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Conspiracy Watch | L'Observatoire du conspirationnisme

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Conspiracy News #18.2022

dimanche 1 mai 2022 à 12:02

L’actu de la semaine décryptée par Conspiracy Watch (semaine du 25/04/2022 au 01/05/2022).

« FRAUDE ». La chronique « Antidote » de Tristan Mendès France du 1er avril sur France Inter était consacrée à cette question de la fraude électorale dans le cadre de l’élection présidentielle française, une thèse dont on pouvait craindre la prolifération à l’annonce des résultats finaux. Cela n’a finalement pas été le cas mais on a effectivement assisté, dans la complosphère française, à de nombreux épisodes de complotisme électoral (source : France Inter, 1er avril 2022).

Au lendemain de la réélection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République, le dimanche 24 avril, une rumeur pointant une supposée fraude électorale est apparue sur les réseaux sociaux. Elle s’appuie sur une séquence de la soirée électorale sur la chaîne France 2 qui aurait attribué en direct à Marine Le Pen plus de 14 millions de voix, alors que celle-ci en a comptabilisé 13,2 millions, selon le décompte final du ministère de l’intérieur. Un « bug purement technique » a expliqué la chaîne (source : Le Monde, 25 avril 2022 ; France 24, 26 avril 2022).

À écouter, en guise d’illustration de la dérive complotiste sur ce sujet, l’« analyse » de l’influenceur complotiste Jean-Jacques Crèvecœur, évoquant le rôle des Khazars (dont descentraient les Juifs ashkénazes) qui auraient selon lui « décidé de prendre sous leur coupe l’ensemble du monde pour offrir un maximum d’âmes aux principes sataniques » (source : L’extracteur/Twitter, 28 avril 2022). Une thèse très populaire au sein de l’extrême droite antisémite depuis plusieurs décennies…

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L’avocat antivax Carlo Alberto Brusa, dont le complotisme constitue également un fonds de commerce, a lui aussi dénoncé une fraude électorale (source : Cerdjman/Twitter, 25 avril 2022).

Pour l’économistre Frédéric Lordon, c’est l’élection elle-même qui est une « fraude ». Animateur d’un blog hébergé par Le Monde diplomatique, l’essayiste estime en effet que « là où il y a de l’élection, il n’y a plus de politique sinon mutilée » (sic)…

Quant à Jean-Luc Mélenchon, il a estimé, concernant les prochaines élections législatives, que « les gens n’accepteront pas deux fois de se faire voler la victoire par ceux qui refuseront de construire cette nouvelle majorité », faisant allusion aux partis de gauche ne s’étant pas rangé derrière sa candidature lors de l’élection présidentielle (source : France 24, 30 avril 2022). Une prise de position considérée par certains comme relevant d’une « rhétorique trumpiste ».

MANIPULATION. Selon L’Insoumission, la plateforme multimédia d’actualités de La France insoumise, 44% des Français souhaiteraient que Jean-Luc Mélenchon gouverne le pays. Il s’agit en réalité d’une manipulation des chiffres comme l’a montré un thread de notre rédaction (source : Conspiracy Watch/Twitter, 25 avril 2022).

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En outre, un sondage BVA pour RTL montre que si 64 % des Français souhaitent un gouvenement de cohabitation à l’issue des élections législatives, 62 % sont toutefois hostiles à ce que le chef de file de la France insoumise devienne Premier ministre (source : Le Figaro, 29 avril 2022).

SYMBOLISME. C’est sur les notes de l’Ode à la joie de Beethoven, hymne officiel de l’Union européenne, que le président de la République réélu Emmanuel Macron a rejoint le podium, installé au Champ-de-Mars, où il a prononcé un discours, tenant son épouse par la main et entouré d’une vingtaine d’enfants de ses principaux collaborateurs. Autant de symboles que la frange la plus radicalisée des complotistes français n’a pas manqué d’analyser à l’aune de ses obsessions (source : Libération, 25 avril 2022).

Christine Boutin a quant à elle relayé avec conviction l’infox selon laquelle le chef de l’État et son épouse auraient, au cours de la soirée du 24 avril, exécuté en public un geste satanique. « C’est épouvantable pour ceux qui savent » a commenté l’ancienne ministre, soutien d’Éric Zemmour lors de l’élection présidentielle. En réalité, le geste en question signifie « Je t’aime » en langue des signes (source : Conspiracy Watch/Twitter, 26 avril 2022).

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ALEX JONES. Il se targue d’influencer Bolsonaro et Orbán. Il est antivax, antimusulman, climatosceptique, poutinolâtre : Alex Jones fut le propagateur frénétique d’à peu près tous les bobards complotistes en circulation au sein de l’extrême droite américaine au cours des deux dernières décennies. Le Texan a accumulé les théories les plus folles et les dollars. Mais les mauvaises blagues ont une fin : le businessman accumule en effet les revers judiciaires et, menacé de devoir verser de lourds dommages et intérêts aux plaignants dans l’affaire de l’école Sandy Hook, il organise tranquillement son insolvabilité (source : Franc-Tireur, 27 avril 2022).

