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Communiqué de Désarmons-les ! par rapport aux émeutes suite au meurtre de Nahel

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

En tant que collectif engagé depuis une décennie contre les violences d'État, Désarmons-les ! tenait à publier une réaction en soutien aux révoltes qui ont suivi le meurtre de Nahel.

Nous étions présent.es lors des émeutes de 2005. Solidaires des émeutier.es.

Déjà à l'époque, nous avons crié : « Zyed et Bouna, on n'oublie pas, on ne pardonne pas ! ».

Entre temps, nous avons créé un collectif pour le désarmement de l'État.

Nous avons passé dix ans à soutenir les victimes de violences policières partout où nous parvenions à entrer en lien avec elles et à faire du plaidoyer sur l'ensemble du territoire français ainsi qu'à l'étranger.

Durant toutes ces années, nous avons aussi crié « Pas de Justice, pas de Paix ! ». Nous n'avions pas confiance dans la Justice, mais nous avons joué son jeu malgré tout. Pour apprendre, pour comprendre, pour essayer, pour savoir. Nous avons fait toutes les procédures légales, nous sommes allés dans toutes les juridictions. Nous connaissons parfaitement la machine, ses rouages et ses vices cachés. En parallèle, nous avons décrypté le maintien de l'ordre, l'histoire coloniale de la police et les mécanismes de la violence, mais aussi le système d'impunité dont bénéficient les forces de l'ordre.

En France, un policier qui tue n'est pas jugé. Incriminés parfois, disculpé toujours.

Combien de policiers condamnés à plus de 18 mois de prison avec sursis, plus de 3000 euros d'amende ? Combien de policiers démis de leurs fonctions et interdits d'exercer ? Combien de policiers interdits de port d'arme ? Nous connaissons la réponse, que la population le plus souvent ignore et que même la plupart des journalistes ignorent. Vous pouvez chercher, vous n'en trouverez pas un seul. L'impunité est totale.

À ce stade, ce n'est plus de l'impunité, c'est une immunité.

En 40 ans, la police a tué plus de 800 personnes. Sous la présidence Sarkozy, nous étions à 15 morts par an, sous Hollande à 22, et sous Macron nous sommes passés à 30 par an, avec un pic à 52 morts en 2021.

Depuis la loi de 2017 qui définit les situations dans lesquelles les forces de l'ordre peuvent ouvrir le feu sans craindre d'être inquiétés par la justice, le nombre de morts par balle a explosé.

Avant, la légitime défense n'avait qu'une définition, qui était la même pour tout.es. Depuis, les policiers bénéficient d'un régime spécial, leur accordant une présomption de légitime défense.

L'article L.435 du Code de la Sécurité Intérieure a ainsi considérablement allégé le poids de détente. En ce sens, c'est un permis de tuer. La peine de mort n'a pas été abolie, son application a juste été confiée aux seules forces de l'ordre. C'est comme si l'on donnait au « crétin du village » la liberté d'apprécier la pertinence d'exécuter une personne pour un moindre délit. Sans intervention d'arbitres ou de juges.

Les syndicats de police sont un État dans l'État. Leurs discours sont autant d'incitations à l'émeute policière et aux exactions, tout cela au nom de la raison d'État et d'une République qui n'a de républicaine (en latin : « chose » ou « affaire publique ») que le nom.

Et l'État, dirigé par des pyromanes néo-libéraux entièrement inféodés à des patrons libertariens, ne tient plus que par sa police. L'État réduit à son seul rôle de gendarme, c'était le rêve des théoriciens ultra-libéraux et minarchistes. Sarkozy, Hollande et Macron l'ont réalisé, pas-à-pas et de manière implacable.

L'impérialisme occidental a d'abord engendré l'esclavage et la colonisation, puis leur sous-produit, le terrorisme islamiste. Le terrorisme islamiste n'est que l'une des têtes de l'hydre fasciste, dont le berceau est bien en occident, et en France en particulier. L'islamophobie et la résurgence du fascisme le plus violent en sont la conséquence directe, fruit de l'ignorance et des discours essentialistes et autoritaires d'un Pouvoir dirigé par les enfants de la bourgeoisie coloniale pétainiste et gaulliste. Une élite bercée d'une mythologie chauviniste dont les idoles sont bien souvent des seigneurs et des guerriers sanglants, plutôt que des philanthropes ou des artistes inspirants.

