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Polémique : la nouvelle imprimante 3D de MakerBot a-t-elle trahi l'open hardware ?

lundi 24 septembre 2012 à 12:37

Le matériel libre, ou open hardware, en général et l’impression 3D en particulier, cela fait longtemps qu’on en parle sur le Framablog (notre premier article sur la RepRap date de 2008).

Nous y croyons parce qu’avec une imprimante 3D libre, vous pouvez non seulement créer des objets en partageant leurs fichiers numériques sous format et licence libres mais également concevoir l’imprimante elle-même, puisque ses sources (c’est-à-dire ses plans de fabrication) sont aussi sous licence libre.

À partir de là, vous voici potentiellement prêt pour… changer le monde (ou tout du moins, ne nous emballons pas, pour dessiner lentement mais sûrement les contours d’un nouveau paysage industriel). Évidemment cela ne se fera pas sans peine et l’on peut déjà anticiper de terribles batailles du côté de la propriété intellectuelle (pire encore que pour la culture), d’où notre long (mais passionnant) article : L’impression 3D, ce sera formidable… s’ils ne foutent pas tout en l’air !.

Or que se passe-t-il aujourd’hui ? L’un des fers de lance de l’impression 3D, la société MakerBot, a récemment annoncé la sortie de son nouveau modèle, la « Replicator 2 » (cf photo ci-dessous). Et à en croire cette percutante vidéo promotionnelle elle semble en effet bien plus mieux que les précédentes, d’ailleurs le célèbre magazine Wired s’en est tout de suite extasié : The New MakerBot Replicator Might Just Change Your World (rien que ça !)

Mais, car il y a un mais, il semblerait que ce nouveau modèle ne soit tout simplement plus libre, aussi bien dans ses sources de fabrication que (et c’est peut-être le plus choquant) dans le format de fichier numérique permettant de créer les objets en 3D (qui se partagent du reste sur le site Thingiverse de MakerBot qui lui aussi a récemment changé ses conditions d’utilisation dans le sens de la fermeture, d’où l’apparition d’alternatives). Tout ceci reste au conditionnel mais force est de reconnaître que MakerBot navigue en ce moment entre flou et silence quant à la réponse à donner à ce début de polémique.

Si cela s’avérait fondé, cela serait très mal vécu par la communauté qui y verrait là comme une sorte de trahison avec les principes du matériel libre, d’autant que la société MakerBot s’est fait connaître dans l’enthousiasme justement parce qu’elle proposait des modèles d’imprimantes 3D libres (quand vous vous rendez sur l’article Imprimante 3D de Wikipédia, MakerBot est cité en exemple de matériel libre).

Ceci étant dit, la question sous-jacente est aussi celle de la viabilité des entreprises de matériels libres. MakerBot a levé des fonds (dix millions de dollars), a investi, vient d’ouvrir un magasin à New York, etc. MakerBot a donc le vent en poupe et est en train de changer de dimension industrielle. Cela peut-il se faire tout en restant totalement libre ? Peut-être que les investisseurs ont fait pression vers la fermeture (par rapport au profit, à la concurrence, etc. quid d’un petit malin qui prendrait les sources délocaliserait en Chine et inonderait le marché ? d’ailleurs on y a déjà plus que pensé !).

Pour rentre compte de cette polémique nous vous proposons coup sur coup trois traductions ci-dessous (une fois de plus, merci à tous les traducteurs bénévoles).

La première émane de Josef Prusa, développeur tchèque pionnier (et passionné) du projet RepRap que l’on peut considérer comme la première imprimante 3D libre (et qui elle, on en est sûr, l’est restée). C’est d’ailleurs sur cette RepRap que s’est construit MakerBot et ils ne s’en cachent pas. C’est lui qui a levé le lièvre et il réagit ici avec véhémence et émotion (d’où le style parfois confus, flottant et familier sachant que l’anglais n’est pas sa langue maternelle non plus).

La seconde est un réponse directe à Josef Prusa. Son auteur est Bre Pettis, l’un des fondateurs de MakerBpot. Il semblerait qu’elle soit destinée avant tout à éteindre l’incendie.

La dernière traduction provient lui aussi de l’un des fondateurs de MakerBot, sauf qu’il a été viré de l’entreprise depuis ! On peut estimer qu’il y a de la rancœur dans son propos mais il n’a pas forcément tort de qualifier la réponse de Bre Pettis de « tas de conneries issu du double langage d’entreprise » en rappelant la définition de l’open hardware.

Et pour finir cette (longue) introduction, un lien vers un petit dessin qui résume amèrement la situation.

Louis Seigal - CC by

Crédit photo : Louis Seigal (Creative Commons By)

Le sens de l’Open Hardware

Open Hardware meaning

Josef Prusa - 20 Septembre 2012 - Blog personnel
(Traduction : fcharton, KoS, Smonff, Pascal, Alex, Gatitac, @jfomhover, ProgVal, Dam, Ag3m, tanguy)

Ddurant123 - CC byJe voulais écrire sur ce sujet depuis longtemps. Certains d’entre vous le savent peut-être, d’autres non, mais j’ai lancé ma propre société de RepRap. Elle se nomme Prusa Research, et c’est sans doute la première entreprise basée sur l’open hardware en République Tchèque, mais certainement pas la première au monde. Il y a plusieurs projets qui le font très bien, par exemple Arduino (à qui je dois tellement que, grâce à RepRap, je peux maintenant considérer Massimo comme mon ami car j’ai commencé à faire du hardware grâce à lui et Arduino), Adafruit, Sparkfun, etc.

La RepRap et surtout l’impression 3D sont pleine de conneries actuellement, c’est vrai. Il y a ainsi tous les jours de nouvelles entreprises qui se montent. La majorité des gens n’y ont pas contribué d’un yotta, pas apporté la moindre contribution et pourtant ils se prétendent inventeurs, mais fini le troll. Je fais partie de la communauté RepRap depuis vraiment longtemps et je puis affirmer sans fausse modestie que j’ai beaucoup aidé à le diffuser. La Prusa Mendel est probablement le modèle d’imprimante 3D le plus répandu sur la planète.