DÉMOCRATES (US). Le Congrès américain a adopté un projet de loi autorisant le président à saisir les avoirs appartenant à des personnes étrangères dont la richesse provient en partie du soutien ou de la corruption liés à Vladimir Poutine. Des sanctions à l’encontre des oligarques russes contre lesquelles les démocrates Alexandria Ocasio-Cortez, Ilhan Omar, Cori Bush et Rashida Tlaib ont voté (source : Jamie Dupree/Twitter, 27 avril 2022).

JULIAN ASSANGE. La figure controversée de Julian Assange est au centre de multiples théories conspirationnistes, mais il en est aussi la source. Le dernier épisode de « Complorama » revient sur la personnalité complexe du fondateur de WikiLeaks, ses liens avec la complosphère. « WikiLeaks et complotisme », c’est le 29e épisode de Complorama, avec Rudy Reichstadt, directeur de Conspiracy Watch, et Tristan Mendès France, maître de conférence et membre de l’Observatoire du conspirationnisme, spécialiste des cultures numériques. Un podcast à retrouver sur le site de franceinfo, l’application Radio France et plusieurs autres plateformes comme Apple podcastsPodcast AddictSpotify, ou Deezer.

RÉGULATION.  Après plusieurs mois de négociations, un accord a été trouvé, samedi 23 avril, entre les institutions européennes au sujet du règlement sur les services numériques (Digital Services Act, DSA) qui imposera aux grandes plateformes numériques de mieux réguler les contenus illicites et dangereux en ligne. Le DSA met à jour la directive sur l’e-commerce née il y a vingt ans. Son objectif est de mettre fin aux dérives des réseaux sociaux qui ont souvent défrayé la chronique : assassinat du professeur d’histoire Samuel Paty en France après une campagne de haine, en octobre 2020 ; assaut de manifestants sur le Capitole aux États-Unis, en janvier 2021, en partie planifié grâce à Facebook et Twitter… (source : Le Monde, 23 avril 2022).

ELON MUSK. Le milliardaire américain vient d’acquérir le réseau social Twitter. Dans un entretien au Point, Gérald Bronner, qui a piloté la commission « Les Lumières à l’ère numérique », explique les raisons de s’en inquiéter. Selon le sociologue, Elon Musk se revendique d’une idéologie, le libertarianisme, « qui défend l’idée que l’expression de la liberté est toujours bonne [et qu’] une totale liberté d’expression aboutirait même à une société de concorde. Or ce n’est pas du tout ce que l’on observe ». Parmi les mesures permettant de limiter la prolifération des fausses informations sur les grandes plateformes sociales, Bronner suggère de « limiter la prime de visibilité aux « super-utilisateurs » [qui représentent] 1 % des comptes actifs, mais produisent 33 % des contenus ! » (source : Le Point, 29 avril 2022).

CLIMATOSCEPTICISME. Twitter a annoncé vendredi 22 avril, soit le « jour de la Terre », que les publicités trompeuses sur le changement climatique seraient désormais interdites, afin de ne pas saper les efforts en faveur de la protection de l’environnement.  « Nous pensons que le climatoscepticisme ne devrait pas servir à générer des revenus sur Twitter, et que les pubs trompeuses ne devraient pas distraire des conversations importantes sur la crise climatique », a expliqué le réseau social dans un communiqué (source : Ouest-France, 23 avril 2022).

LES DÉCONSPIRATEURS. Tristan Mendès France, Rudy Reichstadt et David Medioni ont reçu Florian Cafiero, ingénieur de recherche au CNRS spécialisé en sciences sociales computationnelles et en linguistique quantitative, co-auteur avec Jean-Baptiste Camps de Affaires de style – Du cas Molière à l’affaire Grégory : la stylométrie mène l’enquête (Le Robert, 2022). Au sommaire de ce dix-septième épisode : présidentielle et complotisme ; pourquoi le complotisme est une impasse pour les mouvements sociaux ; les liens entre les complotistes et l’extrême droite ; des nouvelles des États-Unis : Barack Obama, Alex Jones, Tucker Carlson ; Christopher Key et l’urinothérapie ; comment la stylométrie a permis d’identifier l’identité de « Q » (source : Conspiracy Watch, 26 avril 2022).

[PODCAST] Julian Assange, figure controversée au centre de théories du complot

dimanche 1 mai 2022 à 09:45

À travers ses prises de position et ses méthodes parfois critiquées, le fondateur de WikiLeaks a parfois été la cible de théories conspirationnistes… Il en a aussi alimenté.

C’est une affaire tentaculaire qui n’en finit pas : la justice britannique a formellement autorisé l’extradition de Julian Assange, mercredi 20 avril. Un tribunal londonien a officiellement rendu une ordonnance d’extradition à l’encontre de l’Australien de 50 ans, poursuivi par la justice des Etats-Unis pour la diffusion, à partir de 2010, de plus de 700 000 documents classifiés sur les activités militaires et diplomatiques américaines, notamment en Irak et en Afghanistan. Il risque 175 ans de prison, ce que ses soutiens dénoncent comme une attaque gravissime contre la liberté de la presse.

