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Rapport MIQ : censure extra-judiciaire et police privée au nom de la protection du droit d'auteur

mercredi 14 mai 2014 à 10:39

Paris, 14 mai 2014 — Régulièrement reportée depuis le mois de janvier, la remise du rapport de Mireille Imbert-Quaretta sur la « prévention et la lutte contre la contrefaçon en ligne » à la Ministre de la Culture Aurélie Filippetti a eu lieu lundi. Comme le laissaient craindre les prises de position des responsables de la Haute autorité et le rapport Lescure publié en mai 2013, sous couvert de lutter contre la contrefaçon commerciale, ce nouveau rapport propose d'instaurer de dangereuses mesures de censure et de blocage sans intervention du pouvoir judiciaire.

Ce nouveau rapport vient préciser les recommandations d'un précédent document remis par Mireille Imbert-Quaretta en février 2013 et s'inscrit dans la lignée des conclusions de la mission Lescure, remise en mai 2013 et dont il reprend les orientations que La Quadrature du Net avait déjà dénoncées.

Derrière « l'autorégulation », le risque de la censure privée

Alors que la répression conduite par la Hadopi visait jusqu'à présent les échanges en P2P, ce rapport cherche à cibler les sites de streaming et de téléchargement direct, en proposant des moyens d'assécher leurs ressources financières. Cette approche “follow the money” était déjà au cœur de la loi SOPA aux États-Unis, repoussée en 2012 suite à une large mobilisation citoyenne en défense des libertés. Comme c'était également le cas dans l'accord ACTA, l'idée principale de ces mesures consiste à impliquer des intermédiaires dans la lutte contre la contrefaçon en ligne, avec des dommages collatéraux importants sur la protection des droits dans la mesure où le juge se retrouve marginalisé ou contourné au profit d'autorités administratives et d'entreprises privées. Il s'agit notamment de « responsabiliser » les acteurs qui sans être responsables d'actes de contrefaçon « engendrent des revenus aux sites massivements contrefaisants ».

Pour renforcer l'implication des acteurs de la publicité et du paiement en ligne, le rapport préconise l'adoption de chartes, dans lesquelles ils s'engageraient à ne plus fournir leurs services à des sites désignés par l'autorité comme abritant massivement de la contrefaçon. Cette approche privilégiant le « droit souple » et « l'autorégulation » pourrait paraître à première vue moins critiquable que la répression par des sanctions, le rapport proposant l'instauration d'une « mission d'information » confiée à une « autorité publique », un « tiers de confiance », dont le rôle serait de dresser une liste noire de sites contrefaisants, sur la base de critères « objectifs ». En réalité, ces propositions portent en elles le risque de déléguer à des acteurs privés la lutte contre la contrefaçon commerciale, là où seul le juge est à même de garantir la protection des droits fondamentaux, notamment à un jugement équitable et contradictoire. Ainsi, La Quadrature du Net rappelle avec force que seul un juge devrait pouvoir dresser de tels constats, dans le cadre d'une procédure respectueuse des droits de la défense. Même si le rapport prévoit que cette liste serait publique et ne va pas jusqu'à envisager des sanctions pour les intermédiaires refusant de se prêter à ce système d'autorégulation – comme la loi SOPA et l'ACTA tentaient de l'imposer et comme le réclament certains lobbies de l'industrie culturelle – il n'en reste pas moins que la pression imposée à ce type d'acteurs sera suffisamment forte pour les pousser à mettre en œuvre une forme de censure privée. Les régies publicitaires ont déjà été sollicitées pendant la réalisation du rapport pour sonder leur propension à coopérer sur ces bases.

