PROJET AUTOBLOG


Zythom

source: Zythom

⇐ retour index

Les débuts de l'expert judiciaire débutant

jeudi 8 septembre 2016 à 17:15
Vous avez reçu un courrier à entête du ministère de la justice en provenance de votre cour d'appel vous annonçant d'une manière assez sèche simple que vous êtes accepté à l'inscription sur la liste des experts judiciaires, pour une période probatoire de deux ans.

BRAVO \o/

Mais soudain, une inquiétude vous prend : que faut-il faire maintenant ? Voici quelques éléments de réponses.

Tout d'abord, prenez contact avec l'association regroupant les experts judiciaires de votre cour d'appel. Il y en a toujours une, et on appelle ces associations des "compagnies pluridisciplinaires d'experts de justice". Mieux, adhérez-y immédiatement pour au moins bénéficier d'une assurance en responsabilité civile à bas coup (sinon, il vous en coûtera au moins 1200 euros, lire ce billet). La cotisation à cette association vous couvrira en plus de permettre à ses membres de s'offrir de bons repas une à deux fois par an (cela s'appelle une AG) et vous permettra d'assister à des formations (obligatoires ou en tout cas très fortement recommandées). Par contre, le niveau de conseils dans votre domaine d'activité est très fluctuant selon les compagnies.

Préparez vous ensuite pour votre prestation de serment (en général début janvier). Entraînez vous à dire "je le jure" à l'appel de votre nom, et ressortez le costume réservé aux grandes occasions (essayez le bien avant la prestation de serment, vous pouvez avoir des surprises. On ne se voit pas toujours tel que l'on est, et on oublie assez vite comment on a été).

Il faudra ensuite intégrer des listes de diffusion spécialisées dignes de ce nom. Dans mon domaine, il y a celle du LERTI, gratuite et de très bonne qualité. Vous pourrez y appeler à l'aide lorsqu'un magistrat trouvera très naturel que vous sachiez contacter le service légal d'Orange ou de Free pour leur transmettre une commission rogatoire afin de remplir la mission qui vous est demandée. Si vous êtes coincés par un problème technique compliqué (ou pas), il y aura toujours une bonne volonté pour vous renseigner.

Ensuite, il faudra suivre une formation sur la procédure expertale. Si vous n'avez aucune formation juridique, il me semble de bon conseil de vous dire d'acheter tous les ouvrages consacrés à l'expertise judiciaire que vous pourrez trouver, et à les étudier consciencieusement. Tout le monde n'est pas marié à une avocate...

Pour la veille concernant l'activité expertale, certains magistrats animent des groupes de discussion (je participe à l'un d'entre eux sur Google Groups) où toutes les informations publiées sur ce sujet sont remontées. Discutez-en dans votre compagnie pour savoir si c'est le cas dans votre cour d'appel.

Il faudra réfléchir à votre prix de marché concernant vos notes de frais et honoraires (lire ce billet par exemple), à votre structure juridique permettant d'établir des factures (j'ai choisi le statut d'auto-entrepreneur) et à votre déclaration fiscale (lire ce billet). Ne me contactez pas sur ces sujets que je ne maîtrise pas du tout : parlez-en avec votre compagn(i)e.

Enfin, il faudra attendre votre première désignation par un magistrat. Certains experts ne sont pas désignés du tout pendant leurs deux années de probation, ce qui ne manque pas de les laisser perplexes. Surtout que le dossier de renouvellement demande le nombre de missions effectuées... Mystère de la procédure.

Quoi qu'il arrive, je vous félicite d'avoir choisi de servir cette admirable administration qu'est la justice, et d'avoir été choisi. Faites honneur à votre serment, et restez indépendant.

Bon courage.

Et si vous avez des anecdotes à raconter, c'est par ici ;-)


10 ans

lundi 5 septembre 2016 à 05:00
Et bien voilà, cela fait dix ans que ce blog est ouvert.

