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Le poivre, la carotte et la sorcière : une interview de David Revoy

vendredi 25 décembre 2015 à 11:00

Trouver des auteurs de logiciels libres, c’est relativement simple. Il n’y a qu’à se pencher sur un paquet Debian pour en trouver. Trouver des artistes qui mettent leurs productions sous licence libre, c’est déjà un peu plus rare.

Connaissez-vous David Revoy  ? Non  ? Et pourtant, vous avez sans doute déjà vu des projets auxquels il a contribué. Il a en effet travaillé (entre autres) à plusieurs projets de la fondation Blender  : Sintel, Tears of Steel

Mais c’est plutôt son webcomic Pepper & Carrot qui nous a poussés à l’interviewer. D’une rare qualité, les aventures de cette jeune sorcière et de son chat nous ont séduits, tant par les dessins magnifiques que par son humour.

Un auteur Open-Source

Bonjour David. Tu peux te présenter un peu  ? Ton parcours, ton travail, tes projets…

Bonjour, j’ai 34 ans et je suis un Montalbanais passionné de dessin et d’informatique depuis l’enfance. Au cours de ces quinze dernières années, j’ai eu un parcours de freelance passant par l’illustration (couverture de livre et jeu de société), par le concept-art (décors/engins et persos dans les jeux vidéos) et parfois par la direction artistique de projets.
L’an dernier, j’ai créé Pepper&Carrot, un projet de webcomic libre et open-source financé grâces au mécénat des lecteurs. Peu après et grâce au succès de la série, j’ai décidé d’arrêter le freelance pour me consacrer à plein temps à la création de nouveaux épisodes et aux extras (traductions, tutoriaux, wiki, téléchargements gratuits…).

Tu expliques sur ton site pourquoi tu as choisi l’Open Source. Tu peux nous faire un petit résumé pour nos lecteurs qui ne maîtrisent pas la langue de Shakespeare  ?

Je vais essayer de résumer ça mais tout d’abord je tenais à vous remercier, car j’ai abordé le libre entre 2003 et 2005 grâce au portail de Framasoft d’il y a dix ans. A l’époque j’utilisais Windows XP et cela m’a permis d’adopter Blender, Inkscape, Firefox, LibreOffice et FileZilla. Mon abandon total des logiciels propriétaires s’est fait peu de temps après. Je venais d’acheter un nouveau PC livré avec ‘Windows Vista’ pré-installé. J’avais une licence ‘XP pro’ en boîte et je comptais réinstaller ce système car tous mes logiciels dépendaient de ce système. Malheureusement pour moi, la carte mère du PC Vista n’avais pas de pilote pour XP disponible et mes licences logicielles professionnelles (Photoshop, Painter, Manga Studio ; plusieurs milliers d’euros) était toutes instables avec Windows Vista. Mettre tout à jour était très coûteux et n’apportait aucunes nouvelles fonctionnalités.

Cette stratégie de mise à jour forcée me paraissait injuste. Je ne voulais pas alimenter les créateurs d’un tel système avec mon argent. C’est donc cet événement qui m’a poussé vers le 100 % GNU/Linux. Voici une vidéo d’époque :

Cliquez sur l'image pour accéder à la vidéo (Viméo)

Cliquez sur l’image pour regarder la vidéo (Viméo)

Tu as travaillé sur pas mal de jeux vidéos. Pourquoi faire une BD  ? C’était quelque chose qui te trottait dans la tête ou ça t’est arrivé comme ça  ?

J’aime beaucoup les jeux vidéos et le cinéma d’animation, mais être auteur de bande-dessinée c’est mon rêve d’enfance. C’est la passion que j’ai toujours essayé de préserver. La BD, c’est l’art qui me touche le plus et celui dans lequel je m’exprime avec le plus de liberté. Pour la création de Pepper&Carrot, c’est vrai que c’est arrivé un peu « comme ça ». Tout a commencé un dimanche soir d’avril 2014 particulièrement calme, j’ai fait un speedpainting (une peinture numérique à la tablette graphique). J’ai enregistré ce qui ce passait à l’écran par coïncidence ce jour-là  :

Cliquez sur l'image pour accéder à la vidéo (youtube)

Cliquez sur l’image pour voir la vidéo (Youtube)

J’avais là une petite sorcière, un chat, une scène… La semaine qui a suivi j’ai ajouté d’autres cases et cela a formé une petite histoire. L’épisode 1 est né ainsi.

Ce petit projet personnel a eu beaucoup de succès, alors j’ai décidé de faire un épisode 2. Puis 3, puis 4… Ce mois-ci, je fais l’épisode 14. L’audience me porte par son enthousiasme. C’est ainsi qu’est né et continue de grandir Pepper&Carrot ; un pas devant l’autre, très connecté au présent.

Tu utilises des logiciels libres ou open-source, mais lesquels  ? Et qu’est-ce qui t’as décidé à libérer tes œuvres  ?

J’utilise essentiellement Krita sur Linux Mint. Mes outils secondaires sont Inkscape, Blender, Gimp, Mypaint, G’Mic et Imagemagick.

