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Trois théories explicatives des effets des jeux vidéo (et trois façons de les traiter)

jeudi 16 novembre 2017 à 07:22

Lorsque les psychologues étudient les jeux vidéo, ils cherchent dans un premier temps à établir des faits puis à les expliquer. Les faits consistent en des mesures simples qui mettent en rapport des éléments liés aux jeux vidéo (temps de jeu, genre etc) avec des comportements (agressivité, interactions sociales etc.)ou des traits de personnalité. Les théories sont très différentes des faits car il n’est pas possible de les observer. Ce sont des récits hypothétiques et explicatifs qui racontent comment les faits observés peuvent s’organiser. Trois théories sont généralement utilisées pour expliquer les effets des jeux vidéo : la théorie sociale cognitive (Bandura 1997, 2001), la théorie du transfert de l’excitation (Tannenbaum et Zillman, 1975; Zillman, 1988) et la théorie de l’amorçage (Berkowitz, 1984), Berkowitz et Rogers, 1986). Ces théories ont été assemblées en un modèle par Anderson dans un modèle appelé le Modèle Général de l’Agression  (Anderson et Dill, 2000; Anderson et Bushman, 2001)

La théorie sociale cognitive fait l’hypothèse que la violence présentée comme justifiée dans les jeux vidéo est internalisée par les joueurs. Elle peut ensuite plus facilement être transférée dans des situation non ludiques parce que les joueurs ont tendance à s’identifier aux personnages .

Le modèle du transfert d’excitation explique différemment les effets des jeux vidéos. Selon ce modèle, l’excitation des parties de jeux vidéo intensifie l’état émotionnel du joueur et ont tendance à perdurer après la partie. Même si ce modèle ne prédit pas nécessairement que le joueur aura des conduites agressives après avoir joué à un jeu vidéo violent, l’intensité de l’état émotionnel peut fonctionner comme un facilitateur

Le troisième modèle théorique explique les effets des jeux vidéo par l’amorçage. Les jeux vidéo violents facilitent l’accès à des pensées associées à la violence et à la cognition qui sont après coup transférées dans des situations de la vie quotidienne.

 

Chaque théorie est aussi une clé d’intervention éducative. La théorie sociale cognitive indique qu’il faut éviter que les personnages des jeux vidéo deviennent des figures d’identification des enfants. Nous avons tous tendance à nous appuyer sur des images pour renforcer des attitudes psychologiques. Le processus devient problématique lorsque les modèles de la culture populaire deviennent la principale référence de l’enfant.  Il est donc important que les parents prennent le temps de discuter avec leurs enfants des stratégies utilisées par leurs héros dans les jeux vidéo. La violence était-elle nécessaire ? Justifiée ? L’important est d’aider l’enfant à construire petit à petit un bon jugement moral qui lui permettra de se décentrer de ce qu’il vit avec ses jeux vidéo.

Le modèle du transfert d’excitation dit ce que les parents constatent banalement : après une partie de jeu vidéo, les enfants sont excités. Ce que le modèle ne dit pas, c’est que les jeux vidéo mettent les joueurs dans un état de tension car ils doivent rester pratiquement immobiles tout en vivant des émotions fortes ou intenses. Lorsque la tension du jeu s’arrête, il faut bien qu’elle trouve un excutoire. La préparation à ce moment de débordement, une bonne dose de patience et de l’empathie sont ici les meilleurs ingrédients

Enfin, les effets prédits par le modèle de l’amorçage peuvent facilement être au service de l’agenda éducatif. Les média amorcent des pensées et des émotions mais ces pensées et ces émotions peuvent aussi bien être positives que négatives. Ainsi, les jeux vidéo violents vont amorcer des pensées, des émotions et des comportements violents et les jeux vidéo prosociaux vont alimenter des pensées, des émotions et des comportements prosociaux. Il peut donc être utile de donner aux enfants, a coté des jeux vidéo violents, des jeux vidéo qui favorisent les conduites prosociales. Les jeux vidéo dans lesquels le joueur prend soin de quelque chose (un humain comme dans Les Sims, des animaux comme dans Lemmings, des batiments comme dans  Farmville) peuvent facilement jouer ce role

 

Quelque soit la clé éducative, l’important est d’éviter de faire du jeu vidéo une pratique solitaire en l’intégrant dans les discussions familailes.

 

 

Enfin, le modèle de l’amorçage

Tué par les jeux vidéo

jeudi 9 novembre 2017 à 09:11

Dans quelques rares cas, le jeu vidéo a été associé à la mort du joueur. En Virginie, Brian  Vigneault est mort en jouant au MMORPG War of Tank pendant presque 24 heures d’affilées en Février 2017. Brian Vigneault collectait de l’argent pour la fondation Make-A-Wish qui vient en aide aux enfants malade. Selon des témoins, il n’a pas dormi pendant cette période et buvait les boissons énergisantes Five hour Energy et Red Bull pour rester éveillé.