Plus de 60% des policiers et gendarmes votent pour des partis d'extrême-droite fascistes. Soyons plus précis : néo-pétainistes.

Les prolo blancs racistes gangrènent la police, suppléés par des prolos racisés qui ont oublié leur histoire ou qui obéissent aveuglément aux logiques racistes et masculinistes dominant leur corporation. Dans la rue, ils reçoivent désormais le soutien actif de bandes armées néo-pétainistes constituées par les petits-enfants de la grande bourgeoisie, excités à l'idée de reproduire les croisades et les pogroms du passé.

Chaque semaine désormais, à Lyon, Paris, Nantes, Bordeaux, Montpellier, Angers ou encore Annecy, des groupuscules fascistes sortent frapper des gens avec des barres de fer et des bâtons. Leur projet de société, c'est des murs, des barbelés, des milices et des pendus. Comme l'État islamique ou Wagner, pas mieux.

Et la police les protège, la Justice les couvre, les partis politiques de droite les recrutent. Parce que ce sont les enfants de ceux qui siègent à l'Assemblée et au Gouvernement.

Le Gouvernement lui, poursuit sa destruction de la protection sociale, de l'éducation et de ce qui fait société, tout en accélérant la destruction du vivant et de l'environnement, écrasant et humiliant toujours davantage le peuple qui travaille contre son gré pour que cette absurde machine tourne. Macron, avec sa tête de banquier ahuri, détruit tout frénétiquement pour satisfaire son microcosme de super riches libertariens et de premier·e·s de cordée, avec la croyance crétine que l'économie se régulera d'elle-même, apportant paix et prospérité dans un monde où chacun serait son propre maître. Le néant de la pensée philosophique, terreau de l'individualisme le plus méprisant.

Et quand le peuple se révolte, quand les jeunes issus de l'immigration post coloniale se révoltent, quand les antifascistes, les écologistes et les féministes résistent, alors la police et les fascistes les répriment avec violence, en parfait larbins d'un système capitaliste et individualiste qui court à sa ruine.

La France se pensait comme le phare de la civilisation. Elle se pensait comme le pays des Lumières, de la Révolution, des Droits de l'Homme et de la démocratie sociale. Elle n'en aura été que la négation coloniale. Sa mégalomanie et son suprémacisme l'auront amené à coloniser un tiers de la planète, imposant son modèle par la force et par la violence, pillant le Sud pour permettre au Nord de bénéficier d'un État Providence et à sa population de se nourrir d'illusions. Tant qu'il y avait des sous…

Mais l'État Providence n'était qu'une illusion de courte durée.

Le capitalisme ne s'embarrasse pas avec le fait d'aider les pauvres à survivre.

Les valeurs universelles que la France croyait promouvoir n'étaient qu'une illusion.

La sociale-démocratie n'était qu'une illusion.

Plus encore, c'était un mensonge.

La réalité, c'est l'autoritarisme, la prédation et la violence des mercenaires de la Bourse.

Aujourd'hui enfin les masques tombent. Après la révolte des Gilets Jaunes, il n'en restait déjà plus beaucoup.

Et s'il faut que l'illusion s'évapore dans les flammes des émeutes, alors nous l'acceptons.

Ce n'est qu'un juste retour de bâton. “Nous brisons vos vitrines parce que vous brisez nos vies”.

Et si c'est de la racaille, alors nous en sommes, toujours solidaires des émeutes populaires.

Pour honorer Nahel et toutes les victimes de la violence d'État, le seul apaisement qui vaille, c'est une transformation sociale totale et radicale ! Sans État, sans flics, sans prisons, sans patrons et sans fachos !

Le Collectif Désarmons-les !


