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Palestine- Communiqué unitaire d'organisations féministes

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Nous sommes des militantes, des organisations féministes et LGBTQI+ de Paris, Lyon, Montreuil, Saint-denis, Bordeaux, Grenoble, Marseille, Rouen, Montpellier, Nantes, Tours. Nous dénonçons le massacre en cours à Gaza et l'offensive contre le droit à soutenir le peuple palestinien ! La libération de la Palestine est aussi une cause féministe !

Deux semaines après l'offensive menée par le Hamas et les organisations armées de la résistance palestinienne, l'État d'Israel continue de bombarder la bande de Gaza et prépare une invasion terrestre meurtrière. Depuis samedi 7 octobre, plus de 3785 PalestinienNEs sont déjà mortEs [1], mais l'attaque qui se prépare pourrait changer à jamais la situation à Gaza, pour le pire.

Pour justifier son projet mortifère, le gouvernement israelien s'appuie sur les nombreux meurtres de civils perpétrés par le Hamas le 7 octobre dernier.
Nous condamnons ces actes, comme l'ensemble des attaques visant des civils israelienNes, mais il ne peuvent en aucun justifier un massacre du peuple palestinien, et encore moins faire oublier que c'est la situation coloniale en Palestine, qui dure depuis 75ans, qui est la racine de toute cette violence.

Alors que l'État d'Israel multiplie les rhétoriques génocidaires et lance aux Gazaouis l'ordre de fuir vers le sud tout en bombardant les routes, mais aussi les véhicules médicalisés, il bénéficie pourtant d'un large soutien des États occidentaux. Les chefs d'États des États-Unis, de la France ou de l'Allemagne insistent ainsi sur « le droit d'Israel à se défendre », donnant un feu vert à ce que certains qualifient déjà de génocide.

Dans le même temps, en France comme en Allemagne, tout soutien au peuple palestinien est criminalisé. Ces derniers jours, le ministre de l'Intérieur français, Gérald Darmanin assimile ainsi toute position pro-palestinienne à un soutien au terrorisme et au Hamas, promettant d'engager des procédures pénales voire des dissolutions contre les organisations qui s'exprimeraient sur le sujet, et interdit toute mobilisation de solidarité avec le peuple palestinien. Une offensive pour laquelle le ministre n'hésite pas à amalgamer de façon scandaleuse critique de l'État d'Israël et antisémitisme.

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[1] Plus de 12 000 blessés à Gaza. Déjà une centaine de Palestiniens assassinés dans Israel/Cisjordanie depuis une semaine. Sources : LGBTQIA Palestine, ASWAT Palestine.

Il est encore possible de signer la tribune : contacter le collectif Du Pain et Des Roses

Révoltes urbaines, retour d'audience / « Vous trouvez que c'est normal qu'il y ait des émeutes ? »

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Quatre mois après la mort de Nahel tué par un policier, juges et procureurs appliquent encore la circulaire Dupont-Moretti. Ni exemplaire ni banale, une audience comme beaucoup d'autres : tristes théâtres d'une justice aux ordres.

Idriss [1] est en prison depuis quatre mois. Aucun de ses proches n'a pu lui rendre visite à Fresnes. Ce vendredi 6 octobre, c'est dans le box des prévenus de la Cour d'appel de Paris à Cité qu'il peut enfin croiser un regard ami. À la barre, Issa [2], lui, est en semi liberté. Tous les deux doivent répondre à nouveau aux questions d'un tribunal.

En première instance, Idriss a été condamné à 9 mois de prison avec mandat de dépôt. Lui et Issa ont été interpellés dans la soirée du 29 juin à Créteil, ni à la même heure, ni au même endroit. Ils ne se connaissaient pas. Accusés de « groupement en vue de commettre des dégradations et des violences », Idriss, invité chez sa mère, sortait acheter du charbon pour sa chicha et Issa, en visite chez un ami, rentrait chez lui.

Quatre mois après la mort de Nahel tué par un policier, juges et procureurs appliquent encore la circulaire de leur ministre [3] : rapides dans la lecture des événements, se bornant au contexte et non aux faits reprochés ; fermes ou plutôt enfermé.es dans leur logique de gardiens de la paix et « systématiquement » à charge dans leurs questions, commentaires, interventions.