En 2015, deux taiwanais sont morts dans des conditions identiques. Le premier, était agé de 38 ans, et  été retrouvé mort devant son écran après avoir joué pendant 5 jours dans un cybercafé. Le second était un homme de 32 ans nommé Hsieh mort après avoir joué trois jours sans interruption

Un jeune homme de 18 ans originaire de Taïwan nommé Chauan est mort en Juillet 2012 après un marathon de Diablo III de 40 heures à un cybercafé.

En Février 2011, un chinois de 33 ans a passé 27 jours consécutif dans un jeu en ligne. Il est mort après 650 heures de jeu conscéqupitfs pendant lesquel il a pratiquement pas mangé ou dormi. En Août,  Chris Staniforth est mort au cours d’une session de Halo. Le jeune homme de 20 ans étaient connus pour jouer deux à trois fois par semaine à son jeu favori pendant des sessions d’une douzaine d’heures.

En 2006, un chinois de 26 ans surnommé Zhan est mort après un week end de jeu.

En 2005, le Coréen Lee Seung Seop décède après avoir joué pendant 40 heures à Starcraft

Le phénomène n’est pas nouveau. Les premiers cas de mort pendant une partie de jeux vidéo est attribué à Jeff Dailey et Peter Burkowski morts en jouant à Berzek. En 1981, Dailey est mort d’une crise cardiaque après avoir atteint le score faramineux de 16.000 points. L’année suivante, Burkowski est mort dans les même conditions.

Comment expliquer toutes ces morts? La plupart d’entre elles ont lieu dans l’atmosphère surchauffé et enfumée de cybercafés. Les joueurs ont aussi souvent l’habitude de boire des boissons énergétiques pour rester éveillés. Toutes les conditions sont ainsi réunies pour augmenter le risque d’embolie. En médecine, le phénomène est appelé Syndrome de la classe économique. Il correspond au fait que sur les vols de longue durée, l’immobilité et l’inconfort classes économiques augmente le risque de formation d’un caillot sanguin. Si le caillot remonte jusqu’au coeur ou aux poumons, l’accident peut-être mortel. Ces thromboses veineuses peuvent être évitées par une hydratation suffisante, des habits adaptés aux longs vols et une déambulation toutes les deux heures.

Dans son livre Death by videogames, le journaliste Simon PARKIN a une autre explication. Il explique ces morts subites  par le fait que le stress des jeux vidéo met le coeur des joueurs à rude épreuve. Simon PARKIN rapporte qu’en 1977, un cardiologue américain qui utilisait Pong pour créer des situations stressantes pour ses patients avait noté que leur rythme cardiaque et leur pression artérielle augmentait considérablement sans qu’ils en aient conscience

Il est difficile de d’affrimer avec certitude la cause de ces morts. Certains joueurs étaient du fait de leur obésité dans une situation de risque cardioi-vasculaire majeur. Si l’on ajoute la prise de boissons énergisantes le risque est encore plus important. En effet, l’ANSE consière que ces boissons consituent un risque cardio vasculaire non négligeable Le fait qu’ils jouaient beaucoup aux jeux vidéo fait que pour eux la probabilité de mourir d’une crise cardiaque devant un écran était plus grande que mourir devant un livre. L’idée d’un stress particulier des jeux vidéo sur le système cardiaque est possible. Mais les données apportées par Parkin sont déjà anciennes. Certains études montrent qu’il n’y a pas d’activation particulières du rythme cardiaque pendant une session de FPS chez les joueurs expérimentés. Le syndrome de la classe économique constitue un facteur de risque supplémentaire qui est déjà bien documenté. On a donc tout un ensemble de facteurs de autour de l’activité jeu vidéo qui peuvent être dangereusement majorés pour des personnes qui sont déjà à risque.

La bonne nouvelle est que ces risques peuvent être facilement minorés par deux mesures simples. Tout d’abord, les boissons énergétiques sont à éviter du fait du risque qu’elle font peser sur la santé. Ensuite,  des poses régulières et une bonne hydratation  durant les sessions de jeu vidéopermettent d’éviter les risques du syndrome de la classe économique.

 

 

SOURCES

PARKIN, Simon. Death by Video Game: Tales of obsession from the virtual frontline. Serpent’s Tail, 2015.

