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Sunrise, le calendrier du futur

jeudi 1 septembre 2016 à 14:31
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En février 2015, Pierre Valade, co-fondateur du calendrier Sunrise, m’a demandé de collaborer avec lui à la rédaction d’un texte explorant le futur possible de notre utilisation d’un calendrier électronique. La société Sunrise a ensuite été rachetée par Microsoft et le calendrier Sunrise a malheureusement été définitivement mis hors-service ce 1er septembre 2016. Avec l’accord de Pierre, j’ai décidé de rendre ce texte public afin de célébrer, une dernier fois, Sunrise et ce qu’il aurait pu devenir : le calendrier du futur !

 

– À ce soir mon chéri !

Je hurle depuis le hall d’entrée tout en enfilant ma veste. La réponse de mon époux me parvient, lointaine.

— À ce soir ! J’ai vu que tu ne rentrais pas trop tard. Je m’occupe de nous préparer un bon petit plat.

Esquissant un sourire, je sors en refermant la porte derrière moi. La voiture est justement en train de se garer. Une légère vibration à mon poignet me confirme que je dois embarquer. La portière s’ouvre et une voix neutre me demande si je suis prêt à partir.

— Oui, confirmation de départ immédiat, annoncé-je machinalement.

Je m’étire et m’installe confortablement dans le fauteuil. Le temps estimé de trajet est inscrit sur un écran : 1h15. Mon interview du jour aura lieu en plein cœur de New York, dans le lounge d’un grand hôtel. Un hôtel que ni Pierre Valade, mon interviewé, ni moi ne connaissons. Mais qui, selon les algorithmes de Sunrise, est le plus propice à notre rendez-vous. Il faut dire que je me suis contenté d’envoyer une demande de rencontre avec quelques explications. Pierre a accepté. Nos agendas ont fait le reste.

À peine ai-je sorti ma tablette de mon sac qu’elle me propose des lectures et des vidéos qui correspondent au temps du trajet. Pratique mais, aujourd’hui, j’ai seulement envie de rêver, de regarder le paysage défiler, de méditer. Je me sens particulièrement zen.

En quelques années à peine, j’ai perdu ce réflexe de stress permanent que nous imposaient nos conventions. Peur d’être en retard, peur de rater un train ou un avion, peur de ne pas avoir le temps. Nous étions tellement obnubilé par la crainte de perdre du temps que nous en passions la majeure partie à organiser nos agendas, à arriver à l’avance à nos rendez-vous. Notre société était pauvre en temps et ceux qui ne le rentabilisaient pas étaient perçus comme des paresseux, des gaspilleurs de temps.

L’utilisation du temps relatif a, de manière surprenante, apporté une solution à ce paradoxe. Désormais, il est rare que je sache l’heure absolue. Je sais juste le temps qu’il me reste avant de me rendre quelque part. Je ne m’occupe même plus de choisir les moyens de transport : je me contente d’inviter mon mari à un week-end romantique à Paris, j’accepte une offre de voyage si elle correspond à mon budget et, après avoir fait nos bagages suite à un rappel judicieusement placé dans mon emploi du temps par Sunrise, nous embarquons dans la voiture qui nous conduit à l’aéroport.

S’arrêtant doucement, la voiture me sort de ma rêverie. Un coup d’œil à mon téléphone m’indique que Pierre vient également d’arriver. Je le repère au fond du lobby.

– Bonjour Pierre !

– Bonjour, enchanté de faire votre connaissance.

Après les présentations d’usage, je me lance directement dans l’interview.

— Pierre, comment vous est venu l’idée de fonder Sunrise ?

— Étant un grand distrait, j’avais tout simplement besoin d’un très bon calendrier.

— Qu’est-ce qui n’était pas satisfaisant avec les solutions existantes ? La plupart des entreprises étaient très satisfaites avec leur calendrier Exchange.

— Microsoft Exchange, comme la majorité des outils de cette époque, cherchait à organiser le problème, pas à le résoudre. Le but d’Exchange était de gérer un calendrier. Le but de Sunrise, c’est de vous permettre de profiter de votre temps. C’est très différent.