Ainsi, la présidente du tribunal lit à haute voix les procès verbaux, insistant sur certains mots : « émeutes, violences urbaines, incendies (…) il fallait protéger les forces de l'ordre (…) Il est 22H30 place de l'abbaye à Créteil, les forces de l'ordre sont violemment prises à partie. Aucun fonctionnaire blessé mais un pare brise d'un véhicule de police est brisé… ». Quand elle interroge Idriss et Issa, c'est pour les sommer d'expliquer ce qu'il faisait là fin juin : « Pourquoi portait-il un bonnet ? Un parka noir ? Pourquoi ces vidéos d'incendies retrouvées dans un portable ? Vous trouvez que c'est normal qu'il y ait des émeutes ? ».

Puis l'avocat général prend le relais, décrit « des scènes de « guerre civile », des « tirs de mortiers » et s'étonne « de voir autant de gens dehors la nuit ». On est fin juin, en soirée, mais peu importe. C'est une évidence pour lui : Idriss et Issa « faisaient parti des groupes hostiles ». Cela lui suffit pour confirmer les condamnations de « première instance ».

Pour les avocates de la défense, « on marche sur la tête », une Cour d'appel qui se borne au contexte sans vraiment s'intéresser aux faits reprochés, « c'est inadmissible ». Ce soir là, il y a eu « 46 interpellations, il faut donc trouver des coupables ». Aucun fait n'est pourtant caractérisé : « les fouilles, rien » ; « les vidéos, rien » ; seuls trois éléments : un bonnet, un vêtement noir et une conversation téléphonique.

Vendredi 20 octobre, la présidente du tribunal rendait son jugement. Issa est assis dans la salle entouré de ses parents. Idriss est toujours à Fresnes. Ici comme ailleurs, les délibérés peuvent s'énoncer en visio. Au-dessus du tribunal, un écran, plan fixe sur une petite salle étroite, une chaise et, au fond, une porte de prison close. La porte, ouverte par un maton, un détenu s'approche de la caméra en surplomb et s'assoit : le verdict tombe. Aujourd'hui, la visio n'a pas fonctionné. La sanction sera téléphonée par le greffier au maton qui transmettra : maintien en détention [4]. Issa à la barre entend la confirmation des peines de première instance. De retour auprès de ses proches, assis tous les trois, le temps d'encaisser la décision, ils ne s'attarderont pas.

Des membres de la Coordination anti-répression Paris IDF présent.es à l'audience


[1] Les prénoms ont été changés

[2] Les prénoms ont été changés

[3] Le 30 juin, le ministre de la justice Dupont-Moretti rédigeait une circulaire demandant une réponse judiciaire « rapide, ferme et systématique ».

[4] Idriss, après 4 mois en prison, pourrait « bénéficier » d'un aménagement de peine jamais exécuté dans les délais quand on est entre les murs de l'administration pénitentiaire. On pourra lui écrire (lire à ce propos, le rendez-vous proposé par la Coordination antirep dimanche 29 octobre à la Parole Errante ou / pour en savoir plus sur les écrits aux prisonniers, prendre les infos les mardis lors de sa réunion hebdomadaire).

De Gaza à Paris résistance (Rassemblement)

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Appel de Urgence Palestine pour un rassemblement place du Châtelet samedi 28 à partir de 14h30.

Israël commet des crimes de guerre d'une violence insupportable, avec le soutien du gouvernement français.
Nous exigeons un cessez-le-feu immédiat et la fin du blocus.

Halte au massacre, halte au siège !

Stop à l'occupation, au colonialisme et à l'apartheid.

Non à la répression de la solidarité avec la lutte du peuple palestinien.

Source : l'AMI (agenda militant)

Image de la vignette : Nnoman

[Brochures] Pour Zyed, Bouna, Rémi et les autres : ni oubli ni pardon !

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Super-bulletin n°45 d'infokiosques.net (novembre 2020).

Il y a quinze ans, en novembre 2005, se déroulait une révolte incendiaire d'une ampleur inédite sur pratiquement tout le territoire français, principalement dans les quartiers populaires, suite au décès le 27 octobre 2005 à Clichy-sous-Bois de deux adolescents qui tentaient de fuir un contrôle de police : Zyed Benna et Bouna Traoré.