Il y a dix ans, mes trois enfants avaient 4 ans, 8 ans et 12 ans, chacun muni de leur ordinateur, et l'aînée me demandait si elle pouvait ouvrir un blog... J'en avais entendu parler, je suivais déjà quelques blogs qui m'intéressaient, alors j'ai dis oui (avec des conditions). Puis, j'ai ouvert ce blog.

Il me fallait un pseudo, alors j'ai pris le dernier mot de mon dictionnaire papier de l'époque, et je me suis trompé dans sa transcription. J'ai écrit "Zythom" au lieu de "Zythum". Je n'ai jamais corrigé (je me suis rendu compte de l'erreur plusieurs années après !) et ce pseudonyme est resté.

J'avais une vision très "chercheur" de l'univers d'internet que j'ai connu pendant mes années de thèse à Paris à la fin des années 1980. C'était un gigantesque lieu de partage de fichiers, d'idées, de programmes, de codes, d'articles scientifiques, de jeux, de discussions... entre chercheurs. Mais j'étais plutôt content de l'arrivée des entreprises privées dans MON réseau réservé à la recherche, entreprises dont le but était de proposer à tout le monde un accès à ce réseau numérique mondial. Vous connaissez la suite et le résultat magnifique qu'est internet. Parmi toutes les révolutions qui ont été permises par internet, j'ai finalement accroché à celle des sites consacrés aux carnets personnels, que l'on a appelé des weblogs, puis par aphérèse, des blogs.

Fainéant par nature, j'ai cherché une plate-forme proposant un système clef en main, gratuit et si possible stable dans le temps. J'ai choisi Blogger et je n'ai pour l'instant jamais regretté ce choix.

Enthousiasmé par le concept, j'ai publié à un rythme d'environ 10 à 20 billets par mois la première année, pour progressivement diminuer au fil des années à 4 ou 5 billets par mois. Je supprime régulièrement des billets devenus inutiles mais le volume global continue de monter inexorablement et atteint aujourd'hui environ 900 billets.

Vous le savez, je publie sur ce blog plusieurs types de billets :
- des retours d'expériences sur ma modeste participation au monde particulier des experts judiciaires. Ces billets sont regroupés dans la catégorie "Expert" qui regroupe des remarques, des anecdotes (romancées), des partages ou des états d'âme que j'éprouve au fil du temps ;
- des histoires personnelles, parce que j'aime beaucoup parler de moi (et que mes proches saturent un peu, d'où mon refuge dans l'écriture...), que je regroupe dans la rubrique "Privée". Vous êtes un peu mes thérapeutes ;-)
- des partages d'expériences issues de mon travail de responsable informatique et technique dans une grande école d'ingénieurs (rubrique "Professionnel") ;
- et enfin des retours (discrets) sur mon activité de conseiller municipal (rubrique "Vie publique").

Ce blog a eu des impacts très importants sur ma vie. Il m'a permis de réfléchir sur moi-même, sur mes comportements, sur mon mode de pensée. Il m'a forcé à remettre en cause beaucoup de choses. Lire les commentaires, les réactions des lecteurs m'a obligé à me confronter à d'autres visions, d'autres avis, d'autres sensibilités. Les échanges lors des conférences ont aussi été très enrichissants.

Écrire a également été une thérapie pour des moments sombres de ma vie, en particulier lors de certaines expertises judiciaires sordides. Je pense vraiment que cela m'a permis de franchir ces étapes sans dommage. Écrire est également un plaisir, un jeu, et l'exploration d'un nouvel univers.

Tenir un blog, c'est aussi s'exposer publiquement. J'ai payé durement cette exposition plusieurs fois, en particulier lors du procès intenté par un confrère expert judiciaire (lire les billets de l'affaire Zythom) et lors du piratage du blog par un pseudo confrère haineux. Mais en faisant le bilan, j'ai connu beaucoup, beaucoup de bonheur à tenir ce blog. Tout d'abord, cela m'a permis de rencontrer beaucoup de personnes très bien (connues et inconnues), même si ma vie sociale est un peu particulière. Tous ces échanges m'ont fait grandir, sur un grand nombre de sujets, comme par exemple sur le sexisme.