Croyez moi, c’est parfois vraiment tentant de prétendre avoir réalisé des choses que vous n’avez pas vraiment faites, n’est-ce pas ? Comme « Hé, mon imprimante peut imprimer à une résolution de 50 microns! » LOL. J’ai conçu un putain de tatouage pour me défendre de ça. C’est le logo de l’Open Hardware avec la goutte standard de RepRap dedans. C’est directement sur mon avant-bras droit, tout le monde peut le voir quand on me serre la main, quand je rencontre quelqu’un ou que je signe un contrat, peu importe. C’est un symbole pour moi. L’Open Hardware et RepRap ont fait de moi ce que je suis.

Un triste évènement qui s’est produit aujourd’hui m’a finalement motivé à écrire cet article. Makerbot a fermé ses sources, du moins tout semble le laisser présager. Makerbot a été lancé par plusieurs développeurs principaux du projet RepRap, Zach Smith, Bre Pettis (NdT : lire sa réponse juste après) et Adam Mayer. Adrian Bowyer, le fondateur du projet RepRap, leur a donné, comme d’autres, de l’argent pour démarrer. Makerbot est basé sur la RepRap, et ils n’ont jamais eu honte de cela. Mais cela a changé et Makerbot a commencé à prendre de la distance. Les gens m’ont accusé de dénigrer Makerbot lorsque je donne des conférences sur la RepRap. Je me suis dit « qu’est-ce que c’est que ce délire ! ». J’ai même échangé quelques e-mails avec Bre. Je vois toujours Makerbot comme un ami important de l’univers Open Hardware, également comme un bouclier qui protègerait de potentielles poursuites judiciaires.

Bre a donné une conférence l’an dernier à l’Open Hardware Summit, bla bla…. « une entreprise qui montre aux autres que le chemin de l’open source est possible ». J’avoue que je grinçais des dents en entendant le directeur des relations publiques laisser penser qu’ils avaient inventé la chose, vous savez, cette connerie que Makerbot a créé : l’extrudeur pas à pas. Ils en ont même fait une vidéo sympa. Plus tard, ils ont levé la bagatelle de 10 millions de dollars et les choses ont commencé à changer.

Et surprise, surprise, maintenant on a la Replicator 2 et sa version en source fermée. Hé, regardez, on a récupéré toutes les améliorations que vous avez partagé sur Thingiverse, compilé le tout dans un paquet et on l’a fermé. Pareil avec le logiciels MakerWare. (Ils ont finalement, après des années, arrêté d’utiliser Skeinforge, un logiciel libre créé par un brésilien qui n’avait même pas d’imprimante).

Et vous savez ce qui est le plus sournois ? Ne pas en parler lorsqu’ils l’ont annoncé, pas même lorsque les premières commandes sont parties ou juste après l’Open Hardware Summit où Bre Pettis est allé faire un beau discours (relayé par des magazines comme Make: faisant de MakerBot l’un des héros de l’Open Hardware).

J’ai demandé des précisions sur leur page Facebook, demandé à Bre directement et à d’autres employés, mais je n’ai eu aucune réponse. Si c’est vraiment ouvert, pourquoi ne pas le dire ?

Lettre ouverte à Bre Pettis.
Salut Bre,
On se connait depuis un moment. Je voulais te demander si la Replicator 2 est fermée ou non. Et si oui, pourquoi ? J’aimerais aussi t’interviewer pour mon émission RepRap sur Youtube, je te promets de rester neutre. Mais il faudra t’expliquer sur ton comportement bizarre que je mentionne dans cet article.
Jo Prusa, core développeur du projet RepRap

Crédit photo : Ddurant123 (Creative Commons By)

Corriger la désinformation avec de l’information

Fixing Misinformation with Information

Bre Pettis - 20 septembre 2012 - MakerBot.com
(Traduction : fcharton, KoS, Smonff, Pascal, Alex, Gatitac, @jfomhover, ProgVal, Dam, Ag3m, tanguy)

Bre Pettis - CC by-ncIl y a de fausses informations que j’aimerais éclaircir.

Question 1 : Le MakerBot Replicator 2 est-il open source ?

Nous travaillons dessus et allons être aussi ouvert que possible tout en ayant une activité viable. Nous allons continuer à respecter les licences et à contribuer à la technologie ouverte des imprimantes 3D, dont certaines sont de notre initiative. Nous ne voulons pas abuser de la bonne volonté et du soutien de notre communauté. Nous aimons ce que nous faisons, nous aimons partager et nous aimons ce que notre communauté invente. J’ai l’intime conviction que les entreprises qui partagent seront celles qui réussiront demain et je ne pense pas que ce soit un secret. Ces jours-ci, même des sociétés comme Google et IBM se lancent dans l’open source et trouvent de nouvelles manières de partager.

J’attends avec impatience de pouvoir parler avec les gens du Open Hardware Summit pour voir comment MakerBot peut partager autant que possible, donner du travail à ses 150 employés, produire du hardware fabuleux, et rester pérenne. Est-ce que nous devrons expérimenter pour rendre cela possible ? Oui, et cela va demander beaucoup de collaboration, de coopération, et de compréhension.

J’aimerais qu’il y ait plus d’exemples de grandes entreprises prospères dans le domaine du matériel « ouvert ». D’un point de vue commercial, nous avons été ouvert de manière absurbe, plus ouverte que n’importe quelle autre entreprise que je connais. Il n’y a pas de modèles ou de sociétés que je connaisse qui ait plus de 150 employés et qui soient plus ouverte que nous (je serais ravi d’avoir tort, mais je ne le pense pas). Nous expérimentons la manière d’être aussi ouvert que possible tout en ayant toujours un travail à la fin de la journée. Allons-nous réussir ? Je l’espère, mais même si ce nest pas le cas, tout le monde va découvrir qu’être aussi ouvert que possible est une bonne chose pour les affaires ou bien que personne ne devrait le faire, ou quelque chose entre les deux.