J’ai commencé à libérer mes œuvres à la Blender Foundation quand je travaillais sur la direction artistique du court-métrage Sintel. C’était dans le cahier des charges de mettre tous les dessins préparatoires en Creative Commons Attribution. J’ai pu donc faire l’expérience directe de travailler avec cette licence très ouverte au sein d’une grande audience. L’expérience fût très positive. C’est ainsi que j’ai appris à connaître, et ensuite adopté les licence Creatives Commons.

Tes projets sont sous licence CC-BY, CC-BY-SA, CC-BY-NC-ND, copyright classique… Qu’est-ce qui détermine la licence que tu utilises  ?

C’est déterminé par des préoccupations juridiques. D’abord il y a les dessins qui sont tellement « copyrightés » par mes clients que je ne peux ni en parler et ni même les montrer. Ce sont les contrats de jeux-vidéos, de cinémas sous NDA (Non Disclosure Agreement  : accord de non-divulgation) que j’ai remplis durant mes années freelance. Les dessins « copyrightés » simplement sont ceux où je reçois l’autorisation d’afficher le dessin en basse résolution sur mon site.

La licence CC-By-NC-ND encourage le partage Internet mais empêche les travaux dérivés, les modifications et l’utilisation commerciale. J’ai longtemps utilisé ceci pour mes travaux personnels plus activistes comme pour le « Yin-Yang de la faim dans le monde ». Des groupements politiques m’ont déjà démarché pour détourner ou s’approprier ce dessin. Leur donner l’autorisation d’office serait trop dangereux.

La licence CC-By-Sa, c’est celle qui offre tout, mais demande la mise à disposition des sources de l’œuvre sur une licence également libre. Une façon de forcer l’évolution du libre à rester libre.

La licence CC-By, c’est quand je décide de tout partager, et de ne garder que le crédit participatif à l’élaboration du dessin. C’est la licence que je trouve la plus libre et aussi la licence que j’ai choisie pour tout Pepper & Carrot.

Pepper & Carrot Holiday special

Il y a des personnes qui ne connaissent pas (encore) Pepper&Carrot… Comment tu les présenterais  ?

Je les présenterais en BD, tel qu’ils le sont mais si je devais le faire avec que du texte, je passerais la main à ce petit texte issu de l’article de LinuxFr, par l’auteur Eingousef (édité par ZeroHeure, Yvan Munoz, BAud, M5oul, Benoît Sibaud et palm123 et modéré par ZeroHeure / Licence CC by-sa) :

Des personnages mignons, des chats, une influence manga/anime, de l’héroic-fantasy, des clins d’œil au logiciel libre, de l’humour décalé et de la poésie dans un univers épique, des licences libres et des sources complètes, des contributions à des logiciels libres et jeux libres… David Revoy a tout pour plaire aux geeks. Ce dessinateur aux multiples talents, qui s’est fait connaître dans la communauté du libre surtout par son impressionnant travail de concept artist sur les trois derniers Open Movies de la Blender Foundation (Sintel, Tears of Steel et le projet Gooseberry), s’est lancé l’année dernière dans la réalisation d’un webcomic libre, « Pepper & Carrot ». Celui-ci met en scène les aventures décalées de Pepper, une petite sorcière courageuse et casse-cou, mais qui a tendance à sous-estimer ses capacités, et de Carrot, son chat à l’intelligence quasi-humaine, mais éternel esclave de ses instincts, dans l’univers féerique du Royaume d’Hereva, avec ses villes volantes, ses fées, ses phénix, ses dragons-vaches, ses canards-drakes et ses sorcières rivales…

Le mode de financement de Pepper & Carrot est basé sur l’économie participative (Tipeee, Patreon, les dons…). Comment y es-tu venu  ? Ça marche bien  ?

J’y suis venu car je ne voulais pas proposer Pepper&Carrot aux éditeurs papier. L’édition est un milieu en crise que je connais assez bien grâce à mes années de travail dans l’illustration. Un univers ou la loi du marché prime sur tout. Pepper&Carrot aurait été sans doute dénaturé, standardisé, aseptisé et réduit au bon vouloir des commerciaux, des distributeurs, des actionnaires… du pognon pour le pognon. Quand on élimine la voie de l’édition classique, il ne reste plus grand chose pour exercer la BD à plein temps. Je ne suis ni riche ni « fils de » pour vivre de la BD sans en demander une contrepartie financière. J’ai un loyer mensuel à payer, un corps à nourrir, un matériel informatique à entretenir, donc solliciter le mécénat des lecteurs était ma seule possibilité.
De nos jours, ça marche grâce à la générosité des lecteurs. Financièrement, je suis loin de mes années freelance. Je gagne un petit SMIC pour autant d’heures de travail par semaine qu’il en est humainement supportable (sans congé, sans arrêts maladies, sans retraite). Mon projet en 2016  : arriver à maîtriser la production des épisodes et réduire les heures pour retrouver une vie personnelle en dehors de Pepper&Carrot (une coquetterie que je me suis refusée au cours des 15 derniers mois).

Tu as plein de rêves pour Pepper&Carrot… Comment t’es venue l’idée d’afficher ces douces ambitions  ? Cette liste avance bien  ?