10 années ont passé, une bonne tranche de vie.
Mes enfants ont maintenant 14, 18 et 22 ans.
Et moi 53 ans. Seule mon épouse a toujours 20 ans.

Parfois je me demande s'il n'est pas temps d'arrêter et de partir sur la pointe des pieds. Ai-je encore quelque chose à dire ? Mais je reçois encore des emails d'encouragements, ou des emails d'enseignants qui m'indiquent utiliser certains billets pour les faire lire à leurs élèves ("Manon 13 ans" a semble-t-il un certain succès). Cela me fait plaisir et je me sens un peu utile.

Alors je maintiens ouvert mon petit bout d'internet, je continue à partager ce que je fais, et à donner mon avis sans me préoccuper des rageux.

Merci pour tous les petits mots d'encouragement que vous avez pu m'adresser tout au long de ces années.

A bientôt.


Les jeux olympiques d'été

dimanche 7 août 2016 à 21:22
J'ai toujours aimé les jeux olympiques d'été. Enfant, j'essayais de ne rater aucune compétition, enfin, aucune des compétitions retransmises à la télévision. J'ai admiré de nombreux athlètes dans des sports que je ne regardais nulle part ailleurs : haltérophilie, gymnastique, concours de saut d'obstacle, etc. Tous les sports me fascinaient et j'aimais beaucoup "l'esprit olympique", l'idée que je me faisais de la célèbre phrase de Pierre de Coubertin "l'important dans la vie n'est pas le triomphe mais le combat ; l'essentiel n'est pas d'avoir vaincu mais de s'être bien battu".

Je me souviens bien sûr de certains grands champions et grandes championnes, en particulier Nadia Comaneci aux jeux de Montreal de 1976, Jappeloup et Pierre Durand aux jeux de Séoul en 1988, et bien d'autres qui m'ont fait rêver. Mais je me souviens surtout de certaines images d'athlètes qui sont allés au bout d'eux-mêmes.

Je me souviens surtout de deux athlètes qui m'ont fait pleurer d'émotion. La première est une marathonienne qui est arrivée 20mn après la médaille d'or. Son courage et la force de sa volonté ont fait chavirer l'ensemble des spectateurs du stade. Elle s'appelle Gabriela Andersen-Schiess et participait à la première édition du marathon féminin, lors des jeux olympiques de Los Angeles en 1984. A l'époque, les marathoniens qui entraient dans le stade devaient faire un tour complet de piste pour finir la distance. Elle était tellement fatiguée qu'il lui a fallu 5mn et 44s pour faire le tour du stade sous les acclamations et encouragements du public. Des médecins la suivaient pas à pas et ne sont pas intervenus avant la ligne d'arrivée car ils avaient remarqué qu'elle transpirait encore, et donc que sa vie n'était pas en danger.

Voici la fin de son tour de piste en vidéo (à chaque fois, j'en ai les larmes aux yeux) :




Le deuxième athlète qui m'a marqué est originaire de Guinée équatoriale. Il a représenté son pays lors des jeux olympiques d'été de Sydney de 2000, lors de la compétition de natation en 100m nage libre. Il s'agit d'Eric Moussambani. Il avait obtenu son billet pour les jeux grâce à une dérogation pour les pays en voie de développement. Huit mois auparavant, il ne savait pas nager... Il n'avait jamais encore nagé 100m d'affilé et n'avait jamais vu de piscine de 50m, son entraînement ayant eu lieu dans une piscine d'hôtel de 20m. Son maillot et ses lunettes lui seront prêtés une heure avant l'épreuve par deux athlètes compatissants (source Wikipédia).

Sa course, magnifique de courage et d'honneur, a de plus la particularité d'avoir été effectuée seule dans la piscine olympique, les deux adversaires de sa série ayant été éliminés par un faux départ.