Personnellement, j’espère que nous réussirons, et pas seulement parce que j’aime ce que les gens font avec produits MakerBot et que j’adore les employés qui fabriquent ces machines, mais parce que je crois que MakerBot en tant qu’entreprise peut créer un nouveau modèle riche d’enseignements. Mais je n’ai pas l’intention de laisser les vulnérabilités de l’open hardware détruire ce que nous avons créé.

Des business que je connais, liés à l’open source hardware, ceux qui ont du succès sont ceux qui créent des projets éducatifs. Adafruit, Evil Mad Science et Sparkfun font des choses fabuleuses. Des entreprises comme Chumby et OpenMoko n’y sont pas parvenus, malgré le fait que des gens vraiment intelligents y étaient impliqués. Un grand nombre des projets hardware sur Kickstarter sont open source, mais je n’en ai vu aucun qui tienne le passage à la production industrielle. Encore une fois, je suis preneur de n’importe quel exemple réussi d’une grande entreprise de matériel open source. Il y a quelque chose de très intéressant à observer là dedans. Les entreprises hardware qui ont le plus de succès sont celles qui font des projets en étant open source.

Nous allons continuer à contribuer aux projets que nous avons démarré et à d’autres projets open source. J’ai été un fan de l’EFF et la FSF depuis suffisamment longtemps pour respecter les licenses. J’ai été prof depuis plusieurs années et je sais que quand on partage avec une communauté respectueuse, tout le monde dans cette communauté y gagne.

Nous sommes en train de travailler activement à un programme de développement pour créer des trucs super disruptifs et innovants. Nous attendons vraiment de pouvoir trouver des moyens de créer des situations gagnant/gagnant avec des développeurs et des entreprises. Heureusement, tout le monde n’est pas là pour manger gratos, à la fois Ultimaker et plusieurs projets RepRap ont contribué à la technologie et montrent que nous pouvons bosser ensemble et reposer sur les épaules les uns des autres.

Ce n’est pas le premier changement que nous avons effectué pour devenir professionnels et ça ne sera pas le dernier.

Question 2 : Est-ce que les conditions d’utilisation de Thingiverse ont changé pour « voler » les choses des gens

Thingiverse ne vole pas. Nous avons créé Thingiverse afin qu’il soit le meilleur endroit pour partager des choses en utilisant des licences libres. Les nouvelles conditions d’utilisation, que nous avons mis en place en février de cette année, nous permettent avant tout de partager vos créations sur notre site mais aussi de nous protéger contre les entreprises et leurs avocats. Peut-on la rendre plus conviviale ? Oui, mais les honoraires d’avocats sont chers et rendre cela plus simple prend beaucoup de temps.

J’ai mis sur notre liste de choses à faire en 2013 : rendre les conditions d’utilisation plus faciles à comprendre et éviter les malentendus. Si vous êtes préoccupés par cela, faites en sorte de lire le billet que j’ai écrit plus tôt cette année sur les conditions d’utilisation de Thingiverse.

Crédit photo : Bre Pettis (Creative Commons By-Nc)

MakerBot contre Open Source - Du point de vue d’un fondateur

MakerBot vs. Open Source – A Founder Perspective

Zachary Smith - 21 septembre 2012 - Hoektronics.com
(Traduction : fcharton, KoS, Smonff, Pascal, Alex, Gatitac, @jfomhover, ProgVal, Dam, Ag3m, tanguy)

Mark Demers - CC by-nc-ndJe m’appelle Zachary Smith (aussi connu sous le pseudo de Hoeken), je fabrique des imprimantes 3D depuis 2007 en prenant part au projet RepRap. J’ai créé une organisation à but non lucratif (la RRRF, RepRap Research Foundation) dédiée à la promotion des imprimantes 3D. En 2009, j’ai convié mes amis Adam Mayer et Bre Pettis à se lancer dans la fabrication d’imprimantes 3D. Partant de là, MakerBot Industries était né. Revenons-en à avril 2012, quand j’ai été poussé à la porte de l’entreprise du même nom. Aujourd’hui, je n’ai aucune information sur le fonctionnement interne de l’entreprise que j’ai créé. Allez voir cet article de Chris Thompson pour plus d’informations.

Je ne soutiens aucun mouvement qui restreint la nature libre du MakerBot, qu’il s’agisse de matériel, d’électronique, de logiciel, de firmware, ou d’aucun autre projet ouvert. MakerBot a été créé sur les bases de projets de matériel libre, tels que RepRap ou Arduino, aussi bien que d’autres projets logiciels libres pour le développement de notre propre logiciel. Je reste dévoué au mouvement de l’open source, et je crois aux idéaux et buts de l’Open Source Hardware. Je n’ai jamais dévié de cette position et j’espère que je ne le ferai jamais.

Je réserve mon jugement jusqu’à ce qu’on entende quelque chose d’officiel de la part de MakerBot sur la nature open source (ou pas) de sa dernière imprimante. J’essaie de rentrer en contact avec les gens pour comprendre, mais jusqu’à présent personne ne parle, et mes ex-partenaires n’ont pas répondu à mes appels téléphoniques ou mes e-mails. Cela ne sent pas bon. La meilleure information que j’ai trouvée est un tas de conneries issues du double langage d’entreprise (NdT : le « tas de conneries » c’est justement la traduction ci-dessus « Corriger la désinformation avec de l’information » !).

Si ces allégations se révèlent vraies, ce serait une triste journée pour le mouvement du matériel libre. Non seulement ce serait la perte d’un grand fabriquant de matériel ouvert, mais ce serait aussi la perte d’un exemple pour le mouvement. Beaucoup de gens se sont tournés vers Makerbot en disant : « Oui, le matériel ouvert est un secteur viable, regardez la réussite de MakerBot ». S’ils ferment ces portes, alors cela donnera des arguments à ceux qui disent que le matériel ouvert n’est pas viable. Cela va aussi décourager d’autres entreprises de se lancer dans le matériel ouvert. Ce serait effectivement une bien triste nouvelle.

