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Le cadeau de la sérendipité pirate

samedi 12 décembre 2020 à 12:24

Fêter ses proches avec un échange personnel tout en limitant le consumérisme et le pouvoir d’Amazon.

La période des « fêtes » est l’un des piliers de notre mode de vie consumériste. Pendant une brève période, il devient socialement obligatoire de trouver une série de cadeaux pour ses proches. Or, comme Milton Friedman l’avait déjà analysé, dépenser son argent pour les autres est économiquement sous-optimal. Au mieux, on achète quelque chose qui n’est pas prioritaire pour la personne concernée. Ou on l’achète trop bon marché et de moindre qualité. Ou trop cher par rapport au budget prévu. L’industrie s’est d’ailleurs spécialisée dans les « cadeaux gags », l’objet qui fera rigoler quelques secondes avant de finir dans une armoire ou dans la poubelle, car parfaitement inutile ou inutilisable.

https://ploum.net/les-4-manieres-de-depenser-de-largent/

Signe de la culpabilité écologique de notre embourgeoisement, nous passons des gadgets inutiles en plastique bon marché aux gadgets inutiles en bois bio très cher. Mais le principe est le même. Forcé d’offrir, nous consommons de manière absurde et pour un rapport plaisir/coût bien trop faible. Ce rapport peut même être négatif, le cadeau encombrant le destinataire, le forçant à le stocker avant de s’en débarrasser discrètement après une période socialement acceptable de possession.

Le confinement a accéléré cette tendance, transformant les meutes suantes se pressant dans les centres commerciaux surchauffés par des frénésies de clics sur Amazon. Il en résulte des valses de livraisons incessantes, jusqu’à plusieurs fois par jours de plusieurs entreprises de livraisons différentes. Des livreurs épuisés sonnent à 9h du soir à notre porte pour garantir une livraison en 24h d’un objet absurde sur lequel l’algorithme d’Amazon nous a encouragés de cliquer distraitement la veille.

Amazon pousse même le vice à rendre souvent plus chère la livraison moins rapide, spécialement pour les détenteurs d’un compte Prime. L’urgence, qui devrait être surfacturée et réservée aux cas exceptionnels, est devenue la gestion par défaut. Trois objets différents seront envoyés en trois colis différents pour éviter de retarder la livraison de quelques heures. Le tout se faisant au détriment de la santé des travailleurs, au détriment des petites enseignes locales qui ne peuvent garantir une telle rapidité, au détriment de la planète. Les plus cyniques y verront une stratégie consciente pour éviter aux clients d’Amazon d’annuler les achats impulsifs, les plus pessimistes une simple conséquence de notre compulsion à l’immédiateté.

Pourtant, j’aime bien faire des cadeaux à mes proches. Mais je déteste y être obligé. J’aime la spontanéité, la sérendipité d’une idée imprévue.

Pour moi, il n’est pas de cadeau plus inspirant qu’un livre inattendu. Offrir un livre, c’est offrir une chance pour le destinataire de découvrir un nouveau monde, un nouvel univers. Un livre peut changer une vie. Un livre peut apporter quelques heures de plaisir impromptu. Pas toujours. Mais, dans le pire des cas, le livre finira sur une étagère où il attendra son heure. Son stockage est aisé et sa seule présence peuple un intérieur. Le livre est patient. Il peut attendre des siècles. Il peut passer de mains en mains avant d’être ouvert. Il peut finir dans une bouquinerie où il commencera une nouvelle vie. Il peut se transmettre, se prêter, se donner.

J’adore me balader chez les bouquinistes, avoir le regard attiré, par exemple par un ouvrage de Karl Popper qui finira par faire l’objet d’un billet sur mon blog. Ou trouver un livre, me dire qu’il plaira à mon épouse et le déposer sur son bureau sans rien dire.

Avec le confinement, ces déambulations littéraires sont plus compliquées. L’algorithme Amazon broie toute sérendipité au profit de la rentabilité. Au lieu de découvrir un vieux titre inconnu et oublié, nous sommes sans cesse renvoyés aux livres qui se vendent le mieux. Nous sommes algorithmiquement pressés à la conformité jusque dans nos lectures.

Alias a très bien résumé l’importance de, non pas de boycotter Amazon à tout prix, mais bien favoriser l’émergence d’alternatives.

https://alias.erdorin.org/achats-en-ligne-des-presents-pour-lavenir/

Il m’a notamment fait découvrir le site Stop Amazon qui propose des alternatives.

https://www.stop-amazon.fr/Les-alternatives

De son côté, Korben a listé les manières de se procurer des livres pendant le confinement.

https://korben.info/livres-pour-le-confinement.html

Autre idée pour soutenir les commerces locaux que vous appréciez et qui souffrent du confinement : contactez-les pour commander des chèques cadeaux.

Enfin, il reste bien entendu la possibilité de trouver des petits éditeurs de livres indépendants qui ne sont pas sur Amazon. Au hasard, pourquoi ne pas offrir Printeurs ou le reste de la collection Ludomire comme cadeau de Noël ? (toutes les commandes passées jusqu’au mercredi 16 décembre sont garanties d’arriver pour Noël, au moins en France et en Suisse. Pour la Belgique, prévoyez un jour ou deux de plus).

https://www.plaisirvaleurdhistoire.com/shop/37-collection-ludomire

Pour les plus technophiles, une idée cadeau que j’affectionne est la sélection de livres électroniques. Une clé USB contenant des livres sans DRM et un petit texte l’accompagnant décrivant pourquoi on a choisi ces livres-là pour cette personne.

Un véritable cadeau personnalisé qui ne demande ni transport ni livraison, dont le coût financier est minime, mais qui nécessite un chouette investissement personnel.

Un livre d’occasion trouvé par hasard voire dans sa propre bibliothèque, une sélection de livres électroniques sans DRM. Des cadeaux magnifiques qui créent une réelle complicité, un échange, une relation personnelle entre celui qui offre et celui qui reçoit. Et cela, sans nécessairement dépenser beaucoup d’argent.

