de ‘Tranbert Harlou'.

Dans ce texte sans aucune consistance intellectuelle, Kingsnorth fait un amalgame complet entre l'usage de la notion d'« écofascisme » promu par des éditorialistes comme celleux du Figaro et de Valeurs Actuelles pour disqualifier toute remise en cause du productivisme industriel, et la conceptualisation de l'écofascisme portée par une partie de la gauche révolutionnaire pour analyser l'appropriation de thématiques écologistes par l'extrême-droite et les glissements fascisants d'une partie du mouvement écologiste.

Pour Kingsnorth « il est difficile de trouver un seul éco-fasciste dans le monde réel ». D'ailleurs « fasciste » est seulement une « injure gratuite et passe-partout », et l'« écofascisme » n'est qu'un moyen de faire taire « la mauvaise catégorie de défenseurs de l'environnement, c'est-à-dire à ceux qui nous offrent une vision de l'humanité et de la nature qui implique les racines, les traditions, la taille réduite, la simplicité, et un retour à des modes de vie antérieurs ». Vision qu'il fait sienne sans réserve. Comme pour Amiech, toute position écologiste qui refuserait cette approche est réduite par Kingsnorth à une allégeance à la « technocratie » portée par des « Verts-Machine ».

Ce texte de Paul Kingsnorth a été traduit par Annie Gouilleux, traductrice de plusieurs ouvrages aux éditions La Lenteur et d'articles pour L'Inventaire. En note, Annie Gouilleux nous informe que le texte orignal de Kingsnorth a été publié sur le site anglais UnHerd qu'elle présente ainsi : « "Unherd" signifie "inédit" ou ce qu'on ne vous dit pas ailleurs ; quotidien sur Internet dans lequel Kingsnorth publie des "week-end essays" ».

La réalité est que UnHerd, où Kingsnorth est donc chroniqueur, a été fondé par Tim Montgomerie, un militant libertarien-conservateur influent, un temps conseiller de Boris Johnson, et supporter du dirigeant antisémite Viktor Orban [23]. Contrairement à ce que laisse entendre Kingsnorth les partisans du Brexit comme Montgomerie ne sont pas des partisans du « local » mais de la dérégulation économique, environnementale et sanitaire, ainsi que de politiques patriarcales et racistes.

UnHerd, qui selon une stratégie typique de l'extrême-droite cherche à recruter des voix perçues comme venant de la gauche, a développé une ligne nationaliste-libertarienne qui publie des textes favorables au masculiniste pro-viol Andrew Tate, des interviews de Robert Kennedy Jr pour qui le Covid a été « ethniquement ciblé » pour épargner les Juif·ves, ou des articles ayant pour titre Le grand mensonge du changement climatique ou Le changement climatique n'est pas une catastrophe. Les attaques contre les personnes trans et contre les politiques de santé publiques sont des piliers de UnHerd [24].

Bertrand Louart a publié un autre texte de Paul Kingsnorth, traduit lui aussi par Annie Gouilleux : « L'abolition de l'homme (et de la femme ) ». Ce texte violemment transphobe, que Louart a rangé dans la catégorie « Transgenrisme » de son site, affirme notamment que « le concept “d'enfants trans” » est « une stratégie visant à reprogrammer la société » promue par « les médias, les élites culturelles, et un tas d'ONG généreusement financées » ainsi que « nombres de milliardaires ». Pour soutenir son propos Kingsnorth s'appuie sur le théologien conservateur Carl Trueman et l'éditorialiste de UnHerd Marry Harrington, qui a représenté le magazine aux conférences National Conservatism qui réunissent les grandes figures du néofascisme international, de Peter Thiel à Giorgia Meloni.

La présence d'un pamphlet anti-trans sur le site de Bertrand Louart n'a rien de surprenant. Celui-ci a multiplié les collaboration avec les militants anti-trans de DGR/Éditions Libre et Floraisons qui soutiennent ouvertement Dora Moutot et Marguerite Stern. Moutot et Stern sont deux militantes anti-trans reçues chaleureusement à l'Assemblée par la macroniste Aurore Bergé, qui s'affichent avec des fascistes tel que Julien Rochedy ou sur la chaîne youtube de l'équipe de campagne d'Eric Zemmour, Livre Noir. Alors que leur antiféminisme et leur transphobie étaient de notoriété publique, Jacques Luzi, Matthieu Amiech et Aurélien Berlan n'ont pas hésité à donné plusieurs heures d'entretiens au podcast Floraisons. Bertrand Louart est lui visible dans des extraits d'un film « co-produit par Floraison et Le Partage ». Deux média que Louart invite régulièrement dans son émission sur Radio Zinzine. Le Partage est un site animé par Nicolas Casaux, co-fondateur de DGR France et des Éditions Libre, connu pour sa transphobie virulente. C'est ainsi que le texte transphobe de Paul Kingsnorth est directement suivi sur le site de Louart d'une traduction par Nicolas Casaux d'un pamphlet anti-trans de Jennifer Bilek, ancienne de Deep Green Resistance passée à l'extrême-droite, qui promeut les théories antisémites du militant néonazi Keith Woods sur de prétendus liens entre « Transhumanisme et Judaisme » [25].

Quelques mois auparavant, en octobre 2022, Bertrand Louart publiait une recension élogieuse du Manifeste Conspirationniste signée par Nicolas Bonanni [26]. Si le livre est bâti sur la thèse que le virus est avant tout une « fiction », ou qu'il est parsemé d'affirmations sur les vaccins « aux effets secondaires si prometteurs », ou sur les personnes atteintes de Covid Longs qui « en vertu de l'effet nocebo, sont littéralement malades de solidarité » et donc somatiseraient leur maladie, ou bien qu'il nie purement et simplement l'antisémitisme qui a prospéré au sein du mouvement antipass/antivax ; tout cela, pour Nicolas Bonanni, « n'enlève rien aux qualités d'analyse du texte ». Il se félicite même que Coupat se soit enfin approprié les thèses de Pièces et Main d'Oeuvre, et conclu en s'inquiétant des capacités du pouvoir à « conquérir nos âmes ».

Nicolas Bonanni, contributeur de la revue L'Inventaire, est un des animateurs des éditions Le Monde à l'Envers qui a co-édité, avec La Lenteur, un livre du groupe Écran Total, et a également édité plusieurs figures du mouvement anti-industriel présentes sur le site Sniadecki comme Matthieu Amiech, TomJo ou le Groupe Grothendieck.

Le Monde à l'Envers avait également publié, en 2014, La reproduction artificielle de l'humain d'Alexis Escudero, un ouvrage qui avait eu un grand succès dans les rangs de la Manif pour Tous.

Jacques Luzi et Resistenze al Nanomondo

« Nous avons pris l'initiative, en 2014, de publier en feuilleton La reproduction artificielle de l'humain, dont nous avons réuni la documentation ; formulé le titre ; mâché les idées et les raisonnements ; que nous avons corédigé ; diffusé par voie électronique – avant la parution en livre dont nous avons également imaginé la couverture à la Andy Warhol. La seule chose que nous n'ayons pas faite dans ce livre étant de le cosigner » nous informent PMO dans leur contribution au numéro de la revue Écologie et Politique sortie à l'automne 2022, et intitulé Les Enfants de la Machine.

Ce numéro, dédié à la gestation et aux techniques afférentes, revendique fièrement son inscription dans la ligne définie par PMO et Escudero. Il a été coordonné par Mathias Lefebvre et Jacques Luzi (contributeur de L'Inventaire et auteur chez La Lenteur), qui sont les premiers à avoir introduit en France, dans les pages d'Écologie et Politique, des écrits de Paul Kingsnorth. Pour réaliser ce dossier Luzi et Lefebvre ont réunit les contributions d'Aurélien Berlan, Bertrand Louart, Michela Di Carlo et PMO, mais aussi de Renaud Garcia, Mélanie Guyonvarch, Gaëtan Flocco, et Silvia Guerini.

Dans leur introduction Lefebvre et Luzi dressent le tableau : « les technologies de PMA doivent être resituées dans le cadre général des recherches biomédicales qui, de la FIV à l'utérus artificiel et au clonage, en passant par les manipulations génétiques, s'évertuent à étendre à la reproduction les principes usuels de la domination industrialiste ». Contre l'industrialisme et son « geste totalitaire » il faut viser « l'émancipation de l'ensemble du genre humain de la cage d'acier formée par les macrosystèmes technologiques aliénants et destructeurs, plutôt que l'égalité des identités (nationale ou genrée ou ethnique). »

Mais qui est à la manœuvre pour intensifier ce totalitarisme ? Qui en constitue l'avant-garde ? Tou·tes les contributeur·ices semblent s'accorder : ce ne sont plus seulement les « technolesbiennes » que PMO pointait en 2004, mais plus largement les mouvements féministes et LGBTQ+.