Les assassinats policiers étaient fréquents avant 2005. Ils le sont toujours en 2020. Les tenants de la « real politik » prétendront que cette révolte incendiaire n'a donc servi à rien. Au contraire, cette révolte a montré que l'inacceptable ne doit pas rester sans réponse, que la colère partagée par la population peut s'exprimer de manière spontanée et autonome sans leaders ni manipulateurs, loin des partis politiques et des récupérateurs de toutes sortes. Et si cette révolte, comme beaucoup d'autres, a pu sembler sans perspectives, elle a posé le point de départ nécessaire à toute possibilité d'envisager un changement concret de société, un renversement réel du système : ce point de départ, c'est une défiance assumée, directe, sans dialogue ni médiation, de l'État et de son bras armé toujours plus puissant, la police.

Parce que pour tous les assassinats policiers, il n'y aura ni oubli ni pardon, parce que les luttes passées peuvent inspirer les luttes présentes et à venir, nous avons publié récemment sur infokiosques.net deux « vieilles » brochures revenant sur la révolte incendiaire d'octobre-décembre 2005 :


C7H16 : G la rage et je la garde

Anonymes, 3K2N, Boris Lamine, Des combattants émeutiers du 93, Salim / 2006 / Mis en ligne le 12 novembre 2020

Quelques mois après la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré à Clichy-sous-Bois et le déclenchement de la révolte incendiaire d'octobre-décembre 2005, le recueil de textes C7H16 réunissait des textes courts parus à l'époque sur internet, des extraits de fictions littéraires, une chronologie des événements et un street-CD.

Sommaire :
- Edito / G la rage et je la garde
- Chopé sur le net / La révolte fait rage...
- Nouvelle / Fonctionnaires en danger !
- Chopé sur le net / Ma cité
- Nouvelle / Juste un gamin qui grandit...
- Chronologie
- Extrait d'une nouvelle / Il fera si bon mourir
- Extrait d'une nouvelle / Au pied du fromager


La révolte incendiaire de novembre 2005 en France et l'hypothèse insurrectionnelle

Anonyme / 2010 / Mis en ligne le 2 novembre 2020

Réflexions anarchistes à propos de la vague incendiaire historique de novembre-décembre 2005, publiées initialement en 2010 dans la revue A Corps Perdu n°3.

Sommaire :
- Fausses questions
- ... et quelques réponses
- Pacification et révolte hexagonales
- Une révolte généralisée des banlieues ?
- Un langage commun : la destruction
- Groupes affinitaires et incendie volontaire
- Novembre 2005 et la question de l'insurrection


En 2010, nous avions mis en ligne cette autre brochure :

Postface à l'édition castillane de « C'est de la racaille ? Eh bien, j'en suis ! »

Alessi Dell'Umbria / avril 2009 / Mis en ligne le 19 avril 2010

C'est de la racaille ? Eh bien, j'en suis !, sorti au pritemps 2006, est un livre traitant des émeutes qui ont eu lieu en France en octobre-novembre 2005.

L'auteur, Alessi Dell'Umbria, n'est ni sociologue ni journaliste. Son livre, aux propos incisifs, replace les événements de l'automne 2005 dans le contexte d'une désintégration sociale et d'un renforcement de l'État-Léviathan. Il met également en évidence ce qui a fait la force de cette révolte quand des centaines de groupes se sont organisés pour s'affronter avec l'État. Sans mot d'ordre, mais en frappant juste ; sans délégation ni organe de liaison, mais communiquant entre eux à travers leurs actes ; une partie de la jeunesse pauvre du pays s'est identifiée à un sort commun et a fait preuve de solidarité loin de toute prose idéologique.
Sans discours moralisant ou victimisant, l'auteur s'adresse d'égal à égal aux révoltés des banlieues pauvres.

Dans le texte présenté ici, issu d'une postface rédigée pour l'édition castillane de C'est de la racaille ? Eh bien, j'en suis !, il revient de manière auto-critique sur son livre et en profite pour développer quelques points.


Il y a six ans, le 26 octobre 2014, un autre jeune était tué par la police, dans un tout autre contexte : Rémi Fraisse est mort, touché par un tir de grenade offensive, lors d'affrontements avec les gendarmes sur la ZAD du Testet.