Pour l’idée, je me suis dit que d’afficher clairement mes rêves et mes motivations aiderait les visiteurs du site à me connaître.

Est ce que ça avance  ? Difficile à évaluer pour certain rêves. Par exemple pour le rêve numéro 1  : « Donner une conférence au Japon dans une convention Manga à propos de Pepper&Carrot » c’est super difficile à quantifier l’avancement de ce rêve. Mais j’ai déjà une piste  ; j’ai reçu un email d’un lecteur Japonais avec les coordonnées d’un événement Manga qu’il connaît. Je vais donc bientôt constituer un beau dossier pdf pour essayer de démarcher cet événement. Quand au rêve « Atteindre l’épisode 100  ! », ce rêve est très quantifiable et avec la publication le mois dernier de l’épisode 13, j’en suis exactement à 13 %  !

Un petit mot de la fin ? Ou un dessin  ? 😀

Un dessin bien sûr  ! Merci pour l’interview  !

Dessin de David Revoy pour Framasoft

Toutes les illustrations de l’article sont bien évidemment de David Revoy, en CC-BY :-)

Framacarte, pour libérer vos maps de Google !

mercredi 23 décembre 2015 à 13:02

Les barbu-e-s de la communauté le savent déjà : l’alternative Libre à GoogleMaps, c’est OpenStreetMaps (OSM pour les intimes). En un peu plus de dix ans, plus d’un million de personnes ont participé à ce projet de cartographie du monde librement utilisable et accessible

Mais comment faire pour que la famille Dupuis-Morizeau s’empare de ce magnifique outil offert par la communauté et se dégooglise un grand coup ? Notre réponse : Framacarte.

Vous offrir le monde au pied du sapin.

Avoir une carte en ligne, c’est très pratique pour tracer sa route d’un point A à un point B. C’est très exactement ce que vous propose Framacarte : placez votre point A, votre point B, votre tracé… et le tour est joué ! Vous n’avez qu’à cliquer sur « plus » puis sur l’icône « partager » pour avoir l’adresse web à partager à vos ami-e-s ou le code d’intégration afin de placer cette carte sur votre site web.

Balade du Jardin Japonais de Toulouse au fief du GUL Toulibre ;)

Balade du jardin japonais de Toulouse au fief du GUL Toulibre ;)

Framacarte ne s’arrête pas là. Vous pouvez bien entendu placer des étapes entre votre point A et votre point B… jusqu’à dessiner tout l’alphabet si cela vous chante (n’en déplaise à google, ce mot ne leur appartient pas :p).

Framacarte vous permet aussi de colorier des zones, changer les pictogrammes de vos épingles, utiliser plusieurs calques, changer les fonds de cartes (plutôt ville ou plutôt nature ?) importer ou exporter vos données… Bref, de créer des cartes vraiment personnalisées.

Ne réinventons pas la Frama-roue

Framacarte s’appuie sur deux projets Libres : les fonds de cartes sont ceux d’OpenStreetMap, tandis que l’outil d’édition et de partage des cartes n’est autre que le projet Umap. Oui, nous hébergeons tout simplement un clone de ce projet Libre déjà connu des barbu-e-s. Il faut dire que Framacarte n’était pas, à l’origine, dans nos projets de Dégooglisations.

C’est Yohan Boniface, contributeur de OpenStreetMap France et développeur de Umap, qui nous a contacté pour mettre en place cette Frama-version de Umap. L’occasion pour nous de lui poser 3 questions :

Question 1 : Bonjour Yohan, tout d’abord, est-ce que tu peux nous présenter Umap, ses origines, et comment il est développé ?

Je bossais dans un journal à l’époque, et j’étais attristé de voir qu’il n’existait aucun outil libre permettant à un journaliste de faire une simple carte pour afficher des données. Il fallait ou bien l’aide d’un développeur ou bien utiliser des services privatisateurs comme GoogleMap©.

uMap est bâti sur Django (un framework python), et j’ai cherché à le rendre modulaire : le frontend et le backend sont deux projets séparés, ce qui a permis à d’autres développeurs d’utiliser la même interface que uMap mais sur leur propre back-end.

À l’exception d’une demande financée par Ixxi (filiale tech de la RATP), je développe uMap sur mon temps libre, et j’y tiens !

Question 42 : Umap existe déjà et marche très bien… pourquoi cette envie de le doubler d’un Framachin ? C’est pas mieux de tout garder en un seul endroit ?

La centralisation coûte très cher, et ce coût induit une dépendance aux entrées financières. Dans le libre, on essaie autant que possible d’éviter le scénario alla Wikipedia, c’est-à-dire où le service à l’utilisateur est centralisé. On finit par passer son temps à chercher de l’argent pour financer le projet. Côté OpenStreetMap, on tâche autant que possible de laisser la communauté prendre en charge les services à l’utilisateur final.

Donc plus y a d’instances différentes, plus les coûts sont partagés, et plus le modèle est durable.