Selon Silvia Guerini, figure importante du groupe Resistenze al Nanomondo, « les intérêts et les revendications du mouvement LGBTQ+ et du transféminisme en matière de reproduction convergent avec ceux du système technoscientifique et transhumaniste qui veut franchir l'une des dernières étapes pour s'emparer du processus de naissance et parachever son contrôle sur le vivant ».

Silvia Guerini a récemment approfondi son enquête en se demandant « Qui finance le mouvement LGBTQ ? » dans un article éponyme [27]. La réponse vient dès la première ligne : « Le financement du mouvement transféministe LGBTQ provient de certaines fondations et organisations, comme l'Open Society Foundations de George Soros ». Mais ce n'est pas tout, elle nous informe également que la fédération américaine des Planning Familiaux, en plus de faire du « commerce de tissus et d'organes » [28], a « lancé une campagne visant à remodeler les récits culturels sur la sexualité et la santé reproductive sur la base de la reproduction artificielle de l'humain. »

Elle conclut : « Ce n'est pas un mouvement populaire, c'est un projet d'élite, beaucoup d'argent est investi dans la promotion d'une condition corporelle dissociative qui nous détache de notre corps sexuel. La cause LGBTQ+ figure désormais en bonne place dans l'agenda des puissants. »

Resistenze al Nanomondo (RaN), qui comme Cudenec conseille la lecture d'Ernst Junger, anime le lieu La Piralide de Bergame ainsi que le journal L'Urlo della Terra (auquel PMO contribuent régulièrement), et ses liens avec les milieux néofascistes ont déjà été soulignés [29]. En avril 2021 RaN publiait un communiqué de soutien intitulé « Quand un tas de fumier est positif » [30]. Ce texte venait appuyer une action menée deux jours plus tôt : un tas de fumier avait été déversé devant l'entrée du centre social autogéré Paci Paciana, de Bergame également, une pancarte « Complices de la dictature sanitaire » plantée dedans.

RaN dans son texte de soutien à cette action, nous en donne les raisons, nous apprenant qu'elle était une réaction au fait que « le centre social Paci Paciana a lancé une campagne pour réaliser des tests de dépistage Covid gratuits dans son propre espace ». Ce qui pour RaN est éminemment problématique car « le but de cet étrange test appelé écouvillon va certainement au-delà de la recherche de la présence du SARS-CoV-2. On a affaire à de vrais grattoirs qui peuvent attraper, quoi ? l'ADN pour entamer le suivi du programme lié à cette pseudo pandémie. Tous enregistrés avec leur propre identité numérique qui va de pair avec notre code génétique et qui aura besoin de la technologie 5G pour permettre sa lecture. » Et puisque « maintenant c'est nous qui sommes ces épis de maïs OGM, [...] il est important d'indiquer clairement qui est complice et soutient ce techno-monde cybernétique et transhumaniste et, de fait, soutient et promeut haut et fort cette dictature sanitaire, surtout lorsque ces complicités proviennent d'une cyborg-gauche progressiste libérale arc-en-ciel. »

Mélanie Guyonvarch et Gaëtan Flocco, qui ont aussi écrit un article pour le numéro Les Enfants de la Machine, publiaient avec d'autres, à l'été 2022, un hommage au mouvement antivax de l'été 2021 dans la revue en ligne Terrestres, revue qui publie régulièrement des plumes du mouvement anti-industriel (Matthieu Amiech, François Jarrige, Raphaël Deschamps, Aurélien Berlan, Écran Total...). Ce pamphlet antivax et antimasque qui s'intitulait « Retour sur le passe vaccinal et son monde » était illustré par Terrestres d'une photo de troupeau de moutons, et prenait pour référence Laurent Mucchielli, dont Mélanie Guyonvarch, Gaëtan Flocco et Fabrice Colomb sont de fervents soutiens [31] et signataires de plusieurs de ses tribunes, dont « Une nouvelle religion vaccinale est née en Occident » (2021). Deux mois plus tard Terrestres publiait son propre éloge du Manifeste Conspirationniste, sous la plume d'un certain Bernard Aspe, qui tout en renvoyant dos à dos déni de cette « maladie de gravité modéré » que serait le Covid et déni « des effets secondaires de la vaccination », reconnaissait un « mérite à l'extrême-droite » tout en mettant en garde contre « les mouvements féministes ou décoloniaux » et leur « piège identitaire ».

Le contenu de ce numéro d'Écologie et Politique est si brutalement sexiste, transphobe et réactionnaire que des membres du comité de rédaction de la revue Écologie et Politique ont jugé bon de s'en distinguer en en publiant une critique dans Terrestres [32].

Paul Cudenec, présent à l'évènement de lancement des Enfants de la Machine, s'est scandalisé de ces critiques adressées à ses camarades. Il a donc publié une réponse, sous le titre « La Voix du Système », dans un magazine où il tient une chronique : Truthtalk, un site qui diffuse régulièrement des vidéos de Steve Bannon, ancien conseiller de Donald Trump et chef de file de l'internationale néofasciste [33].

Renaud Garcia et les éditions L'Échappée

Paul Cudenec n'est pas le seul à s'être élevé contre les critiques émises sur ce dossier d'Écologie et Politique. Jacques Luzi, coordinateur du dossier, a donné une interview à la revue Le Comptoir en réponse à la critique parue dans Terrestres. Dans cette interview, Jacques Luzi soutient notamment que « l'identité féminine se définit à partir de la capacité reproductive des femmes », mais aussi que « le Planning familial répand le lexique trans selon lequel le sexe est un “construit social” et “mâle/femelle”, “masculin/féminin”, sont des mots à bannir ». La critique émise par ses camarades du comité de rédaction est quant à elle qualifiée de procédé de « censure » typique de la « gauche industrialiste » et des « enragés transactivistes » [34].

Le mouvement anti-industriel a ses propres relais médiatiques. Le plus évident est le mensuel La Décroissance dirigé par le catholique Vincent Cheynet, et dont les positions profondément réactionnaires sont connues de longue date [35]. La Décroissance est très lié aux éditions L'Échappée : Cedric Biagini y est chroniqueur, de même que François Jarrige ; Patrick Marcolini et Guillaume Carnino y interviennent régulièrement, et Pierre Thiesset journaliste titulaire à La Décroissance est directeur de collection chez L'Échappée. La Décroissance donne donc régulièrement la parole au milieu anti-industriel, à PMO et aux auteur·ices de La Lenteur.

Mais si les protagonistes du mouvement anti-industriel sont également mis en avant dans Reporterre, ou des publications anarchistes plus confidentielles comme Réfraction ou À contretemps, c'est un autre hebdomadaire qui lui offre sa plus grande publicité hors des espaces militants. Il s'agit ici du magazine Marianne, dirigé par Natacha Polony, dont la ligne éditoriale polarisée par la dénonciation de « la tyrannie des minorités » a rendu son contenu indistinguable de celui de Valeur Actuelles [36]. Jacques Luzi, Matthieu Amiech, Aurélien Berlan, Bertrand Louart, mais aussi Cedric Biagini et Patrick Marcolini ont notamment eu les honneurs de ce magazine qui s'est fait le héraut de la lutte contre « les obsédés de la race, du sexe, du genre, de l'identité » et le porte-voix des campagnes anti-trans. Le Comptoir, qui est également un relai actif du mouvement anti-industriel, a d'ailleurs été fondé par Kevin Boucaud-Victoire - rédacteur en chef de la rubrique débats et idées de Marianne et ancien chroniqueur de la revue Limite - avec certains de ses camarades de Ragemag, webzine qui s'éteignit au bout de 2 ans « après avoir explosé toutes les limites de la décence, sexiste, raciste, islamophobe et antisémite » [37].

Renaud Garcia, contributeur actif de PMO et auteur phare des éditions L'Échappée (ainsi que membre d'Écran Total et auteur chez La Lenteur et L'Inventaire), semble être particulièrement apprécié par Le Comptoir et Marianne. Cela paraît logique tant à sa lecture on peine à trouver ce qui le distingue de la prose d'une Natacha Polony et de son combat contre les « nouveaux inquisiteurs » [38] que seraient les militant·es féministes, antiracistes et antifascistes.