Pour comprendre d'où on parle et qui nous sommes :

https://desarmons.net/qui-sommes-nous/

Pour comprendre d'où proviennent nos informations et analyses :

https://desarmons.net/ressources/livres-rapports/

https://basta.media/webdocs/police/

https://lahorde.samizdat.net/Combattre-l-extreme-droite-partout-elle-s-implante

Pour lire notre analyse du système d'impunité :

https://desarmons.net/ressources-investigations/

…et notamment sur les mécanismes de la violence policière :

– Quelques éléments de réponse sur la dangerosité du métier de gendarme/policier-e / https://desarmons.net/2022/11/24/quelques-elements-de-reponse-sur-la-dangerosite-du-metier-de-gendarme-policier-e-2/

– Toujours plus de flingues et de bagnoles : le “si vis pacem, para bellum” de l'État français / https://desarmons.net/2022/01/06/flingues_bagnoles_si_vis_pacem_etat_francais/

– Culte de l'Ordre, culture du viol : état des lieux / https://desarmons.net/2021/03/08/culte-de-lordre-culture-du-viol-etat-des-lieux/

– La Police, cette chanson douce que me chantait ma maman… / https://desarmons.net/2020/12/13/la-police-cette-chanson-douce-que-me-chantait-ma-maman/

– 1791 à 1914 : les racines du maintien républicain de l'ordre / https://desarmons.net/2019/11/04/1791-a-1914-les-racines-du-maintien-republicain-de-lordre/

– Comment la République s'est muée en dictature. / https://desarmons.net/2019/10/09/comment-la-republique-sest-muee-en-dictature/

– De 1945 à nos jours : Comment l'État moderne s'est réalisé dans une violence sans limites / https://desarmons.net/2019/02/08/de-1945-a-nos-jours-comment-letat-francais-sest-realise-dans-une-violence-sans-limites/

– Maintien de l'ordre : ultra-violence institutionnelle, ce qu'ils n'avoueront pas / https://desarmons.net/2018/12/18/maintien-de-lordre-ultra-violence-institutionnelle-ce-quils-navoueront-pas/

– Après Sainte-Soline : il n'y a pas d'armes de paix ! / https://desarmons.net/2023/03/30/apres-sainte-soline-il-ny-a-pas-darmes-de-paix/

– Quand on comprend que les grenades sont un enjeu stratégique pour la doctrine du maintien de l'ordre… / https://desarmons.net/2019/06/20/quand-on-comprend-que-les-grenades-sont-un-enjeu-strategique-pour-la-doctrine-du-maintien-de-lordre/


ENGLISH VERSION

STATEMENT OF THEDESARMONS-LES !” COLLECTIVE AFTER THE RIOTS FOLLOWING NAHEL'S DEATH

We were present during the 2005 riots. In solidarity with the rioters.

Even back then, we shouted : “Zyed et Bouna, we don't forget, we don't forgive !

In the meantime, we created a collective for the disarmament of the state.

We spent ten years supporting victims of police violence wherever we could make contact with them, and doing advocacy work throughout France and abroad.

During all these years, we also shouted “No Justice, No Peace”. We didn't trust Justice, but we played its game anyway. To learn, to understand, to try, to know. We went through all the legal procedures, we went to all the courts. We know the machine perfectly, its workings and its hidden defects. At the same time, we decoded policing, the colonial history of the police and the mechanisms of violence, but also the system of impunity enjoyed by the law enforcement officers.

In France, a policeman who kills is not tried. Sometimes accused, always exonerated.

How many police officers have been sentenced to more than 18 months suspended prison sentences and to fines of over 3,000 euros ? How many police officers have been dismissed and banned from their duties ? How many police officers have been banned from carrying weapons ? We know the answer, which the public mostly ignores, and which even most journalists ignore. You can search, but you won't find a single one. Impunity is total.

At this point, it's no longer impunity, it's immunity.

Over the last 40 years, the police have killed over 800 people. Under President Sarkozy, we were at 15 deaths a year, under Hollande at 22, and under Macron we've risen to 30 a year, with a peak of 52 deaths in 2021.

Since the 2017 law defining the situations in which law enforcement officers can open fire without fear of legal proceedings, the number of gunshot deaths has exploded.

Before, self-defense had only one definition, which was the same for everyone. Since then, police officers have benefited from a special regime, granting them a presumption of self-defence.

Article L.435 of the French Homeland Security Code has eased the weight of the trigger considerably. In this sense, it's a license to kill. The death penalty has not been abolished, its application has simply been entrusted to the police officers alone. It's as if the “village idiot” were given the freedom to decide whether or not to execute a person for the slightest offence. Without the intervention of arbitrators or judges.