Il faut un peu connaître python pour installer uMap chez soi, mais quand c’est le cas on le fait tourner en 15 minutes, donc j’invite les motivés à installer d’autres instances ! J’en connais déjà une bonne dizaine, notamment en Suisse, en Colombie, en Argentine, en Éthiopie, et aussi dans des intranets.

cliquez sur l'image pour aller sur Framacarte

cliquez sur l’image pour aller sur Framacarte

Question 1337 : À Framasoft, on espère que ce projet apportera du monde aux communautés Umap et OpenStreetMap… Mais du coup, comment y entrer et faut-il obligatoirement coder pour contribuer ?

Utiliser uMap, c’est déjà contribuer.

Parce que ça aide à le faire connaître, et donc à étendre ses utilisateurs, et donc à augmenter les instances disponibles, et donc à « dégoogliser » Internet.

Pour aller un peu plus loin dans la contribution, il y a plusieurs options. Faire des rapports de bugs ou des demandes d’amélioration est une façon d’aider à prioriser les développements. Il y a aussi un gros besoin de documentation et tutoriels.

On peut aussi participer à la traduction (on a récemment ajouté une traduction en amarique !). Enfin, y a de l’espace pour améliorer le graphisme et l’ergonomie.

Et bien sûr, quand on code en python (backend) ou en javascript (frontend), il y a de quoi faire ! La page du projet pour en savoir plus : http://wiki.openstreetmap.org/wiki/UMap

Libre à vous de dessiner sur le monde

Révolu, le temps des atlas coûteux (et autres cartes IGN) qu’il était illégal de photocopier et que l’on stabilotait à grands frissons. Désormais, avec Framacartes, vous pouvez laisser libre cours à votre imagination et partager en quelques clics ce parcours de trail avec l’ensemble de votre club…

carte-trail

oh le joli dénivelé !

… ou mettre en ligne sur le site de votre office de tourisme l’ensemble des restos, hébergements et lieux à visiter de votre ville…

carte-ville

ça ressemble furieusement à une chasse aux trésors… nous on dit ça, on dit rien, hein…

…ou encore détourner Framacarte pour dessiner un Tux, un Chaton ou un GNU sur le pays de votre choix (la première personne qui réalisera ce défi gagnera notre éternelle admiration déclarée officiellement sur nos réseaux sociaux !)

Car, encore une fois, le succès de cet outil ne dépendra que de vous. À vous donc de vous en emparer, de le partager et de nous soutenir par vos dons afin que nous préparions de nouvelles alternatives à GAFAM tout au long de 2016.

« 2° avant la fin du monde » : un documentaire écolo à traduire Librement

lundi 21 décembre 2015 à 15:42

Il y a peu de temps, les journalistes auteurs de #DataGueule ont appelé à l’aide la communauté Framalang. Leur long métrage « 2° avant la fin du monde », un documentaire critiquant la COP 21 et expliquant les enjeux du réchauffement climatique, est déjà un succès francophone. Ils aimeraient proposer des sous-titres en anglais, espagnol, etc. pour que d’autres audiences puissent en profiter… mais voilà : ce long-métrage n’est pas Libre.

Quand les communs nous rassemblent…

Qu’on soit bien d’accord : profiter des communautés bénévoles pour augmenter la valeur de son travail propriétaire, c’est moche. Sauf que là, on n’est pas dans un modèle aussi manichéen. Déjà parce que les équipes de #DataGueule, bien qu’officiant sur YouTube (attention les liens suivants vous y mènent ^^), ce sont celles qui ont créé des vidéos vulgarisant avec brio des sujets complexes comme :

On a mis assez de liens vers YouTube comme ça, alors exceptionnellement, cette image ne mène à rien ;)

On a mis assez de liens vers YouTube comme ça, alors exceptionnellement, cette image ne mène à rien ;)

Bref : autant d’outils pour sensibiliser les Dupuis-Morizeau de notre entourage aux sujets qui nous sont chers. Sans compter toutes leurs autres vidéos, dont les thèmes et l’angle défendent souvent cette idée des communs… ou montrent les enclosures des systèmes dans lesquels nous vivons. C’est une nouvelle fois le cas avec ce pamphlet écologique qu’est « 2° C avant la fin du monde. »

Car ce n’est pas pour rien si la coalition entre militant-e-s écologistes, libristes, personnes engagé-e-s dans l’ESS ou la lutte des classes a fait tomber ACTA. Ce n’est pas pour rien si Framasoft (aux côtés de nos ami-e-s de l’APRIL et de biens d’autres) a défendu les valeurs du Libre dans de nombreuses villes accueillant un Alternatiba : cette notion qui nous rassemble, c’est celle de communs. Le Libre et l’Écologie ont tout intérêt à tisser des ponts entre eux, et nous y voyons là une magnifique occasion.

…le droit d’auteur nous divise.

Seulement voilà : ces vidéos comme leur documentaire ne sont pas sous licence Libre. Vous demander de participer à ajouter de la valeur à une création de l’esprit qui ne respecte pas vos libertés, c’est un peu comme vous proposer de participer au financement participatif d’une production qui restera l’entière propriété de ses auteurs : vous prenez tous les risques et il faut une certaine dose de confiance.