En 2021 les éditions L'Échappée ont réédité Le désert de la critique de Renaud Garcia. Un livre initialement paru en 2015 où Garcia se livrait à un exercice de shadow-boxing assez gênant contre des figurines en papier mâché confectionnées à son usage : les « déconstructionnistes ». La nouvelle édition est agrémentée d'une préface inédite, et c'est tout le vocabulaire de Polony que l'on retrouve sous la plume de Garcia qui s'en prend lui aussi aux « nouveaux inquisiteurs » de « la nouvelle doxa de la lutte contre toutes les oppressions », comparant « les milices néoféministes actuelles » à la police politique stalinienne et les luttes antiracistes au totalitarisme orwellien de 1984. Partageant l'obsession de la directrice de Marianne pour les personnes trans, il assène que « l'accusation de transphobie est un cheval de Troie permettant à des hommes trans de prendre le contrôle de groupe de femmes », et se gausse du « souci de ne pas “mégenrer” les gens, autrement dit commettre une erreur d'identification en se fiant à l'évidence de sa perception. »

Dans Les Enfants de la Machine Renaud Garcia prolonge son propos dans un texte qu'il introduit ainsi : « Cet article développe une thèse avancée dans la préface à la réédition de mon livre Le désert de la critique, selon laquelle les militants [...] qui se rassemblent sous l'étiquette LGBTTQQIAAP, seraient les “agents d'acceptabilité sociale” du parti technologiste : les partisans d'un monde intégralement bureaucratisé, en accélération constante, dirigé par la caste de l'avoir, du pouvoir et du savoir ». Plus loin Garcia fait siennes les positions de Colette Chiland, psychiatre anti-trans qui en 2011 comparait le travail théorique de Judith Butler à l'idéologie nazi [39]. Enfin, se revendiquant d'un « matérialisme organique et vitaliste » il conclut lui aussi que « la technoscience » constitue « le front principal à dénoncer, par-delà la polarisation médiatique extrême droite réactionnaire vs gauche transgressive. »

Pour appuyer son propos Renaud Garcia évoque également un autre auteur important des éditions L'Échappée : Anselm Jappe. Ce chef de file de la ‘critique de la valeur' a publié en avril 2021 un pamphlet contre la PMA intitulé « Le droit à l'oncle » [40]. Selon Jappe « la PMA, dans toutes ses variantes, depuis la “simple” insémination artificielle jusqu'à l'implantation d'un embryon génétiquement modifié dans un utérus “loué” (gestation pour autrui), la greffe d'utérus, et jusqu'à l'utérus artificiel encore en voie d'élaboration, appartient au même monde que les centrales nucléaires et les pesticides, le clonage des animaux et l'amiante, la dioxine dans les poulets et le plastique dans les océans ». Ce texte, dans lequel Jappe trace un trait d'union entre le transhumanisme et la PMA qu'il rebaptise « zoologie médicalement assistée », a été salué par PMO qui, le qualifiant de « fidèle résumé » de leur propres positions, lui ont fait l'honneur de le republier sur leur site.

Mais ce n'est pas le seul point commun qu'Anselm Jappe partage avec PMO. En 2022 Jappe a vu l'un de ses écrits réfusé par la principale revue allemande de la ‘critique de la valeur'. La revue Exit !, dont il était un contributeur régulier. Dans cet article intitulé « Vous avez dit "dictature sanitaire" ? » [41] l'auteur de L'Échappée se livre à une charge azimutée contre l'« hystérie vaccinale », nous prédisant que bientôt le rappel vaccinal « sera administré chaque semaine, ou bien nous serons directement reliés à une perfusion continue. Et tout cela dès l'âge de cinq ans ». Pour Jappe cette dictature sanitaire représente « la plus grave restriction des libertés depuis 1945 ». De façon plus étonnante, Anselm Jappe ne se contente pas d'affirmer que « l'utilisation fanatique de la vaccination [...] vise essentiellement à créer un climat de soumission », d'apporter son soutien à Didier Raoult, ou de nier ouvertement le fait que les populations africaines n'ont quasiment pas eu accès aux vaccins, mais va jusqu'à soutenir que « le virus se moque de toutes les mesures et même de l'absence de mesures ». Ce qui le conduit à rejoindre le choeur de ses camarades anti-industriels, relativisant l'implication structurelle de l'extrême-droite dans les mouvements anti-prévention et répétant lui aussi que « l'accusation de théorie du complot est devenue un élément central du discours officiel et vise à étouffer dans l'œuf toute discussion sur les vérités étatiques et médiatiques. » Comme dans son texte sur la PMA, les points de vues contraires à celui qu'il soutient sont affublés des habits du « stalinisme ».

Les deux auteurs de L'Échappée semblent pleinement d'accord sur ce point. Renaud Garcia affirmant à Boucaud-Victoire, sur Le Comptoir, que le « militantisme “woke” » est « une résurgence totalitaire, dans le style des organisations de jeunesse staliniennes » [42]. Un point de vue partagé par les édition L'Échappée qui, pour présenter l'ouvrage de Garcia en quatrième de couverture, usent de mots qui rappellent étrangement les éléments de langage des chroniqueurs de CNews : « Les théories de la déconstruction, aujourd'hui portées par la culture “woke”, créent un climat de suspicion et d'intimidation inédit. Elles prospèrent sur le désert humain de la tyrannie des identités. »

Paul Cudenec est encore plus direct, intitulant un de ses récents articles :
« Woke is fascism »

Histoire de dix ans

Il y a dix ans la publication par les éditions L'Échappée du fasciste Charles Robin parmi les auteurs de Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques avait suscité un large mouvement de réprobation au sein des espaces de luttes. Mais bien que la réponse de la maison d'édition – intitulée « Les Éditions de L'Échappée appellent à la vigilance » [43] - se soit concentrée uniquement sur la présence de cet individu, les critiques émises à la sortie de cette publication pointaient des problèmes bien plus larges, comme la ligne générale de l'ouvrage et le pedigree des auteurs sélectionnés pour ce petit panthéon « radical », ainsi que celui de certains contributeurs.

De nombreuses personnes s'étaient étonnées que cette sélection de « penseurs radicaux vraiment critiques » par une maison d'édition se revendiquant du mouvement libertaire comporte un certain nombre d'auteurs très difficilement situables dans le camp révolutionnaires. Le profil de certains d'entre-eux retenait particulièrement l'attention, et il peut-être intéressant de voir ce qu'ils sont devenu depuis cette année 2013.

Guillaume Carnino, co-fondateur de L'Échappée, livrait un papier sur Dany-Robert Dufour. En 2013, Dufour est un ancien directeur de programme au Collège international de philosophie qui s'est spécialisé, comme une bonne part des ‘radicaux' sélectionnés par L'Échappée, dans la critique du « libéralisme culturel », présenté par lui comme un « totalitarisme antiautoritaire » imposant la « désymbolisation » de la « religion du Marché », qui mène notamment au « transexualisme ». Son livre L'individu qui vient, paru en 2011, contient des pages d'une rare violence mysogine, homophobe et transphobe. Cette « critique du libéralisme culturelle » lui a valut des hommages appuyés de la part du néofasciste Alain de Benoist dès 2006 [44]. Dans les années 2010 Dufour a endossé le costume de l'intellectuel qui ne-peut-plus-rien-dire alors que ses ouvrages étaient réédités en poche chez Gallimard, se plaignant en 2017 auprès de Boucaud-Victoire d'être « classé parmi les néoréactionnaires » [45].

Plus récemment, en 2020 et 2021, Dufour a donné des conférences au Cercle Aristote, un thinktank « souverainiste » mené par Pierre-Yves Rougeyron, animateur à la webtv fasciste TVLiberté et président de l'association "Les Amis d'Eric Zemmour". En 2021 il a également publié Fils d'anar et philosophe chez la maison d'édition néofasciste R&N, un livre biographique basé sur des entretiens menés par Thibault Isabel, ancien rédacteur en chef de Krisis et ancien collaborateur d'Éléments, deux revues néofascistes fondées par Alain de Benoist. C'est d'ailleurs dans les colonnes d'Éléments que Dufour a donné une interview pour promouvoir son récent pamphlet anti-trans Le phénomène trans. En 2013, dans les notices biographiques de Radicalité on pouvait également prendre connaissance du fait que Dany-Robert Dufour était alors le directeur de thèse de Charles Robin.

Le texte sur Pier Paolo Pasolini avait quant à lui été confié à Olivier Rey, philosophe et mathématicien. Olivier Rey était en 2013 déjà connu pour son implantation dans les milieux catholiques conservateurs et traditionalistes. Il avait publié dans la revue catholique Étvdes, fondée par la Compagnie de Jésus, des articles au titres évocateurs comme « L'homme originaire ne descend pas du singe », il avait également donné un prêche anti-trans lors de la Conférence de Carême à Notre-Dame de Paris en mars 2011, et il était membre d'honneur de l'association Cosette et Gavroche créée en octobre 2012. « Dès le début d'octobre 2012, l'association Cosette et Gavroche a lancé une grande manifestation à Lyon le 17 novembre qui a été le point de départ du mouvement français La Manif Pour Tous », peut-on lire sur le site de l'association.