Police unions are a state within the State. Their speeches incite police riots and violence, all in the name of the State and of the Republic that is republican (from Latin : “public affair”) in name only.

And the State, run by neo-liberal pyromaniacs wholly subservient to libertarian bosses, is only as strong as its police force. The State reduced to the role of “gendarme state” was the dream of ultra-liberal and minarchist theorists. Sarkozy, Hollande and Macron have made it a reality, step by step and relentlessly.

Western imperialism gave rise first to slavery and colonization, then to their by-product, Islamist terrorism. Islamist terrorism is just one of the heads of the fascist hydra, whose cradle is in the West, and in France in particular. Islamophobia and the resurgence of the most violent fascism are their direct consequence, the fruit of ignorance and essentialism, authoritarian rhetoric of a Power led by the children of the colonial bourgeoisie, both Petainist and Gaullist. An elite lulled by a chauvinist mythology whose idols are often landlords and bloody warriors, rather than philanthropists or inspiring artists.

Over 60% of policemen and gendarmes vote for fascist far-right parties. Let's be more precise : neo-Pétainist parties.

White racist commoners gangrenes the police force, supplemented by racialized (POC) commoners who have forgotten their history or who blindly obey the racist and masculinist logics dominating their corporation. In the streets, they now receive the active support of neo-Pétainist armed gangs formed by the grandchildren of the upper middle classes, excited by the idea of reproducing the crusades and pogroms of the past.

Every week now, in Lyon, Paris, Nantes, Bordeaux, Montpellier, Angers and Annecy, fascist groups are out beating people with iron bars and sticks. Their vision of society is one of walls, barbed wires, militias and hanging people. Like the Islamic State or Wagner, no better.

And the police protect them, the justice system covers them up, right-wing political parties recruit them. Because they are the children of those who sit in the Parliament and the Government.

As for the government, it is continuing to destroy social welfare, education and everything that makes up society, while accelerating the destruction of life and environment, crushing and humiliating ever more the people who work against their will to keep this absurd machine running. Macron, with his bewildered banker's face, is frantically destroying everything to satisfy his microcosm of libertarian super-rich and “lead climbers”, with the cretinous belief that the economy will regulate itself, bringing peace and prosperity in a world where everyone is its own master. A void of philosophical thought, a breeding ground for the most contemptuous individualism.

And when the people rise up, when young people from post-colonial immigrant families rise up, when antifascists, environmentalists and feminists resist, then the police and fascists violently repress them, like perfect stooges of a capitalist and individualist system that is heading for ruin.

France thought of itself as the beacon of civilization. It thought of itself as the land of the Enlightenment, the Revolution, of Human Rights and social democracy. It was nothing more than a colonial negation. Its megalomania and supremacism led it to colonize a third of the planet, imposing its model by force and violence, plundering the South to allow the North to benefit from a welfare state and its population to feed on illusions. As long as there was money…

But the Welfare State was a short-lived illusion.
Capitalism doesn't bother with helping the poor to survive.
The universal values France thought it was promoting were just an illusion.
Social democracy was an illusion.

More, it was all a lie.

The reality is the authoritarianism, predation and violence of the mercenaries of the stock market.
Today, at last, the masks are coming off. After the Gilets Jaunes uprising, there weren't many left.
And if the illusion has to fade away in the flames of the riots, then we accept it.
It's only fair. “We smash your windows because you smash our lives”.
And if they are scum, then we're in, always in solidarity with popular riots.

To honor Nahel and all the victims of state violence, the only thing that will bring relief is total and radical social transformation ! No state, no cops, no prisons, no bosses and no fascists !

The “Désarmons-les !” collective.

Quelques remarques sur la révolte actuelle et ses fossoyeurs

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

On voudrait réagir à des prises de position qu'on a pu voir ces derniers jours de la part de nos camarades, des écueils assez récurrents quand il s'agit d'analyser les révoltes qui sortent du cadre bien classique de la gauche.