Responsabilisation des intermédiaires techniques et extension du blocage judiciaire

Par ailleurs, le rapport contient plusieurs recommandations tendant à remettre en cause l'équilibre des responsabilités fixée actuellement par la Loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN) en ce qui concerne les hébergeurs de contenus, et à aggraver ses dérives. Pour contourner l'interdiction prévue par la LCEN et la directive européenne sur le commerce électronique d'imposer à des tels acteurs « une obligation générale de surveillance des contenus qu'ils stockent », le rapport préconise de confier à une autorité administrative la possibilité d'adresser aux sites des « injonctions de retrait prolongé » afin d'éviter la réapparition de contenus supprimés après signalement pendant une durée déterminée. Le rapport préconise qu'une telle solution puisse s'appliquer aux sites participatifs comme YouTube ou DailyMotion. Pour assurer techniquement l'application de ces injonctions, il est fait référence aux outils de reconnaissance de contenus à base d'empreintes, tels que le système ContentID de YouTube. La Quadrature du Net a déjà vivement critiqué ces dispositifs qui ont pour effet de renverser la charge de la preuve aux détriments des usagers, tout en faisant jouer aux intermédiaires un rôle de police privée du droit d'auteur, avec des dommages collatéraux importants sur l'exercice de la liberté d'expression. Le rapport Imbert-Quaretta préconise en réalité une généralisation de ces « Robocopyright », en proposant d'engager « la responsabilité du prestataire du service de communication au public en ligne » dans le cas de non-respect de l'injonction.

Enfin, le rapport propose d'aller plus loin que les conclusions de l'affaire AlloStreaming en matière d'application des décisions de justice prononçant le blocage d'un site contrefaisant. Il est proposé en effet de confier à une autorité publique le suivi auprès des FAI et des moteurs de recherche de l'exécution de telles mesures, notamment en ce qui concerne la réapparition de sites miroirs. Le rapport envisage que cette fonction puisse être exercée par une « autorité transverse », dotée d'une compétence générale en matière de blocage, couvrant les dispositifs déjà existant en matière de pédopornographie et de cybersécurité, étendus à la lutte contre la contrefaçon. Sur ce point, La Quadrature du Net rappelle son opposition de principe aux mesures de blocage, qui sont globalement inefficientes et toujours porteuses d'un risque de surblocage d'usages licites. L'instauration d'une « Haute autorité du blocage » ne peut conduire qu'à ancrer le recours à ce procédé critiquable dans le paysage français, tout en marginalisant encore une fois le rôle du juge.

La légalisation du partage non-marchand est le meilleur moyen de lutter contre la contrefaçon commerciale

Face à ces multiples risques de dérives dont le rapport « MIQ » est porteur, La Quadrature du Net rappelle que le meilleur moyen de lutter contre la contrefaçon commerciale consiste à légaliser le partage non-marchand entre individus sans but de profit. Les sites de streaming et de téléchargement direct sont le produit de l'acharnement depuis des années à lutter contre le partage décentralisé des œuvres entre individus. Cette forme de partage constitue un droit culturel fondamental dans l'espace numérique comme il l'est pour les œuvres sur support, même s'il doit être encadré. Ce droit est la condition contemporaine d'exercice de la « participation culturelle à la vie de la cité », établie par la Déclaration universelle des droits de l'Homme.

Il est significatif à cet égard qu'alors que la lettre de mission de Mireille Imbert-Quaretta faisait référence à la lutte contre la « contrefaçon commerciale », le rapport ne s'appuie pas dans ses développements sur la distinction entre le partage non-marchand et la contrefaçon commerciale pour lui préférer l'expression floue de site « massivement contrefaisant ». Le rapport mélange ainsi des formes très différentes d'accès aux œuvres, et range même les annuaires de liens dans la catégorie de ces « sites massivements contrefaisants ». Pour La Quadrature du Net, la fourniture de moyens, même commerciaux, à l'exercice du droit au partage des œuvres entre individus est tout aussi légitime, pourvu que cette fourniture de moyens n'interfère pas avec les pratiques de partage des individus en favorisant certaines œuvres ou ayants droit pour des motifs économiques. La répression de la référence et sa privatisation sous couvert de garanties de l'État aux intermédiaires qui la pratiqueraient porte une atteinte majeure à la liberté d'information et de communication.

« Sans surprise, le rapport remis à Aurélie Filippetti par Mireille Imbert-Quaretta échoue à proposer les mesures à même de concilier droit d'auteur et pratiques culturelles actuelles. Au lieu de ça, il propose le développement de mesures aggravant la transformation des intermédiaires techniques en police privée et la censure extra-judiciaire au nom de la protection des intérêts des ayant droits. Si le gouvernement envisageait réellement d'inscrire dans la loi de telles dispositions et de persister dans le développement des politiques répressives dans le domaine numérique démarré par ses prédécesseurs, les citoyens devraient se mobiliser d'urgence pour faire enfin entendre leur voix dans ce débat » déclare Philippe Aigrain, co-fondateur de La Quadrature du Net.