Génie persécuté pour les uns, manipulateur paranoïaque pour les autres, la figure controversée de Julian Assange est au centre de multiples théories conspirationnistes. Sans remettre en cause le rôle majeur joué par WikiLeaks dans la révélation de crimes de guerre depuis 2006, ce nouvel épisode de « Complorama » revient la personnalité complexe du fondateur de WikiLeaks, ses liens avec la complosphère. Mais aussi sur les différentes théories du complot ayant émergé aux Etats-Unis après la fuite de documents, et la relation paradoxale entretenue entre Julian Assange et la Russie.

« WikiLeaks et complotisme », c’est le 29e épisode de Complorama, avec Rudy Reichstadt, directeur de Conspiracy Watch, et Tristan Mendès France, maître de conférence et membre de l’observatoire du conspirationnisme, spécialiste des cultures numériques. Un podcast à retrouver sur le site de franceinfo, l’application Radio France et plusieurs autres plateformes comme Apple podcastsPodcast AddictSpotify, ou Deezer.

 

Voir aussi :

Aux origines de la théorie du complot sur le meurtre de Seth Rich

« Wikileaks manipulé par la CIA » : décryptage d’une théorie du complot

Les Déconspirateurs – l’émission #17

mardi 26 avril 2022 à 15:13

Tristan Mendès France et Rudy Reichstadt décryptent l’actualité du complotisme, de la désinformation et de la haine en ligne avec David Medioni.

Au sommaire des Déconspirateurs : présidentielle : le coming-out des complotistes ; le complotisme électoral, quel bilan ? ; le retour des Gilets jaunes ? ; pourquoi le complotisme est une impasse pour les mouvements sociaux ; les liens entre les complotistes et l’extrême droite ; des nouvelles des États-Unis : Barack Obama, Alex Jones, Tucker Carlson ; « The End of Men », le docu viriliste de Tucker Carlson ; Christopher Key et l’urinothérapie ; comment la stylométrie a permis d’identifier l’identité de « Q ».

Invité : Florian Cafiero, ingénieur de recherche au CNRS spécialisé en sciences sociales computationnelles et en linguistique quantitative, co-auteur avec Jean-Baptiste Camps de Affaires de style – Du cas Molière à l’affaire Grégory : la stylométrie mène l’enquête (Le Robert, 2022).

(Emission enregistrée lundi 25 avril 2022)

Conspiracy News #17.2022

dimanche 24 avril 2022 à 19:56

L’actu de la semaine décryptée par Conspiracy Watch (semaine du 18/04/2022 au 24/04/2022).

DÉSINFOSPHÈRE. Influenceurs antisémites, figures antivax ou politiques d’extrême droite entretiennent des relations étroites. Le collectif « L’Extracteur », qui alerte sur les médecines « pseudo-alternatives », a dressé une cartographie très documentée de la désinfosphère et de ses personnages, d’Alain Soral à FranceSoir en passant par Thierry Casasnovas (source : Libération, 21 avril 2022).

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ANTIVAX. La Ligue nationale pour la liberté des vaccinations a officiellement appelé ses adhérents à voter pour Marine Le Pen au 2e tour du scrutin de la présidentielle. Dans un courrier, son président Jean-Pierre Eudier dresse le bilan du quinquennat d’Emmanuel Macron en dénonçant un « gouvernement tyrannique », un « État policier », la « violence d’État menée contre les opposants, assimilés à des ennemis intérieurs »… (source : Lucie Guimier/Twitter, 19 avril 2022).

TURQUIE. Proche du président Recep Tayyip Erdoğan, l’ultra-nationaliste turc Doğu Perinçek, connu pour avoir nié la réalité du génocide des Arméniens, appelle à voter pour Marine Le Pen, « contre la tyrannie américaine ». Selon lui, les accusations visant la candidate RN proviennent directement de Washington (source : Conspiracy Watch/Twitter, 23 avril 2022).

#BARRAGE. Vincent Glad relève qu’« un sondage informel mené par Silvano Trotta auprès des abonnés de sa chaîne Telegram à la veille du premier tour donnait ces résultats (sur 36 000 votants) : Dupont-Aignan, 58% ; Zemmour, 12 % ; Mélenchon, 11 % ; Le Pen, 6 % ; Lassalle, 5%, blanc ou abstention, 7 %. Naturellement, Macron avait obtenu 0 % » (source : Le JDD, 17 avril 2022).

« Faire barrage » à Emmanuel Macron : c’est, comme le rappelle Rudy Reichstadt, l’antienne de François Asselineau. Le chef de l’Union populaire républicaine (UPR), qui s’insurgeait il y a quelques années que France 5 classe son parti à l’extrême droite, estime dans une de ses cascades sophistiques qu’il « faut faire barrage à l’extrême droite, c’est-à-dire faire barrage à Macron, le président le plus facho de notre histoire » (source : Franc-Tireur, 20 avril 2022).

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ANTI-SYSTÈME. À lire dans le dernier numéro de Franc-Tireur la chronique de Christophe Barbier qui souligne la « logomachie complotiste » à laquelle Marine Le Pen a recours quand elle concentre ses tirs contre le « système ». Il voit dans cette rhétorique un potentiel révolutionnaire qui pourrait relever d’une stratégie visant à faire passer sa défaite comme le résultat d’un complot (source : Franc-Tireur, 20 avril 2022).