Déjà, on a du mal à comprendre ce réflexe de vouloir juger de la pertinence d'une révolte, des limites de ce qui est acceptable ou non. On voit pas quel intérêt a une telle prise de parole : ça change quoi de dire ce qui est légitime et ce qui l'est moins ? On n'est pas des juges, on n'a aucun bon point à distribuer, surtout quand on a accepté de soutenir sans réserve un mouvement social dont les objectifs et les modes d'action étaient aussi creux que celui du mouvement des retraites (nous compris).

Parfois aussi, la reconnaissance de la spécificité antiraciste de la lutte actuelle pousse la gauche à n'apporter aux insurgé•es qu'un soutien moral ou extérieur. Cette position d'extériorité est au fond une forme de désolidarisation, elle ne fait que reconduire l'isolement politique. La situation exige bien plus qu'une approbation du bout des lèvres...

Autre écueil : conseiller aux révolté•es d'adopter un objectif précis. Il faudrait aux insurgé•es des bonnes vieilles revendications, il faudrait, comme il a fallu le faire pour les gilets jaunes, faire rentrer tout ce beau monde dans le champ de la réclamation politique.
Même si on obtient jamais rien, il faut quand même le demander : la démission du président, la retraite a 60 ans, n'importe quelle connerie tant qu'il nous reste quelque chose à dire.

Selon cette même logique, il faudrait essayer de faire comprendre aux « jeunes », à « ces gamins » que le véritable ennemi est le capitalisme, c'est-à-dire, dans la plupart des esprits à gauche, en fait, une notion assez floue, relative aux inégalités. Là aussi, c'est une manière de se payer de mots. Mieux vaut des pratiques claires et fortes que des mots d'ordre flous ou creux.

En fait un mouvement n'a pas besoin d'avoir des revendications pour avoir des effets, il doit juste avoir des objectifs, et que ces derniers soient précis. Or, la révolte ne manque pas d'objectifs : comicos, mairies, prisons, casernes, boutiques, écoles. Tout ça, on aimerait suggérer à celles et ceux qui qualifient cette révolte de « nihiliste », que ça dessine une cohérence...

Souvent, une telle posture s'accompagne de la prédiction selon laquelle tout ça ne ferait que renforcer l'extrême droite. Les conséquences d'un tel raisonnement conduisent donc a dire qu'un mouvement social ne peut exister que s'il est inoffensif (c'est vrai qu'à cet égard la gauche est passée maîtresse dans cet art). On remarque quand-même que cet argument est plus souvent utilisé quand c'est les arabes et les noirs qui se bougent.

Ce n'est plaquer aucun fantasme que de dire que nous nous reconnaissons dans les objectifs de ce mouvement, que le sens de cette révolte est explicite et que son ambition dépasse de loin tout ce qui a pu émerger dans le cadre traditionnel de la gauche. Avant de juger, donc, commençons par tâcher d'être à la hauteur de ce qui se joue.

Texte de positionnement écrit par la coordination antifasciste inter—universitaire (CAIU) en réaction aux révoltes ayant suivi la mort de Nahel.

Nouveau cadastre en ligne pour squatteur·euse·s : cadastre.squat.net

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Quand on veut squatter des bâtiments vides c'est parfois pratique de savoir à qui les bâtiments appartiennent. En France, pour répondre à des questions telles que « Qui possède ce bâtiment ? » ou « Quels sont tous les terrains appartenant à la mairie dans ce village ? », la solution officielle est d'aller demander un extrait de cadastre à la mairie locale, ce qui n'est pas toujours très pratique (ni très discret).

C'est là qu'intervient cadastre.squat.net, le nouveau cadastre en ligne pour squatteur·euse·s ! Cette carte interactive affiche toutes les parcelles cadastrales appartenant à des personnes morales (entreprises, associations, État...) à l'échelle de la France (métropolitaine et outre-mer). Elle permet de filtrer les parcelles par département, commune, propriétaire ou référence cadastrale, ou simplement de zoomer sur le coin qui vous intéresse pour voir qui y possède quoi.

Notez donc que les parcelles appartenant à des particuliers ne sont pas affichées - pour ça, il faut toujours aller en mairie. De plus, les données sont actuellement à jour du 1er janvier 2022 - on les mettra à jour dès qu'on pourra mais la carte aura toujours entre un et deux ans de retard sur la situation réelle. On a fait de notre mieux pour nous assurer de la fiabilité des données affichées par la carte mais il se peut que des erreurs se soient glissées, on est pas des pros ;)

Pour contacter les cartographes à l'origine de cette carte, envoyez un mail à hm123@riseup.net.