Personnellement, je considère les migrations vers les formats propriétaires comme la trahison ultime. Quand on m’a chassé ce n’était dû qu’à un malheureux mais classique clash de personnalités, où une personne devait partir et l’autre rester. J’ai ravalé mon égo et je suis parti parce que je savais que la société que j’avais fondé porterait mes idéaux plus loin dans le monde. Sans m’attarder sur nos différences, j’avais pensé que Bre aurait continué à suivre les principes sur lesquels nous avions fondé notre société et les mêmes principes qui avaient joués un rôle de premier plan dans le succès de notre société. Passer d’un format libre à un format propriétaire est contraire à tout ce que je défends et en tant que co-fondateur de MakerBot Industries, j’ai honte d’y voir mon nom associé.

Bre Pettis, je t’en prie, montre-moi que j’ai tort en clarifiant exactement sous quelle license Makerbot va diffuser les fichiers de conception et le logiciel. C’est tout ce que nous (la communauté) souhaitons.

Enfin, je voudrais rappeler et souligner la définition de l’Open Source Hardware, que MakerBot a approuvé. Ce document énonce en des termes très clairs ce que cela signifie être une entreprise d’open hardware. Je le laisse ici à votre jugement :

Open source hardware regroupe les conceptions Hardware réalisées publiquement et disponibles de manière à ce que n’importe qui puisse étudier, modifier, distribuer, créer et vendre un design ou un produit basé sur ce design. La source du produit hardware, le design duquel le produit est issu, est disponible sous un format choisi pour permettre de faire des modifications. Idéalement, open source hardware utilisera des composants et matériaux facilement approvisionnables, des procédés de fabrication standard, des infrastructures libres, des contenus libres de droit et des outils de design open source pour maximiser la possibilité donnée à d’autres de concevoir ou utiliser un produit hardware. Open source hardware permet à quiconque d’avoir le contrôle sur leur technologie du moment qu’elles partagent leur savoir et encourage le commerce au travers de l’échange de design libre.

Crédit photo : Mark Demers (Creative Commons By-Nc-Nd)

Ceci est une Révolution : ce que l'Open Source a changé

samedi 22 septembre 2012 à 14:50

Patrice Bertrand - SmilePatrice Bertrand est directeur général de la SSII Smile spécialisée dans l’intégration de solutions open source ainsi que président du prochain Open Word Forum (dont Framasoft sera).

Il a tout récemment fait paraître un article dans le quotidien économique et financier La Tribune qu’il nous a semblé intéressant de reproduire ici (enrichi de quelques liens) avec son aimable autorisation.

C’est accessible et synthétique. On n’hésite pas à employer les grand mots.

Et, clin d’œil à nos plus fidèles lecteurs, on peut également y trouver là comme une sorte de réconciliation entre les frères ennemis « open source » et « logiciel libre » (enfin vous nous direz dans les commentaires).

Ceci est une Révolution : ce que l’Open Source a changé

Patrice Bertrand - 17 septembre 2012 - La Tribune

URL d’origine du document

Les 11, 12 et 13 octobre prochains se tiendra à Paris, l’Open World Forum, un événement de renommée internationale dédié à l’open source et aux approches ouvertes. L’open source est une idée qui a pris naissance dans le monde du logiciel, mais a inspiré et bousculé bien d’autres domaines. Tout comprendre en quelques clics sur une révolution qui bien au-delà de l’informatique, touche l’ensemble de la société…

Logiciel libre et open source

Revenons aux origines. Le logiciel libre est imaginé dans les années 80 par Richard Stallman. Il affirme que les programmes informatiques doivent pouvoir être librement utilisés, et surtout étudiés et modifiés. Utopique pour certains, il amorce pourtant une véritable révolution, qui 20 ans plus tard a bousculé toute l’économie du logiciel, et bien au delà. Fin des années 90, certains préfèrent l’appellation alternative de logiciel open source pour désigner à peu près la même chose, mais en mettant en avant non pas tant la liberté, que les qualités spécifiques de ces programmes réalisés de manière collective, peu centralisée, dont le code source (le programme tel qu’il est écrit par un informaticien) est disponible et peut être modifié, utilisé pour créer de nouveaux programmes, des oeuvres dérivées.

A certains égards, l’open source est un mouvement humaniste. Il considère que le logiciel est, à la manière de la connaissance scientifique, une forme de patrimoine de l’humanité, un bien commun que nous enrichissons collectivement, pour le bien être de tous.

L’open source, disons ici plutôt le logiciel libre, porte aussi un message particulièrement d’actualité: le logiciel nous contrôle, il est vital pour nous de contrôler le logiciel. Des pans de plus en plus grands de notre vie sont sous la maîtrise de logiciels. Un logiciel détermine si votre voiture va freiner, un autre si votre pacemaker va faire battre votre coeur, et un autre peut-être déterminera pour qui vous avez voulu voter aux présidentielles. Le logiciel fait désormais plus que nous rendre service, il nous contrôle. Ce n’est pas un mal en soi, à condition seulement que le contrôlions aussi, que nous sachions ce qu’il fait exactement, et ayons le droit de le modifier si besoin. Cette exigence première du logiciel libre est plus que jamais essentielle.

Ces 20 dernières années, le logiciel libre et open source, réuni sous l’appellation FLOSS, a apporté d’incroyables bouleversements.

Dans l’informatique, une révolution aux multiples facettes

D’abord dans la manière de créer des programmes. Dans les années 90, peu après la naissance du web, c’est une révélation : les programmes les plus critiques de la toile, les programmes les plus utilisés, les programmes les plus complexes, sont des programmes open source. Même Bill Gates en prend soudain conscience, et adresse en 1998 un mémo à ses troupes, où il s’alarme de cette transformation, de ces logiciels aussi bons et parfois meilleurs, de cette nouvelle forme de concurrence.