EXTRÊME DROITE ET COMPLOTISME. Une enquête de la Fondation Jean-Jaurès et Conspiracy Watch réalisée par l’Ifop, portant sur l’état du complotisme en France, avait établi une corrélation entre la proximité avec l’extrême droite et l’adhésion aux thèses complotistes. Dans une note, dont la (re)lecture est opportune en cette période électorale, Valérie Igounet, directrice adjointe de Conspiracy Watch et historienne spécialiste de l’extrême droite, avait analysé la porosité entre ces deux courants (source : Fondation Jean-Jaurès, 20 février 2019).

« ÉLECTION TRUQUÉE ». Selon une étude Ifop réalisée du 4 au 8 mars 2022 pour la Fondation Reboot, l’idée selon laquelle l’élection présidentielle 2022 serait ou pourrait être truquée a fait son chemin dans les esprits. Au total, 14 % des Français croient en cette affirmation tandis que 31 % « ne savent pas ». Le chiffre grimpe à 24 % chez les personnes utilisant internet comme principal moyen d’information, et il s’établit à 25 % lorsque cela concerne des personnes qui adhèrent aux théories du complot. D’un point de vue partisan, les électeurs de Marine Le Pen (30 %), d’Éric Zemmour (29 %) et de Jean-Luc Mélenchon (18 %) sont ceux qui approuvent le plus cet énoncé (source : Libération, 19 avril 2022).

Source : Ifop/Fondation Reboot, 31/03/2022.

INFOWARS. Le site complotiste Infowars s’est déclaré en faillite. Son fondateur et animateur, Alex Jones, a dû faire face à de multiples poursuites en diffamation liées à ses fausses affirmations selon lesquelles la fusillade mortelle à l’école primaire Sandy Hook de Newtown (2012) était une opération sous faux drapeau (false flag) mettant en scène des « acteurs de crise » (source : Washington Post, 18 avril 2022).

GRAND MENSONGE. Près de 35 % des Américains dont 68 % des républicains croient à la théorie du « Big Lie » (« grand mensonge ») répétée sans relâche par l’ancien président des États-Unis Donald Trump et amplifiée par les médias conservateurs, selon laquelle l’élection présidentielle de 2020 aurait été volée. Ils pensent que Trump fut le vrai vainqueur de l’élection présidentielle de novembre 2020 et qu’il devrait encore être à la Maison Blanche aujourd’hui. Analyse par Sarah Longwell (source : The Atlantic, 18 avril 2022).

BARACK OBAMA. L’ex-président américain sait qu’il n’aurait pas été élu sans les réseaux sociaux, mais il appelle aujourd’hui à les réguler. Dans un discours prononcé le 21 avril, Barack Obama a accusé les grandes plateformes d’avoir largement amplifié « les pires instincts de l’humanité ». Évoquant l’attitude de Donald Trump qui a refusé de reconnaître la victoire de Joe Biden et qui a encouragé ses partisans à assiéger le Capitole, le 6 janvier 2021, Obama a déclaré : « Ce doit être notre sonnette d’alarme pour réagir » (source : Le Temps, 22 avril 2022).

TUCKER CARLSON. L’animateur-vedette de Fox News, Tucker Carlson, dit ne pas comprendre l’animosité qu’inspire le complotiste Alex Jones : « Il est intelligent, diablement drôle, vraiment. Il est beaucoup plus talentueux que moi à bien des égards. » Invitée de son émission, la journaliste Savanah Hernandez lui a répondu : « C’est parce qu’il dit la vérité » (source : Conspiracy Watch/Twitter, 21 avril 2022).

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ANDRÉ BERCOFF. Selon certains internautes, Salah Abdeslam, le terroriste islamiste seul survivant de l’expédition criminelle du 13-Novembre, aurait, en larmes, appelé à voter pour Emmanuel Macron pour faire barrage à Marine Le Pen. Une rumeur complètement fausse colportée sans recul par des comptes très influents, par exemple celui du journaliste André Bercoff (source : Marianne, 18 avril 2022).

MICHÈLE RIVASI. La nouvelle commission spéciale chargée d’examiner la réponse de l’Union européenne à la pandémie de Covid-19 a élu sa présidente, Kathleen Van Brempt, ainsi que quatre vice-présidents, parmi lesquels Michèle Rivasi connue pour ses positions hostiles aux vaccins. On se souvient notamment que l’eurodéputée écologiste avait fait scandale en juillet 2021 pour avoir comparé, dans un tweet, le pass sanitaire à une politique d’apartheid. Elle avait aussi répondu à l’invitation, en septembre 2021, du « conseil scientifique indépendant » du site antivax Réinfo Covid (source : Action Antifouchiste/Twitter, 20 avril 2022).

PIERRE BARNÉRIAS. Après deux opus conspirationnistes qui ont contribué à désinformer sur la pandémie de Covid-19 et sur les mesures sanitaires engagées contre la propagation du virus, Pierre Barnérias récidive avec un troisième volet : Hold Out. À visionner, le thread du Dr Nendily, qui propose quelques extraits du film dont un hommage à « ces personnalités au cursus enviable qui ont été évincées, raillées, discréditées par une presse arrogante et complice d’un système inqualifiable tant son crime est immense », pendant que défilent à l’écran les visages de Didier Raoult, Christian Perronne, Louis Fouché, Alexandra Henrion-Caude ou encore Luc Montagnier… (source : Dr Nendily/Twitter, 22 avril 2022).