— Concrètement, en quoi Sunrise s’est-il démarqué ? Quelle a été l’innovation majeure ?

— Sunrise n’est pas une invention unique, soudaine. C’est un ensemble d’innovations continues, d’améliorations perpétuelles. Google, Microsoft, Facebook et Apple ne s’intéressant pas vraiment au problème, il y avait une place à prendre. Sunrise est né et nous avons acquis de l’expérience, nous sommes devenus des spécialistes, des experts. Nous étions les seuls !

— Et quel est ton rôle dans cette aventure ?

— Je suis un peu le chef d’orchestre. J’ai une vision précise et je cherche à recruter les personnes qui seront capables faire passer cette vision du rêve à la réalité.

— Pourrais-tu me donner un exemple concret de ta vision ?

— Et bien j’etais convaincu que l’optimisation du temps était un problème relativement simple pour un ordinateur alors que les outils existants étaient particulièrement laborieux à utiliser. Sunrise s’est donc concentré sur le design et l’interaction utilisateur. Pas besoin d’algorithme intelligent si personne ne peut utiliser ton application !

— En effet. Mais vous avez cependant introduit beaucoup d’intelligence par la suite…

Il acquiesce avant de jeter un coup d’œil machinal à son téléphone.

— Dîtes, je vois dans mon agenda qu’une parade musicale passe à deux rues d’ici. Ça vous dirait d’aller la voir.

— J’avais prévu de m’atteler à la rédaction de votre interview mais je pourrai faire ça durant mon retour en voiture.

— Elle viendra vous chercher là bas. Et puis, une parade musicale dans les rues de New York, c’est une occasion à ne pas manquer. Autant en profiter !

Me prenant par le bras, il m’emmène vers la sortie. Je résiste pour la forme.

— Au fait, quelle heure est-il ? me demande-t-il mystérieusement.

— Aucune idée ! fais-je, étonné.

— Parfait ! Ignorer l’heure est la meilleure façon de profiter du temps présent.

— Après tout, tant que je suis rentré pour le repas que me prépare mon mari…

— Vous utilisez Sunrise ? Alors, aucun risque ! me fait-il avec un clin d’œil complice.

Au loin, je perçois déjà les premiers échos de la fanfare.

 

Photo par Clément Cousin. Also available in English.

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Ce texte est publié par Lionel Dricot sous la licence CC-By BE.

Printeurs 39

jeudi 21 juillet 2016 à 16:23
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Ceci est le billet 39 sur 39 dans la série Printeurs

Nellio, Eva, Max et Junior fuient l’usine de mannequins sexuels à bord d’un taxi automatique gratuit.

Le taxi nous emmène à toute allure.
— Junior, tu es sûr que l’on ne sera pas tracé ?
— Pas si on utilise le mode gratuit. Les données sont agrégées et anonymisées. Un vieux reliquat d’une ancienne loi. Et comme le système informatique fonctionne, personne n’ose le mettre à jour ni triturer un peu trop les bases de données. Par contre, si on achète quoi que ce soit dans le tunnel, nous serions immédiatement remarqués !

Tout en répondant, il regarde avec émerveillement les doigts métalliques que Max lui a greffé.

— Waw, dire que j’ai attendu tout ce temps pour me faire greffer un implant auriculaire ! C’est génial !
— C’était nécessaire pour t’implanter le logiciel de gestions des doigts, ajoute Max. Mais l’implant auriculaire est fournit avec une légère euphorie pour atténuer la douleur.
— Au fait, Max, où va-t-on ?
— J’ai contacté FatNerdz sur le réseau. Il m’a filé les coordonnées du siège du conglomérat de la zone industrielle.
— Peut-on réellement faire confiance à ce FatNerdz que personne n’a jamais vu ni ne connait ?

Max semble hésiter un instant.

— À vrai dire, que peut-il nous arriver de pire que nous faire descendre par des drones explosifs ? Et c’est ce qui nous arrivera si nous ne faisons rien. Il y a un combat certain pour te capturer, Nellio. Autant tirer tout cela au clair une bonne fois pour toute…

Je me tourne vers Eva.