L’open source a apporté une rupture dans l’économie du logiciel en abaissant les coûts d’une manière incroyable. Tout ce qui constitue le socle d’une plateforme informatique, d’une plateforme web, est devenu tout simplement gratuit : système d’exploitation, bases de données, logiciels serveurs, outils de développement, outils d’administration. Bien sûr, le coût total de possession n’est jamais nul : il faut du matériel, du support et de l’expertise humaine pour déployer et faire marcher tout cela. Mais pour une start-up, la barrière à l’entrée a été abaissée de manière phénoménale, stimulant et accélérant la création d’entreprises innovantes. Et pour les entreprises utilisatrices, cette nouvelle donne s’est traduite en gains de compétitivité.

Comme toutes les révolutions technologiques depuis la machine à vapeur, l’open source a amené une forme de destruction créatrice, comme l’avait décrit l’économiste Joseph Schumpeter. En produisant des alternatives quasi-gratuites à des logiciels anciennement coûteux, l’open source a fait disparaître des acteurs devenus non compétitifs, et réduit les marges de quelques autres. Mais le contexte nouveau d’un socle logiciel devenu un bien commun a permis l’émergence de milliers d’acteurs, de startups innovantes, dont certaines sont déjà grandes. Et a permis, plus largement, l’émergence du web, de ses acteurs géants, et des milliers d’acteurs plus petits mais innovants et grandissants.

Le développement logiciel a été profondément modifié lui aussi. L’approche moderne du développement consiste à assembler des composants, grands et petits, pour l’essentiel open source. Une part déterminante du développement consiste donc à sélectionner les bons composants et les intégrer, en ne développant réellement que les parties spécifiques, qui concentrent la valeur ajoutée de l’application. C’est une transformation du développement logiciel qui a apporté d’importants gains de productivité.

L’open source domine sur les serveurs et dans le cloud

L’open source a eu des succès mitigés sur le poste de travail, sur le PC ordinaire. Et pourtant, moins visible et moins connue du public, la victoire de l’open source a été écrasante du côté serveurs et Cloud. Si Windows domine sur les postes de travail, le système d’exploitation Linux a une domination plus grande encore sur les millions de serveurs des grandes plateformes du web, de Google, Facebook, Amazon, ou eBay, mais des plus petits acteurs de la même manière. Une étude récente estimait à 90 % la part de marché de Linux sur le Cloud de Amazon. Dans beaucoup de domaines, l’open source est en pointe, faisant naître les outils de demain. Citons par exemple l’émergence du Big Data, la manipulation des données à une échelle nouvelle, où les outils de bases de données anciens atteignent leurs limites, et où des technologies nouvelles sont nécessaires. Ces nouvelles bases, dites NoSql, sont pratiquement toutes des logiciels open source.

Open Innovation

L’open source a apporté aussi une nouvelle approche de la R&D. Une belle illustration est donnée par le projet open source Genivi, qui a l’initiative de BMW et PSA a réuni des grands constructeurs automobiles et équipementiers dans une démarche typique de R&D mutualisée, construisant ensemble une plateforme logicielle destinée à leurs véhicules. Pour réussir ce projet stratégique, ces grands industriels ont adopté le modèle open source tant en termes de socle, de développement, de diffusion, que de gouvernance. Et l’on pourrait citer évidemment le noyau du système Linux lui-même, auquel contribuent des dizaines d’entreprise, en faisant sans doutes le plus bel exemple de R&D mutualisée, à l’échelle mondiale. Les démarches appelées parfois « open innovation » ont montré les bénéfices d’une innovation plus ouverte sur le monde, moins cachée, fonctionnant en réseau.

Open Art

Certains ont présenté l’open source comme antagoniste à la propriété intellectuelle. C’est tout le contraire, puisque l’open source se définit par ses licences d’utilisation, qui s’appuient elles-mêmes sur le droit d’auteur. L’auteur, titulaire des droits, donne à l’utilisateur des droits étendus, et quelques devoirs. Ce principe par lequel l’auteur d’une oeuvre reste parfaitement identifié, conserve ses droits, mais autorise différentes utilisations et la redistribution de son oeuvre a été étendue à de nombreux domaines, bien au delà du logiciel.

L’open source se décline dans l’art également. Les licences Creative Commons ont permis de diffuser des oeuvres de toutes natures en donnant des droits étendus, en particulier une libre rediffusion, avec ou sans le droit de modifier l’oeuvre originale. Ainsi, la fondation Blender, qui développe l’un des meilleurs programmes d’animation 3D du monde, un programme open source, réalise des open movies, des films d’animation dont tous les fichiers source, qui permettent de générer le film, sont rendus disponibles et peuvent être modifiés. Comme un roman dont on pourrait réécrire la fin.

Open hardware

L’open source a gagné le matériel également, sous l’appellation de « open hardware ». Il s’agit ici de partager les plans de circuits et d’équipements entiers. Un bel exemple d’open hardware, le projet Arduino est un microcontrôleur programmable totalement open source, matériel et logiciel, qui peut être adapté pour toutes formes de traitement du signal, ou de contrôle de process. Il peut être programmé pour réagir aux signaux de capteurs externes, les traiter, et commander des actions. Depuis 2005 il s’enrichit d’année en année, et plus de 300 000 unités ont été fabriquées. La diffusion de l’open hardware est encore modeste, mais souvenons-nous que c’était le cas aussi de l’open source logiciel à ses débuts : un « truc de geek ». Mais ces trucs de geeks font tourner les plateformes du web aujourd’hui.

Le mot clé derrière ces projets, ces démarches, est celui de réappropriation de la technologie. La technologie n’est pas le domaine réservé d’une élite minuscule, du fond de la Silicon Valley. Nous pouvons la maîtriser, et particulièrement si nous réunissons nos forces. C’est le principe des FabLabs. Nous ne sommes pas que des consommateurs idiots qui s’endettent pour acheter le dernier smartphone, dont on n’aura pas le droit même de changer la batterie. Avec quelques amis, avec un peu d’aide, avec des plans et des logiciels open source, nous pouvons construire des choses extraordinaires, dans notre garage. Pas tout à fait le dernier smartphone, mais pas très loin. Les imprimantes 3D ouvrent de nouvelles frontières pour ces démarches. Après avoir pris le contrôle des logiciels, il sera possible de reprendre le contrôle sur le matériel. On rêve déjà de pouvoir télécharger, sous licence libre, les plans d’une pièce de rechange pour sa cafetière, d’imprimer chez soi sa pièce en 3D. Et un peu plus tard, d’imprimer la cafetière open source elle-même ! Utopique ?