Si sa mort a été suivie par de nombreuses manifestations sauvages, des rassemblements et des actions de solidarité qu'il serait intéressant de rappeler, cette brochure s'attache à la critique de la cogestion, c'est-à-dire de la collaboration avec le pouvoir, dans le cadre de la lutte contre le projet de barrage de Sivens.

Contester ou cogérer ? Sur la lutte contre le barrage du Testet à Sivens, et les leçons que l'on peut en tirer pour l'avenir des luttes territoriales

Anonyme, Des habitant⋅e⋅s du Tarn / octobre 2017 / Mis en ligne le 23 octobre 2020

À la suite d'une introduction qui se penche sur l'histoire de la cogestion (réformiste) comme stratégie d'intégration (para)étatique des dynamiques contestataires (révolutionnaires), ce texte fait une analyse de la lutte contre le projet de barrage du Testet, à partir d'un récit chronologique de 2011 jusqu'à 2017.

« Comment penser les rapports, dans les luttes territoriales actuelles, entre leurs deux composantes essentielles, les forces de contestation (radicale) et les visées de cogestion (citoyenne) ? Ces deux attitudes peuvent-elles, comme on le souhaite souvent la bouche en cœur, se combiner et se renforcer, à quelles conditions et jusqu'à quel point ? Quels sont les dangers de ce genre d'alliance, et peut-on s'en prémunir ? Comment les autorités tirent-elles parti de cette division, et comment pouvons-nous en tirer parti ?
L'histoire de la lutte contre le barrage du Testet dans la forêt de Sivens (Tarn), et de l'évolution de sa composition, peut nous donner des éléments de réponse. Après une première phase de constitution de l'opposition, et de coopération étroite entre ses deux principales composantes, la violence croissante de la lutte sur le terrain a fait monter la tension entre elles. Finalement, l'État a repris la main sur le terrain en jouant la double stratégie de la carotte participative (pour la frange cogestionnaire de l'opposition) et du bâton répressif (pour ses éléments contestataires).
 »

Sommaire :

  • Intro
  • La cogestion se sait impuissante et suscite la contestation
  • Les tensions montent de toutes parts
  • La carotte de la démocratie participative et le bâton des milices fascistoïdes
  • La composition explosive des luttes territoriales
  • Bonus : Tract « Après les pyromanes, les pompiers ? Les dessous du "projet de territoire" de Sivens »

Depuis le précédent super-bulletin, dix nouvelles brochures ont été mises en ligne. Il y a maintenant 762 brochures, trouvables ainsi :

par date de publication sur le site :
https://infokiosques.net/pardate

par titre :
https://infokiosques.net/partitre

par auteur-e :
https://infokiosques.net/parauteur


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Cet article a été publié initialement en novembre 2020.

L'antifascisme contre la révolution

jeudi 1 janvier 1970 à 01:00

Commentaires sur la révolution sociale espagnole.

« La révolution espagnole fut la plus singulière des révolutions collectivistes du XXe siècle. C'est la seule révolution radicale et violente qui se soit produite dans un pays d'Europe de l'Ouest et la seule qui ait été, malgré l'hégémonie communiste croissante, véritablement pluraliste, animée par une multitude de forces, souvent concurrentes et hostiles. Incapable de s'opposer ouvertement à la révolution, la bourgeoisie s'adapta au nouveau régime dans l'espoir que le cours des événements changerait. L'impuissance manifeste de leurs partis incita très vite les libéraux et les conservateurs à rechercher une organisation capable d'arrêter le courant révolutionnaire lancé par les syndicats anarchiste et socialiste. Quelques semaines seulement après le début de la révolution, une organisation incarnait à elle seule tous les espoirs immédiats de la petite et moyenne bourgeoisie : le Parti communiste. »

Burnett Bolloten, La Guerre d'Espagne. Révolution et contre-révolution (1934- 1939), 1991

1. La gauche n'a de sens qu'aux côtés de l'État et du Capital, comme médiatrice des rapports de classe et arbitre de l'exploitation. Formée à encadrer les exploité·es, à négocier en leur nom et à les réprimer si besoin, ses cadres sont d'une utilité certaine à la conservation des institutions de la bourgeoisie et à l'évolution de sa domination politique. Ses discours et son programme sont au final moins menaçants que son autonomie relative : à une époque où le capital cherche à étendre ses rapports à l'ensemble des sociétés, l'existence d'une communauté autre que la sienne fait obstruction. Le syndicalisme, même soumis et compromis, est de trop : tout organe de collaboration de classe doit émaner de l'État. Il faut le savoir, sans s'enfermer dans des manifestations datées de cette tendance totalitaire et des débats périmés à son sujet. Nous devons retrouver une perspective révolutionnaire, communiste, et penser ses manifestations présentes.