C’est ce genre de cadeau que la publicité tente de nous faire oublier, que les fondamentalistes du copyright tentent de dénigrer sous le nom de piratage. S’échapper des algorithmes est devenu une forme de piratage.

La sérendipité pirate ! Le cadeau que j’ai envie d’offrir et de recevoir.

Pour vous, amis lecteurs, je vous souhaite :

Un joyeux Noël anti-consumériste, mais plein de joie enfantine

https://ploum.net/178-j-emmerde-noel/

Un joyeux Newël plein de magie scientifique et de découvertes

https://ploum.net/newel-dans-la-ceinture-d-asteroides/

Et un effroyable solstice plein de Ph’nglui et de R’lyeh wgah’nagl fhtagn.

https://ploum.net/229-un-effroyable-solstice/

PS: Si votre esprit souscrit à l’alléchante perspective de la lecture de Printeurs mais que votre escarcelle s’y refuse, je dispose d’exemplaires suspendus qui vous attendent avec impatience. Contactez-moi simplement par mail pour en bénéficier, confidentialité garantie et aucune justification nécessaire. Si, au contraire, vous souhaitez alléger vos bourses en contribuant à ce programme, vous pouvez simplement passer votre commande sur le lien suivant. Celui Qui Dort Dans Les Profondeurs vous le rendra au centuple.

https://www.plaisirvaleurdhistoire.com/shop/accueil/247-printeurs-version-ludomire.html

Photo by Eddie Junior on Unsplash

Je suis @ploum, ingénieur écrivain. Abonnez-vous par mail ou RSS pour ne rater aucun billet (max 2 par semaine). Je suis convaincu que Printeurs, mon dernier roman de science-fiction vous passionnera. Commander mes livres est le meilleur moyen de me soutenir !

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Ce texte est publié sous la licence CC-By BE.

L’indéterminisme scientifique et le libre arbitre

mercredi 9 décembre 2020 à 15:08

Une lecture personnelle de « L’Univers irrésolu, un plaidoyer pour l’indéterminisme » de Karl Popper, complétée par « Les Lois du chaos » et « La Fin des certitudes », d’Ilya Prigogine.

Contrairement à une intuition souvent partagée, la science n’est pas une entité monolithique à laquelle on croit ou pas. C’est un fluide sans cesse mouvant qui tente d’étendre la connaissance globale humaine, de déterminer les règles qui régissent notre univers.

Comme je l’ai écrit dans un précédent billet, prétendre que la science ne peut expliquer tel ou tel domaine relève d’une prétention absolue. Cela revient en effet à affirmer haut et fort que vous savez, avec certitude, que personne ne pourra jamais expliquer quelque chose que vous, vous pouvez identifier. Que vous avez donc atteint la connaissance ultime dans ce domaine particulier, que vous êtes sur ce point plus intelligent que tous les humains passés, présents et à venir.

https://ploum.net/la-science-na-pas-reponse-a-tout/

La science n’a pas réponse à tout ? Non, mais elle y tend de manière asymptotique. Karl Popper utilise souvent l’analogie de la pêche : la connaissance est un filet. Chaque progrès nous permet de resserrer les mailles du filet pour comprendre toujours un peu plus la réalité, mais nous laissons toujours quelque chose passer entre ces mailles.

Le fantasme de Laplace

Au 17e siècle, les Principia Mathematica de Newton suscitèrent un énorme espoir parmi les intellectuels. La science semblait presque complète. Chaque découverte semblait une nouvelle pièce de puzzle qui s’insérait magnifiquement. La « science totale » était à portée de main.

Laplace imagina son célèbre démon qui, connaissant la position et la vitesse exacte de chaque particule dans l’univers à un temps donné, pouvait déduire le futur précis de cet univers.

Selon cette vision, notre ignorance n’était plus qu’un manque de précision. Notre libre arbitre d’humain n’était qu’une méconnaissance de l’agencement des molécules du cerveau. Nous n’étions plus qu’une machine soumise aux lois d’un univers entièrement déterministe.

Le déterminisme est la clarté qui s’oppose au chaos, l’étendard du siècle des Lumières, le triomphe de la raison. Einstein lui-même était un fervent partisan d’un déterminisme qui reste encore populaire.

Au 20e siècle, les succès de la mécanique quantique vont lézarder l’édifice du déterminisme. Il devient en effet impossible de prédire, avant une mesure, les propriétés d’une particule. Tout au plus peut-on prédire une probabilité de résultat de cette mesure.

L’interprétation de cette incertitude n’est pas intuitive. Pour l’école dite « de Copenhague », c’est la mesure elle-même qui détermine aléatoirement la propriété de la particule observée. La matière serait donc, au niveau quantique, intrinsèquement indéterministe. C’est inacceptable pour les déterministes comme Einstein pour qui cette imprécision est un simple manque de connaissance.

Cet indéterminisme quantique donnera naissance à pléthores de théories tentant d’expliquer la conscience et le libre arbitre à travers la mécanique quantique, depuis les plus sérieuses aux plus farfelues (vous avez certainement vu passer des ateliers de méditation quantique, de connexion quantique à l’univers, de revitalisation quantique, etc.).

Le raisonnement qui conduit à ces théories est simple. Si l’univers newtonien est déterministe et si la mécanique quantique est indéterministe, si l’existence du libre arbitre présuppose l’indéterminisme alors le libre arbitre s’explique par la mécanique quantique. Sophisme évident, mais terriblement intuitif et attrayant.

Mais la science implique-t-elle réellement un univers déterministe ? C’est pour répondre à cette question que Karl Popper publie, en 1982, L’Univers irrésolu, sous-titré « Plaidoyer pour l’indéterminisme ».

Quatre ans plus tard, Sir James Lighthill, alors président de l’Union internationale de mécanique pure et appliquée, présente officiellement ses excuses, au nom du monde scientifique, pour avoir induit, par excès d’enthousiasme envers les théories de Newton, le public en erreur en prétendant que le monde était prédictible.

Si les Lumières nous ont appris que la science a bien réponse à tout, le 20e siècle nous apprend que cette réponse n’est pas déterministe.