Mais justement, c’est la plus grande révolution de l’open source, de montrer que l’utopie gagne, parfois.

Open médecine ?

Les systèmes open source ne sont pas que pour les bricoleurs du dimanche. Ils gagnent par exemple la recherche en médecine. Merveilleux exemple de matériel et de logiciel open source associé à une démarche de recherche : des chercheurs ont développé Raven, un robot chirurgien open source, mis à disposition des équipes de recherche du monde entier afin de faire progresser les logiciels et technologies de chirurgie assistée. D’autres chercheurs travaillent à une machine combinant scanneur et radiothérapie, dont les plans, le code source, et les instructions de fabrication seront open source. Il est intéressant de remarquer que certains de ces projets de médecine open source ont reçu le soutien de la FDA, qui est un peu l’équivalent de l’AFSSAPS, avec l’espoir en particulier que le logiciel open source améliore la qualité, jugée insuffisante, des équipements propriétaires.

Fédérer les énergies citoyennes

L’open source a montré aussi que l’on pouvait fédérer et organiser les efforts d’un grand nombre de personnes sur un projet commun. Il était précurseur de ce qu’on a appelé plus tard le crowdsourcing, ces projets qui impliquent un grand nombre de contributeurs bénévoles, dont la réussite emblématique est celle de Wikipedia, mais qui a aussi donné OpenStreetMap. Avec un double crédo : d’une part la connaissance est un bien commun qui doit être accessible à tous sans barrière économique, d’autre part les citoyens peuvent gérer eux-mêmes ce patrimoine, dans le cadre d’une organisation décentralisée, et d’une gouvernanceouverte.

Parmi les déclinaisons de l’open source, on peut citer aussi le mouvement de l’open data, la mise à disposition des données publiques, mais aussi des données de certaines entreprises. Une démarche citoyenne et démocratique d’une part, mais aussi le socle de nombreuses initiatives et modèles économiques nouveaux appuyés sur ces données.

L’open source a fédéré des combats citoyens fondamentaux. Les militants de l’open source ont une force particulière : ils réfléchissent aux tendances sociétales, mais sont aussi au coeur des technologies nouvelles et parfois de leurs rouages économiques. Ils ont compris par exemple l’importance de standards réellement ouverts, dont la spécification soit librement accessible, dont la gouvernance soit ouverte, dont l’utilisation soit gratuite. Ils se battent pour la neutralité du Net, ce principe fondateur de non-discrimination des flux sur le réseau mondial, qui a permis l’émergence de toute une industrie du web et qui est menacée aujourd’hui. Ils tentent d’expliquer aux politiques pourquoi les brevets ne sont pas applicables au monde du logiciel, où la seule protection du copyright est amplement suffisante. Dans le monde du logiciel, les brevets sont contre-productifs, ils découragent l’innovation, ils sont l’arme d’un oligopole de géants et d’entités mafieuses appelées patent trolls. Pour les premiers il s’agit d’effrayer les petits concurrents plus innovants. Pour les seconds, d’extorquer une rente sur l’innovation des autres.

Une industrie florissante

L’open source n’est pas à l’écart de l’économie, au contraire. Les développeurs qui construisent les programmes open source ne sont pas toujours des bénévoles : la plupart sont payés par des entreprises qui voient un intérêt bien analysé dans leurs participations à ces travaux : elles bénéficient de logiciels performants dont elles n’ont eu à financer qu’une fraction de la R&D, elles ont une parfaite maîtrise de ces technologies qui deviennent des standards, elles ont un rôle dans la gouvernance de ces projets.

En France, l’économie du logiciel libre représente plus de 300 PME et ETI, éditeurs de logiciels ou sociétés de services, dédiées au logiciel libre. Elles sont souvent réunies en associations régionales, elles-mêmes fédérées au sein du CNLL, le Conseil National du Logiciel Libre. Elles représentent ensemble plus de 3000 salariés, et connaissent une croissance annuelle de près de 30 %. Si on comptabilise également les emplois liés au logiciel libre dans les sociétés de services généralistes, l’industrie (notamment aéronautique) et les télécommunications, le chiffre d’affaires global lié à l’open source est estimé à 2.5 milliards d’euros, soit 6% du marché des logiciels et des services informatiques, et plus de 30.000 emplois, en croissance annuelle de 30%. Source : Pierre Audoin Consultants.

On le voit, les déclinaisons de l’open source sont nombreuses, les impacts de l’open source vont bien au-delà du logiciel, des nouvelles technologies, ils s’étendent à d’autres industries, à l’ensemble de la société, à nos conceptions de la citoyenneté, de la démocratie. Toutes ces facettes de l’open source, à l’articulation de la technologie et du sociétal, sont représentées à l’Open World Forum. Ceci est une révolution, comme le dit une célèbre marque technologique…

De la question des marques dans le logiciel libre

vendredi 21 septembre 2012 à 10:05

Le navigateur Firefox étant libre, vous pouvez l’adaptez à vos besoins, le modifier et le distribuer mais vous n’aurez plus nécessairement le droit, sauf autorisation de la Fondation Mozilla, de l’appeler Firefox. Dans le cas contraire il faudra lui trouver un autre nom.

Même chose s’il vous prend l’envie de vendre des tee-shirts avec le célèbre logo du panda roux entourant la terre. Sans autorisation de la fondation cela ne vous sera pas légalement possible.

On pourrait presque dire que dans le logiciel libre tout est libre sauf sa marque (nom, logo…).

Cela se conçoit bien car il est important de savoir qui fait quoi, mais c’est souvent une surprise pour l’utilisateur.

Ce billet de Benjamin Mako Hill évoque donc de cette question du branding qui doit être au service du projet et non mettre des bâtons dans les roues de sa communauté.