Voici sa course (merci de couper le son, les commentateurs français de l'époque ayant fait honte à leur profession) :




Le public dans les gradins n'a pas cessé d'encourager ce nageur inexpérimenté au style peu académique. Au terme de sa course, il est sorti sous des tonnerres d'applaudissements. "Les premiers 50m n'ont pas été très difficiles, mais pendant les 50 derniers j'étais vraiment inquiet et je pensais que je n'allais pas finir la course" avait-il alors expliqué à la presse. "Quelque chose est arrivé. Je pense que c'était le public qui m'encourageait. J'étais vraiment fier. Cela restera un moment inoubliable et j'ai vraiment apprécié les applaudissements du public. J'avais l'impression d'avoir remporté la médaille d'or" (source gentside.com).

Alors, faîtes comme moi : coupez le son des commentateurs, oubliez les bilans de médailles franchouillardes, et admirez les performances des athlètes pour ce qu'elles sont : un dépassement de soi.

La vie sociale du n3rd

mardi 19 juillet 2016 à 16:37
Emporté par ma passion pour mon travail et pour ma famille, j'ai progressivement, et sans m'en rendre compte, coupé les ponts avec la société "normale". Plus exactement, je ne tisse pas beaucoup de liens avec les personnes que je rencontre dans la vie de tous les jours : je ne participe pas à la fête des voisins, je ne sors pas le soir avec des collègues, je ne pousse pas très loin les relations qui se créent dans mes activités diverses : aviron, conseil municipal, etc.

J'aime passer mon temps libre dans mon bureau, à tester des logiciels, à monter et démonter des ordinateurs, à configurer des systèmes d'exploitation. J'aime aussi beaucoup lire de la science-fiction, surfer sur internet en rebondissant de sites en sites au gré de mes envies. J'aime apprendre, la physique me fait rêver, en particulier l'espace et ses mystères.

Difficile dans ces conditions de trouver quelqu'un avec qui partager.

Sans être misanthrope, je suis plutôt un handicapé social : je deviens un ours taiseux lorsque je suis dans un groupe d'humains, alors que je peux être extrêmement bavard si je rencontre une personne "réceptive" à mes passions...  Lorsque j'ai découvert la série Dexter, j'étais fasciné par la psychopathie du personnage principal, au point de vérifier (sur internet) que je n'en avais pas les symptômes précurseurs...

J'ai plutôt l'impression d'avoir régressé au stade pré-adolescent... Je n'ai pas/plus les codes qui me permettent de communiquer avec les autres dans la société.


Premier exemple : les vêtements.

Depuis ma tendre enfance, je cherche une tenue passe-partout pour ne pas me faire remarquer. J'ai la hantise d'être ridicule. Jeune, j'étais très intéressé par la science ET par les filles, MAIS pas par les vêtements. J'ai découvert très récemment que les chemises à manches courtes (les chemisettes) faisaient l'objet d'une fatwa, alors que je pensais bêtement qu'il s'agissait de chemises d'été. Je suis capable de mettre des chaussettes dans des chaussures bateaux, uniquement parce que cela me fait moins mal aux pieds... J'ai du mal à assortir les couleurs convenablement, j’achète les jeans par trois pour minimiser la corvée d'essayage dans les magasins...

Bref, j'ai résolu le problème en adoptant quelques tenues "types" discrètes et passe-partout, validées par mon épouse qui a bien du mérite. Un peu comme John Gray dans le film "9 semaines 1/2" (et oui, ma femme est aussi belle qu'Elizabeth McGraw !).


Deuxième exemple : les rencontres Twitter.

Pour garder le contact avec les humains, les informaticiens ont développé un outil fantastique qui s'appelle internet. Une interconnexion de réseaux informatiques qui permet de relier entre eux tous les types de terminaux, quelques soient leurs connecteurs et leur système d'exploitation. Et sur ces terminaux s'exécutent des applications (que l'on appelait auparavant des "programmes", et que certains appellent, par glissement sémantique, des "algorithmes"). Parmi les applications qui relient les humains (les réseaux sociaux), celle que j'utilise principalement est Twitter.

A mes débuts sur Twitter, j'ai fait beaucoup d'expériences pour tester l'application, son fonctionnement technique, mais aussi les interactions qu'elle permet, et le monde underground qu'elle génère. J'ai même tout cassé en 2012 en me trompant de compte lors de mon test d'achat de followers (lire ce billet). Aujourd'hui, je me contente de lire les tweets des influenceurs que j'ai sélectionnés, je retweete les tweets qui me semblent intéressants et je tweete (très peu) les liens que je souhaite partager.