Le débat a eu lieu chez Framalang. DataGueule, ce sont visiblement des gens qui partagent nombre des valeurs-clés du Libre et des Communs. Ce sont des journalistes issus du malheureusement défunt OWNI, qui ont co-écrit l’excellent documentaire « Une contre-histoire de l’Internet ». Bref, des gens biens. C’est une production qui n’hésite pas à diffuser son long métrage sur YouTube avant même qu’il ne passe à la télévision (est-ce pour cette raison qu’il n’y a pas de budget pour la traduction ?), ce qui nous permet de vous le faire découvrir dans cet article :


Vidéo « 2° avant la fin du monde » sur Youtube

cliquez sur l’image pour visionner le documentaire (YouTube)

Dans nos équipes s’est fait le choix de la main tendue. Chers DataGueule (et chère prod d’IRL Nouvelles Écritures), celles et ceux d’entre nous qui le veulent vont tenter de traduire votre documentaire. Cette traduction sera libre, proposée sous la licence CC-BY-SA. Nous espérons qu’en vous faisant goûter aux joies du Libre, vous envisagerez de passer vos productions sous ces licences (même YouTube propose une CC-BY, c’est facile !) et de parler encore plus de ces sujets qui nous rassemblent.

Libre à vous de traduire (ou pas)

Alors voilà : libristes de tous poils, linguistes polyglottes, fan-subbeurs acharné-e-s et/ou écolos de tous bords : la balle est dans votre camp. Libre à vous de décider si les enjeux, le sujet et l’œuvre méritent votre participation. Libre à vous de venir participer à cette collaboration entre libristes, écolos… bref : entre commoners.

Vous y trouverez à chaque fois la liste des pads où vous pourrez traduire (c’est déjà bien entamé), relire, amender, participer, etc. Pensez à respecter les façons de faire, à bien entrer votre nom (et à choisir votre couleur) dans l’icône « bonhomme » en haut à droite, et à faire un coucou sur le chat (en bas à droite).

Et si cette expérience vous a plu, vous pouvez rejoindre nos groupes de traductions collaboratives, promis, on ne mord pas (sauf un, mais on dira pas qui).

Je ne publierai plus chez toi (lettre ouverte à Apple)

vendredi 18 décembre 2015 à 15:06

Yann Houry est un professeur de français et auteur de manuels numériques dont nous avions encouragé la libération en 2014.
Nous reproduisons ici, avec son accord, la lettre ouverte (publiée initialement sur son blog), qu’il a adressée à un de nos GAFAM préféré dans laquelle il explique pourquoi il ne publiera plus chez Apple. Celle-ci est extrêmement instructive sur les conditions qu’ils peuvent imposer sur les contenus publiés.


En effet, la situation pourrait être comique si elle n’était kafkaïenne : Yann Houry se voit refuser – une n-ième fois – la publication d’un de ses manuels libres de grammaire sur la plate-forme iTunes au prétexte que « l’orthographe et la grammaire sont incorrects » ! (Le signalement est fait en anglais, en plus…)

Ce genre de pratique montre à notre sens bien les limites d’une trop grande concentration des pouvoirs des plate-formes sur internet : pour être vu, il faudrait publier sur ses plate-formes et pas ailleurs. Or ces dernières gèrent un tel volume de données publiées par leurs utilisateurs, qu’il devient impossible de les valider par des humains. C’est donc la machine qui prend le relais. Et on se retrouve alors avec des cas absurdes, comme celui de la peinture de Courbet, « L’origine du monde », censurée par Facebook.

Yann a finalement décidé de ne plus publier sur iTunes (tout en continuant – nous le regrettons – à publier chez Amazon ou Google Play, avec le risque que le problème se reproduise). Preuve supplémentaire que le secteur de l’édition a décidément bien besoin de se « dégoogliser » lui aussi. Framasoft propose par exemple le catalogue Framabookin.org pour partager, parmi des milliers d’autres œuvres, les ouvrages de sa collection Framabook. À quand le développement de ces « micro-catalogues », qui pourraient très bien être agrégées par des « moissonneurs » afin de proposer une recherche globale, et qui seraient surtout à l’écoute de leurs auteurs ?

 


Chère Apple,

Ma pomme préférée (alors que c’est moi la pomme), je t’écris pour te dire que je ne publierai plus chez toi.

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Depuis que tu t’es amusée, en 2012, à retirer mon livre de ton store parce que j’avais mis « libre et gratuit » sur la couverture, on s’est franchement bien marré ! Souviens-toi, tu m’avais dit : « Si tu veux revoir ton livre sur mon beau magasin, il faut retirer lesdits mots. Ils sont laids. Comment ? Tu l’as déjà fait, petit écrivaillon conciliant ? Eh bien retire « pour iPad » maintenant ! ».

Remove libre or gratuit

Et je l’avais fait.
Ce n’était qu’un début.
Dernièrement, j’avais écrit « Kobo » dans la préface du livre de grammaire et de littérature (mon dieu, quand j’y repense…). Encore plus récemment, j’ai dû oublier un truc dans la table des matières. Je t’ai envoyé des photos de mon dos que j’ai fouetté. J’espère que tu as aimé.