Roadsidepictures - CC by-nc-nd

Open Brands

Open Brands

Benjamin Mako Hill - 2 septembre 2012 - Copyrighteous (blog personnel)
(Traduction : GPif, ehsavoie, Fe-lor, goofy_chromium, Louson, JoKoT3, Penguin, pwetosaurus, Giant Jack)

Fin juillet, les membres de l’Awesome Foundation m’ont invité à participer, lors de leur conférence, à une interessante discussion au sujet des marques ouvertes (NdT : Open Brands). Awesome est un jeune regroupement d’organisations qui s’interroge pour savoir s’il faut, et si oui comment, controler ceux qui utilisent le terme Awesome dans leur nom. Ils m’ont demandé d’intervenir pour présenter comment la communauté du logiciel libre abordait ce problème.

La gouvernance d’un logiciel libre est souvent étonnamment floue sur le sujet. J’ai assisté et participé a des discussions houleuses sur cette question de la marque, dans chaque projet de logiciel libre (réussi) où j’ai travaillé. Plusieures années en arrière, Greg Pomerantz et moi avons écrit, autour de quelques bières, un brouillon de politique de marque déposée pour la distribution Debian. J’ai également travaillé avec le responsable du projet Debian, Stefano Zacchiroli et un avocat de du Software Freedom Law Center afin d’aider à la rédaction d’un brouillon pour la politique de marque déposée du projet Debian dans son ensemble.

Grâce à ces réflexions, j’en suis venu à élaborer trois principes, qui, à mon avis, mènent à des discussions plus claires pour déterminer si la culture libre et le logiciel libre doivent enregistrer une marque déposée et, s’ils le font, comment ils doivent concevoir d’accorder ou non l’utilisation de la marque à d’autres (et sous quelles conditions). J’ai listé, ci-dessous, ces principes par ordre d’importance.

1. Nous voulons que les gens utilisent nos marques.

Les discussions concernant les marques déposées semblent tourner à un exercice consistant à imaginer tous les abus possibles de l’image de la marque déposée. C’est à la fois idiot et erroné. Il faut être très clair sur ce point : Notre problème n’est pas que les gens n’utilisent pas correctement nos marques, mais qu’ils ne sont pas assez nombreux à les utiliser. Le but primordial d’une politique de protection des marques devrait être d’en rendre possible et facile son utilisation légitime.

Nous voulons que les gens fabriquent des tee-shirts avec nos logos. Nous voulons que les gens écrivent des livres sur nos logiciels. Nous voulons que les gens créent des groupes d’utilisateurs et tiennent des conférences. Nous voulons que les gens utilisent, parlent, et fassent la promotion de nos projets, commercialement ou non.

Or le branding peut limiter la diffusion de notre marque et va ainsi nuire à nos projets. Parfois, après avoir soigneusement considéré ces inconvénients, nous pensons que ces compromis en valent la peine. Et c’est parfois le cas. Cependant, les projets sont souvent trop prudents, et en conséquence font l’erreur de trop vouloir contrôler. Je pense que le désir des projets libres de contrôler leur marque a fait plus de dommage que tous les mauvais usages des marques mis bout à bout.

2. Nous voulons que nos projets soient capables d’évoluer.

La création d’une marque déposée donne le pouvoir légal de contrôler une marque dans les mains d’un individu, d’une firme ou une organisation à but non lucratif. Même si ça n’a pas l’air d’être si important, ce pouvoir est, fondamentalement, la capacité à déterminer ce que le projet est, et ce qu’il n’est pas.

J’ai entendu dire que dans le monde politique américain, il n’y a aucune marque déposée pour les termes Républicain ou Démocrate et qu’aucune permission n’y est requise pour créer une organisation affirmant appartenir à l’un ou l’autre parti. Et cela n’implique pourtant pas de confusion générale. À travers les structures sociales et organisationnelles, on voit clairement qui en fait partie ou non, et qui est à la marge.

Plus important, cette structure permet à de nouvelles branches et des groupes extérieurs à la ligne officielle de grandir et se développer en marge. Les deux partis se disputent depuis le XIXe siècle, ont changé de position dans le spectre politique sur un grand nombre de questions, et ont été le lieu d’importantes divergences idéologiques internes. La plupart des organisations devraient aspirer à une telle longévité, à de tels débats internes et à une telle flexibilité.

3. Nous ne devrions pas troubler nos communautés.

Bien qu’ils soient souvent sources d’abus, les marques sont foncièrement en faveur des consommateurs. Le but des marques légalement déposées est d’aider les consommateurs à ne pas être induits en erreur sur la source d’un produit ou d’un service. Des utilisateurs peuvent aimer un logiciel du projet Debian, ou peuvent le détester, mais il est agréable pour eux de savoir qu’ils ont la Qualité Debian lorsqu’ils téléchargent une distribution.

Bien évidemment, protéger des marques légalement n’est pas le seul moyen pour atteindre ce but. Les noms de domaine, les politiques internes et les lois contre la fraude et l’usurpation d’identité servent également ce but. L’Open Source Initiative a fait une demande de marque déposée pour le terme open source, et leur demande a été heureusement rejetée. L’absence d’enregistrement d’une marque ne les a pas empêchés de contrôler l’utilisation de ce terme. Si certaines personnes tentent de donner le terme open source à leurs produits open source alors qu’ils ne le sont pas, elles sont rappelées à l’ordre par une communauté de personnes qui savent de quoi ils parlent.

Et puisque les avocats sont rarement dans la boucle, il est difficile de savoir si déposer une marque aiderait dans la grande majorité des cas. Il est également vrai que la plupart des structures du libre manquent d’argent, de conseils juridiques ou de temps, pour obliger à une utilisation correcte de la marque. Il est effectivement très important que votre communauté d’utilisateurs et de développeurs sache précisément ce qu’est, et ce que n’est pas, votre produit et votre projet. Mais comment nous décidons d’arriver à cela n’est pas quelque chose que nous devons considérer comme acquis et tout le monde doit être impliqué dans les décisions.