 

Les personnes isolées se tournent preférentiellement vers les jeux vidéo violents

lundi 6 novembre 2017 à 07:00

L’article de Alessandro GABBIADINI et Paolo RIVA  Social exclusion predicts violent video game preferences and fuels aggressive inclinations in adolescent players publié dans la revue Agressive Behavior examine un aspect assez peu exploré des relations entre les jeux vidéo et les comportements. Une grande partie de la recherche a en effet tenté de comprendre quels étaient les effets des jeux vidéo violents sur les comportements des adolescents. Cette recherche regarde en amont en tentant de comprendre quels sont les facteurs qui poussent les adolecents à jouer à des jeux vidéo violents.

Un dispositif expérimental a été utilisé pour tester deux conditions. Dans l’expérienc 1, des adolescents sont artificiellement mis dans une situation d’exclusion sociale puis sont interrogés sur le contenus de 9 jeux vidéo (violents, non violents et pro-sociaux). Les résultats montrent que les personnes qui ont été mis dans une situation d’exclusion sont davantage jouer à des jeux vidéo violents. Dans l’expérience 2, les adolescents sont assignés à un jeu vidéo violent ou non-violent. Puis on leur laisse l’occasion d’exprimer leurs inclinaisons agressives envers les exclus. Les résultat montrent que les participants exclus ont le plus haut niveau d’inclinaison agressives envers les autres.

Ainsi, la recherche de GABBIADINI et ses collègues  montre que l’exclusion est un facteur qui joue dans le choix des jeux vidéo agressifs et que les inclinaisons agressives sont une combinaison de facteurs qui viennent du jeu vidéo violent et de l’exclusion. L’exclusion sociale pourrait être une variable intermédiaire entre les jeux vidéo et les comportements. En effet, la recherche a montré que les adolescents vont préférentiellement vers les jeux vidéo violents pour traiter des sentiments pénibles. Il se pourrait que ces sentiments pénibles aient été provoqués par une  exclusion sociale. Les personnes exclues se tourneraient vers les jeux vidéo soit pour réguler leur humeur, soit parce qu’ils sont moins capables de s’auto-réguler, soit parce qu’elles sont moins capable de maintenir un niveau de moralité suffisant.

 

Le design expérimental de la recherche rend difficile toute généralisation mais la conceptualisation des résultats par leurs auteurs est intéressante pour toute personne qui s’intéresse aux enfants. Devant un adolescent qui montre un goût excessif pour les jeux vidéo violent, les interventions devront prendre en compte ses relations sociales plutot que de tempérer une éventuelle agressivité.

 

SOURCE : Gabbiadini A, Riva P. The lone gamer: Social exclusion predicts violent video game preferences and fuels aggressive inclinations in adolescent players. Aggressive Behavior. 2017; 1–12. https://doi.org/10.1002/ab.21735

 

 

Pour résoudre un problème, les iGen commencent par se distraire

dimanche 5 novembre 2017 à 09:52

 

Les mécanismes de coping sont des stratégies d’ajustement et d’adaptation qu’une personne met intentionnellement en place pour résoudre un problème personnel. Une recherche publiée sur  le blog Queendom  montre que les boomers et les XGens ont tendance à utiliser des mécanismes de coping sains. La dernière génération se caractérise par l’utilisation d’un mécanisme de coping qui est habituellement décrit comme inadapté. En efeft, les générations précédentes considérent qu’l vaut mieux traiter immédiatement les problèmes tandis que la dernière génration se donne d’abord le temps de distraction. Pour un boomer, c’est très certainement la pire stratégie possible. Mais ce mécanisme de coping est le premier cité par les iGen. Le fait que les personnes nées après 1996 utilisent préférentiellement ce mécanisme doit arrêter. Comment expliquer que ce qui deux générations avant été considéré comme un problème devienne le mécanisme préférentiel de toute une génération ?

SOURCE :

https://queendomblog.wordpress.com/2017/10/20/coping-through-escapism-are-todays-youth-having-trouble-facing-reality/

Les jeux vidéo n’isolent pas les joueurs

vendredi 3 novembre 2017 à 11:30

Les parents s’inquiétent souvent de ce que les jeux vidéo puissent avoir une influcence néfaste sur le développement de leurs enfants. Une de ces inquiétudes est alimentée par le fait qu’ils préfèrent voir leurs enfants s’amuser avec des amis plutôt que de les voir jouer aux jeux vidéo.  De ce point de vue, les jeux vidéo seraient problématiques parce qu’ils empechent les enfants d’avoir les interactions sociales dont ils ont besoins. Les résultats de la recherche menée sur les jeux vidéo permettent de lever ces craintes. 