Mais c'est peut-être la lecture d' Une folle solitude, Le fantasme de l'homme auto-construit, publié en 2006 par Olivier Rey, qui avait décidé cette maison d'édition anarchiste a inviter cet auteur. Dans ce vibrant plaidoyer en faveur de l'autorité et de la tradition on peut en effet lire que « dans un cosmos hiérarchiquement ordonné, prendre place dans une hiérarchie, fût-ce au plus bas degré, n'était pas uniquement servir : c'était également s'inscrire dans le monde, participer à son ordre, ainsi “il faut de tout pour faire un monde” : des puissants et des humbles, jouant chacun leur partition, participant à la plénitude ordonnée du cosmos social ». En septembre 2013, deux mois avant la parution de Radicalité, Olivier Rey publiait lui aussi dans la revue Krisis d'Alain de Benoist [46].

Conférences pour le Cercle Aristote ou pour le lobby anti-IVG Alliance Vita, apparitions sur TV Liberté, contributions aux magazines Éléments et Krisis, préfaces pour les éditions R&N… Il serait impossible de recenser toutes les collaborations d'Olivier Rey avec des organes néofascistes depuis 2013 tant elles sont nombreuses. Relevons-en simplement quatre : en 2017 Olivier Rey fera partie du comité de rédaction de L'Incorrect, magazine dirigé par Jacques de Guillebon, co-fondateur de Limite et proche de Marion Maréchal-Le Pen, et financé par le thinktank néofasciste L'Avant-Garde [47]. L'Incorrect, L'Avant Garde, Marion Maréchal et tous ceux qui constitueront la base de la campagne électorale d'Eric Zemmour organiseront en 2019 la « Convention de la droite » : Olivier Rey y donnera une conférence intitulée « Seuls les peuples enracinés résistent à l'effondrement ». En 2021 et 2023 Olivier Rey inteviendra au colloque annuel du thinktank néofasciste l'Institut Iliade. Enfin, en 2022, Oliver Rey participera à un débat organisé par la revue Éléments à propos du « Grand Remplacement », en tête à tête avec le principal promoteur de cette théorie, Renaud Camus.

Cette trajectoire politique marquée par la constance et dépourvue d'ambiguïté n'a en rien empêchée Bertrand Louart de publier plus d'une dizaine de textes d'Olivier Rey sur son site entre 2014 et 2019, ni le collectif Technologos, proche du mouvement anti-industriel, d'inviter Olivier Rey à donner une conférence intitulée « La décivilisation numérique » lors de leurs assises annuelles de 2017. Cette journée d'assises était introduite par François Jarrige et les vigilants éditeurs de L'Échappée, Guillaume Carnino et Cédric Biagini.

Beaucoup à la sortie de Radicalité se sont étonné·es du fait que les éditeurs ne semblaient pas se poser une seconde la question de ce qui avait permis à un texte rédigé par un fasciste d'être validé par leur soin, ni sur le ‘penseur' à qui ce texte était consacré - Jean-Claude Michéa - qui était loin d'avoir une place marginale dans le livre, en en constituant au moins une boussole [48]. Et c'est la présence de Michéa lui-même qui ne laissait pas d'interroger, indépendamment du fait que sa présentation ait été faite par un fasciste. Cette incompréhension était-elle simplement dû au fait que des personnages comme Marine Le Pen ou Eric Zemmour présentait déjà à l'époque Jean-Claude Michéa comme leur auteur de chevet ? Ou bien à celui que Michéa avait dès 2001 co-signé un livre - Les Valeurs de l'homme contemporain - avec Alain Finkielkraut et Pascal Bruckner, et, à la manière de Renaud Garcia, se saisissait de la moindre occasion pour couvrir de mépris la « lutte contre toutes les discriminations » ?

Peut-être les éditeurs de L'Échappée n'avaient-ils pas eu le temps de lire le dernier ouvrage de Michéa paru en mars 2013 – Les Mystères de la gauche - dans lequel il faisait dépendre « toute culture authentique » des « frontières géographiques », et le « véritable internationalisme prolétarien » de « ses fondements patriotiques et communautaires ». Peut-être la lecture de L'Empire du moindre mal paru en 2007, où Michéa faisait de l'« extrême gauche » et du Réseaux Éducation Sans Frontière l'avant-garde du Capital et de ce qu'il appelle son « sans-frontiérisme », était quant à elle trop lointaine [49].

Prenons-donc un ouvrage ni trop proche ni trop loin de 2013 dans la littérature éminemment rébarbative de Jean-Claude Michéa : Le Complexe d'Orphée, paru en 2011. Dans ce livre, qui a pour base sa thèse répétée ad nauseam que le Capital serait bâtit sur la symbiose du libéralisme économique de la droite et du libéralisme culturelle de la gauche (bref de la droite du travail et de la gauche des valeurs), Michéa consacre l'ensemble de l'ouvrage à attaquer l'« illimitation » et le « refus du passé », proprement « libéraux », de « la gauche et de l'extrême-gauche » [50].

C'est ainsi qu'il attaque une gauche coupable selon lui de combattre « tous les signes d'une vie collective enracinée dans une culture particulière » et de « célébrer à l'infini la transgression de toutes les limites morales et culturelles léguées par les générations antérieures ». « L'univers liquide dont rêvent Badiou, le Medef et les “sans-frontiéristes” » conduirait, toujours selon Michéa, au « déracinement généralisé » et à une « conception désincarnée (ou transgenre) de l'universel ». Il défend donc la vision d'« une société socialiste décente » qui devra « maintenir un secteur privé et, par conséquent, un nombre, probablement important, d'entreprises privées », pour lutter contre « le capitalisme sans frontières – machine dont les élites déracinées, incultes et perpétuellement mobiles s'emploient, depuis maintenant des décennies, à dissoudre la prodigieuse diversité des civilisations existantes ». Cela l'amène à consacrer plusieurs pages à la défense d'Eric Zemmour face à ce qu'il nomme « la police de la pensée ».

Sa thèse majeure, celle d'une gauche congénitalement « libérale », repose sur une source principale, citée dès la première page de l'ouvrage : une « étude magistrale », d'un certain Marc Crapez, paru en 2009, dans la revue Krisis. Celle d'Alain de Benoist.

Comment un Charles Robin ne serait-il pas à son aise dans une pensée aussi furieusement nationaliste et saturée de schèmes antisémites ? Mais surtout, comment cette pensée raciste et patriarcale a pu se diffuser autant et devenir matricielle au cours des années 2000 dans certains milieux anarchistes, alors que la seule chose que Michéa ait en commun avec l'anarchisme est l'usage du mot dans le titre d'un de ses livres ?

Dans les années qui suivirent, Kevin Boucaud-Victoire déclarera dans les colonnes de Limite que « Le livre Radicalité : 20 penseurs vraiment critiques publié par L'Échappée en 2013 est presque une Bible pour nous ».
Alain de Benoist confiera que « dans le paysage intellectuel français, celui dont je me sens le plus proche, c'est quand même Jean-Claude Michéa ».
Et Charles Robin écrivit pour la revue Krisis un papier intitulé La sagesse anarchiste.

Faire face à nos responsabilités

Vous en conviendrez aisément, cette histoire n'a que trop duré. La tâche étant des plus pénibles, elle ne pouvait être réalisée à moitié. Concluons cette traversée d'un naufrage en compagnie de celui qui l'a inaugurée, le contributeur de la revue Brasero, Paul Cudenec, qui quelques semaines à peine après la sortie de la revue des éditions L'Échappée publiait un nouvel ouvrage intitulé Les Ennemis du Peuple : les Rothschilds et leur Empire Global corrompu [51].

En juillet 2023 PMO invitent leurs lecteur·ices à se rendre aux rencontres estivales annuelles de leurs ami·es de Resistenze al Nanomondo [52]. Du 27 au 29 juillet des conférences et animations sont programmées lors de ces « trois jours contre la techno-science ». Vincent Cheynet, Jacques Luzi et Paul Cudenec y sont programmés comme conférenciers. Le samedi 28 Jacques Luzi fait donc un exposé sur « Biotechnologie, PMA et eugénisme » tandis que Vincent Cheynet se demande s'il « existe une matrice du "phénomène trans", du transhumanisme, du transsexualisme ? » [53].