Vive le squat !

Créteil sans soleil : tout le monde se retrouve à l'ombre

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Récit de la longue journée de comparutions immédiates de mardi au tribunal de Créteil, pour des personnes chopées depuis jeudi soir

Aujourd'hui à Créteil les familles et ami.e.s étaient présent.e.s en masse ! C'est toujours cool et on rappelle au cas où qu'il faut leur laisser la priorité dans ces petites salles : 12 types passaient, chacun méritait une chance de voir ses proches si possible !
On n'a du coup pas pu assister à tout mais on vient d'abord en soutien !
Pas comme cet abruti de prof d'éco en goguette avec ses élèves, qui n'a eu aucun scrupule à squatter tout un banc et s'est permis en plus de taper un scandale quand on le lui a fait remarquer...

  • 23 ans, accusé d'avoir pété la vitrine de G20 pour y voler quelques trucs. Pas de casier, sans-papiers, bosse au black et a une OQTF au cul. Mais c'est le meneur parce que c'est lui qui aurait cassé la vitre...
    Le proc dégaine son refrain de la journée « certes il n'a pas de casier mais vu le contexte actuel... » : on fait bien comme le chef Dudu-Momo a dit, on tabasse ça leur fera les pieds. Il demande 18 mois ferme (il pense que les émeutes vont durer autant ?? on aimerait voir ça !) et une interdiction du territoire français (ITF) de 5 ans, parce que la double peine c'est cadeau.
    Son avocate fait remarquer que les incohérences et les souvenirs flous quand on est complètement raide c'est pas rare. Les rues étaient calmes, ni émeutes ni rien dans le coin, il aurait juste piqué une caisse de whisky, parce qu'il avait besoin de picoler... Elle demande le sursis et une injonction de soin (pour alcoolisme), il écopera d'un an + ITF...
  • Un tout juste 18 ans, accusé d'avoir attaqué le comico au mortier, cramé des poubelles et « transporté des cocktails molotov » dans le coin.
    Les flics auraient reçu des pavés, des mortiers et des cocktails. On ne voyait rien, l'identification était tendue, mais les keufs l'ont reconnu d'avant, à force de le contrôler pour le fun tous les jours, comme c'est pratique... Après une perquis' il a reconnu avoir été là (n'avouez jamais ! [1]) Aucun blessé ni grosse dégradation, de l'aveu même des keufs. Et là passage surréaliste du juge « pourquoi n'êtes vous pas allé juste à la marche blanche ? ». Ça ose tout. Il y était lui ? Et il aurait été plus clément pour les gen.te.s qui ont cartonné les keufs à cette occasion ? On peut en organiser d'autres si besoin !
    L'exploitation du tel a donné une photo où il se la joue avec un cock à la main... C'est déjà pas une super idée de se cramer comme ça, mais on rappelle aussi que sans code de tel, pas de photos auto-compromettante ! Certes c'est théoriquement punissable, mais toujours moins !
    Le daron pas forcément au point (et c'est le seul avis de parent versé au dossier de toutes les audiences ! C'est que quand ça les arrange ou quoi ?) le décrit comme un ado relou en crise, tout bénef pour le juge...
    Le proc en remet une grosse louche sur le foutage de gueule, en nous expliquant que ce sentiment d'injustice est illégitime, vous comprenez il y une procédure en cours contre le keuf, et la justice est impartiale et gentille tout le monde le sait bien au pays des droits de l'homme bisounours. Il demande 3 ans pour une simple présence reconnue...
    L'avocate rappelle la théorie d'individualisation des peines, c'est pas une bande de jeunes émeutiers à lui tout seul, il est juste stupide (ça fait toujours plaisir).
    Elle ne demande rien de plus que l'aménagement, verdict 3 ans dont la moitié de sursis.
  • 3 jeunes types passent ensemble, pour rebellion avec ou sans ITT. Leur seul point commun a prio c'est de s'être fait choper ensemble, autrement dit de manquer de bol ou de courir un peu moins vite que les autres...
    L'avocate des parties civiles précise que les 3 keufs qui demandent de la moulah ne sont pas de ceux qui sont habitués à faire ça pour arrondir leurs fins de mois. Un peu surprenant d'admettre que ça existe, mais si c'était le cas combien de chance qu'elle les balance ? Ces pourris sont capables de tout ! « Nan mais si si c'est vrai vu qu'on le fait pour la 1e fois » Ben ouais et si ça passe vous réssayerez...
    Chaque keuf essaye quand même de se faire 1000-1500 balles... Jaloux de la cagnotte ?
    Le proc en fait des caisses sur les émeutes, les OVNI, etc, alors que rien de tout ça ne leur est reproché. Mais bon faut bien le répéter pour tout le monde avant de le juger in-di-vi-duelle-ment. Comme il est plus à ça près, et qu'en ce moment les flics c'est les victimes vous voyez, Il demande 4 ans pour les 3 : rien à foutre qu'un ait une copine et un nourrisson présents, que l'autre soit à la rue, fallait juste pas se débattre au milieu d'un gros bordel, après s'être pris un LBD et une dose de télésco ou s'être fait attraper par les cheveux... Verdicts de 8 à 18 mois et un petit cadeau pour chaque keuf, même celui qui a repris le taf malgré ses ITT « pour épauler ses collègues dans un moment difficile », un tel zèle avec de si grandes souffrances il est mûr pour la légion d'honneur !