FRANCIS LALANNE. Sur le plateau du média complotiste FranceSoir, Francis Lalanne a dénoncé la « propagande […] qui a essayé de nous vendre son faux vaccin » et a voulu rétablir la vérité : « ce qu’est en train de faire Poutine en Ukraine est plus une libération de l’Ukraine qu’une occupation de l’Ukraine ». Épousant le narratif du Kremlin, cette figure de la complosphère a ajouté : « Il n’y a pas de guerre de la Russie à l’Ukraine, c’est l’Europe qui est en train de déclarer la guerre à la Russie. » (source : Docteur Marty/Twitter, 23 avril 2022).

RUSSIE. Depuis des années, la Russie de Poutine a progressivement converti les vérités du régime en « régime de vérité ». Une « vérité » faite de mystifications, d’affabulations, loin des faits, proche d’un mode orwellien – mais dont Poutine a compris combien elle était mobilisatrice politiquement. À l’heure où l’extrême droite arrive en France aux portes du pouvoir en s’inspirant de ce modèle, Guillaume Lancerau, dans une enquête publiée par Le Grand Continent, en propose une étude approfondie (source : Le Grand Continent, 20 avril 2022).

MALI. Désireuse de devancer toute tentative de désinformation, l’armée française a filmé ce qu’elle affirme être des mercenaires russes en train d’enterrer des corps près de la base de Gossi, dans le nord du Mali. Une manœuvre qui viserait selon elle à accuser les Français d’avoir laissé un charnier derrière eux, dernière étape d’une vive brouille sur place entre les autorités maliennes et leurs supplétifs russes du groupe Wagner, et la France (source : Huffington Post, 22 avril 2022).

BOBARDS DE GUERRE. Pour nier sa culpabilité dans le massacre de Boutcha, le régime de Vladimir Poutine a accumulé les allégations les plus contradictoires, cherchant par tous les moyens à retourner l’accusation contre les victimes. De manière remarquable, les nazis avaient usé des mêmes ficelles après le massacre d’Oradour-sur-Glane du 10 juin 1944 par la division blindée SS Das Reich (source : Conspiracy Watch, 22 avril 2022).

DÉSINFORMATION. Pour contribuer à assécher le financement de la désinformation, les acteurs publicitaires ont une responsabilité. Cela commence par l’instauration de davantage de transparence dans la publicité programmatique, source d’importants revenus pour la désinformation. Mais comment un annonceur peut-il contrôler les milliers de sites sur lesquels il diffuse ses campagnes ? Notamment « en s’équipant de technologies spécifiques et expertes en détection de fausses informations », explique Clément Bascoulergue, directeur commercial d’Integral Ad Science, une société de technologie publique américaine qui analyse la valeur des placements publicitaires numériques (source : Stratégies, 20 avril 2022).

D’Oradour à Boutcha : d’un écran de fumée l’autre

vendredi 22 avril 2022 à 16:56

Pour nier sa culpabilité dans le massacre de Boutcha, le régime de Vladimir Poutine a accumulé les allégations les plus contradictoires, cherchant par tous les moyens à retourner l’accusation contre les victimes. De manière remarquable, les nazis avaient usé des mêmes ficelles…

A gauche : une rue de Boutcha (Ukraine) après le retrait des forces russes (1er avril 2022) ; à droite : visite du Général de Gaulle à Oradour-sur-Glane (4 mars 1945).

Abandonnée par l’armée russe en retraite, libérée le 1er avril 2022, Boutcha, petite ville d’Ukraine à cinquante kilomètres au nord de Kiyv, a offert au monde une vision d’épouvante : des centaines de cadavres de civils, certains torturés, ligotés, les yeux bandés, voire victimes de violences sexuelles, jonchant la voie publique ou jetés dans des fosses communes. Au point que « quand les soldats ukrainiens sont arrivés dans la ville, leurs véhicules ont été contraints de slalomer entre les corps de civils abandonnés dans les rues ».

Solidement documenté par plusieurs médias, dont le New York Times (son enquête a été synthétisée en français par Le Monde), confirmé par des images satellites, le massacre perpétré par l’occupant russe continue de faire l’objet d’investigations rigoureuses, notamment par l’O.N.G. Human Rights Watch, mais aussi par la gendarmerie française.

Pour contester l’évidence, le Kremlin et ses petits télégraphistes de la « complosphère », ont employé tous les moyens, non sans se contredire : d’abord nier en bloc sans autre explication ; puis présenter les victimes comme des comédiens ; manipuler l’image ; tronquer les témoignages ; accuser les services de renseignements occidentaux d’avoir organisé une « mise en scène » ; citer à torts et à travers l’exemple du faux charnier roumain de Timisoara ; enfin, en désespoir de cause, prétendre que les victimes auraient été assassinées par l’inévitable régiment Azov (cible favorite de la propagande russe).