L’incomplétude de la science

Dans son texte, Karl Poper utilise plusieurs arguments. Le premier c’est celui de l’incomplétude de la science qu’il illustre avec l’analogie du filet que j’ai citée plus haut. Pour que l’univers soit déterministe, il faut que la science soit complète donc que la somme des connaissances possibles soit finie. Une telle affirmation est, on le conçoit, assez prétentieuse.

Mais en admettant que la connaissance soit finie, encore faut-elle qu’elle soit accessible à notre fameux démon de Laplace (qui pourrait être un ordinateur, un scientifique, un dieu) pour qu’il puisse l’utiliser afin de prédire le futur.

Malheureusement, une connaissance finie entraîne le paradoxe de l’autoprédiction. Une entité connaissant les règles finies qui régissent l’univers serait en mesure de prédire ses propres découvertes futures simplement en prédisant ce qu’elle va afficher sur son propre écran ou sa propre imprimante. Elle est donc en mesure de prédire sa propre évolution, son impact sur son environnement et, en conséquence, de prédire les données que va lui fournir son environnement.

Il est possible de démontrer que les calculs d’une telle entité prendront un certain temps et que le stockage informationnel est proportionnel à la taille de l’environnement prédit. Bref, que pour prédire l’univers, il faut… observer l’univers lui-même.

Stricto senso, cela ne pose pas un argument contre un univers déterministe, mais contre le déterminisme scientifique. Si déterminisme il y’a, les règles de celui-ci seront pour toujours inaccessibles.

En fait, Gödel l’a démontré pour les mathématiques : une théorie ne peut être complète et se prouver elle-même. Une découverte admirablement vulgarisée dans le lien ci-dessous. On retrouve le même principe en informatique où Turing a démontré qu’il était impossible de créer un programme qui détermine si un autre programme s’arrête ou non.

https://stopa.io/post/269

Remarquons au passage que nous pouvons en inférer l’impossibilité mathématique de l’existence d’un dieu omniscient et omnipotent. Un dieu ne peut pas à la fois connaître le monde (il doit avoir la taille de ce monde) et agir dessus (il fait partie du monde).

Quand bien même nous pourrions construire un ordinateur laplacien ultime capable de contenir toute la connaissance de l’univers, il serait impossible de lui fournir cette connaissance. Cela, à cause de la relativité. Un argument magnifique que Poppper a présenté à Einstein en personne alors que celui-ci arguait du déterminisme.

La relativité nous informe en effet que rien ne peut se déplacer plus vite que la lumière. Nous sommes en permanence dans ce qu’on appelle un « cône informationnel ». Si vous voulez prédire ce qui se passera en 2021 sur Terre, vous n’avez besoin que de connaître tout ce qui se trouve à moins d’une année-lumière de notre planète. Si un cataclysme galactique devait se produire demain à deux années-lumière de la terre, il n’aurait aucun impact sur 2021.

Cependant, pour pouvoir prédire 2021, j’ai besoin de savoir comment sont tous les corps célestes situés à une année-lumière de la terre… maintenant. Or, comme aucune information ne peut dépasser la vitesse de la lumière, je ne peux pas le savoir immédiatement. Le seul moment où j’aurai l’information nécessaire pour prédire 2021 sera… le 31 décembre 2021. En gros, la relativité nous condamne à ne connaître que le présent. Par essence même de l’univers, il est impossible de prédire le futur. Tout au plus peut-on vivre le présent.

L’indéterminisme newtonien.

Une autre idée que s’efforce de déconstruire Popper est celle du déterminisme newtonien. Deux corps s’attirent, cela semble une loi immuable et déterministe.

Mais Newton lui-même n’a jamais prétendu au déterminisme. L’attraction entre deux corps n’est qu’une simplification très particulière d’une loi plus générale qui, elle, est statistique.

Avez-vous déjà entendu parler du problème à trois corps ? En gros, si l’on peut calculer très simplement la gravitation de deux corps qui s’attirent mutuellement, il est impossible de prévoir exactement la trajectoire de trois corps qui interagissent. Trois corps en interaction représentent en effet un système dit chaotique.

On croit souvent que chaotique signifie « difficile à calculer ». Que si l’on connaissait suffisamment la position et la masse des trois corps, il n’y aurait plus d’incertitude ! C’est une erreur.

Imaginez trois planètes qui, partant d’une position de départ A, aurait un mouvement donné M. Trouvez une position de départ B qui est aussi proche que possible de A et qui donne, d’après vos instruments, un mouvement M’ très similaire, voire même indistinguable, de M. Il est toujours possible de trouver une position de départ A’, située entre A et B, qui aurait un mouvement complètement différent.

Avec trois corps, même les lois de Newton deviennent statistiques et indéterministes. Il est impossible de connaître avec certitude le mouvement de trois corps soumis aux équations de la gravitation de Newton.

Dans « La Fin des certitudes » et « Les Lois du chaos » (ce dernier étant un livre de moins de 100 pages qui réalise l’exploit de placer des références à Asimov et Turing dès le premier chapitre), Ilya Prigogine démontre exactement la même chose. Certaines réactions chimiques, qu’il appelle des « oscillateurs chimiques », sont imprévisibles au sens strict. Tout au plus peut-on inférer une probabilité, mais même une connaissance parfaite des conditions initiales ne permet pas de connaître avec certitude le résultat.

Prigogine démontre que cette incertitude n’est pas due à un manque de connaissance, mais est belle et bien mathématique et structurellement propre à certains systèmes. En intégrant les équations décrivant ces systèmes, certaines informations disparaissent et deviennent probabilistes. Ce résultat n’est en fait pas nouveau. Il avait déjà été étudié par Poincarré, mais était considéré comme une curiosité.

Dans les années 50, la théorie Kolmogoroff-Arnold-Moser démontrera que le calcul de simples trajectoires peut, lorsque des effets de résonance entrent en jeu, donner des résultats imprévisibles au sens strict. Renversement de situation ! En réalité, ce sont les systèmes prévisibles qui sont des curiosités. L’univers est majoritairement chaotique.