Mai 1937, barricade dans les rues de Barcelone.

2. Au triomphe du camp nationaliste a succédé celui des révisionnismes mythologiques de la Gauche. Retrouver une perspective révolutionnaire, communiste, implique de renouer avec l'autonomie de classe, que l'État et la Gauche ont violemment attaquée à travers le gouvernement de Front Populaire. La disciplinarisation productiviste du prolétariat et son désarmement par l'intégration des milices dans l'armée bourgeoise ont participé à la dissolution de la révolution dans la guerre. Et pas n'importe laquelle : celle de fronts, typique des États modernes. L'armée républicaine était une vulgaire armée bourgeoise. En 1934, cette même armée avait été placée - par cette même République - sous les ordres de Franco pour écraser la révolution asturienne. C'est à cette armée, mais aussi à la garde civile positionnée à l'arrière, que sont allées les armes et les munitions que réclamaient les milices prolétariennes sous-équipées. C'est derrière cette armée et cette police que les « anarchistes de gouvernement » se sont rangés, abandonnant définitivement toute perspective révolutionnaire au profit de la conservation d'un État bourgeois - et colonial. Le régime des brigades internationales n'a pas accordé son indépendance au Maroc. Le Front Populaire français et les généraux républicains espagnols s'y sont opposés. Une victoire militaire sans conservation de cette colonie menaçait la prospérité de la bourgeoisie libérale, qui entendait naturellement garantir ses intérêts au sortir de la guerre. De même, une victoire militaire sans écrasement préalable de la révolution sociale risquait d'être fatale à la bourgeoisie et à son État. L'antifascisme démocratique a servi de justification idéologique à la contre-révolution.

Le groupe anarchiste Les Amis de Durruti appelle, en vain, à s'allier au POUM, dont une colonne était en route depuis Madrid pour soutenir l'insurrection à Barcelone et en Catalogne.

3. La révolution espagnole s'éteint le 8 mai 1937 dans les rues de Barcelone. La CNT reste dans le gouvernement, qui vient de réprimer ses bases et leurs camarades du POUM, et passe sous la direction d'un socialiste plus droitier que son prédécesseur, chargé de régénérer l'autorité perdue par l'appareil d'État face à l'action des révolutionnaires. La direction de la CNT, c'est le parti de l'ordre. Peu après, le dirigeant du POUM Andreu Nin est arrêté par la police politique républicaine et exécuté, après avoir été dénoncé par André Marty, « inspecteur général » des Brigades internationales – responsable, en outre, du nettoyage opéré par les services du NKVD dans les rangs des volontaires armés. L'acharnement victorieux contre le POUM, les anarchistes et les autres antistaliniens – en un mot, les révolutionnaires – était parfaitement logique à une époque où le stalinisme s'était engagé dans une lutte mondiale pour le contrôle et la direction du prolétariat. L'antifascisme démocratique fut sans doute l'arme la plus sophistiquée de cette entreprise. Forçant les plus radicaux et radicales à s'aligner sur les plus modéré·es au nom de l'unité d'action, repoussant la révolution après la guerre, l'antifascisme démocratique a permis de dénoncer et de combattre comme « fascisme de gauche » toute tentative réelle de réaliser la révolution.

Carte des bâtiments tenus par les staliniens et leurs alliés (étoiles bleues pleines), et par les anarchistes et le POUM (étoiles rouges contourées) pendant les journées de mai 1937.