Twitter permet de créer des interactions qui n'auraient presqu'aucune chance d'arriver dans la vie réelle. J'ai pu échanger quelques caractères avec des personnes que j'aurais eu beaucoup de mal à approcher IRL. Puis, petit à petit, j'ai rejoint, en observateur, plusieurs communautés de twittos que j'apprécie.

Un jour, l'une de ces communautés a organisé une rencontre IRL : la rentrée Saoulennelle, réservée aux juristes. J'ai réussi à m'y faire accepter et j'ai pu m'y rendre les deux fois où elle a été organisée. Moi qui n'ai pas connu les grandes heures de Paris Carnet... Cela a été pour moi deux occasions de rencontrer en chair et en os des personnes dont j'apprécie sur Twitter la vivacité d'esprit, l'intelligence, la tendresse ou alors la truculence : @MaitreMo (et sa charmante femme), @Maitre_Eolas, @judge_marie (et son charmant mari @maitreTi), @Tinkerbell_ring, @jugedadouche, et plein d'autres.

Mais tant d'esprits brillants, pour mon esprit d'escalier et ma timidité naturelle, c'est assez troublant et gênant. Je ne suis pas un fin bretteur de la langue française, ni un esprit brillant en société sur les sujets d'actualité. Vous ne verrez mon œil s'éclairer que sur des sujets abscons n'intéressant personne ou si peu. Au point que quand une personne s'adresse à moi, je me demande "suis-je un fat, ou serait-il vrai qu’elle a du goût pour moi" ? Si vous ajoutez à cela le fait que j'ai le tutoiement difficile, la casquette facile, un phrasé lent sinon amphigourique, et un grand corps maladroit, vous comprendrez le piteux spectacle que je donne en brillante société.


Finalement

Les années passent et je ne m'en sors pas si mal. Je suis heureux comme ça et je pense donner un peu de bonheur autour de moi. Mes enfants ne me détestent pas trop (même s'ils ont plus de lucidité sur leur père maintenant qu'ils sont grands), mon épouse me supporte et je fais des efforts de sociabilisation.

Peut-être ne suis-je pas un n3rd authentique, mais un "quitenerd", car si j'ai sans doute la nostalgie de ma période "enfant roi", je sais donner du temps aux autres et m'intéresser à eux. Mon métier de directeur informatique et technique en est la meilleure preuve, ainsi que mon activité de conseiller municipal.

J'évacue mon côté n3rd sur ce blog qui me sert de défouloir pour parler des choses qui m'intéressent et pour pouvoir faire mon intéressant, discrètement.

Zythom.qn

Dans la peau d'un nerd

jeudi 7 juillet 2016 à 13:06
Depuis de nombreuses années, je me considère plus comme un nerd que comme un geek.

Extrait de la page Wikipedia consacrée à la définition de nerd :
Un nerd est, dans le domaine des stéréotypes de la culture populaire, une personne solitaire, passionnée voire obnubilée par des sujets intellectuels abscons, peu attractifs, inapplicables ou fantasmatiques, et liés aux sciences (en général symboliques, comme les mathématiques, la physique ou la logique) et aux techniques - ou autres sujets inconnus aux yeux de tous.

Apparu à la fin des années 1950 aux États-Unis, le terme est devenu plutôt péjoratif, à la différence de geek. En effet, comparé à un geek qui est axé sur des centres d'intérêts liés à l'informatique et aux nouvelles technologies, un nerd est asocial, obsessionnel, et excessivement porté sur les études et l'intellect. Excluant tout sujet plus commun ou partagé par ses pairs académiques, il favorise le développement personnel d'un monde fermé et obscur. On le décrit timide, étrange et repoussant.

Je dois dire que cette définition me correspond plutôt bien.