Et il y en a eu d’autres encore ! À propos du petit recueil que j’avais fait des fables de La Fontaine, j’avais dit que je m’appelais Yann Houry ! Grossière erreur ! Hop, on ne publie pas le livre !
Une fois, une vidéo ne fonctionnait pas ! Et hop ! on retire le livre. Une autre fois, tu as même retiré un livre parce que le « spelling and grammar must be correct » ! Ah ! tu t’es bien foutue de ma gueule ! Et ce en anglais ! Bah oui, tu ne vas quand même pas condescendre à t’exprimer dans la langue de ton interlocuteur ! Enfin ! Rien ne vaudra les mois que tu as mis à publier mon Manuel de 5e pour une raison que toi seule tu es incapable de donner.

grammar and spelling

Enfin bref. C’en est trop.
Je ne supporte plus. Raison pour quoi, je me barre ! Je m’en vais (et tes larmes – si tu étais capable d’émotion – n’y pourraient rien changer).
Imagine-t-on un éditeur publier puis retirer puis republier puis retirer à nouveau un livre de la vente ? C’est pourtant ce que tu viens de faire avec mon manuel de grammaire. C’est complètement insensé !

Problème

Je retire donc tous mes livres de ton store. J’imagine que tu t’en fiches comme de l’an quarante, mais moi ça me fait un bien fou.

Adieu.

Yann

Vieux Flic et Vieux Voyou : un polar tout neuf dans le Domaine Public !

jeudi 10 décembre 2015 à 11:35

Y a des jours où on a envie d’un bon vieux polar. Une enquête bien ficelée, une intrigue qui nous titille le ciboulot avec des personnages jubilatoires dont les déboires et les victoires nous chatouillent les zygomatiques.

La recette du roman policier est connue. De San-Antonio aux NCIS, elle fait littéralement partie de notre culture, de notre domaine public. Pourtant, aucun auteur (à notre connaissance) n’avait encore placé son polar flambant neuf dans le Domaine Public Vivant, livrant ses personnages et son univers aux fantaisies de vos imaginaires pour que vous puissiez jouer avec.

Voilà qui est chose faite grâce à Fred Urbain, auteur d’un nouvel opus paru chez Framabook : Vieux Flic et Vieux Voyou.

Quand Lucien, ancien flic et toujours amateur de bon pinard, tire son pote Maxime (ancien pickpocket) de la maison de retraite de la Pinède où ils coulent des jours paisibles… Ce n’est pas pour aller fricoter de la veuve dans un thé dansant !

Ces deux octogénaires vont mener tambour battant une enquête mêlant drogue, meurtres et kébabs avec toute l’insouciance, l’espièglerie et l’expérience que leur confèrent leurs quatre-vingts balais…

L’occasion donc d’une interview avec Fred, heureux papa de ces deux vieux… et d’un polar jubilatoire.

(entretien goupillé par Pouhiou, avec l’aide des relecteurs et relectrices du groupe Framabook)

 

Frédéric Urbain, sous le feu des projecteurs.

Frédéric Urbain, sous le feu des projecteurs.

Salut Fred… Je peux te présenter comme « Le monsieur qui m’a permis de changer le prénom d’un personnage »…

Eh eh, c’est vrai que je suis entré chez Framabook comme correcteur, à l’époque où il n’y avait pas beaucoup d’œuvres de fiction. À part les BD de Simon…
Je cherchais à aider dans le Libre, mais je ne suis pas informaticien. Relire des ouvrages, c’était dans mes cordes.
Et en effet, je me suis enthousiasmé pour tes romans, Pouhiou, au point de te proposer carrément des évolutions dans tes intrigues.

… mais comment te présenterais-tu à Béatrice Dupuis-Morizeau ?

Je suis un contemplatif. J’adore me mettre en retrait et observer le monde, noter les travers, les grandeurs, les beautés et les laideurs des personnes que je croise. Je me fais un album photo avec tous ces morceaux de vie, et ça ressort à l’improviste, ça s’assemble comme ça peut, ce sont les briques de mon petit jeu de construction intime.

Venons-en à ton polar. Les deux personnages principaux, Lucien et Maxime, ont dans les 80 piges… Pourquoi ne pas avoir fait dans le jeunisme ? Il arrive encore des choses aux gens à cet âge-là ? Ou c’est juste pour vendre plus d’ebooks gratuits à Mamie Dupuis-Morizeau qui va avoir une nouvelle liseuse pour Noël ?

Justement… Toute une partie de mon propos est là : on met les gens à la retraite comme s’ils avaient une date de péremption, comme s’ils n’avaient plus rien à vivre, plus rien à ressentir, plus rien à découvrir, plus rien à enseigner… On a tant à apprendre de nos anciens. Je ne suis pas le seul à jouer avec cette idée, regarde Gilles Legardinier, ou Jonas Jonasson. J’adore aussi Les vieux fourneaux. Et ta Madame Marquet, elle n’est pas de la première jeunesse !

Tous les codes du polar semblent délicieusement respectés dans cette enquête… comme si tu les avais étudiés. Tu peux nous expliquer la recette d’un bon roman policier ?