Vladimir Poutine lui-même a donné le ton, non sans se ridiculiser une nouvelle fois, affirmant que ces atrocités seraient un « fake », comparable à « la façon dont on a accusé le gouvernement de Bachar Al-Assad de l’emploi d’armes chimiques » (!). Après tout, Moscou avait déjà usé des mêmes procédés de désinformation pour défendre le dictateur syrien lorsque ce dernier gazait son propre peuple

Pour Vladimir Poutine et ses relais, il s’agit moins d’être cohérents que de semer le trouble. Comme le relève Stephanie Lamy, autrice d’Agora toxica (éd. Detour, 2022), « ce type d’« intox » est produit dans le cadre de la stratégie de l’agresseur, nommée en anglais Darvo (acronyme de deny, attack and reverse victim and offender), pour « attaquer et décrédibiliser les victimes de violences ». » En d’autres termes, peu importe que la propagande se contredise, l’essentiel est de retourner l’accusation, de faire du bourreau un innocent et de la victime un coupable [1]. Or, les nazis n’ont pas agi autrement à la fin de la Seconde Guerre mondiale, pour tenter d’oblitérer leur culpabilité dans le massacre d’Oradour-sur-Glane.

Écran de fumée

10 juin 1944. Quatre jours après le Débarquement allié en Normandie, la division blindée S.S. « Das Reich », chargée de « pacifier » le Sud-Ouest de la France, extermine le village d’Oradour-sur-Glane, dans la Haute-Vienne : les hommes de la bourgade sont exécutés par balles dans les granges, tandis que les femmes et les enfants sont massacrés dans l’église, incendiée et que l’on tente de détruire à l’explosif. Au total, on recensera 642 civils assassinés, dont 221 femmes, 147 écoliers de 6 à 14 ans et 68 enfants de moins de six ans. La localité elle-même est réduite en cendres. Littéralement rayée de la carte [2].

L’anéantissement d’Oradour visait à terroriser la France, si bien qu’il était de l’intérêt des nazis d’en laisser la rumeur se répandre. Mais aux fins de camoufler leur culpabilité, ils s’emploient à diffuser plusieurs « bobards de guerre ». Souvent contradictoires, ces versions ont surtout pour objet et pour effet de créer un écran de fumée. Et elles se rejoignent au moins sur un point : nier l’innocence des victimes.

Ainsi, le lendemain du massacre d’Oradour, le premier rapport d’activité expédié par ses auteurs se limite à indiquer : « Après perquisition de la localité, celle-ci a été incendiée. Presque dans chaque maison étaient entreposées des munitions. [….] Bilan : 548 morts ennemis, deux des nôtres blessés. » [3] Ou comment réduire le massacre à une simple bataille, quitte à prétendre frauduleusement que le village était rempli de munitions, alors qu’Oradour ne comprenait aucun maquis, comme il le ressort des rapports – bien renseignés – de l’administration de Vichy [4].

Les jours suivants, alors que les détails du drame commencent à être connus de la population, la propagande allemande croit bon d’accumuler les mensonges : des munitions se trouvaient dans le village ; les S.S., en entrant à Oradour, y auraient été accueillis « par des coups de feu, tuant un soldat et en blessant un autre » ; les Allemands n’auraient eu d’autre choix que de fusiller la population masculine en guise d’otages. « Les femmes et les enfants avaient été rassemblées par la troupe dans l’église pour leur sécurité. Sous l’église, les terroristes ont placé un dépôt d’explosifs et de munitions qui a pris feu pendant les combats et a déterminé une explosion qui a détruit l’église. » [5]

Tout de même, chez l’occupant, l’incohérence domine. Après s’être rendu sur les lieux du crime le 13 juin 1944, le Préfet régional de Vichy est informé par un représentant du Sicherheitsdienst (le S.D., service de sécurité S.S. plus connu sous le nom de Gestapo) que le drame résulterait d’une « expédition punitive » fomentée par un officier allemand capturé et « molesté » à Oradour – et qui, par bonheur, aurait réussi à s’évader [6]. Mais le massacre en lui-même n’est pas nié.

Extrait du rapport du Préfet Marc Freund-Valade au gouvernement de Vichy du 15 juin 1944 – Archives départementales de la Haute-Vienne, 986 W 481.

L’allégation selon laquelle ce massacre découlerait d’une initiative isolée – mais légitime – d’un officier S.S. est également propagée à l’attention de la presse française par le responsable allemand de la censure militaire le 19 juin 1944 [7]. Cette fois, point de munitions dans l’église, nulle explosion non plus, et l’idée d’une « bavure » des Waffen S.S. est pour la première fois expressément suggérée – mais l’innocence des victimes reste crânement niée.

L’occupant, en effet, se plaît à prétendre que des soldats allemands auraient été tués ou maltraités à Oradour avant l’arrivée de la division « Das Reich » : « Six cents personnes auraient été tuées [à Oradour], précise un compte-rendu de l’administration militaire allemande à Clermont-Ferrand le 14 juin 1944. Un sous-lieutenant de la 2. S.S.-Panzer-Division « Das Reich » a été capturé à Nieul (8 kilomètres N.-O. de Limoges) a été capturé et emmené à Oradour. Il a pu s’échapper. Le corps d’un officier-payeur a été retrouvé et montrait des traces de sévices. Toute la population masculine d’Oradour a été fusillée. » Et le rapport d’ajouter : « Les femmes et les enfants avaient fui vers l’église. L’église a pris feu. Des explosifs étaient entreposés dans l’église. Des femmes et des enfants ont également péri. » [8] Point de bataille, cette fois, mais un incendie accidentel imputable, de nouveau, à d’imaginaires dépôts de munitions.