Libre arbitre

Popper va bien entendu beaucoup plus loin et développe de nombreux arguments que je vous invite à explorer par vous-même dans « L’univers irrésolu », qui est d’une lecture agréable. Sa conclusion est cependant contenue dans le titre : l’univers est intrinsèquement indéterministe. Le contraire impliquerait que tout ce que nous sommes aujourd’hui, cet article que vous lisez, nos poèmes d’adolescents et les symphonies de Beethoven soient informationellement contenues entièrement dans l’agencement de la matière lors du Big Bang.

À titre anecdotique, quand j’ai commencé à écrire Printeurs, j’ai posé l’hypothèse d’un univers laplacien entièrement déterministe. Au cours de l’écriture, j’ai trouvé que les personnages subissaient trop l’histoire, qu’ils ne vivaient pas sous ma plume comme mes autres créations. Mais peut-être est-ce une conséquence obligatoire. Le libre arbitre n’existe pas dans un univers déterministe. À travers la fiction, j’explore l’idée que les tentatives pour rendre les profits économiques déterministes (et donc le reste de l’univers) induisent une destruction volontaire de notre libre arbitre (à travers notamment la publicité, la surveillance, etc.).

L’indéterminisme est donc une condition nécessaire, mais, comme le souligne Popper dans son dernier chapitre, pas suffisante pour permettre le libre arbitre. Il souligne que les partisans du libre arbitre tentent à tout prix de le trouver dans les sources de hasard d’une réalité perçue comme quasi déterministe. Au contraire, notre libre arbitre provient des sources de déterminisme, de rationalité, dans un univers chaotique et indéterministe. Libre arbitre qu’il aborde volontairement très peu dans le texte même si on peut lire, au chapitre 23 :

La manière dont le déterminisme scientifique a été réfuté me parait assez intéressante. Elle montre non seulement que nous ne pouvons pas remplacer nos décisions par des prédictions scientifiques sur nos propres actions futures (puisque ce genre de prédictions est impossible), mais également que l’argument décisif en faveur du déterminisme est l’existence de la connaissance rationnelle elle-même. Nous sommes « libres » non point parce que nous sommes sujets au hasard plutôt qu’à d’inflexibles lois naturelles ; nous sommes libres parce que la rationalisation progressive de notre monde — l’effort pour attraper le monde dans le filet de notre connaissance — se heurte, à n’importe quel moment, à des limites inhérentes à la croissance de la connaissance elle-même, celle-ci étant également, bien entendu, un événement à l’intérieur du monde.

Sans une certaine connaissance anticipée, toute action rationnelle est impossible. Or, c’est très précisément cette connaissance anticipée qui, en définitive, s’avère tellement limitée qu’elle laisse une marge ouverte pour l’action, c’est-à-dire pour l’action « libre ».
(Karl Popper, L’Univers Irrésolu, éditions Hermann 1984)

Appliquer son libre arbitre n’implique donc pas de rejeter la science, de croire que « la science n’a pas réponse à tout ». Au contraire, devenir un libre penseur et un penseur libre implique de saisir tous les outils rationnels à notre disposition pour tenter d’influencer notre propre vie dans un monde éminemment chaotique. La science et la rationalité sont nos seules réelles libertés.

Le futur est incertain, plus incertain encore que nous le faisait présager la mécanique quantique traditionnelle.
(Ilya Prigogine, Les lois du chaos, Champs Flammarion 1994)

La plupart des mouvances populistes utilisent des arguments et des théories anti-scientifiques pour précisément cette raison : nous ôter notre libre arbitre. Prétendre nous libérer pour mieux nous imposer une quelconque domination par l’ignorance, la foi et les certitudes. Au fond, il n’est d’humain réellement libre que celui qui n’est prisonnier que du doute et de la raison.

La pensée n’avait pas de place dans l’image que la physique classique donnait de l’univers. Dans cette image, l’univers apparaissait comme un vaste automate, soumis à des lois déterministes et réversibles, dans lesquelles il était difficile de reconnaître ce qui pour nous caractérise la pensée : la cohérence et la créativité.
(Ilya Prigogine, Les lois du chaos, Champs Flammarion 1994)

Je suis @ploum, ingénieur écrivain. Abonnez-vous par mail ou RSS pour ne rater aucun billet (max 2 par semaine). Je suis convaincu que Printeurs, mon dernier roman de science-fiction vous passionnera. Commander mes livres est le meilleur moyen de me soutenir !

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Ce texte est publié sous la licence CC-By BE.

Lectures, productivité, bandes dessinées et bitcoins

mardi 1 décembre 2020 à 11:50

Quelques liens et lectures diverses, pour nourrir votre sérendipité. Ces dernières semaines, ma bibliothèque semble se remplir de livres par écrits par des gens que j’apprécie, au web comme à la ville (sauf Valery Bonneau, le seul avec qui je n’ai jamais échangé de vive voix).

Lectures égocentrées

Le confinement a perturbé la logistique de mon éditeur. La plupart des romans Printeurs devraient arriver chez ceux qui l’ont commandé dans le courant de la semaine prochaine. Quelques veinards l’ont reçu en avance dont Sebsauvage qui vous donne son avis en cours de lecture.

https://sebsauvage.net/links/?SlHGmQ

Iceman, de son côté, répond par un billet de blog à mon billet de blog sur la correspondance par mail. J’aime retrouver cette philosophie de l’échange intellectuel par écrit comme la blogosphère nous l’a offert au début des années 2000.

https://cheziceman.wordpress.com/2020/11/30/reflexion-correspondre-plutot-que-mal-communiquer/

Une blogosphère que Facebook a tuée. Avec pour résultat une surveillance généralisée et un abrutissement total que dénonce de manière hilarante Valery Bonneau dans cette courte et excellente nouvelle « Une cuite de Shrödinger » (rappel : son recueil est en vente, je le conseille).