Rapport MIQ : le vrai visage du SOPA à la française

lundi 12 mai 2014 à 18:35

Paris, 12 mai 2014 — Après des mois de tergiversation le rapport de Mireille Imbert-Quaretta consacré aux « Outils opérationnels de prévention et de lutte contre la contrefaçon commerciale en ligne » a été remis à Aurélie Filippetti, la ministre de la Culture. Son contenu conforte les craintes exprimées par la société civile, puisqu'il propose de mettre en place une infrastructure où l'administration et les intermédiaires techniques, financiers et de publicité, sont en position de force pour déterminer le caractère contrefaisant ou non des sites de partage et pour agir contre eux. Ce système, contournant le pouvoir judiciaire, porte atteinte aux droits fondamentaux de chacun. La Quadrature du Net appelle les citoyens à se tenir prêts à s'opposer à ces mesures si le gouvernement venait à envisager de les reprendre à son compte.

Régulièrement reporté depuis le mois de janvier, le rapport « MIQ » vient finalement d'être remis à Aurélie Filippetti, la ministre de la Culture, sans qu'aucun membre d'une organisation de la société civile n'ait été auditionné pour sa rédaction. On ne s'étonnera donc pas que ce rapport reprenne, en les détaillant, les demandes les plus arrogantes des lobbyistes des industries du divertissement. De la même manière que l'Hadopi punissait les citoyens pour ne pas avoir « sécurisé » leur connexion – sans jamais prouver qu'ils commettaient une contrefaçon en partageant leurs fichiers ou qu'il en résultait un dommage – ce nouveau rapport élude la question du périmètre légitime du partage et de ses effets. Une fois désignés comme « contrefaisant massivement » par une autorité administrative, ces sites feraient l'objet de deux types de mesures confiées aux intermédiaires techniques :

À charge pour les ayant-droits de saisir la justice, ensuite, s'ils le souhaitent (l'autorité administrative ayant auparavant constitué l'essentiel du dossier aux frais du contribuable), affirme le rapport. Une fois de plus, la justice tend petit à petit à être remplacée par des instances sans contrôle chargées de définir ce qui est légal ou non, tandis que le judiciaire n'intervient qu'en dernier lieu, pour punir les derniers récalcitrants. Une liste de sites « impurs »2 agrégera des plate-formes tirant profit directement ou indirectement de la mise en accès de contenus culturels à ses usagers, si tant est que ce gain financier soit nécessaire à cette qualification, la catégorie de « massivement contrefaisant » pouvant s'appliquer à des sites sans aucun but lucratif3.

« Ce rapport illustre l'aberration qu'il y a à prétendre réprimer fortement la fourniture de moyens de partage de fichiers sans but de profit entre individus sans avoir en parallèle reconnu le périmètre légitime de ce partage. Une fois de plus, on va dresser massivement une conjonction de groupes d'intérêts, d'intermédiaires et d'administrations mises à leur service contre les citoyens qui font vivre chaque jour la culture » déclare Lionel Maurel, co-fondateur de l'association La Quadrature du Net.

« La Quadrature du Net appelle les citoyens et les parlementaires à la plus grande vigilance à l'égard des suites qui seront données à ce rapport. Si le gouvernement s'avise de les mettre en œuvre par la loi et le décret, il doit s'attendre à une forte mobilisation citoyenne pour défendre les droits fondamentaux, au premier rang desquels celui à ne voir les libertés restreintes durablement que par une décision judiciaire » déclare Philippe Aigrain, co-fondateur de La Quadrature du Net.

La présidence italienne soutiendra-t-elle la neutralité du Net ?

vendredi 9 mai 2014 à 15:25

Paris, 9 mai 2014 — La voix de la présidence italienne au Conseil de l'Union européenne pourrait trancher parmi les discours gouvernementaux fustigeant le vote sur la neutralité du Net au Parlement européen ! Selon le portail d'information Euractiv, elle serait favorable au texte voté par les eurodéputés et prête à le défendre devant les gouvernements européens et les industries des télécoms. À l'approche de la publication du rapport d'orientation du Conseil de l'Union européenne sur ce sujet, prévu pour les 5 ou 6 juin, La Quadrature du Net salue cette prise de position encourageante, et appelle les citoyens européens à pousser leur gouvernement à suivre cet exemple.