— Eva ? Parle moi ! Aide-nous !

Elle me darde d’un regard froid, cruel.

— Je pense savoir qui est FatNerdz. Je n’ai pas de preuve mais j’ai l’intime conviction que je le connais bien. Trop bien même…

Je n’ai pas le temps d’exprimer mon étonnement que la voiture ralentit soudainement. Toutes les vitres descendent et nos sièges se tournent automatiquement vers l’extérieur. Junior nous hurle un ordre avec un ton incroyablement autoritaire.

— Surtout, ne touchez rien, n’achetez rien ! Gardez les mains coincées en dessous de vos fesses.

Devant nos yeux se mettent à défiler des distributeurs nous présentant toutes sortes de produits : barres sucrées, boissons colorées, alcools, vêtements, accessoires…

— Junior, fais-je un peu honteux d’avouer mon ignorance, je n’ai jamais pris les tunnels gratuits. J’ai toujours pu me payer des courses individuelles…
— Heureux veinard ! Les tunnels gratuits n’ont de gratuit que le nom. À force de les utiliser, ils coûtent bien plus cher à l’usager que de payer directement des courses individuelles. C’est ce qui rend les pauvres encore plus pauvres : ils vendent la seule chose qui leur reste, leur personnalité et leur libre arbitre, pour une illusion de gratuité.

Des hologrammes commencent à danser devant mes yeux, des femmes et des hommes nus se trémoussent, boivent d’alléchantes boissons et me tendent langoureusement des cuillerées de yaourt ou des morceau de fruits recomposés. Je sens monter en moi un mélange d’appétit, de désir sexuel, de fringale… Instinctivement, je tends le bras vers une délicieusement rafraichissante bouteille de jus…

— Non ! me hurle Junior en me tapant violemment sur le bras. Si tu touches le moindre objet, il te sera crédité via un scan rétinien. Les transactions financières étant étroitement surveillées dans le cadre des lois anti-terroristes, nous serons pulvérisés dans la seconde ! Tiens bon !

La voiture me semble de plus en plus lente. Ce tunnel est interminable.

– Tant qu’on n’achète pas, la voiture ralentit, me souffle Junior. Mais il y a une durée maximale. Tiens bon !

Je ferme les yeux afin de soulager mes pulsions mais les phéromones de synthèse aguichent mes sens. Mes nerfs sont à fleur de peau, je me sens agressé, écorché, violé. Le désir monte en moi, j’ai envie de hurler, je me mords les mains jusqu’au sang. Je…

Lumière !

— Nous sommes sortis !

La voiture reprend de la vitesse Je respire douloureusement. De grosses gouttes de sueur perlent sur mon front. De sa main cybernétique, Junior me caresse l’épaule.

— C’est vrai que ça doit être violent si c’est la première fois. Le problème c’est que lorsqu’on y est exposé enfant, on développe une forme d’accoutumance. Les réflexes d’achats sont ceux ancrés dans la petite enfance. Les publicitaires sont donc dans une concurrence de plus en plus violente afin d’outrepasser ces habitudes.

Je me tourne vers Eva, qui semble être restée impassible.

— Eva, pourtant toi aussi tu m’avais dit ne pas avoir été exposé à la publicité. Encore moins que moi ! Tu m’as raconté que tes parents avaient fait d’énormes sacrifice pour cela.

Elle hésite. Se triture les lèvres. Un silence gêné s’installe que Max rompt.
— Eva, il est peut-être temps de lui dire la vérité.
— Je ne sais pas s’il est prêt à l’entendre…

Je hurle !

— Bon sang, je suis manipulé, pourchassé et traqué, j’ai bien le droit de savoir ce qui m’arrive ! Merde, Eva, je croyais sincèrement que je pouvais compter sur toi.
— Tu as toujours pu compter sur moi, Nellio. Toujours ! Je ne t’ai menti que sur une seule chose : mon origine.
— Alors dis moi tout !
— Je croyais que ce que tu as vu à l’usine Toy & Sex était suffisant.
— Et bien non ! Cela a rendu tout encore plus confus pour moi ! Pourquoi ces poupées gonflables nouvelle génération sont-elles à ton effigie ?