Une « enquête » allemande réduite à sa plus simple expression

Bavure ou représailles ? Bataille ou accident ? Toujours est-il que le régime de Vichy ne se satisfait guère de ces explications contradictoires, d’autant qu’il cherche alors à redorer son blason auprès de la population française. Le 10 juillet 1944, il transmet aux autorités d’occupation des protestations détaillées [9]. En réponse, le haut-commandement allemand, tout en feignant de s’offusquer, ouvre une vague enquête, au cours de laquelle les différentes autorités sollicitées se renvoient la balle [10].

Le 4 janvier 1945, le « juge-juriste » de la division « Das Reich », Detlef Okrent, finit par adresser à sa hiérarchie une brève attestation rédigée « de mémoire », qui synthétise les éléments de langage élaborés en juin 1944.

Sans surprise, Okrent commence par recycler l’allégation selon laquelle Oradour aurait été peuplé de terroristes : un officier S.S. et son chauffeur y auraient été molestés ; l’officier se serait évadé, mais le chauffeur aurait été torturé à mort ; et « peu de temps auparavant, un convoi sanitaire de la Wehrmacht d’environ 10 hommes fut attaqué dans ce village par des terroristes et les hommes massacrés » [11].

Après ce nouveau déni d’innocence, Okrent passe à l’action « de représailles » proprement dite, non sans verser dans le surnaturel : les Waffen S.S., « dès la phase d’approche », auraient essuyé des tirs « de carabines et de mitrailleuses » (!). « Après avoir réduit la résistance, on s’assura d’un nombre d’armes considérable lors de la fouille des maisons. Il se produisit alors dans presque toutes les maisons des explosions qui provenaient de munitions qu’on tenait cachées. Les explosions étaient si fortes que l’officier commandant les opérations dut retenir ses hommes pour assurer leur sécurité. Etant donné les circonstances, cette manière de procéder semble tout à fait justifiée du point de vue militaire. » [12] Des femmes et des enfants assassinés dans l’église, Okrent ne dit mot. Et « l’enquête » allemande n’ira pas plus loin.

Le régime de Vichy n’attendra pas les résultats de ladite « investigation » pour livrer sa propre « explication ». Le 27 juillet 1944, Xavier Vallat, ex-Commissaire général aux Questions juives devenu porte-parole officiel du gouvernement pétainiste, affirme à Radio-Paris que si, à Oradour, « d’autres Français, désobéissant eux aussi aux conseils et aux ordres du Maréchal, n’avaient pas causé, au nom d’un faux patriotisme, des troubles graves, des soldats allemands n’auraient pas été amenés à faire supporter à une population innocente la cruelle conséquence des méfaits de quelques bandits » [13].

Récapitulons. Dans les jours qui suivent la destruction d’Oradour, les nazis s’emploient à la justifier, par tous les moyens. Selon eux, le village était rempli de munitions et les habitants étaient des maquisards qui ont tué et torturé des Allemands. Le massacre des femmes et des enfants dans l’église est soit passé sous silence, soit imputé à un incendie ou à une explosion déclenchée par des munitions qui y auraient été entreposées par les « terroristes », sachant que la cause de la présence des victimes dans l’édifice religieux varie d’une explication à l’autre. Le régime de Vichy, sans remettre en cause le massacre lui-même, reprendra à son compte au moins une affirmation allemande, à savoir que des maquisards auraient été présents à Oradour et auraient, par leur trahison, causé d’injustes représailles.

Une telle mise en scène n’est pas neuve. Elle s’inscrit même dans une pratique fort courante de l’armée allemande, comme en témoigne le massacre du village de Komméno, en Grèce, le 16 août 1943 : même prétexte fantaisiste (des « terroristes » grecs auraient tiré sur des soldats allemands, si bien qu’il fallait nettoyer leur repaire) ; même phraséologie assimilant des civils à des « ennemis » ; même bobard selon lequel la localité aurait été saturée de munitions adverses [14].

L’essentiel, pour les assassins, reste de nier le crime en bloc, et surtout que s’impose l’idée selon laquelle les victimes n’en sont pas, qu’elles restent l’ennemi, et qu’en définitive elles l’ont bien cherché. En Ukraine, le régime de Vladmir Poutine ne fait pas exception à la règle, allant jusqu’à décorer la formation militaire accusée d’avoir perpétré le massacre de Boutcha. Pour sauver les apparences, il faut bien tuer la vérité.