Aussi loin que remontent mes souvenirs, j'ai toujours été attiré par les sciences en général et par l'informatique en particulier. Je garde un souvenir brûlant d'un exposé en classe de seconde sur un sujet libre et où j'ai présenté avec passion le principe de fonctionnement d'un Tokamak. Non pas que je comprenais grand chose à ce que je présentais, mais que je puisse avoir l'idée de faire cette présentation à ma classe et, en plus trouver cela passionnant, a sidéré mes camarades et ma professeure de physique.

J'adorais lire des articles du magasine "Pour La Science" auquel j'étais abonné et dont j'attendais avec impatience l'arrivée dans la boite aux lettres familiale. J'étais passé maître dans l'art du démontage des appareils électroniques (y compris des postes de radio à tubes, oui, j'ai plus de cinquante ans...). J'aimais beaucoup les énigmes de mathématique et en particulier les paradoxes. Je faisais des expériences de chimie dans ma chambre (et ma moquette s'en est longtemps souvenue, surtout dans ma période "feu de Bengale"...).

Personne ne pouvait rivaliser avec moi dans la création de programmes de moins de cinquante "pas" capable de tenir dans ma calculatrice programmable TI-57. C'est ainsi que j'ai découvert la programmation (j'en parle dans ce vieux billet). De nerd, je suis devenu n3rd...

Bien entendu, j'étais obligé d'avoir une double vie : solitaire et secrète chez moi, et sociale à l'école. Car malgré tout, j'étais intégré dans la vie sociale, et j'étais me semble-t-il plutôt populaire. Pourtant, j'avais un réel défaut : j'étais à la recherche de l'Amour et de l'Amitié, façon chevaleresque.

Pour l'Amour, j'ai eu la chance de rencontrer la femme de ma vie, et elle me supporte (dans les deux sens du terme acceptés maintenant) depuis 23 ans.

Pour l'Amitié, je dois avouer que je n'ai jamais rencontré quelqu'un avec qui vivre une relation comme celle qui liait Montaigne et La Boétie.

La Boétie : "L’amitié, c’est un nom sacré, c’est une chose sainte : elle ne se met jamais qu’entre gens de bien et ne se prend que par mutuelle estime, elle s’entretient non pas tant par bienfaits que par bonne vie. Ce qui rend un ami assuré de l’autre, c’est la connaissance qu’il a de son intégrité : les répondants qu’il en a c’est son bon naturel, la foi et la constance. Il ne peut y avoir d’amitié là où est la cruauté, là où est la déloyauté, là où est l’injustice"

Montaigne : "Au demeurant, ce que nous appelons ordinairement amis et amitiés, ne sont qu’accointances et familiarités nouées par quelque occasion ou commodité par le moyen de laquelle nos âmes s’entretiennent [NdZ: Facebook n'existait pas encore!]. En l’amitié de quoi je parle, elles se mêlent et se confondent l’une en l’autre, d’un mélange si universel qu’elles s’effacent et ne retrouvent plus la couture qui les a jointes. Si l’on me presse de dire pourquoi je l’aimais, je sens que cela ne se peut exprimer qu’en répondant : « Parce que c’était lui, parce que c’était moi ». 5Il y a, au-delà de tout mon discours et de ce que je puis dire particulièrement, je ne sais quelle force inexplicable et fatale médiatrice de cette union. Nous nous cherchions avant que de nous être vus et par les rapports que nous oyions l’un de l’autre qui faisaient en notre affection plus d’efforts que ne le porte la raison des rapports, je crois par quelque ordonnance du ciel ; nous nous embrassions par nos noms. Et à notre première rencontre, qui fut par hasard en une grande fête et compagnie de ville, nous nous trouvâmes si pris, si connus, si obligés entre nous que rien dès lors ne nous fut si proches que l’un à l’autre."

Quand j'ai fait le constat, à table devant mes enfants, que personne ne traverserait la France pour moi en cas de problème grave (ou moi pour lui ou elle), qu'en fait je n'avais pas de véritable ami, ils m'ont répondu en chœur :
"prend un Curli".

Au moins, ça m'a fait sourire ;-)



Dans le prochain billet, je vous parlerai de la vie sociale du n3rd, façon Zythom.