Max émet un son qui, s’il avait un larynx biologique, ressemblerait sans doute à un toussotement.

— Nellio, continue Eva doucement. Ces poupées ne sont pas à mon effigie.
— Mais…
— C’est moi qui suis…

Une formidable explosion retentit soudain. La voiture est soufflée et projetée violemment sur le flanc. Des crépitements d’armes à feu se font entendre.

— Ils nous ont repéré, hurlé-je !
— Non, me répond Junior. Si c’était le cas, nous serions mort. C’est certainement un attentat.

Nous sommes tous les quatre emmêlés, culs par dessus tête. Max tente de s’extirper du véhicule. Ses pieds et se genoux me broient les côtes mais la douleur reste supportable.

— Oh merde, un attentat, soupiré-je en portant la main à mon front ensanglanté. Encore ces foutus militants du sultanats islamiques !
— Ou alors, des policiers en service commandé, ajoute Junior avec un sourire narquois.
— Hein ?
— Oui, s’il n’y a pas assez d’attentat, on en organise des petits histoires de justifier les budgets. Parfois ce sont des initiatives locales. Parfois, c’est carrément des ordres qui viennent d’en haut afin de faire passer des lois ou de prendre des mesures. Dans tous les cas, ça fait consommer de l’info, ça occupe les télépass.

La voix de Max nous parvient de l’extérieur.

— Dîtes, vous vous magnez le train ? Ils sont en train de descendre tout le monde de l’autre côté de la rue. Mais ils risque bien de venir canarder les survivants de l’explosion.
— Après toi, fais-je à Junior d’un air blasé, heureux de vivre enfin une explosion dont je ne suis pas la cible prioritaire.

 

Photo par Oriolus.

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Reliez Ottignies et Bruxelles en vélo grâce au VER

vendredi 24 juin 2016 à 14:27
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Une piste cyclable parfaitement sécurisée et sur site propre pour relier Ottignies à Bruxelles en seulement 16km ? Le tout entièrement financé par l’argent du contribuable ?

Un rêve ?

En fait, c’est déjà une réalité que vous avez déjà financé à hauteur de plusieurs milliards d’euros.

Seul petit problème à régler : les contribuables qui ont financé cette merveille sont interdits d’accès.

Car cette merveilleuse piste cyclable, c’est le tracé du futur RER. Un chantier qui a déjà englouti des milliards d’euros d’argent public pour un résultat qui serait, au mieux, utilisable en 2024. Mais les prévisions les plus réalistes tablent pour une arrivée du RER aux alentours de 2030. Si jamais il est finalement terminé et n’est pas déjà périmé avant même sa mise en service.

De Ottignies à Bruxelles (gare de Boitsfort), il existe donc une véritable route goudronnée, lisse, plate, sans aucune côte et sans aucun trafic. Cette route en parfait état ne s’approche jamais à moins de trois mètres des voies de chemin de fer et en est toujours séparé par une bordure et un écran minimal de végétation. Nous l’avons baptisé le VER, Vélo Express Régional.

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Cliquez pour voir l’animation

L’association cycliste Gracq a très récemment annoncé que certains de ses membres utilisaient certains tronçons du VER. La réaction d’Infrabel, gestionnaire des voies, ne s’est pas fait attendre : l’accès à cette route est strictement interdit voire serait dangereux.

Cette route en parfait état devrait donc rester inutilisée et se dégrader inutilement pendant au minimum une décennie.

C’est pour en avoir le cœur net que cinq cyclistes ont décidé de relier Ottignies à Boitsfort en vélo, un jour de grève générale : Stéphane, Nils, Natacha, Yves et votre serviteur.

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Preuve que l’idée est dans l’air du temps : nous préparions notre action alors qu’aucun de nous n’était au courant de l’action très similaire du Gracq.