 

Notes :
[1] La méthode « Darvo » a déjà été maintes fois décrite par le passé, notamment par l’historienne Nadine Fresco, qui rappelait la « logique du chaudron » pour exposer les manipulations négationnistes.
[2] Ce massacre constitue le point culminant d’une série d’atrocités commises alors dans la région par cette même formation – voir la liste dressée dans le réquisitoire définitif du commandant Guille, substitut du Commissaire du Gouvernement près le Tribunal militaire de Bordeaux, du 12 mars 1951, p. 18-23 bis – Archives de la Justice militaire, carton 551, liasse XII (cote 430). Notamment, le 9 juin, à Tulle, la « Das Reich », qui vient de reconquérir la ville prématurément libérée par la Résistance, rafle 5 000 otages, pend 99 d’entre eux et en déporte 149 autres.
[3] Fac-similé reproduit dans L’Humanité, 5 février 1953. Voir également Karl Stitzer, Mordprozess Oradour, Berlin, Dietz Verlag, 1954, p. 52 ; Ahlrich Meyer, L’occupation allemande en France 1940-1944, Toulouse, Privat, 2002, p. 195 (trad. de l’allemand) ; Reimund Schnabel, Le Dossier des S.S., Paris, Perrin, 1967, p. 238-239 (trad. de l’allemand).
[4] Voir à ce titre les rapports mensuels de la sous-préfecture de Rochechouart aux archives départementales de la Haute-Vienne, cote 185 W 1/58.
[5] Extrait cité par Jean-Paul Pierrot, « L’invention du mensonge », L’Humanité, 8 juillet 1994. Document reproduit partiellement en fac-similé dans L’Humanité, 4 février 1953.
[6] Cette allégation s’inspire d’un fait réel, mais sans rapport aucun avec Oradour. Le 9 juin 1944, un sous-lieutenant S.S., Karl Gerlach, et son chauffeur, sont inopinément faits prisonniers par la Résistance près de Nieul. Alors que les Résistants s’apprêtent à l’exécuter, Gerlach s’évade, mais son chauffeur est tué. Cet épisode sera régulièrement monté en épingle, pendant et après la guerre, pour tenter de « justifier » le massacre, alors que Gerlach n’a jamais mis les pieds à Oradour. Voir la mise au point de Michel Baury, Résistance. Les derniers témoignages, Paris, Jourdan, 2019, p. 43-62.
[7] « Bien entendu, nous n’excusons pas ce qui s’est passé, et le ou les officiers de ce régiment seront punis, s’ils ne l’ont pas déjà été. La troupe allemande n’est pas allée là-bas au hasard. C’était un bourg plein de maquis, un asile du maquis. La veille et le matin même on avait tiré sur des voitures d’officiers allemands. Les Allemands étaient donc en état de légitime défense. En ce qui concerne ce qui s’est passé à l’église, où les femmes et les enfants avaient été envoyés pour y être mis en sécurité, nous ne comprenons pas ce qui est arrivé, nous essayons de le savoir ! Après tout, Messieurs, il y a davantage de femmes et d’enfants victimes des bombes anglaises qu’à Oradour. » Cité dans Pierre Poitevin, Dans l’enfer d’Oradour. Le plus monstrueux crime de guerre, Limoges, Publications du Centre, 1944, p. 118-119.
[8] T.M.I., vol. XXXVII, doc. F-257, p. 18.
[9] T.M.I., vol. XXXVII, doc. F-673, p. 338-341.
[10] Début mars 1945, le chef de l’état-major suprême de la Wehrmacht, le Maréchal Keitel, en sera encore à réclamer de « continuer l’étude de l’affaire [d’Oradour] avec toute l’énergie nécessaire ». T.M.I., vol. VI, p. 428-429.
[11] Comme pour l’épisode relatif à l’évasion du sous-lieutenant S.S. Karl Gerlach, cette allégation s’inspire d’un fait réel, mais sans lien avec Oradour : le 8 juin 1944, un camion de la Wehrmacht était tombé dans une embuscade au lieu-dit La Betoulle, à la limite des communes de Breuilaufa et de Berneuil : quatre ou cinq soldats allemands avaient été tués (ainsi qu’un Français qu’ils avaient réquisitionné), cinq ou six autres capturés, emmenés dans les bois avant d’être fusillés par les maquisards (Baury, Résistance. Les derniers témoignages, op. cit., p. 21-41).
[12] Attestation reproduite dans Peter Przybylski et Horst Busse, Mörder von Oradour, Berlin, Militärverlag der Deutschen Demokratischen Republik, 1984, p. 99-100. Trad. française d’après Jean-Jacques Fouché, Oradour. La politique et la justice, Saint-Paul, Lucien Souny, 2004, p. 50-51.
[13] Cité dans Henri Noguères, Histoire de la Résistance en France, tome IX : D’Overlord à la fin du Vercors, Genève, Famot, 1982, p. 138 (éd. originale : vol. V, Paris, Robert Laffont, 1981, p. 133).
[14] Le rapport transmis au commandement militaire à Athènes par la 1ère division allemande de montagne, chargée du massacre du village de Komméno le 16 août 1943, mentionnait : « 150 ennemis tués, quelques têtes de bétail, armes à main de fabrication italienne. Explosion de grandes quantités de munitions pendant l’incendie du village. » Un précédent rapport, interne à la division, était plus franc, parlant de « 150 civils tués ». Voir Mark Mazower, Dans la Grèce d’Hitler (1941-1944), Paris, Les Belles Lettres, 2002, p. 212 (trad. de l’anglais).