C’est que j’en ai lu beaucoup. Et je suis exigeant ! Ce n’est pas pour rien que je cite Agatha Christie et Alfred Hitchcock dans le bouquin. Je déteste les intrigues qui ne tiennent pas la route, les polars qui ne respectent pas les jalons du genre. Et en effet, j’ai étudié le scénario à la fac et j’en ai écrit pas mal quand je faisais du jeu de rôles.

Je me suis amusé avec les codes, par exemple l’obligatoire passage érotique, la poursuite, le super flic…

La recette d’un bon polar, c’est quand le lecteur croit avoir tout compris pour finalement se rendre compte que l’auteur a tout le temps gardé une longueur d’avance. Je me suis vraiment efforcé de tenir ça tout du long et de surprendre mon public, jusqu’à l’épilogue qui est une pirouette un peu facile, mais je l’assume.

[Yann] Comment conçois-tu ton récit ? Est-ce que tu as un plan détaillé ? Est-ce que tu « joues » les dialogues ? Bref, quels sont tes secrets pour élaborer ton histoire, construire ton intrigue ?

C’est bien mon problème… Je suis à la fois perfectionniste et laborieux. Je traînais cet ouvrage inachevé depuis dix ans. J’avais le début et la fin, l’ambiance générale, des personnages attachants, des idées rigolotes… Mais je galérais avec la chronologie, et je m’étais imposé des contraintes, comme notamment l’alternance des chapitres. J’ai eu la chance de discuter avec des auteurs, des gens de cinéma, de théâtre, qui m’ont tous dit la même chose : d’accord, il faut bosser, mais il s’agit aussi de savoir se laisser embarquer, se faire plaisir, permettre à l’histoire de monter toute seule.

Alors je m’y suis remis et je suis allé au bout, en acceptant d’y laisser des passages moins travaillés.

Je pense aussi que je me marrais tellement avec mes deux loustics, que je répugnais à terminer leur histoire.

Franchement, je peux l’offrir, le bouquin, j’ai déjà été largement payé !

Tu allies un humour (et une verve argotique) à la Audiard et San Antonio avec des éléments résolument modernes et geek-friendly… Comment as-tu géré ce grand écart ? Que font un flic et un voyou de la vieille école quand l’enquête mêle ordinateurs, tracking GPS, et autres codes de notre modernitude ?

Eh bien, ça m’est assez naturel. Je suis un geek avec une culture somme toute plutôt classique. Je suis fan des films de la période Audiard, des Gabin, Ventura, Bourvil, Blier, Darc, Belmondo. Pour moi, Lucien, c’est Julien Guiomar ! Alors ça se mélange sans trop de problème. Les gens de ma génération ont roulé en deux-chevaux, mais ils utilisent un PC depuis vingt-cinq ans.

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[Goofy] Tu reconnais volontiers ta dette et ton admiration pour des écrivains dont la langue est charnue et savoureuse comme René Fallet, tu pourrais mentionner tes trois bouquins préférés (je sais, c’est dur de choisir quand on aime) ?

Ça, c’est très difficile, comme exercice. Parce que mes préférences fluctuent en fonction de mes états d’âme et des périodes de ma vie.

Il y a un bouquin qui reste tout en haut de mon estime, toujours, c’est Kim, de Kipling. Justement à cause des dialogues, de l’impertinence du personnage principal dont la verve est fabuleuse.

Je vais citer aussi La vieille qui marchait dans la mer, de San-Antonio. C’est curieux, je n’ai pas pensé à ce livre en écrivant, et pourtant il a des similitudes avec le mien. Cette vieille saloperie qui, malgré tout, est croyante, juge inutile de prendre des gants quand elle s’adresse à Dieu. Alors elle prie comme un charretier. Ses soliloques sont extraordinaires.

Le troisième, c’est La folie Forcalquier, de Pierre Magnan. Là aussi, une langue magnifique. Je suis un admirateur éperdu de Monsieur Magnan, j’ai emmené toute ma famille en vacances dans ses montagnes. J’ai adapté un de ses romans pour l’écran, avec l’autorisation de son épouse. Mais vous ne le verrez probablement jamais, faute de sous pour le produire. Je n’ai pas tout lu, de lui, je m’en garde sous le pied pour quand j’aurai besoin de me faire du bien.

Revenons un poil sur la langue… Tu ne mégotes pas sur les argots, que ce soit dans la bouche de tes personnages ou dans les lignes du narrateur… D’où ça te vient cet amour pour ces langues ? Comment se sont-elles insérées dans ton écriture ?

J’ai surtout une passion pour les dialogues. Les mots qu’on s’échange, les histoires qu’on se raconte, c’est la vie ! Ça m’arrive tout le temps, de rencontrer des inconnu-es, et en trois minutes je sais tout de leur existence.
Alors, quand je fais parler un personnage, j’aime que ça roule.

[Mireille] Comment se fait-il qu’un (relativement) jeune comme toi jaspine aussi bien l’argomuche ? Moi-même, qui suis jeune seulement dans ma tête et dont la daronne est née dans l’faubourg St D’nis, je ne le jaspine pas aussi bien que toi… Chuis jalmince !