4. Ironiquement, l'antifascisme constitua le principal argument au service du renversement de la conception léniniste de la guerre. L'impératif stratégique n'était plus de « transformer la guerre impérialiste entre les peuples en une guerre civile des classes opprimées contre leurs oppresseurs, en une guerre pour l'expropriation de la classe des capitalistes, pour la conquête du pouvoir politique par le prolétariat, pour la réalisation du socialisme. » Au contraire, le passage à la guerre de fronts et l'intégration des milices dans l'armées régulière – avec son pendant social, la redisciplinarisation de la classe ouvrière désarmée, et son pendant politique, l'intégration de l'anarchisme à l'État – a marqué la transformation de la guerre civile des classes opprimées contre leurs oppresseurs en une guerre impérialiste entre les peuples, pour l'extension de la sphère d'influence du régime bureaucratique soviétique, pour la conservation des institutions représentatives bourgeoises, pour la réalisation de l'industrialisation capitaliste dans la péninsule ibérique.

Des militantes du Parti socialiste unifié de Catalogne (PSUC, stalinien) démontent une barricade d'insurgés sur les Ramblas. En bout de chaîne humaine, l'agent du NKVD Caridad Mercreder.

5. Cette intégration – opérée sur les plans militaire, politique et social – est directement liée à la nature des structures – armée régulière, État-nation, syndicats – qui l'ont rendue possible. Nous ne nous étendrons pas ici sur la critique du militarisme et de sa discipline verticale, ni sur celle de l'État et de ses mythes unificateurs. La critique du syndicalisme nous semble plus pertinente, parce que moins évidente chez les militant·es révolutionnaires. La CNT espagnole était un syndicat. Pour original et radical qu'elle soit, cette centrale syndicale ne pouvait aller contre sa fonction : la négociation du prix de la force du travail (salaire) et la médiation dans les conflits de classe au travail (compromis). La répression, la conscience des bases, le caractère de masse de l'organisation n'y peuvent rien : un syndicat anarchiste est d'abord et toujours un syndicat. Il n'y a, dès lors, rien d'étonnant à voir des responsables de la CNT et de l'UGT assis à la même table œuvrer à la rationalisation de la production et à son optimisation par la modernisation technique et organisationnelle ; à imposer le taylorisme-fordisme au prolétariat au nom de la socialisation du capitalisme. Du reste, la contradiction entre institution et subversion avait été résolue bien avant la guerre civile, en 1931, avec le renoncement à l'anti-parlementarisme et le soutien électoral au camp républicain. La CNT, reniant son anti-étatisme, partait à la conquête du pouvoir. Six années plus tard, elle appelait les ouvriers et les ouvrières à obéir à la police du régime républicain – celle-là même qui emprisonnait, harcelait et assassinait les prolétaires en lutte jusqu'alors ; celle-là même qui avait réprimé, avec l'armée, l'insurrection asturienne de 1934 (3 000 tué·es, 7 000 blessé·es, 30 000 arrestations). Un bon anarchiste de gouvernement est un anarchiste mort.

Corps d'un anarchiste tué lors des affrontements à Cerdanyola del Vallès, au nord de Barcelone.

6. L'antifascisme a joué un rôle fondamental dans la conservation du pouvoir étatique et bourgeois en Espagne. L'erreur impardonnable des révolutionnaires a été de penser la conquête du pouvoir derrière eux. En vérité, si le prolétariat a pu reprendre partiellement le contrôle sur son activité, il n'a jamais eu le pouvoir. Les barricades de mai 1937 étaient l'ultime tentative des révolutionnaires et du prolétariat catalans de détruire le pouvoir d'État – qui s'était maintenu dans le gouvernement du Front Populaire, et qui allait se maintenir indépendamment de l'issue militaire du conflit. Dernière tentative de revenir à l'état insurrectionnel qui avait ouvert la perspective d'une révolution, elle n'a pas suffi à mettre un pied dans la porte. Gavée d'antifascisme jusqu'à l'indigestion, maintenue dans un mensonge permanent par les revirements et les anathèmes de la presse républicaine et stalinienne, la classe ouvrière est allée à l'abattoir persuadée d'y trouver son paradis. L'antifascisme a permis à la République espagnole de gagner la partie contre le prolétariat, mais seulement pour mieux la perdre contre Franco.

La Prison Model de Barcelone, lieu d'enfermement des révolutionnaires catalans sous la Restauration, la dictature de Primo de Rivera, le Front Populaire et le régime de Franco.

Ce texte a été rédigé par le Groupe Révolutionnaire Charlatan

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