La veille ils ont pu assister à la projection d'Infertilité : un plan diabolique, un « documentaire » réalisé par la star historique des mouvements antivax Andrew Wakefield, et produit par Robert Kennedy Jr, figure importante du mouvement antisémite Qanon et candidat libertarien à la présidentielle américaine, ayant reçu le soutien public des milliardaires Jack Dorsey et Elon Musk. Ce « documentaire » diffusé par le lobby Children's Health Defense, dirigé par Kennedy, affirme qu'après que l'OMS « sous le couvert d'un programme de vaccination contre le tétanos, a conduit à la stérilisation de millions de femmes en Afrique », désormais « les vaccins génétiques contre le Covid-19 sont susceptibles de provoquer la stérilité des femmes dans le monde entier. »

Paul Cudenec, quant à lui, donne une conférence intitulée « Faire la lumière sur le climat de manipulation ». Dans celle-ci il développe la thèse que, selon lui, « le fait que les mouvements pour la “justice climatique” et les “droits des trans” soient des faux drapeaux pour les intérêts financiers des entreprises n'est pas une coïncidence, mais fait partie d'un plan systématique et de grande envergure ». Il ouvre son propos en avançant qu'il est difficile de trancher entre la position d'une certaine Cory Morningstar « selon laquelle le changement climatique d'origine humaine est bien réel, mais qu'il a été systématiquement exploité à des fins nettement non écologistes par le capitalisme mondial », et celle de « l'affable scientifique anglais » Piers Corbyn qui « affirme qu'il n'y a pas de réchauffement climatique provoqué par l'homme » [54].

⁂ ⁂ ⁂

Ces dix dernières années ont vu progresser de manière fulgurante l'extrême-droite internationale et les dynamiques réactionnaires et autoritaires, propulsées par les ravages de l'offensive capitaliste néolibérale. Tout en maquillant leur antisémitisme constitutif sous un anticapitalisme de pacotille et les artifices langagiers anciens de l'« élite mondialiste » ou de l'« oligarchie mondiale », les fractions d'extrême-droite de la bourgeoisie ont capitalisé pendant des années sur l'intensification de l'islamophobie extérieure et intérieure. Réussissant ainsi à capter une partie des angoisses d'une classe moyenne blanche en voie de paupérisation.

La pandémie de Covid-19 a été l'occasion d'élargir considérablement leur audience bien au-delà des sympathisants sensibles de prime abord aux discours racistes, tout en revitalisant un antisémitisme et un eugénisme décomplexé. À travers certains de leur représentants à la tête de puissances capitalistes mondiales comme Trump, Bolsonaro, Modi ou Johnson, mais aussi par la construction d'une myriade de mouvements fascisants comme Réinfocovid, iels se sont battu.es pour promouvoir l'infection de masse, pour l'abandon des personnes vulnérables, surreprésentées parmi les classes populaires et racisées, pour que prévale « la loi de la nature » et du profit, pour retrouver l'ancienne normalité. Appuyant ainsi le programme porté par le néolibéralisme de destruction continue des systèmes de solidarité et de toute forme d'autodéfense populaire.

Une fois les dommages de la pandémie invisibilisés et naturalisés par les néolibéraux grâce aux outils forgés par l'extrême-droite libertarienne, les fractions d'extrême-droite de la bourgeoisie, fortes d'arrivées nombreuses dans leurs rangs, ont relancé de nouvelles offensives. Certaines de ces offensives se sont concentrées d'abord sur les personnes trans, selon la stratégie typique de l'extrême-droite de s'en prendre d'abord aux personnes les plus fragilisées socialement. À travers les personnes trans c'est l'ensemble des minorités de genres et de sexualités, le mouvement féministes, et les droits reproductifs qui sont visés pour y opposer l'orde supposément « naturel » de la famille. En témoigne les violentes vagues d'attaques, en France et à l'international, contre le Planning Familial et le droit à l'avortement au cours de l'année 2022. Ces attaques ont été portées par l'extrême-droite historique ainsi que par la multitude de nouveaux satellites créés dans les premières années de la pandémie.

Enfin cette campagne contre les personnes trans et le féminisme, qui reprend bien des éléments de l'antisémitisme (le mythe de la minorité privilégiée, celui du « Lobby » tentaculaire, quand ce n'est pas directement des listes de personnes juives), a trouvé à se prolonger dans l'offensive plus générale et continue de l'extrême-droite contre les luttes d'émancipation, cette fois-ci affublée des oripeaux d'un vocable tout droit emprunté aux forces néofascistes américaines : le « wokisme ». Derrière l'épouvantail du « wokisme » agité par les partisans autoritaires de la reproductions des hiérachies sociales, c'est l'éternelle opération d'étouffement des luttes populaires contre les dominations capitalistes, coloniales et patriarcales, qui se rejoue (pour les épisodes précédents voir « islamo-gauchisme », « politiquement correcte », « dictature des minorités »).

Dans un contexte mondial où s'entrelacent crises écologiques, économiques, pandémiques et géopolitiques, l'ordre suprémaciste, patriarcal et eugéniste vendu par l'extrême-droite internationale qui a déjà conquis de larges pans de la bourgeoisie séduit des secteurs importants de la classe moyenne qui espèrent retrouver l'ancienne normalité. Hier comme aujourd'hui les fractions d'extrême-droite de la bourgeoisie recrutent en ouvrant des fronts, en menant des offensives, en surjouant la révolte. Une révolte pour enraciner et renforcer l'ordre dominant.

⁂ ⁂ ⁂

Comme nous l'avons vu, et aussi hallucinant que cela puisse paraître, depuis plusieurs années le mouvement anti-industriel a relayé chacune de ces offensives au sein même des espaces de luttes. Comme nous l'avons vu également, Pièces et Main d'Oeuvre, loin d'avoir été marginalisé·es par leurs sorties racistes, anti-trans, homophobes et anti-féministes sont au contraire reconnu·es et valorisé·es par l'ensemble de ce mouvement. PMO n'est pas l'exception mais la norme.

Le refus d'analyser et combattre la multiplicité des systèmes de domination qui structurent le capitalisme au profit d'une vision indigente opposant un sujet soi-disant unifié – les humain·es ou les vivant·es – face au « technototalitarisme » produit un terreau hautement favorable à la naturalisation des hiérarchies sociales. D'autant plus quand cela croît dans une atmosphère d'essentialisation et de fascination pour « la Nature », désormais vendu sous l'emballage du « Vivant ». Nous n'avons nul besoin de ces impasses essentialistes et autoritaires pour mener une critique conséquente du capitalisme industriel.

Quand des acteur·ices se revendiquant de l'anarchisme et des luttes populaires travaillent activement a importer des logiques autoritaires et réactionnaires au sein des espaces de luttes, alors même que l'extrême-droite devient chaque jour plus hégémonique, cela provoque une porosité avec le pire, des divisions dans les collectifs de lutte, et mène à un affaiblissement général porteur des plus grands dangers.

Tout cela devrait constituer un signal d'alarme fort et pousser l'ensemble des acteur·ices des luttes populaires d'émancipation à ne pas seulement « appeler à la vigilance » mais à s'organiser concrêtement pour qu'aucune passerelle ne soit établie entre nos mouvements et des courants antisémites, antitrans, racistes, validistes, antiféministes, nationalistes, et les personnes qui pourraient être complaisantes à leur égard.

De toute urgence, il nous faut élever des digues.
Chacun·e doit faire face à ses responsabilités.

Août 2023

Bibliographie

[Podcast] Bilan critique du courant anti-industriel, Zoom Ecologie, novembre 2022, paris-luttes.info [https://paris-luttes.info/podcast-bilan-critique-du-courant-16402]

Sur la dérive réactionnaire de certain·es « compagnon·nes », Des anarchistes, août 2021, mars-infos.org [https://mars-infos.org/sur-la-derive-reactionnaire-de-5879]

Ce que les queers ont à dire de la technique. Repenser la technocritique à partir d'expériences minoritaires, Cy Lecerf Maulpoix, octobre 2022 Revue du Crieur 21 [https://www.cairn.info/revue-du-crieur-2022-2-page-108.htm]

Masculinisme : Quand les femmes « oppressent » les hommes, Anaïs et Benoit, mai 2020, UCL [https://www.unioncommunistelibertaire.org/Masculinisme-Quand-les-femmes-oppressent-les-hommes]

· Pièce et Main d'Oeuvre

Pièce et main d'oeuvre, dérive à l'extrême droite, décembre 2021, labogue.info [https://labogue.info/spip.php?article1139]

Le coming out masculiniste de Pièces et main d'oeuvre, Collectif Stop-Masculinisme, janvier 2015, infokiosques.net [https://infokiosques.net/spip.php?article1741]

Critique radicale du collectif Pièces et main d'œuvre. A propos du texte « Ceci n'est pas une femme (à propos des tordus queer) », mais 2021, lepoing.net [https://lepoing.net/critique-radicale-du-collectif-pieces-et-main-doeuvre-a-propos-du-texte-ceci-nest-pas-une-femme-a-propos-des-tordus-queer2/]