  • 19 ans, accusé de groupement en vue de violences/dégradations/destruction, avec des gants, des mortiers et une cagoule, et de rebellion parce que ça ne faisait pas assez. Il est un peu stressé, le juge demande une expertise psy, comme il s'est déjà retrouvé coincé en HP plusieurs fois, il est suivi par la MDPH. Le gars avait un petit casier pour stup quand il était mineur et ne s'oppose pas à l'expertise, mais même si l'avocate demande le CJ il restera un mois en zonz avant son expertise, le 2 août.
  • 24 ans, accusé de groupement en vue de violences/dégradations/destruction, trouvé près d'un feu de containers, a admis qu'une cagoule trouvée pas loin était à lui. Il s'est fait choper en sortant d'un buisson, tout le matos trouvé dedans lui a été attribué. Il plaide avoir juste été pisser, ça ne convainc pas du tout le juge qui insistera 2-3 fois sur le fait qu'il aurait pu remonter chez lui juste au-dessus pour ça.
    On se doute bien que c'est pas son style mais franchement à choisir entre pouvoir pisser dans un buisson une nuit d'été où on a repris la ville et remonter ne serait-ce qu'un étage pour rentrer le choix est vite fait, émeute ou pas !
    Le problème est le tel déverrouillé (on rappelle, faut pas !) plein de snaps pétés avec des promos sur les mortiers et à quelle pompe aller pour faire des cocktails, et le fait d'avoir admis en gav « je suis sorti je voulais brûler des poubelles et allumer des flics ». Il n'y a aucne preuve qu'il l'ait fait, il n'en est même pas accusé mais c'est utilisé quand même. L'avocate a plaidé l'envie de se faire mousser sur les réseaux, sa mère était prête à l'accueillir avec bracelet, il allait signer un contrat et n'avait plus eu de contact avec la « justice » depuis 6 ans, rien à foutre, 9 mois ferme, avec mandat comme tout le monde...
  • 3 autres jeunes devaient passer ensemble, ils ne sont que 2. Le 3e a été emmené à l'hosto depuis la gav tellement il s'était fait attendrir... Ils ne se connaissent pas.
    Accusation habituelle, groupement en vue de violences/dégradations/destruction et tir de mortier sur les keufs pour le 1er.
    Demande de nullité tout de suite, les PV étaient écrits avec les pieds, il n'y avait que la parole d'un keuf et rien sur les vidéos, jurisprudence et tout : le juge s'en torche évidemment, et ne fait même pas semblant de se concerter avec ses collègues, en 15 secondes c'était plié. Vous comprenez les keufs étaient fatigués, c'est pas facile tous les jours, la rengaine habituelle...
    Le 2e gars dit plusieurs fois ne pas avoir tiré de mortier, le juge insiste sur le fait qu'il n'en est pas accusé, juste d'avoir été là : pas de souci à rappeler en boucle qu'ils ont un procès juste parce qu'ils étaient quelque-part...
    Le juge ne comprend absolument pas qu'on puisse aller faire des courses à 22h, ou aller chercher une carte de salle de sport chez un pote vers 23h : ben ouais quand on bosse comme éboueur, un boulot éprouvant avec des horaires de merde et qu'on vit chez ses parents les quelques loisirs qu'on arrive à gérer sont très importants ! Tout était dans l'enquête sociale mais chez le juge ça doit être la petite souris qui vide les poubelles, le travail en horaires décalés il ne connaît pas...
    Le principal élément contre eux est une exploitation de tel, où est trouvé un appel à « cramer le Tj de Créteil (ce qui aurait évité de s'y retrouver a priori [2]), on va niquer ces FDP ». On a pouffé dans la salle mais le juge moins, il a traduit par « fils de pute », pas sûr que « forces de police » soit mieux passé, « fils de policiers » c'était Cayenne ?
    Tout ça sachant que le tel en question n'était à aucun des 3 !! C'était celui d'un gars du camion, dont le seul lien avec eux est de s'être fait choper par les même keufs ! Si se retrouver dans le même fourgon constitue un groupement ça va être compliqué... Le procureur, qui ne doit pas cracher sur le monop en bas de chez lui qui exploite des prolos pour rester ouvert jusqu'à minuit, trouve « cocasse » et même « savoureux » que les « casseurs » fassent leurs courses après 22h. Ben oui les cités dortoir c'est fait pour dormir, vous aviez pas compris « métro boulot dodo » les pauvres ?
    Les deux avocates se démènent, montrent qu'il n'y a rien, que le dossier est bancal tellement il est torché, qu'il y a des jurisprudences jusqu'à la CEDH, que pour une grande partie de la population c'est normal de courir quand on voit les flics, surtout une semaine parès un meurtre policier, et demandent une relaxe, plus ou moins fermement (une prévoit aussi le sursis ou l'aménagement si ça passe pas).
    Mais ici pas de clémence de fin de soirée, 9 mois pour les 2 comme requis par le proc. « Semi-liberté » pour l'un s'il travaille (Cayenne donc). Le 3e passera en août une fois sorti de l'hosto, il s'en sortira peut-être mieux sans le « vous comprenez vu le contexte actuel » à toutes les sauces ?
  • Pour les audiences loupées pour laisser des places à la famille : un gars accusé de groupement en vue de violences/dégradations/destruction a pris 10 mois dont 5 avec sursis, ce qui en fait une des peines les moins pires de la journée même si le proc demandait 30 mois ferme. Un autre a été relaxé pour groupement (seule relaxe de la journée !) mais a pris 4 mois avec sursis pour rebellion, on n'ose imaginer le vide du dossier...