https://www.valerybonneau.com/nouvelles-noires/cuite-schrodinger

Trump

Conséquence directe ? L’élection de Trump en 2016. Bon, on a assez prêté attention à Trump pendant quatre longues années et il est temps de passer à autre chose. En guise de conclusion, je partage entièrement l’opinion de François De Smet. Cela fait quatre ans que j’ai exactement la même théorie que lui : Trump ne voulait pas vraiment être élu. Mais il faut tirer les enseignements de cette élection et ne pas se satisfaire de tout ce qui n’est pas Trump.

https://francoisdesmet.blog/2020/11/03/cher-donald-trump/

La victoire de Trump aurait été la preuve que le populisme et l’anti-intellectualisme jusqu’à l’absurde fonctionnent. Mais, en quelques sortes, il a gagné. Il a démontré ce qu’une grande partie des électeurs voulaient : des paroles au lieu des actes, des sentiments et non des réalités ainsi qu’une légitimité à cracher sa haine.

https://newrepublic.com/article/160212/republican-party-dead-its-trump-cult-now

Sa victoire en 2020 aurait été un modèle morbide pour toutes les autres démocraties. La victoire de Biden, de justesse, n’est cependant pas une bonne nouvelle.

Après quatre ans à saccager notre société et notre planète à un rythme effréné, nous revenons à l’ancienne méthode : saccager notre société et notre planète à un rythme diplomatiquement acceptable. La corruption polie plutôt que celle sauvage.

Le destin des USA et, à cause de leur influence, d’une grande partie du monde, se jouait entre deux bliches, deux hommes blancs riches et quasi octogénaires. Comment parler d’avenir ?

Productivité et faire carrière

Un avenir dédié à la productivité ?

Au fond, à quoi nous sert d’améliorer notre productivité ? À avoir du temps libre ou bien à travailler encore plus ? En choisissant la première solution, on est moins attractif sur le marché de l’emploi que ceux qui choisissent la seconde. Nous sommes donc obligés de passer notre temps à optimiser notre productivité pour pouvoir travailler encore plus.

https://zandercutt.com/2019/02/18/were-optimizing-ourselves-to-death/

Et comme nous travaillons plus, nous sommes forcés de créer des emplois qui sont soit inutiles, soit destructeurs. J’en parle assez régulièrement sur ce blog et j’avais résumé le tout en 5 points.

https://ploum.net/les-5-reponses-a-ceux-qui-veulent-preserver-lemploi/

Une fois productif, on peut postuler pour un emploi et découvrir le monde fabuleux du travail !

Jeune ingénieur, j’ai été vite confronté dans ma carrière au choix de devenir « spécialiste » ou « manager ». La langue de bois corporate prétendait qu’il n’y avait pas de différence de traitement ni de statut. Malgré ma naïveté, j’ai très vite compris que les managers avaient beaucoup plus de pouvoir, de reconnaissance et d’opportunités de carrière. Un manager peut toujours changer de crèmerie pour aller vers le plus offrant. Être spécialiste d’un code source propriétaire propre à votre employeur vous met pieds et poings liés, pantalon baissé, à la merci de votre… manager. Ce billet revient en profondeur sur cette asymétrie.

https://www.spakhm.com/p/parallel-tracks

Astuce pour les étudiants et jeunes ingénieurs : refusez de passer trop de temps à apprendre du code propriétaire qui n’existe pas en dehors de votre boîte. Soyez francs et dites ouvertement que les seules compétences qui vous intéressent sont celles que vous pouvez monnayer à l’extérieur le jour où la boîte n’a plus besoin de vous. De mon côté, je me suis spécialisé au début de ma carrière dans les prototypes n’utilisant que des technos Open Source. Avant de devenir manager…

D’ailleurs, vous voudriez vraiment devenir spécialiste de ce genre de code ?

https://linuxfr.org/news/encore-un-exemple-de-code-spaghetti-toyota

Souvenez-vous, les entreprises ne veulent pas que vous utilisiez vos capacités de réflexion.

http://www.slate.fr/story/124061/entreprises-gens-intelligents-stupides

Bandes dessinées

Découverte dans une bouquinerie de Monsieur Mardi-Gras Descendres, par Éric Liberge. Une bande dessinée étrange : un squelette dans un monde de squelettes ! L’idée est géniale, l’univers absurde à souhait. On peut cependant regretter que l’intrigue se complexifie inutilement, que l’histoire et la lisibilité en pâtissent vers la fin. Cela reste néanmoins un ovni à découvrir. À la limite de la bande dessinée culte.

Et si, comme moi, vous attendez avec impatience la suite d’UW2, un billet de Bajram à lire absolument. Car derrière l’œuvre se cache l’humain. Tout mon respect à Bajram.

https://www.bajram.com/2019/11/23/des-nouvelles-duniversal-war/

Sciences et Covid

Un billet très intéressant sur l’origine de nos unités de mesure. Et sur la difficulté de les établir.

https://couleur-science.eu/?d=926182–lorigine-de-nos-unites-de-mesure

Nassim Nicholas Taleb explique les erreurs statistiques que commettent ceux qui sont contre le port du masque ou minimisent son efficacité.

https://medium.com/incerto/the-masks-masquerade-7de897b517b7

Thierry Crouzet, lui, revient sur l’importance de l’hygiène des mains, grande oubliée au profit du port du masque. Or, sans hygiène des mains, le masque ne sert à rien voire fait pire (vu qu’on le réajuste). Les deux billets sont en fait assez alignés : l’hygiène des mains partout et tout le temps, le masque dans les endroits confinés ou lorsque la distanciation physique n’est pas possible.

https://tcrouzet.com/2020/11/24/covid-point-sur-la-polemique-mains-aerosols/

Au fait, le covid a impacté salement les projets de certains développeurs indépendants, dont mes potes de Codefathers (je vous rassure, ils sont meilleurs en code qu’en jeux de mots moisis). Si jamais vous cherchez des gens bien pour développer votre projet, n’hésitez pas !

https://codefathers.be/

Bitcoin

J’ai oublié de fêter un anniversaire particulier : les 10 ans de mon premier billet de blog traitant de Bitcoin. J’y fais énormément d’erreurs de compréhension de la monnaie, notamment tombant dans le piège de l’historique du troc (qui est entièrement faux. Je recommande à ce sujet la lecture du livre de David Graeber : « Dette, 5000 ans d’histoire »).

https://ploum.net/monnaie-de-geek-monnaie-de-singe/

Il y a une décennie, j’écrivais notamment :

« Actuellement, un bitcoin vaut plus ou moins 0,07€ » et « Je n’y investirai donc pas toutes mes économies, mais j’adore le principe ».