Le résultat est sans appel : seul le tronçon entre les gares de Genval et La Hulpe (2km) n’est pas encore aménagé. Le passage est strictement impossible sans s’approcher dangereusement des voies ou en les traversant (l’aménagement étant fait de l’autre côté des voies). Il est donc impératif de quitter le VER avant la gare de Genval et de le reprendre à la gare de La Hulpe, impliquant un détour de 15 minutes.

Le reste du trajet se fait de manière entièrement sécurisée sur une route large et dégagée. Deux passages d’une centaine de mètres sont en sable et en terre mais restent praticables en VTT, le premier à Profondsart et le second dans la gare de Boitsfort même.

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Passage boueux à Profondsart

Au total ? Un VER d’un peu plus de 16km sur un terrain absolument plat. Pour un cycliste entraîné, ce trajet est réalisable en une demi-heure. Et pour ceux qui préfèrent prendre le temps et admirer le cadre très agréable, 45 à 50 minutes semble un grand maximum. Tant que la jonction Genval vers La Hulpe n’est pas finalisée, une petite heure semble un temps raisonnable, même pour un cycliste néophyte.

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Une partie du trajet est même couverte

Autre obstacle imprévu : une étendue de verre brisé dans la gare de Rixensart qui déchirera le pneu de votre serviteur, le forçant à faire demi-tour tandis que les quatre autres continuaient vers Boitsfort.

Mais rien de mieux pour vous convaincre qu’une petite vidéo (d’où il ne manque que les derniers kilomètres).

Alors, est-ce dangereux ?

Oui, clairement. Le fait de devoir faire un détour entre Genval et La Hulpe nécessitant de passer par des rues ouvertes au trafic automobile et sans pistes cyclables est certainement la partie la plus dangereuse du trajet. Un danger que les cyclistes vivent au quotidien mais qui pourrait désormais être évité grâce au VER.

En dehors du tronçon Genval/La Hulpe, les trains restant toujours à une bonne distance ne peuvent en aucun cas représenter le moindre danger.

Est-ce légal ?

Non. Bien qu’il n’y ait ni dégâts matériel, ni victimes, cette action que nous avons entreprise est illégale.

Cette illégalité est-elle justifiable ?

Suite à l’action du Gracq, la réaction d’Infrabel ne s’est pas fait attendre : des bacs de ciment ont été volontairement placés pour bloquer l’accès aux cyclistes. Cette réaction vous semble-t-elle responsable et utile ?

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Infrabel ne supporte pas la concurrence intolérable du vélo

Le pouvoir politique qui lutte pour la mobilité, la réduction des polluants peut-il légitimement décider que les cyclistes n’ont pas le droit d’être protégés et ne doivent en aucun cas bénéficier du VER ?

Ces politiciens ne seront-ils pas moralement responsables si un cycliste se fait renverser par une voiture car il a décidé de respecter l’interdiction d’utiliser le VER et roule au milieu de routes pensées pour l’automobile ?

Un état démocratique qui a financé le VER avec l’argent du contribuable a-t-il le droit d’interdir ces mêmes contribuables de l’utiliser ?

Ne devrait-on pas au contraire finaliser au plus vite la jonction Genval/La Hulpe et inaugurer une formidable voie verte sur laquelle pourrait naître une véritable économie de proximité : buvette pour cyclistes assoiffés, ateliers de réparation, salles de réunions et espaces de travail.

La créativité est sans limite. Il ne reste plus qu’à finaliser l’effort accompli.

Mesdames et Messieurs les politiciens, vous avez aujourd’hui l’opportunité de transformer le plus grand des travaux inutiles belges, véritable gabegie d’argent public (le RER) en un formidable investissement écologique et économique, le VER.

Mesdames et messieurs les politiciens, il suffit d’une impulsion pour finaliser le VER. La balle est dans votre camp !

 

Photo de couverture : départ du VER depuis le pont de Jassans à Ottignies.

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Travailler, un luxe que nous ne pouvons plus nous permettre

jeudi 23 juin 2016 à 15:55
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De tous temps, la jeunesse est entré en rébellion contre les vieillards afin de faire évoluer une société que les conservateurs, par essence, veulent figée.