Le 2 mai, le portail d'information Euractiv a rapporté la position de la présidence italienne du Conseil de l'Union européenne à propos de la réforme du Paquet Telecom votée par le Parlement européen le 3 avril dernier. Alors que les acteurs dominants des télécommunications et plusieurs gouvernements, dont la France, se sont déclarés opposés à ce texte, qui risque d'être sérieusement remanié dans un sens malheureusement contraire à la neutralité du Net lors de son passage au Conseil de l'Union européenne, cette prise de position tranche et constitue un signal encourageant.

Marco Peronaci, représentant permanent adjoint de l'Italie auprès de l'Union européenne, a ainsi déclaré lors d'une conférence organisée par ETNO : « Nous comprenons les préoccupations de l'industrie, mais nous pensons toujours que le [texte] doit faire l'objet d'une analyse sérieuse ». Une source diplomatique citée par Euractiv avance même que l'Italie, qui va prendre la présidence de l'Union européenne pour 6 mois à partir du 1er juillet prochain, voudrait défendre le texte tel qu'adopté par le Parlement européen. Tandis que plusieurs gouvernements semblent céder aux lobbies des télécoms pour réintroduire dans le texte les mesures autorisant les discriminations commerciales et revenir sur les avancées votées par les eurodéputés, les citoyens doivent soutenir de telles prises de position respectueuses du vote du Parlement européen et de la neutralité du Net.

« Cette prise de position de l'Italie est intéressante et encourageante. Elle montre que la neutralité du Net est un enjeu de société de plus en plus pris en compte politiquement, au plus haut niveau. Le gouvernement français, et notamment madame Lemaire en charge du numérique, doit suivre l'exemple de l'Italie et clarifier la position que la France va défendre lors des prochaines étapes législatives. Sans attendre, les citoyens doivent agir et appeler leur gouvernement à agir et à porter la voix citoyenne du Parlement européen et des défenseurs de la neutralité du Net.  », déclare Adrienne Charmet-Alix, coordinatrice des campagnes à La Quadrature du Net.

#OurNETmundial : Notre Internet mérite mieux qu'une « gouvernance »

vendredi 25 avril 2014 à 13:06

São Paulo, 25 avril 2014 — Sous l'influence des gouvernements et de l'industrie, le document final du forum NETmundial est devenu un texte inefficace et décevant. Malgré le discours courageux de la présidente du Brésil, NETmundial montre simplement à quel point les efforts pour une gouvernance mondiale et multipartite sont risibles et inutiles. Si l'Internet devait être gouverné, ce devrait être par les citoyens directement, indépendamment de ces structures, et sans attendre un « consensus global ». Notre infrastructure de communication partagée doit être considérée comme un bien commun, défini politiquement et défendu comme tel.

Le discours courageux de la présidente Dilma Rousseff en faveur des libertés numériques, de la neutralité du Net et contre la surveillance de masse a eu un impact négligeable sur les conclusions de NETmundial. La version finale du document sur les « principes de gouvernance d'Internet » est pire que les brouillons antérieurs : des mentions de la non-discrimination des communications (neutralité du Net), qui étaient déjà très faibles, ont été enlevées, alors que des passages sur le respect du droit d'auteur ont été ajoutés. En même temps, les passages du texte consacrés à la surveillance de masse – la raison initiale pour laquelle NETmundial a été convoqué ! – sont ridicules, n'appelant à rien de plus que « davantage de dialogue », échouant totalement à appeler à une quelconque action concrète.

NETmundial a eu cependant un résultat positif majeur : il montre la « gouvernance globale et multipartite de l'Internet » telle qu'elle est, ce cirque absurde de dix ans de Forums pour la Gouvernance de l'Internet (IGF), de discussions stériles qui laissent les citoyens déçus, où les industries et les gouvernements ont le dernier mot, et dont rien de concret n'est jamais sorti pour la défense de l'intérêt général. La farce de la gouvernance de l'Internet par NETmundial doit servir à réveiller les citoyens qui veulent réellement la fin de la surveillance de masse et favoriser les libertés numériques.