Dossier sur « le glissement de PMO vers des positions homophobes, anti-féministes et réactionnaires », Timult 8, septembre 2014 [https://timult.poivron.org/08/]

Contre PMO et son monde, juin 2022, Indymedia Lille [https://lille.indymedia.org/spip.php?article34769]

· Sur l'ouvrage Radicalité, ses contributeurs et Jean-Claude Michéa

Commentaires sur l'ouvrage collectif « Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques », Max Vincent, mars 2014 [http://lherbentrelespaves.fr/index.php?post/2014/03/19/Commentaires-sur-l-ouvrage-collectif-Radicalit%C3%A9%2C-20-penseurs-vraiment-critiques]

A propos du réac Jean-Claude Michéa (alias Nietzschéa), des Editions l'Echappée et de leur « vigilance »... en carton pâte, novembre 2013, mondialisme.info [https://web.archive.org/web/20210512120834/http://www.mondialisme.org/spip.php?article1990]

Conversation sur les spécialistes radicaux des penseurs radicaux, Radio Vosstanie, novembre 2013 (retranscription février 2014) [https://vosstanie.blogspot.com/2014/02/conversation-sur-les-specialistes.html]

Contre la récupération de l'écologie par l'extrême droite (sur Olivier Rey), mai 2020, paris-luttes.info [https://paris-luttes.info/contre-la-recuperation-de-l-13536]
L'union radicale conservatrice et ses limites, Ève Gianoncelli, septembre 2020, Mots [https://journals.openedition.org/mots/26632]

Au nom du peuple. J-C. Michéa réécrit l'histoire, Isabelle Garo, janvier 2015, Contretemps [https://www.contretemps.eu/au-nom-du-peuple-j-c-michea-reecrit-lhistoire/]

Critique radicale de Michéa : glorification de la valeur d'usage, critique tendancieuse du libéralisme culturel, récupération par les rouges-bruns, Benoit Bohy Bunel, mai 2017 [http://benoitbohybunel.over-blog.com/2017/05/critique-radicale-de-michea-glorification-de-la-valeur-d-usage-critique-tendancieuse-du-liberalisme-culturel-recuperation-par-les-ro]

« Vous connaissez Michéa ? » : quelques rappels fondamentaux à propos de l'idéologie du site Ragemag, Noe Clectic, octobre 2021, Lignes de crête [https://www.lignes-de-cretes.org/vous-connaissez-michea-quelques-rappels-fondamentaux-a-propos-de-lideologie-du-site-ragemag-ragemag-episode-1/]

· Sur l'offensive anti-trans

L'offensive anti-trans est un cheval de Troie contre les droits des femmes, Toutes Des Femmes, Nous Toutes et Le RAAR, novembre 2022, tribune médiapart [https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/171122/l-offensive-anti-trans-est-un-cheval-de-troie-contre-les-droits-des-femmes]

Planning familial : les anti-trans, « cautions progressistes » des réacs, Pauline Bock, septembre 2022, Arrêt sur images [https://www.arretsurimages.net/articles/planning-familial-les-anti-trans-cautions-progressistes-des-reacs]

[Video] Comment la droite réactionnaire construit une « question trans » ?, Toutes de Femmes et XY Media, juin 2022 [https://toutesdesfemmes.fr/comment-la-droite-reactionnaire-construit-une-question-trans/]

Comment l'extrême-droite transforme les féministes en fascistes, Jude Ellison S. Doyle, traduction juillet 2022, Blog des Potates [https://blog.potate.space/comment-lextreme-droite-transforme-les-feministes-en-fascistes/]

Trans n'est pas transhumanisme, Alex B, octobre 2018, Infokiosques.net [https://infokiosques.net/spip.php?page=lire&id_article=1805]

L'éradication des « abstractions talmudiques » : l'antisémitisme, la transmisogynie et le projet nazi, Joni Alizah Cohen, juin 2019, Contretemps [https://www.contretemps.eu/antisemitisme-transmisogynie-nazisme/]

Compte-rendu de Dommages irréversibles d'Abigail Shrier, mai 2022, Blog des Potates [https://blog.potate.space/review-livre-transphobe-shrier/]

· La Décroissance, Floraisons, DGR, Editions Libre, Paul kingsnorth, Le Comptoir…

La Décroissance : quand le « journal de la joie de vivre » courtise la fachosphère, Aude Vidal, avril 2021, blog médiapart [https://blogs.mediapart.fr/audevidal/blog/300421/la-decroissance-quand-le-journal-de-la-joie-de-vivre-courtise-la-fachosphere]

La Décroissance, ce journal que nous n'achèterons pas, juillet 2019, rebellyon.info [https://rebellyon.info/La-decroissance-ce-journal-que-nous-n-20957]

Pas d'éco-terfs dans nos luttes ! Floraisons et DeepGreenResistance ne viendront pas à la Maison de l'écologie, ni ailleurs !, novembre 2022, rebellyon.info [https://rebellyon.info/Pas-d-eco-terfs-dans-nos-luttes-24294]

Nicolas Casaux et la transphobie par Peter Gelderloos, novembre 2019, rebellyon.info [https://rebellyon.info/Nicolas-Casaux-et-la-transphobie-par-21327]

Deep Green Resistance, des réactionnaires à l'assaut de l'écologisme français, janvier 2019, Revolutionnary Democracy [https://revolutionarydemocracy.wordpress.com/2019/01/24/deep-green-resistance-des-reactionnaires-sinfiltrant-dans-le-mouvement-ecologiste-francais/]

L'imposture Deep Green Resistance, juillet 2022, le-social.club [https://www.le-social.club/limposture-deep-green-resistance-partie-1-un-reseau-meconnu/]

Pourquoi Expansive suspend la publication des articles proposés par Deep Green Resistance, janvier 2022, expansive.info [https://expansive.info/Pourquoi-Expansive-suspend-la-publication-des-articles-proposes-par-Deep-Green-3049]

Les mensonges de la terre, Contre l'écologie völkisch de Paul Kingsnorth, Collectif Out of the Woods, mars 2017, traduction publiée en 2023 dans L'utopie maintenant !, éditions Présence(s) [texte original :https://libcom.org/article/lies-land-against-and-beyond-paul-kingsnorths-volkisch-environmentalism]

Écologie transphobe et proto-fascisme (de Paul Kingsnorth), John Halstead, mars 2023, cric-grenoble.info [https://cric-grenoble.info/analyses/article/ecologie-transphobe-et-proto-fascisme-2891]

· Réinfocovid

Qui sont les animateurs de Reinfocovid ?, juin 2021, La Horde [https://lahorde.samizdat.net/Qui-sont-les-animateurs-de-Reinfocovid]

Lettre à propos de ReinfoCovid, mai 2021, paris-luttes.info [https://paris-luttes.info/lettre-a-propos-de-reinfocovid-15012]

À propos de la projection du film « Tous résistants dans l'âme », février 2023, iaata.info [https://iaata.info/A-propos-de-la-projection-du-film-TOUS-RESISTANTS-DANS-L-AME-5698.html]


[1] Commentaires sur l'ouvrage collectif « Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques », Max Vincent, mars 2014 (Lien en Bibliographie)

[2] De la popullulation, PMO, novembre 2004 [www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=resume&id_article=19]

[3] La notion de « mouvement anti-industriel » est employée par Miguel Amoros et Renaud Garcia (in Le Désert de la critique) quand Patrick Marcolini parle lui de « mouvance anti-industrielle » : « la mouvance qu'on nomme – en fait, qui se nomme elle-même – « anti-industrielle  » » [sniadecki.wordpress.com/2023/06/14/marcolini-ancre/]

[4] Fascism Rebranded : Exposing the Great Reset, juillet 2021, Winter Oak ; Who's behind the fake-left vaccine gang ?, octobre 2021, Winter Oak ; Klaus Schwab and his great fascist reset, octobre 2020, Winter Oak

[5] Voir notamment Klaus Schwab and his great fascist reset, octobre 2020, Winter Oak ; Controlling the left : the impact edgenda, février 2021, Winter Oak ; The Great Reset Phase 2 : War, mars 2022, Winter Oak ; Who's behind the fake-left vaccine gang ?, octobre 2021, Winter Oak.