La jeunesse finit toujours par gagner même s’il faut parfois plusieurs générations de jeunes pour faire admettre une idée, avec potentiellement des retours en arrière. Au final, il suffit d’être patient.

Mais aujourd’hui, il y’a un problème pour lequel nous n’avons malheureusement plus le temps d’attendre : la sauvegarde de notre planète.

Nous n’avons plus le loisir de discuter et de laisser le conservatisme accepter péniblement l’idée que, tiens, peut-être que les ressources de la planète sont limitées. Nous ne pouvons plus nous permettre de mettre quinze ans à apprendre à mettre les déchets plastiques dans des sacs bleus pour avoir l’impression de faire un geste pour l’environnement.

Il faut agir radicalement aujourd’hui et maintenant. Il faut repenser fondamentalement tout ce qui, dans notre société, détruit ou justifie la destruction de la planète.

Et l’une des principales sources de destruction est clairement identifiée : l’emploi ! Personne n’ose le dire voire le penser car il s’agit d’un pilier de notre société et de notre identité.

Car quel est le réel problème auquel nous sommes confrontés ? Nous consommons et nous produisons trop ! C’est aussi simple que cela : tout notre modèle de société est basé sur produire plus pour pouvoir consommer plus et consommer plus pour pouvoir produire plus.

Et comme nous sommes de plus en plus productifs pour produire avec moins de travail, nous n’avons d’autre choix que d’augmenter la consommation.

Les emballages biodégradables, les réductions d’émissions, l’isolation des bâtiments et même les marches pour l’environnement pleines de bons sentiments ne sont que cela : des bons sentiments, des vœux pieux.

Tous les discours, toutes les décisions politiques et toutes les technologies “vertes” ne pourront rien faire d’autre que légèrement ralentir l’inéluctable tant que nous n’aurons pas conscience que le seul et unique problème est notre relation au travail.

Car un travail n’est finalement rien d’autre que prendre une partie de ressources de la planète et la transformer en autre chose, en produisant au passage des déchets.

Tant que nous nous évertuerons à vouloir “créer des emplois”, nous consommerons, nous polluerons, nous détruirons la planète.

Or, loin de remettre en question cette cause fondamentale, nous en sommes arrivé à la suprême hypocrisie qui consiste à “créer des emplois verts”. Le discours des partis écologistes est de dire que “être écologique crée de l’emploi”.

Nous essayons de faire en sorte que les voitures polluent un peu moins par kilomètre parcouru, quitte à truquer les tests pour faire semblant, alors que l’unique problème est que nous parcourons bien trop de kilomètres pour… nous rendre au travail. Kilomètres qui nécessitent des routes de plus en plus larges afin d’attirer de plus en plus d’automobilistes qui sont de plus en plus ralentis et donc polluent encore plus.

Nous ne pouvons plus nous permettre de “polluer moins”. Nous ne pouvons plus accepter que les mentions “écologique” ou “vert” soient apposées à coté de tous ce qui est légèrement moins polluant que la concurrence. Nous devons radicalement changer notre mode de vie pour ne plus polluer du tout voir pour régénérer la planète.

La remise en question du travail génère des peurs fondamentales : plus personne ne va rien faire, les gens vont être désœuvrés, la civilisation va s’écrouler.

Mais le pire des scénarios n’est-il pas préférable à l’issue vers laquelle nous nous dirigeons inexorablement ?

Car si nous observons ce que les gens font en dehors du travail, que ce soit en bénévolat, en activité artistique, en entraide, en faisant de l’artisanat ou du sport, une tendance nette s’observe : ces activités détruisent très peu la planète (à l’exception de quelques sports moteurs ou de la chasse).

À l’opposé, le travail est une activité rarement réalisée avec plaisir qui a pour essence même de détruire la planète ou d’encourager à sa destruction à travers la consommation.