Au final, l’argot, je l’ai plus lu que parlé. J’ai grandi en province, moi ! Je connais bien quelques authentiques « titis » parisiens, mais j’ai surtout pratiqué l’argot des poètes, celui de San-Antonio, de Renaud, de Cavanna. C’est un langage très métaphorique, qui parle avec des images, parfois triviales, souvent astucieuses. C’est la créativité des petites gens qui se manifeste au détour d’une phrase. Et elle est loin d’être moribonde, la langue des rues de Paris. Je fais dire « daron » à un jeune dans la cité, c’est pas du chiqué, ce terme ancien est encore utilisé, je l’ai souvent entendu. Daron, on le lit dans Les Misérables !

Ce qui m’a surpris, c’est qu’au final, quand je testais le manuscrit, certains termes que je pensais passés dans le langage courant ont bloqué mes lecteurices. J’ai réfléchi à mettre un glossaire, ou des notes de bas de page, mais bon c’est un polar, pas un dictionnaire d’argomuche. J’ai fait le pari que le contexte suffirait à éclairer le sens des mots. Sinon, allez demander à Boudard, Le Breton, Perret.

Dis-moi, quand tu as commencé l’écriture de ce roman, tu envisageais déjà de l’élever dans le Domaine Public ?

Pas du tout ! Je pensais faire un polar bien classique, et aller le proposer sans grand espoir à un éditeur traditionnel, finir sans doute par le publier à compte d’auteur, avoir des centaines d’invendus dans ma cave, mangés par la moisissure … Je bricolais déjà avec des logiciels libres, mais je n’étais pas imprégné de culture libre.

Alors comment t’est venu ce choix de licence ? C’est juste pour faire comme moi et me piquer mes followers :p ?

Exactement ! C’est ton discours sur la confiance qui m’a influencé. Étant dans le groupe Framabook, je ne pensais plus le publier autrement que sous licence libre, mais je réfléchissais à une CC-BY standard. Et puis je me suis demandé quelle différence ça pouvait bien faire, une fois qu’on avait accepté la démarche, autant aller au bout du militantisme.

Ce qui m’a fait marrer, ce sont les copains qui me demandaient « tu l’as protégé, au moins, ton manuscrit ? Comment tu vas gagner des sous, si on peut le télécharger librement ? »

C’était l’occasion d’expliquer le partage, le domaine public vivant.

Les débats sur l’entrée du Petit prince dans le domaine public m’ont pas mal interpellé, aussi.

Cela fait quelques années maintenant que tu participes au projet d’édition collaborative Framabook… Qu’est-ce que ça t’a fait de te retrouver de l’autre coté des corrections ? [Goofy] Ils sont vraiment aussi ch*ants qu’on le dit, les relecteurs ?

Le plus pénible de la bande, je ne le craignais pas, c’est moi ! J’avais surtout peur que vous ne soyez trop indulgents avec un auteur « de la maison », que vous me fassiez trop confiance et que vous n’osiez pas me pousser à me dépasser comme on le fait avec d’autres postulants. Malgré la qualité de son texte original, qu’est-ce qu’on a enquiquiné Lilly, par exemple !

Je tiens absolument à ce que Framabook reste une vraie maison d’édition, exigeante, qui ne publie pas n’importe quoi sous prétexte que c’est du libre. Il y va de sa crédibilité. Moi qui, en comité de lecture, ai voté contre la publication de certains ouvrages, je ne voulais pas qu’on sorte mon bouquin parce que c’était le mien. Ça va peut-être vous faire rigoler, mais j’ai sérieusement envisagé de vous monter un bateau et de proposer le roman sous un pseudo, avec une fausse adresse mail. Et puis je me suis dit que de toute façon je me ferais vite gauler, vu que j’avais déjà parlé de mon projet à plusieurs d’entre vous.

Donc, bon, un soir j’ai pris mon courage et j’ai mis mon texte dans un mail.

Bon, c’est pas tout ça mais… la suite des aventures de Lucien et Maxime, elle te titille le ravioli ou bien tu vas partir sur d’autres projets ?

Je vais les laisser se reposer un peu, à leur âge ce ne serait pas raisonnable de recommencer à courir après les méchants tout de suite.

Mais j’ai bien un autre projet, encore un polar, dans lequel je vais encore jongler avec la langue.

Bon, pas d’affolement, je suis bien capable de le laisser mariner dix ans aussi, celui-là.

Et comme toujours lors de nos interviews, on te laisse le mot de la fin et/ou la question que tu aurais voulu qu’on te pose 😉

Difficile de sortir un roman rigolo en plein état d’urgence, mais si on attend que ça aille mieux on n’est pas sortis des roseaux !

Et puis, le vivre ensemble, c’est bien l’un de mes sujets, finalement.

J’ai retravaillé une description parce qu’une lectrice trouvait racistes les propos du narrateur.

En revanche, les préjugés sur les vieux que je balance à longueur de bouquin (au second degré, évidemment), les rhumatismes, les cors aux pieds, la prostate, les charentaises, ça n’a choqué personne.

L’intolérance est partout, et chacun essaie de se dépatouiller avec ses peurs, sa conscience, et le regard des autres.

SI on arrive à en rire, on a déjà fait un grand pas.

 

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