L’hypothèse du remplacement a été soutenue par Gary SELNOW qui montre que les enfants qui jouent beaucoup aux jeux vidéo ont tendance à penser qu’ils sont plus amusants que les activités avec les autres enfants. Cette conception est proportionnelle au temps de jeu. Plus les enfants jouent aux jeux vidéo, plus ils ont tendance qu’ils sont des compagnons bien plus agréables que les autres enfants Les jeux vidéo pourraient donc être utilisés par les enfants en remplacement à des activités sociales avec d’autres enfants. SELNOW reste cependant isolé. En effet, peu d’études confirment l’idée que les jeux vidéo sont en concurrence avec d’autres activités sociales.

En 1983, un an avant l’article de SELNOW, une étude menée par GIBB et ses collègues avait déjà remis en cause ce lien. Pour les 280 enfants évalués, les chercheurs ne trouvent pas de lien entre les jeux vidéo et l’isolation sociale, la colère, la compulsivité ou les conduites antisociales. Cette absence de corrélation concerne aussi bien ceux qui jouent peu et ceux qui jouent beaucoup aux jeux vidéo ou les joueurs novices et les joueurs expérimentés.

Au Japon, John COWEL et Mariko KATO ont dupliqué une étude effectuée en Grande Bretagne  avec des résultats très différents. John COLWELL avait trouvé que une relation négative entre les jeux vidéo, les relations sociales et l’estime de soi. L’étude japonaise a recueilli des informations sur la fréquence et la durée des parties, les attitudes parentales par rapport aux jeu vidéo, et une échelle mesurant les attitudes des joueurs vis à vis des jeux vidéo et des relations sociales, l’estime de soi et l’agressivité. Les résultats montrent que l’amitié n’est pas corrélée avec le jeu vidéo, pas plus que l’estime de soi.

Une des toutes premières études sur l’impact des jeux vidéo sur les enfants dresse un portrait complexe des relations entre les jeux vidéo, l’ordinateur et la vie sociale des enfants. Publiée dans le Journal of Applied Social Psychology, l’étude de LIN et LEPPER montre une série de liens entre les activités numériques et différents secteurs de la vie des enfants. Les auteurs rapportent une relation entre la pratique des jeux vidéo et l’impulsivité, mais cette relation n’existe que pour les garçons. Il existe aussi une faible relation entre la pratique des jeux vidéo et une réduction des capacités d’attention des élèves. Là encore, cette relation n’existe que pour les garçons. Enfin, les jeux vidéo ne remplacent pas d’autres activité. Il s’agit d’une nouveau loisir qui s’ajoute aux activités déjà existantes. Les auteurs notent que a relation entre les jeux vidéo et les autres activités de loisir est positive et consistante. La lecture de livres est le seul domaine affecté. Les joueurs de jeu vidéo les plus impliqués sont aussi ceux qui lisent le moins. Là encore, ce lien se trouve uniquement chez les garçons

Emil SCHIE et Oene WIEGMAN trouvent que les enfants qui passent le plus de temps à jouer aux jeux vidéo sont aussi ceux qui regardent le plus la télévision, lisent le plus des comics, ont le plus d’activité sportives et ont tendance à utiliser le plus des ordinateurs. Ils notent que les garçons jouent plus que les filles et que le temps passé à joueur aux jeux vidé n’est pas corrélé avec le fait d’être identité par les autres enfants comme plus agressif que les non-joueurs. Les auteurs trouvent aussi une relation négative entre les conduites prosociales et les jeux vidéo mais cette relation apparaît lorsque l’analyse sépare les garçons des filles. L’isolation sociale, la solitude, la popularité et le statut social ne sont pas corrélés avec les jeux vidéo. Enfin, il n’y a pas de relation entre les jeux vidéo et les performances scolaires

Contrairement à ce que pensait SELNOW, l’idée que les “amis électroniques” puissent remplacer les amis réels n’est donc pas vérifiée. Par contre, plusieurs études montrent que les jeux vidéo sont imbriqués dans la vie sociale. D’autres études observent que les jeux vidéo sont liés à des interactions sociales. Par exemple, MITCHELL (1985) rapporte que l’achat d’un jeu vidéo est suivi d’une augmentation des interactions sociales dans la famille. Cette observation est appuyée par COLWELL, GRADY et RHAITI (1995) qui notent que les enfants qui jouent aux jeux vidéo ont davantage tendance à aller voir leurs amis en dehors de l’école. D’une façon générale, la recherche suggère que les jeux vidéo ne remplacent pas des activités sociales mais s’ajoutent à celles qui existent déjà. Les enfants socialement actifs le sont autant lorsqu’ils ont une console, un PC ou une tablette. Par contre, ceux qui sont isolés pourront trouver dans des jeux vidéo un moyen de cosntruire les relations sociales dont ils ont besoin.

SOURCES