[6] Voir Canada : the “anarchists” who hate freedom uprisings, février 2022, Winter Oak ; Resistance : rupture and rebirth, février 2022, Winter Oak ; France rises up against the new fascism, juillet 2021, Winter Oak ; Liberté ! Résistance ! A photo-report from France, juillet 2021, Winter Oak

[7] La Rose Blanche : de l'extrême-droite à l'agonie populaire, Ricardo Parreira, juillet 2021, La Mule du Pape [https://www.lamule.media/2021/07/30/la-rose-blanche-de-lextreme-droite-a-lagonie-populaire/] ; La Rose Blanche, la décadence d'un réseau Qanon, Ricardo Parreira, janvier 2022, La Mule du Pape [www.lamule.media/2022/01/10/la-rose-blanche-la-decadence-dun-reseau-qanon/] ; Qui sont les animateurs de Reinfocovid ?, juin 2021, La Horde [lahorde.samizdat.net/Qui-sont-les-animateurs-de-Reinfocovid]

[8] Our insurrection will be impure !, Paul Cudenec, février 2022, Winter Oak

[9] Un « Manifeste conspirationniste » attribué à Julien Coupat publié par l'extrême droite allemande, Maxime Macé, Pierre Plottu, Libération [www.liberation.fr/politique/un-manifeste-conspirationniste-attribue-a-julien-coupat-publie-par-lextreme-droite-allemande-20230208_PTWS2TML3RDCZO2E2SZAIQG7MU]

[10] Dialogo tra Resistenze al nanomondo e Paul Cudenec, juillet 2022, L'Urlo de la Terra [www.resistenzealnanomondo.org/necrotecnologie/dialogo-tra-resistenze-al-nanomondo-e-paul-cudenec/] ; Version anglaise : Resisting techno-tyranny : a dialogue, décembre 2022, Winter Oak [winteroak.org.uk/2022/12/02/resisting-techno-tyranny-a-dialogue/]

[11] Rapiécer le monde. Les éditions La Lenteur contre le déferlement numérique, François Jarrige, novembre 2019, Terrestres [www.terrestres.org/2019/12/20/rapiecer-le-monde-les-editions-la-lenteur-contre-le-deferlement-numerique/]

[12] Site Sniadecki : ‘Matthieu Amiech, L'Industrie du complotisme', juillet 2023 [sniadecki.wordpress.com/2023/07/06/amiech-complotisme/]

[13] Contre l'islamisme, ni “Causeur” ni “Crieur”, Matthieu Amiech, octobre 2016, Le Monde.

[14] Matthieu Amiech : « La gestion de la crise sanitaire nous entraîne vers une société-machine », Amélie Poinssot, mars 2021, Médiapart [www.mediapart.fr/journal/ecologie/130321/matthieu-amiech-la-gestion-de-la-crise-sanitaire-nous-entraine-vers-une-societe-machine]

[15] Morts du Covid-19 : la pauvreté, une comorbidité sous-estimée, Antoine Beau, avril 2021, HuffingtonPost [www.huffingtonpost.fr/science/article/morts-du-covid-19-la-pauvrete-une-comorbidite-sous-estimee_179766.html] ; Covid-19 : excès de mortalité parmi les immigrés, Myriam Khla, Walid Ghosn, Michel Guillo, Stéphanie Vandentorren, juin 2023, Plein droit [www.cairn.info/revue-plein-droit-2023-2-page-10.htm]

[16] So, is it all right to be an English nationalist ?, Paul Kingsnorth, avril 2008, The New Statesman [www.newstatesman.com/long-reads/2008/04/english-england-british]

[17] Les mensonges de la terre, Contre l'écologie völkisch de Paul Kingsnorth, Collectif Out of the Woods, mars 2017 (Lien en Bibliographie)

[18] Le déni idéologique du réel sera le plus difficile à abattre, Alexandra Laignel-Lavastine, décembre 2015, Valeurs Actuelles ; Face à l'islamisme, certains intellectuels « progressistes » sont dangereux, Alexandra Laignel-Lavastine, juin 2015, FigaroVox

[19] « La Déraison sanitaire » d'Alexandra Laignel-Lavastine : un essai puissant sans masque ni oeillères, décembre 2020, Atlantico ; Confinement : « Nos héritiers nous reprocheront notre irresponsabilité », Alexandre Devecchio, novembre 2020, Le Figaro

[20] Covidoscepticisme, Vichy et déni climatique : la recette des éditions de L'Artilleur, François Vaneeckhoutte, avril 2023, Libération [www.liberation.fr/checknews/covidoscepticisme-vichy-et-deni-climatique-la-recette-des-editions-de-lartilleur-20230407_VOTANWQR6JGFFNKX6EWZUMC6UI/]

[21] La vérité sur l'écofascisme, Paul Kingsnorth, janvier 2023, Sniadecki [sniadecki.wordpress.com/2023/01/06/kingsnorth-ecofascisme/]

[22] sniadecki.wordpress.com ; La religion du progrès, Floraisons [floraisons.blog/la-religion-du-progres/]

[23] Boris Johnson adviser under fire for praise of Hungary's Viktor Orban, George Parker, janvier 2020, Financial Times

[24] À propos de UnHerd voir Disaffected Right, Making Sense of UnHerd, Josh White, juin 2023, The Battleground [thebattleground.eu/2023/06/12/disaffected-right/] ; Red Tory to Blue Labour, How Spiked and Unherd are Keeping National Populism Alive, Jon Bloomfield, David Edgar, décembre 2022, Byline Times [bylinetimes.com/2022/12/07/red-tory-to-blue-labour-how-spiked-and-unherd-are-keeping-national-populism-alive/] ; Fighting Back Against National-Populism, Jon Bloomfield, David Edgar, décembre 2022, Byline Times [bylinetimes.com/2022/12/19/fighting-back-against-national-populism/]

[25] Cf. Bibliographie, notamment Pas d'éco-terfs dans nos luttes ! Floraisons et DeepGreenResistance ne viendront pas à la Maison de l'écologie, ni ailleurs !, novembre 2022, rebellyon.info ; Planning familial : les anti-trans, « cautions progressistes » des réacs, Pauline Bock, septembre 2022, Arrêt sur images

[26] À propos du Manifeste conspirationniste, Nicolas Bonanni, octobre 2022, Sniadecki

[27] Chi finanzia il movimento LGBTQ, Silvia Guerini, juin 2023, AcroPolis [www.acro-polis.it/2023/06/08/chi-finanzia-il-movimento-lgbtq/]

[28] Don de tissus foetaux : le planning familial répond aux accusations des « pro-life », Stéphany Gardier, juillet 2015, Fréquence Médicale [www.frequencemedicale.com/urologie/patient/3829-Don-de-tissus-foetaux-le-planning-familial-repond-aux-accusations-des-pro-life]

[29] Sur la dérive réactionnaire de certain·es « compagnon·nes », Des anarchistes, août 2021, mars-infos.org (Lien en Bibliographie)

[30] Quando un mucchio di letame risulta positivo al tampone, Resistenze al nanomondo, avril 2021

[31] Gaëtan Flocco et Fabrice Colomb ont pris personnellement la défense de Laurent Muchielli lorsqu'un de ses billet de blog a été dépublié par Médiapart et que le CNRS s'est désolidarisé de son chercheur, du fait qu'il désinformait de manière plus outrancière que d'habitude au sujet de la vaccination : « La sociologie ne consiste pas à faire la chasse aux sorcières mais à débattre », Gaëtan Flocco, Fabrice Colomb, août 2021.

[32] Une revue à un carrefour, Renaud Bécot, Fabrice Flipo, Laurent Garrouste, Benoît Morange, décembre 2022, Terrrestres [www.terrestres.org/2022/12/12/une-revue-a-un-carrefour/]

[33] The Voice of the System, Paul Cudenec, janvier 2023, TruthTalk [truthtalk.uk/2023/the-voice-of-the-system/]

[34] Jacques Luzi : « La procréation technologiquement assistée est une médecine transhumaniste », Kévin Boucaud-Victoire, mars 2023, Le Comptoir [comptoir.org/2023/03/13/jacques-luzi-la-procreation-technologiquement-assistee-est-une-medecine-transhumaniste/]

[35] La Décroissance : quand le « journal de la joie de vivre » courtise la fachosphère, Aude Vidal, avril 2021, blog médiapart ; La Décroissance, ce journal que nous n'achèterons pas, juillet 2019, rebellyon.info · (Liens en Bibliographie)

[36] L'hebdo Marianne se voit-il encore à gauche ?, Pauline Bock, juin 2021, Arrêt sur image [www.arretsurimages.net/articles/lhebdo-marianne-se-voit-il-encore-a-gauche]

[37] Le Printemps Républicain, la social-démocratie au service de l'extrême droite, Antoine Grégoire, mai 2018, Lignes de Crêtes [www.lignes-de-cretes.org/le-printemps-republicain-la-social-democratie-au-service-de-l-extreme-droite/ ] ; « Vous connaissez Michéa ? » : quelques rappels fondamentaux à propos de l'idéologie du site Ragemag, Noe Clectic, octobre 2021, Lignes de Crêtes (Lien en Bibliographie)

[38] Délivrez-nous du bien ! - Halte aux nouveaux inquisiteurs, Natacha Polony, Jean-Michel Quatrepoint, 2018, éditions de L'Observatoire

[39] Les mots et les réalités, Colette Chiland, 2011, L'information psychiatrique [www.cairn.info/revue-l-information-psychiatrique-2011-4-page-261.htm] ; À propos de Chiland voir aussi Des « psys », des théories et de la transphobie, in Sociologie de la Transphobie, Arnaud Alessandrin, Karine Espineira, novembre 2019, Maison des Sciences de l'Homme d'Aquitaine [books.openedition.org/msha/4875]

[40] Le Droit à l'oncle, Anselm Jappe, avril 2021, blog Mediapart [blogs.mediapart.fr/anselm-jappe/blog/190421/le-droit-loncle], réédité dans Soleil noir, Anselm Jappe, novembre 2021, Crise et critique.