Ça a assez mal vieilli. J’aurais dû y investir toutes mes économies. Par contre, ma réponse à la question « Est-ce le bon moment pour investir dans les cryptomonnaies » n’a pas changé depuis 2018.

https://ploum.net/est-ce-le-bon-moment-pour-investir-dans-les-crypto-monnaies/

Bonnes lectures et bonne semaine à tou·te·s !

Je suis @ploum, ingénieur écrivain. Abonnez-vous par mail ou RSS pour ne rater aucun billet (max 2 par semaine). Je suis convaincu que Printeurs, mon dernier roman de science-fiction vous passionnera. Commander mes livres est le meilleur moyen de me soutenir !

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Ce texte est publié sous la licence CC-By BE.

Gemini, le protocole du slow web

vendredi 27 novembre 2020 à 09:27

Les possibilités infinies du HTML ont complexifié le web. À tel point qu’est né Gemini, un protocole dont le but est d’être et de rester le plus simple possible. Un nouveau réseau dédié à ceux qui veulent écrire et lire en ligne. Mais loin d’être un simple réseau, Gemini ouvre également la voie à une véritable mouvance : le slow web.

Les développeurs informatiques savent bien que tout projet finit, un jour ou l’autre, par devenir une sorte de monstre de Frankenstein, une horreur qui fait un peu de tout très mal à un coût très élevé, mais rien de bien. En 2020, force est de constater que c’est exactement ce qui est arrivé au web.

Le moindre site web fait désormais plusieurs mégaoctets, se charge en plusieurs fois rendant impossible toute utilisation sur une connexion instable, déplaçant des éléments de la page au moment où on essaye de cliquer. Le même site appelle des centaines de codes divers ralentissant les ordinateurs les moins puissants, remplissant la RAM, faisant des navigateurs des monstres de complexité.

Je souhaite lire un article ? Encore faut-il qu’il charge correctement puis que je le trouve sur la page, entre des myriades de publicités, des logos, des extraits d’autres articles, des vidéos qui se lancent toutes seules. Pour chaque site, je dois apprendre à utiliser une nouvelle ergonomie. Tout ça pour simplement lire un lien que j’avais naïvement suivi.

Parfois, après avoir paramétré les cookies et accepté les conditions du site (vous vous souvenez, je veux juste lire un article dont j’ai trouvé le lien), je ne trouve aucun contenu. Erreur temporaire ? Ou bien est-ce l’un de mes nombreux bloqueurs (de pubs, de JavaScript, d’avertissements, de trackers) qui a bloqué par erreur le contenu ? Peu importe, hors de question de tout désactiver. Sur le web, comme sur Tinder, il faut sortir couvert. Le web est à ce point complexe qu’il faut s’en protéger comme d’une maladie !

Inutile de se lamenter sur le passé et sur une époque idéalisée où le web était plus simple. Souvenez-vous, nous avions les popups, les gifs animés et les musiques midi dans des frames cachées. Ça ne me manque pas. Constatons tout de même que le web est devenu une couche essentiellement applicative et particulièrement peu adaptée à un usage simple : écrire, publier, partager et lire des textes.

Parmi les geeks, surtout les plus âgés, la recherche du retour au simple partage de texte est une véritable tendance.

https://cheapskatesguide.org/articles/beauty-of-text.html

Certains tentent de regagner une certaine clarté d’esprit et d’indépendance en développant de nouveaux navigateurs web simplifiés, en ne postant plus que du texte brut sur leurs serveurs web ou, au contraire, en reprenant l’habitude de surfer en ligne de commande, voire en se reconnectant sur le vénérable réseau Gopher.

http://len.falken.ink/misc/writing-for-the-internet-across-a-human-lifetime.txt

https://dataswamp.org/~lich/musings/links-browser.html

Si Gopher est simple, mais trop limité et le web trop complexe, peut-être manque-t-il d’une solution intermédiaire ? C’est ce qu’ont pensé les auteurs du protocole Gemini, protocole qui tire son nom des missions astronautiques du même nom qui eurent lieu entre les missions simples Mercury et les missions ultra-complexes Apollo.

La page principale du projet Gemini, à lire pour découvrir et explorer (le protocole est lui-même remarquablement court ) :

https://gemini.circumlunar.space/

Si le web permet d’accéder à du contenu HTML via le protocole http://, Gemini permet d’accéder à du contenu Markdown via le protocole Gemini://.

Le markdown est simplifié, car l’objectif de Gemini est clair : ne pas permettre d’étendre le protocole et empêcher tout espionnage des visiteurs. L’utilisateur, surfant via un client Gemini, se contente de lire du texte avec des titres, des sous-titres et des mises en exergue voire des citations. Rien d’autre ! Même les liens sont limités à un seul par ligne.

Pas de couleurs, pas de design, pas de mise en page (et pas toujours d’images). Le seul lien entre un auteur et son lecteur est le texte, le contenu. Au lecteur de faire ses choix pour rendre la lecture la plus agréable possible.

Inutile d’ajouter que je suis absolument conquis par le concept. Mais est-ce que Gemini peut remplacer le web ?

