A force de barder nos véhicules d’assistance à la conduite et de sécurités gérées par un ordinateur de bord, nos voitures et tracteurs sont maintenant pilotés quasi obligatoirement par des logiciels conçus par les constructeurs. Des logiciels sans lesquels il est impossible d’espérer réparer ou modifier son véhicule sans en avoir l’accès.
C’est précisément ce que des constructeurs essaient d’imposer aux USA : en interdisant l’accès ou la modification aux logiciels embarqués dans les tracteurs et les voitures, réparer ou modifier son tracteur ou sa voiture pourrait bientôt devenir illégal…
L’intérieur de la cabine ConfortView d’un tracteur John Deer moderne
C’est le constructeur américain de tracteurs John Deer qui attaque le premier, en expliquant au bureau américain du Copyright que les fermiers ne possèdent pas leurs tracteurs. A cause des logiciels présents dans les machines vendues, les fermiers reçoivent « une licence correspondant à la durée de vie du véhicule pour le faire fonctionner ».
Un argument déjà léger pour qui a dépensé des dizaines de milliers d’euros dans un véhicule flambant neuf, mais ce n’est pas le pire qu’ait pu sortir John Deer :
« Permettre aux propriétaires d’avoir accès aux logiciels des tracteurs pourrait conduire au piratage de musique au travers du système sonore du véhicule. »
Comme si un fermier avait besoin de rooter ou jailbreaker son tracteur pour écouter des MP3…
Une manière capillotractée de voir les choses, qui pourra permettre aux constructeurs d’interdire toute modification logicielle future, si ce n’est en passant par un centre agréé John Deer, et donc d’obtenir le monopole sur les réparations des tracteurs de sa marque.
La plupart des constructeurs automobiles présents aux Etats-Unis ont plaidé avec le même genre d’arguments auprès du bureau du Copyright, en espérant obtenir le même monopole sur le logiciel des voitures, camionnettes et camions. Notez au passage que seul Tesla, un constructeur automobile basant pourtant une grande partie de sa stratégie sur le logiciel embarqué de ses voitures, n’a pas souhaité se joindre à la majorité des fabricants automobiles.
L’avenir pourrait bien s’assombrir pour les consommateurs si une telle loi venait à passer, mais déjà, une forme de résistance nous laisse entrevoir que le combat pour la propriété de nos véhicules ne se fera pas sans heurt : de plus en plus de fermiers américains choisissent d’acheter d’anciens tracteurs sans électronique embarquée, bien plus facile à réparer. Il existe même des tracteurs Open Source pour lutter contre cette main-mise sur l’industrie agricole. L’on peut espérer que la communauté des hackers saura casser les protections mises en place pour réaliser ce qu’il est déjà possible de faire sur sa tablette tactile ou son smartphone : modifier le système et les programmes pour faire tourner ce que l’on souhaite sur son appareil, sans demander l’autorisation au constructeur.
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