[41] Haben Sie „Gesundheitsdiktatur“ gesagt ?, Anselm Jappe, janvier 2022, Wertkritik und Krisentheorie [wertkritik.org/beitraege/jappe-haben-sie-gesundheitsdiktatur-gesagt]

[42] Renaud Garcia : « Le militantisme “woke” ne cherche pas à convaincre mais à régenter la vie des autres », Kévin Boucaud-Victoire, novembre 2021, Le Comptoir [comptoir.org/2021/11/16/renaud-garcia-le-militantisme-woke-ne-cherche-pas-a-convaincre-mais-a-regenter-la-vie-des-autres/]

[43] [Intégralité du communiqué “Les Éditions de L'Échappée appellent à la vigilance” (novembre 2013) :
“Il a été porté à notre connaissance qu'un auteur d'un texte du livre collectif Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques, publié aux Éditions de L'Échappée et actuellement en librairie, entretenait des relations avec des structures proches de la mouvance d'Alain Soral. Cet auteur, Charles Robin, nous avait été recommandé par une personne de confiance, clairement engagée à gauche, initialement pressentie pour écrire le texte en question, et qui faute de temps n'a pas pu le faire. Cette personne n'étant en rien au courant des accointances de Charles Robin, et a été tout autant choquée que nous lorsque nous le lui avons appris. Notre erreur aura été de ne pas nous renseigner sur Charles Robin (nous ne l'avons même pas googlisé !), et la teneur de son texte ne pouvait en rien laisser présager de ses fréquentions politiques.
En temps de crise l'extrême droite a pour stratégie de tenter des rapprochements avec l'autre bord de l'échiquier politique. Nous en appelons donc à la vigilance, afin qu'aucune passerelle ne soit établie entre nos mouvements et des courants antisémites, racistes, antiféministes, nationalistes, conspirationnistes, etc., etc., et les personnes qui pourraient être complaisantes à leur égard”.]

[44] Nous et les autres, problématique de l'identité, Alain de Benoist, 2006, Krisis

[45] Dany-Robert Dufour : « Nous nous sommes embarqués dans une escalade de l'horreur », Kevin Boucaud-Victoire, mars 2017, Le Comptoir [comptoir.org/2017/03/13/dany-robert-dufour-nous-nous-sommes-embarques-dans-une-escalade-de-lhorreur/]

[46] Page personnel d'Olivier Rey sur le site de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne [www.pantheonsorbonne.fr/page-perso/orey]

[47] L'Avant-Garde, ou comment vouloir garder ce qu'il y avait avant, septembre 2017, La Horde [lahorde.samizdat.net/lavant-garde-ou-comment-vouloir-garder-ce-quil-y-avait-avant]

[48] Voir Commentaires sur l'ouvrage collectif « Radicalité, 20 penseurs vraiment critiques », Max Vincent, mars 2014 (Lien en Bibliographie)

[49] Les Mystères de la gauche, Jean-Claude Michéa, mars 2013, Climats ; L'Empire du moindre mal, Jean-Claude Michéa, septembre 2007, Climats

[50] Le Complexe d'Orphée : La gauche, les gens ordinaires et la religion du progrès, Jean-Claude Michéa, octobre 2011, Climats

[51] Enemies of the People, The Rothschilds and their Corrupt Global Empire, décembre 2022, Winter Oak

[52] Naissance, nature et liberté, Pièces et main d'œuvre, juin 2023 [www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=resume&id_article=1855]

[53] Programma tre giornate contro le tecno-scienze 28-29-30 luglio, Resistenze al Nanomondo [www.resistenzealnanomondo.org/necrotecnologie/biotecnologie/programma-tre-giornate-contro-le-tecno-scienze-28-29-30-luglio/]

[54] Fare luce sul clima di manipolazione, Paul Cudenec, Resistenze al Nanomondo [www.resistenzealnanomondo.org/necrotecnologie/fare-luce-sul-clima-di-manipolazione-paul-cudenec/] ; En anglais : Shining light on the climate of manipulation, Paul Cudenec, juillet 2023 [winteroak.org.uk/2023/07/31/shining-light-on-the-climate-of-manipulation/]

Matinée de soutien en attente du délibéré du procès des inculpé.es du 8/12

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Appel à une matinée de soutien le 22 décembre à partir de 9h en solidarité avec les inculpé.es du 8 décembre et contre la mascarade de la justice antiterro. Jour du rendu (délibéré) suite aux 4 semaines de procès en octobre.

Le vendredi 22 décembre se tient le rendu du procès des inculpé.es du 8 décembre. Après 4 semaines de procès en octobre, très éprouvantes pour les inculpé.es, les juges rendent leur délibéré. Nous rappelons que les réquisitoires du Parquet National Anti-Terroriste vont de 2 à 5 ans de prison avec sursis et 6 ans ferme avec mandat de dépôt pour l'un des prévenu.
Mobilisons-nous pour leur apporter notre soutien !
Nous invitons toustes celleux qui le peuvent à nous rejoindre dès 9h devant le TGI, Porte de Clichy. Toutes formes d'expression de soutien sont bienvenues : prise de parole, chorales révolutionnaires, banderoles, tract, son...
Contre l'antiterrorisme et son monde !

Nous remercions toutes celleux qui nous entourent, qui apportent leur soutien sous des formes bien diverses et multiples. Qui aident sans aucun doute les prévenu.es à tenir jusqu'au bout. Cette solidarité immense, la justice préférerait ne pas la voir et la faire taire.

Face à l'extension sans précédent de la répression antiterroriste, nous appelons à la solidarité de toutes les composantes de la contestation sociale. Après 3 ans d'instruction, des détentions provisoires allant jusqu'a 18 mois à l'isolement et près de 4 ans d'enquête...pour cette mascarade judiciaire qu'ont été les 4 semaines de procès.
Un procès politique ne sert pas à punir des individus mais un mouvement.

ZADistes, féministes, antifascistes, anticapitalistes, antiracistes, anarcho-punk campagnard·es nous sommes tous·tes concerné·es !

Ne nous laissons pas anti-terroriser !
solidarité avec les inculpé·es du 8 décembre !

Ciné-causerie « S'organiser collectivement face à l'effondrement du vivant »

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Tenue d'une causerie sur l'organisation collective et la stratégie révolutionnaire face aux menaces d'effondrement le jeudi 7 décembre à 20h, dans un lieu public du 19 arrondissement. Comme support à la causerie, deux vidéos courtes seront projetées : « Effondrement, la résistance s'organise » par Partager C'est Sympa (2019) et « Oubliez les douches courtes » par Le Partage (2015), avec d'un temps d'échange entre chaque.

Alors que nos sociétés sont sur le point de franchir un seuil de non-retour concernant le dérèglement climatique et que les pouvoirs publics nationaux et internationaux sont incapables de prendre acte, il devient clair que nous seul.es pouvons agir.
Mais quels sont les enjeux d'un effondrement et comment s'organiser collectivement et efficacement ?

L'Organisation de Résistance et d'Autonomie (ORA) vous propose une causerie sur l'auto-organisation collective et la stratégie. L'ORA est une organisation révolutionnaire qui sera lancée au printemps 2024 et dont le but est de mettre fin au système de classes sociales (capitalisme, racisme et patriarcat) en démantelant son infrastructure industrielle et en atteignant l'autonomie populaire.

Quand ? Le jeudi 7 décembre à 20h
 ? Au Centre Paris Anim' Solidarité Angèle Mercier, 133/135 boulevard Sérurier, 75019 PARIS

Événement GRATUIT, sans réservation
Organisé par l'Organisation de Résistance et d'Autonomie (ORA)