Pas du tout. Ce n’est pas l’objectif. Aveuglés par l’idéal monopolistique rabâché par la Silicon Valley, nous en venons à juger que tout ce qui ne peut pas avoir de monopole est un échec. Notre seule métrique étant l’argent, nous concluons que tout ce qui n’enrichit pas des investisseurs est une perte de temps. Mais, comme Mastodon le fait pour Twitter, Gemini n’a pas pour objectif de remplacer. Simplement de proposer une alternative, un autre type d’espace partagé. Le simple fait qu’être utilisé prouve que ces espaces sont un succès.

https://write.as/eloquence/why-mastodon-and-the-fediverse-are-doomed-to-fail

100% des utilisateurs de Gemini sont aussi utilisateurs du web. Une grande partie des contenus sur Gemini sont également disponibles sur le web classique. Il n’empêche que j’éprouve un plaisir incroyable à lancer Amfora (mon client Gemini en ligne de commande, screenshot en illustration) et à surfer sur Capcom, qui agrège les contenus postés récemment sur le réseau.

https://github.com/makeworld-the-better-one/amfora

gemini://gemini.circumlunar.space/capcom/ (ce lien est ma page de démarrage dans Amfora)

Comme il est très simple de coder des clients Gemini, le choix est déjà large.

https://kwiecien.us/gemini-client-review.html

On peut accéder à des services comme Wikipédia, Hacker News, Lobste.rs depuis Gemini.

gemini://gempaper.strangled.net/mirrorlist/

J’ai personnellement ressenti deux gros manques : un agrégateur RSS, pour s’abonner à un gemlog (un blog sur Gemini) et un service pour collecter mes lectures (comme Pocket ou Wallabag). Ce dernier manque est cependant intéressant parce que cela me force à lire directement ce que je trouve intéressant, à me concentrer plutôt que papillonner. J’ai d’ailleurs pris le pli de n’utiliser qu’un seul onglet dans Amfora !

Gemini a été conçu pour qu’un codeur moyen puisse développer un serveur et un client Gemini en moins d’une journée (à comparer avec votre client web qui représente des années d’efforts par des milliers de développeurs). Je trouve cependant dommage de ne pas avoir profité de l’occasion pour insister sur la décentralisation. La légèreté du texte permettrait d’imaginer que les contenus ne soient pas stockés sur un seul serveur, mais soient distribués.

Mais, avant toute évolution technique, les auteurs de Gemini insistent sur un point : il faut du contenu. Il y’a presque plus de logiciels liés au projet que de sites Gemini ! Si vous voulez contribuer à Gemini, postez du contenu sur Gemini. Si vous avez un serveur web, n’hésitez pas à lire la documentation pour installer un serveur Gemini (c’est court et simple). Sinon, certains services vous proposent d’héberger votre gemlog.

https://gemlog.blue/

Ploum.net sur Gemini ? Vous vous doutez bien que cela occupe mes pensées et que je suis en train de réfléchir à la meilleure manière de le faire. Ce ne sera peut-être pas la plus rapide, mais c’est une de mes priorités. Je pense qu’il est nécessaire de développer aujourd’hui de nouveaux réseaux, légers, simples, rapides. Respectueux autant de notre attention que de la consommation électrique. Une espèce de slow web, un internet accessible depuis des connexions très aléatoires et depuis des terminaux e-ink ou du matériel de récupération. Par exemple le téléphone Mudita dont l’OS est open source.

https://mudita.com/products/pure/muditaos

L’idée de ce slow web me fait rêver. Je vous ai dit dans le billet précédent à quel point j’appréciais l’email. L’email et Gemini sont parfaitement complémentaires et pourraient un jour être suffisants pour se nourrir intellectuellement, ne gardant le web traditionnel que pour l’administratif. Je ne suis d’ailleurs pas le seul à imaginer ce futur.

https://kwiecien.us/why-i-love-thunderbird.html

Slow web ? Cela fait trop penser à des problèmes de connexion. Il faudrait un mot pour décrire ce concept. Que pensez-vous de Permacomputing ? Mot qui englobe également l’idée de rendre durable toute la chaine qui relie les participants au réseau.

L’idée n’est pas de moi, mais de Solderpunk, le co-créateur du protocole Gemini et auteur d’un gemlog que j’ai découvert au hasard de mes lectures… sur le réseau Gemini bien sûr.

gemini://gemini.circumlunar.space/~solderpunk/gemlog/permacomputing.gmi

Vous l’avez compris, je suis fan. Et impatient que mon blog soit disponible sur ce réseau. N’hésitez pas à me communiquer vos écrits et vos trouvailles sur Gemini !

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Pour un logiciel de correspondance plutôt qu’un client mail

lundi 23 novembre 2020 à 12:11

Plaidoyer en faveur d’un logiciel de relations épistolaires électroniques, échanges sacrifiés au culte de l’instantanéité.

J’aime l’email. Je ne me lasse pas de m’émerveiller sur la beauté de ce système qui nous permet d’échanger par écrit, de manière décentralisée. D’entretenir des relations épistolaires dématérialisées à l’abri des regards (si l’on choisit bien son fournisseur). Je l’ai déjà dit et le redis.

https://ploum.net/email-mon-amour/.

Pourtant, l’indispensable email est régulièrement regardé de haut. Personne n’aime l’email. Il est technique, laborieux. Il est encombré de messages. Alors toute nouvelle plateforme nous attire, nous donne l’impression de pouvoir communiquer plus simplement qu’avec l’email.

Beaucoup trop d’utilisateurs sont noyés dans leurs emails. Ils postposent une réponse avant que celle-ci ne soit noyée dans un flux incessant de sollicitation. Entrainant, effet pervers, une insistance de l’expéditeur.

Désabusé, la tentation est grande de se tourner vers cette nouvelle plateforme aguichante. Tout semble plus simple. Il y’a moins de messages, ils sont plus clairs. La raison est toute simple : la plateforme est nouvelle, les échanges entre les utilisateurs sont peu nombreux. Dès le moment où cette plateforme sera devenue particulièrement populaire, votre boîte à messages se retrouvera noyée tout comme votre boîte à email. Tout au plus certaines plateformes s’évertuent à transformer vos boîtes en flux, de manière à vous retirer de la culpabilité, mais entrainant une perte d’informations encore plus importante.

https://ploum.net/comment-jai-fui-le-flux-pour-retrouver-ma-boite/

C’est pour cela que l’email est magnifique. Après des décennies, il est toujours aussi utile, aussi indispensable. Nous pouvons imaginer un futur sans Google, un futur sans Facebook. Mais un futur sans email ?