Dans le pire et le plus effrayant des futurs, une société de loisirs entraînerait des inégalités, un appauvrissement général voire un écroulement de la civilisation. Le tout potentiellement agrémenté de famines, d’épidémies, de guerre. Nous sommes d’accord que ce scénario catastrophe est improbable mais considérons le pire.

Nous constatons que, pour l’humanité, ce scénario catastrophe n’est pas mortel. Une nouvelle civilisation finira toujours pas renaître.

Tandis qu’en continuant à travailler, à créer de l’emploi et à valoriser le travail, nous détruisons peut-être définitivement notre planète.

Par peur des incertitudes, nous préférons offrir à nos enfants une quasi-certitude : celle d’être l’une des dernières générations d’êtres humains.

L’humanité peut se remettre de toutes les catastrophes. Sauf une. La perte de son unique planète.

Il est urgent de nous débarrasser de l’emploi le plus vite possible. D’arrêter d’essayer de négocier avec les conservateurs inquiets et d’agir sans tenir compte de leur avis. Nous devons unir nos forces aujourd’hui car nous n’aurons pas de seconde chance.

Alors ? Comment fait-on pour arrêter de nourrir le système ?

 

Photo par Alan Cleaver.

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La liberté que nous avons oubliée…

lundi 6 juin 2016 à 11:12
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Nous avons cru que tout était propriété, que chaque atome appartenait au premier qui le réclamerait.

Mais nous avons oublié que la matière a toujours existé, qu’elle nous a été transmise et que nous la transmettrons à notre tour, peu importe les transactions, les ventes et les achats. Nous n’en sommes que les dépositaires temporaires.

Nous avons cru que tout se vendait et tout s’achetait. Que pour subsister, il fallait acheter et donc vendre pour gagner de quoi acheter.

Mais nous avons oublié que, parfois, nous n’avons même plus de quoi acheter le minimum vital. Alors nous avons puni ceux qui étaient dans cette situation, nous les avons accusé et nous nous sommes convaincu que nous ne serions jamais comme eux. Nous avons séparé l’humanité en deux.

Nous avons cru que nous devions gagner plus afin de vivre plus et de posséder plus. Que nous n’avions pas le choix. Que nous devions vendre notre corps, notre intelligence ou bien des objets. Ou vendre des idées afin d’aider d’autres à vendre plus. Ou d’enseigner à d’autres la meilleure manière de vendre.

Mais nous avons oublié que le choix, il se prend. Qu’accepter un travail plus loin mais mieux rémunéré afin de consommer plus est un choix. Qu’accepter un travail qui pousse d’autres à consommer est un choix. Nous avons refusé de voir que nous étions chacun responsable de notre travail, de l’impact que celui-ci avait sur le monde.

Nous avons cru que le fait de posséder était notre objectif ultime, que nous devions amasser, acheter, consommer.

Mais nous avons oublié que les objets n’ont pas de maître. Qu’ils peuvent tout au plus nous procurer quelques soupçons de joie lorsque nous les utilisons durant quelques minutes ou quelques heures. Et que, le reste du temps, ils nous encombrent, nous rendent malheureux et nous convainquent d’acheter encore plus.

Nous avons cru que la propriété apportait la liberté. Que le propriétaire pouvait jouir de son bien à sa guise sans se préoccuper des conséquences.

Mais nous avons oublié que les frontières et les tracés ne sont que des délimitations virtuelles. Que nous ne possédons qu’une seule et unique planète qui souffre globalement de chacune de nos actions.

Nous avons cru que les idées étaient une propriété. Que même les semences et le génome devait être breveté. Que partager revenait à voler.

Mais nous avons oublié qu’une idée qui ne se partage pas se fige et s’oublie. Que le vivant n’a que faire de nos brevets. Qu’en tentant de contrôler la propriété, nous ne pouvions qu’arrêter de penser.

Nous avons cru jouir de la propriété.

Mais nous avons oublié que nous ne faisons qu’emprunter au futur chaque molécule, chaque journée.

Nous avons cru ne pas avoir le choix et devoir acheter la liberté.

Mais nous avons oublié que la liberté, c’est avant tout de faire des choix. Nos choix.

 

Photo par Stefano Corso.

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