On comprend bien pourquoi les tribunaux ressemblent à des forteresses dégueulasses : on peut regarder les gueux du haut des remparts mais faudrait pas qu'il puissent entrer sans invitation ça pourrait piquer !

Pour les nombreuses personnes qui se sont fait envoyer au trou, rassemblement dimanche à 15h !


[1] dans la mesure du possible bien sûr

[2] Le dépot a d'ailleurs été attaqué (quand lui y était déjà) mais des feux d'artifices contre un tribunal 80% béton/20% amiante ça fait pas le taf...

Rassemblement de soutien aux enfermées

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Appel à se rassembler dimanche 9 juillet devant les prisons pour soutenir les personnes enfermées.

Depuis la mort de Nahel tué par la police à Nanterre, la répression s'abat fermement sur celleux qui sont sorti-es dans les quartiers pour mettre en acte leur colère.

Soyons solidaires avec celleux qui subissent des attaques racistes et classistes de l'État.

Rassemblons-nous devant les prisons ce dimanche pour leur montrer qu'on se laissera pas faire et exprimer notre solidarité envers les interpellé-es et les enfermé-es.

Liberté pour les prisonnier-es du mouvement, liberté pour tou-tes !

RDV à la gare du parc de Sceaux (RER B) à 15h pour aller à la maison d'arrêt de Fresnes !