L’email pourrait être merveilleux. Mais aucun client mail ne donne envie d’écrire des mails.

Je rêve d’un client mail qui serait un véritable logiciel d’écriture. Pas d’options et de fioriture. Pas de code HTML. Écrire un email comme on écrit une lettre. En mettant l’adresse du destinataire en dernier, comme on le fait pour une enveloppe.

Un logiciel d’écriture d’email qui nous aiderait à retrouver un contact avec sa correspondance plutôt qu’à permettre l’accomplissement d’une tâche mécanique. Un logiciel qui nous encouragerait à nous désabonner de tout ce qui n’est pas sollicité, qui marquerait des mails les correspondances en attente d’une réponse. Qui nous encouragerait à archiver un mail où à le marquer comme nécessitant une action plutôt qu’à le laisser moisir dans notre boîte aux lettres.

Bref, je rêve d’un client mail qui me redonne le plaisir d’interagir avec des personnes, pas avec des fils de discussions ou des onomatopées.

D’un autre côté, j’abhorre ces tentatives de classement automatique qui fleurissent, par exemple sur Gmail. Outre qu’elles augmentent le pouvoir de ces algorithmes, elles ne font que cacher le problème sans tenter d’y remédier. Si les mails doivent être triés comme « promotions » ou « notifications », c’est la plupart du temps que je n’avais pas besoin de les voir en premier lieu. Que ces emails n’auraient jamais dû être envoyés.

Enfin, un véritable logiciel de correspondance devrait abandonner cette notion de notification et de temps réel. Une fois par jour, comme le passage du facteur, les courriels seraient relevés, m’indiquant clairement mes interactions pour la journée.

De même, mes mails rédigés ne seraient pas envoyés avant une heure fixe du soir, me permettant de les modifier, de les corriger. Mieux, je devrais être forcé de passer en revue ce que ‘envoie, comme si je me rendais au bureau de poste.

En poussant le bouchon un peu plus loin, les mails envoyés pourraient prendre une durée aléatoire pour être remis. Un lecteur de mon blog a même imaginé que cette durée soit proportionnelle à la distance, comme si le courriel était remis à pied, à cheval ou en bateau.

Car l’immédiateté nous condamne à la solitude. Si un mail est envoyé, une réponse reçue instantanément, l’ubiquité du smartphone nous oblige presque à répondre immédiatement. Cela même au milieu d’un magasin ou d’une activité, sous peine d’oublier et de penser paraitre grossier.

La réponse à la réponse sera elle aussi immédiate et la conversation s’achèvera, les protagonistes comprenant que ce ping-pong en temps réel ne peut pas durer plus de quelques mots.

Paradoxalement, en créant l’email, nous avons détruit une fonctionnalité majeure des relations épistolaires : la possibilité pour chacune des parties de répondre quand l’envie lui prend et quand elle est disponible.

Jusqu’au 20e siècle, personne ne s’étonnait de ne pas recevoir de réponse à sa lettre pendant plusieurs jours voire pendant des semaines. Écrire une lettre de relance était donc un investissement en soi : il fallait se souvenir, garder l’envie et prendre le temps de le faire.

Cette temporisation a permis une explosion de la créativité et de la connaissance. De grands pans de l’histoire nous sont accessibles grâce aux relations épistolaires de l’époque. De nombreuses idées ont germé lors d’échanges de lettres. Pouvez-vous imaginer le 21e siècle vu par les yeux des historiens du futur à travers nos emails ?

Une lettre était lue, relue. Elle plantait une graine chez le destinataire qui méditait avant de prendre sa plume, parfois après plusieurs brouillons, pour rédiger une réponse.

Une réponse qui n’était pas paragraphe par paragraphe, mais bien une lettre à part entière. Une réponse rédigée en partant du principe que le lecteur ne se souvenait plus nécessairement des détails de la lettre initiale. Aujourd’hui, l’email nous sert à essentiellement à « organiser un call » pour discuter d’un sujet sur lequel personne n’a pris le temps de réfléchir.

Des parties d’échecs historiques se sont déroulées sur plusieurs années par lettres interposées. Pourrait-on imaginer la même chose avec l’email ? Difficilement. Les échecs se jouent désormais majoritairement en ligne en temps réel.

Pourtant, le protocole le permet. Il s’agit simplement d’un choix des concepteurs de logiciel d’avoir voulu mettre l’accent sur la rapidité, l’immédiateté, l’efficacité et la quantité.

Il ne faudrait pas grand-chose pour remettre au centre des échanges écrits la qualité dont nous avons cruellement besoin.

Nous utilisons le mail pour nous déresponsabiliser. Il y’a une action à faire, mais en répondant à l’email, je passe la patate chaude à quelqu’un d’autre. Répondre le plus rapidement, si possible avec une question, pour déférer le moment où quelqu’un devra prendre une décision. Tout cela au milieu d’un invraisemblable bruit publicitaire robotisé. Nous n’échangeons plus avec des humains, nous sommes noyés par le bruit des robots tout en tentant d’échanger avec des agents administratifs anonymes. Nous n’avons plus le temps de lire ni d’écrire, mais nous croyons avoir la pertinence de prendre des décisions rapides. Nous confondons, avec des conséquences dramatiques, efficience et rapidité.

Pour l’interaction humaine, nous nous sommes alors rabattus sur les chats. Leur format nous faisait penser à une conversation, leur conception nous empêche de gérer autrement qu’en répondant immédiatement.

Ce faisant, nous avons implicitement réduit l’interaction humaine à un échange court, bref, immédiat. Une brièveté et une rapidité émotive qui nous pousse à agrémenter chaque information d’un succédané d’émotion : l’émoji.

Nous en oublions la possibilité d’avoir des échanges lents, profonds, réfléchis.

Parfois, je rêve d’abandonner les clients mails et les messageries pour un véritable client de correspondances. De sortir de l’immédiateté du chat et de la froideur administrative du mail pour retrouver le plaisir des relations épistolaires.

Photo by Liam Truong on Unsplash

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