« Nous devons mener un combat politique pour obtenir la protection de nos droits et libertés, en créant un contexte global qui forcera les gouvernements à protéger Internet comme un bien commun, inspiré par les précédents siècles de lutte pour les droits civiques et humains. Partout dans le monde, nous devons exiger de nos gouvernements qu'ils s'inspirent de la récente loi brésilienne Marco Civil da Internet : bien qu'elle soit loin d'être parfaite1, elle constitue un modèle que les citoyens courageux peuvent soutenir auprès de leur gouvernement pour agir concrètement pour la protection des droits et libertés fondamentales et l'Internet libre » déclare Jérémie Zimmermann, co-fondateur de La Quadrature du Net.

Intrusion massive de la DGSE dans les communications des clients d'Orange : libertés en danger !

mardi 22 avril 2014 à 10:07

Communiqué commun de l'Observatoire des libertés et du numérique (OLN)1

Paris, 22 avril 2014 — Dans un dossier publié le 20 mars 2014, Le Monde a révélé – sur la base d'un document de 2010 du GCHQ britannique (Government Communications Headquarters) – que la DGSE avait accès « libre et total » aux réseaux d'Orange et flux de données qui y transitent. L'article « Espionnage : comment Orange et les services secrets coopèrent » montre par ailleurs que les agents de la DGSE et d'Orange coopèrent à casser le chiffrement des flux de données correspondants. Ces activités ont lieu hors de tout cadre légal et judiciaire. Il est sidérant que ces informations n'aient donné lieu à aucune réponse du gouvernement. L'Observatoire des libertés et du numérique (OLN) exige que des réponses politiques, légales et pénales soient apportées à ces agissements.

L'échelle exacte de recueil des informations n'est pas connue mais le fait que « la DGSE dispose, à l'insu de tout contrôle, d'un accès libre et total [aux] réseaux [d'Orange] et aux flux de données qui y transitent » dépasse toutes les craintes précédemment exprimées sur le développement de la surveillance généralisée dans le cadre français. Cet accès porte aussi bien sur les citoyens français qu'étrangers, et la collaboration avec le GCHQ en aggrave les conséquences.

Les révélations du Monde, non démenties, n'ont donné lieu à aucune déclaration du (précédent) gouvernement, mais uniquement à une réponse dilatoire de Stéphane Richard, Président d'Orange, selon lequel « des personnes habilitées secret-défense peuvent avoir à gérer, au sein de l'entreprise, la relation avec les services de l'État et notamment leur accès aux réseaux, mais elles n'ont pas à m'en référer. Tout ceci se fait sous la responsabilité des pouvoirs publics dans un cadre légal » (extrait de l'article du Monde référencé plus haut). On aimerait savoir quel cadre légal.

En réalité, il semble bien que ce soit une véritable opération de surveillance généralisée conjointe conduite par des agents de la DGSE et d'Orange, issus des mêmes corps d'État, et passant de l'une des organisations à l'autre qui ait été mise en place. L'existence de ce type de dispositif renforce toutes les inquiétudes dont nous avions déjà fait état à propos des dispositions de l'article 20 de la Loi de programmation militaire. Que vaut la soi-disant protection résultant de ce que l'accès au réseau passe par des demandes à l'égard des opérateurs, dans un contexte où certains de leurs agents travaillent main dans la main avec les services de renseignement en vue d'une surveillance de masse hors de tout cadre légal ?

À la lumière de ces révélations, le recours à des partenariats public-privé pour la mise en place d'une plateforme centralisée pour les interceptions sur mandat judiciaire, la PNIJ (Plateforme Nationale des Interceptions Judiciaires), soulève elle aussi de graves inquiétudes.

L'Observatoire des libertés et du numérique (OLN) alerte les citoyens et interpelle avec force le gouvernement et les parlementaires sur ces révélations. C'est l'État de droit et la démocratie qui sont menacées lorsque tout citoyen voit ses communications et ses expressions personnelles surveillées hors de tout cadre légal. Le gouvernement a une obligation immédiate de faire toute la lumière sur ces dérives, de dire comment il entend y mettre un terme, et d'indiquer quelles procédures pénales seront engagées.