Crédit photo : Roadsidepictures (Creative Commons By-Nc-Nd)

Geektionnerd : OpenGLAM

vendredi 21 septembre 2012 à 09:43

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Source : Recommandations pour l’ouverture des données et des contenus culturels (Framablog)

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)

À la rencontre des « bots » qui veillent eux aussi sur Wikipédia

lundi 17 septembre 2012 à 23:24

Connaissiez-vous les « bots » de Wikipédia ?

Le mieux est de commencer tout d’abord par demander à Wikipédia :

« Les bots sont des agents automatiques ou semi-automatiques qui interagissent avec Wikipédia comme le fait un utilisateur, mais pour des tâches répétitives et fastidieuses pour un humain. Les bots peuvent être utilisés pour créer des articles. D’autres peuvent être utilisés pour éditer ou même détruire des articles. Certains bots sont spécialisés dans la gestion des liens d’interlangue, la résolution des homonymies, les annulations de certains vandalismes ou encore les opérations sur les catégories. Des bots bien conçus peuvent apporter un bénéfice concret à Wikipédia. Cependant, parce que le système n’a pas été conçu pour supporter des bots, même un bon bot peut avoir des effets secondaires non souhaitables. »

C’est donc de ces satanés bots dont il est question dans la traduction ci-dessous. Bien moins pour glorifier l’intelligence artificielle que pour rendre hommage à ceux bien humains qui les programment dans les coulisses.

Remarque : Les wikipédiens francophones ont quant à eux souvent à faire avec le bot Salebot (Attention, bot méchant ! nous prévient-on sur sa page « Utilisateur »), un article spécialement dédié lui avait été consacré par Camille Gévaudan sur le site Écrans en août 2008.

Kristina Alexanderson - CC by-sa

Meet the ‘bots’ that edit Wikipedia

Daniel Nasaw - 25 juillet 2012 - BBC News
(Traduction : elfabixx, Pwetosaurus, Gatitac, Jose, ProgVal, Kaya, fck)

Rencontrez les « bots » qui éditent Wikipédia

Wikipedia est écrit et maintenu par des dizaines de milliers de volontaires bénévoles dans le monde, qui sont eux-mêmes assistés par des centaines de « bots » — des programmes informatiques autonomes — qui aident à garder l’encyclopédie fonctionnelle.

« Le pénis est l’organe mâle de copulation et de miction chez les mammifères. » dit la page Wikipédia en question.

Cette affirmation est indéniablement vraie, et donc mérite d’être dans Wikipédia, mais elle n’a assurément rien à faire dans l’article du site consacré à la Cour suprême !

C’est un facétieux lecteur anonyme de Wikipédia vivant en Caroline du Sud a proposé cette contribution à l’encyclopédie mondiale en ligne la semaine dernière, et il a suffi de quelques secondes pour que cette erreur soit détectée et supprimée.

Ce vandalisme n’a pas été trouvé par un autre contributeur, mais simplement par un programme d’intelligence artificielle appelé « bot », qui est une aphérèse de « robot ».

Virtuellement invisible

ClueBot NG, car tel est son nom, réside dans un ordinateur à partir duquel il intervient sur la vaste encyclopédie pour détecter et nettoyer le vandalisme, quasiment dès que celui-ci apparaît.

Il fait partie des quelques centaines de bots qui patrouillent sur Wikipedia à tout moment. Son rôle dans la restauration immédiate de l’article sur la Cour suprême illustre comment les bots sont devenus une partie indispensable — même si virtuellement invisible — du projet Wikipédia.

« Wikipedia serait une belle pagaille sans les bots », écrivait dans un courriel un administrateur de Wikipédia, connu sur le site sous le nom de Herfold.

À elle seule, la version anglaise de Wikipedia dépasse les quatre millions d’articles ce mois-ci. Elle contient autour de 2.5 milliards de mots, équivalent à des millions de pages, et est 50 fois plus grosse que l’Encyclopædia Britannica.

Wikipedia est maintenue dans toutes les langues par des dizaines de milliers de contributeurs — dont environ 77 000 font plus de cinq éditions par mois.

Le projet est devenu avec le temps tellement vaste et sa maintenance un tel travail intensif que cela défie les capacités de ses administrateurs et simples contributeurs humains de le maintenir en ordre.

Intervenir contre les vandales

C’est là que les (ro)bots interviennent.

« On s’amuse à penser au jour où les robots se mettront en grève juste pour que tout monde se rende compte de la quantité de travail qu’ils abattent », dit Chris Grant un étudiant de 19 ans à Perth en Australie, qui fait partie du comité de Wikipédia qui supervise les robots.

« Le site demanderait beaucoup plus de travail de notre part et épuiserait davantage les contributeurs ».

Les bots effectuent ainsi de nombreuses tâches éditoriales et administratives qui sont fastidieuses, répétitives et chronophages mais néanmoins vitales.

Ils suppriment le vandalisme et les grossièretés, organisent et cataloguent les entrées, et gèrent les coulisses de l’encyclopédie, ce qui lui permet de fonctionner efficacement et de garder son apparence soignée et uniforme dans le style.

En des termes plus concrets, les bots sont comme des étudiants qui veillent sur les livres, déplacent des piles d’un étage à un autre, corrigent les codes-barres au dos des livres, et effectuent d’autres tâches ingrates, qui permettent aux bibliothécaires qualifiés de se concentrer sur les acquisitions et la politique du lieu.

Les bots peuvent-ils écrire ?

« Wikipédia s’est tellement développée que je ne sais pas comment les gens pourraient bien la gérer si tous les bots s’en allaient » nous dit Brad Jorsch, un programmeur informatique en Caroline du Nord qui gère un bot qui traque les bandeaux rappelant aux rédacteurs d’ajouter des sources aux articles.

Les bots sont présents depuis presque aussi longtemps que Wikipédia elle-même.

Le site a été fondé en 2001 et l’année suivante, un bot appelé Rambot a créé environ 30 000 articles — à un rythme du millier par jour — sur les villes individuelles des États-Unis. Le bot a puisé ses données directement à partir de tabeaux de recensement américain. Et les articles se lisaient bien comme s’ils avaient été écrit par un robot. Ils étaient courts et convenus, et contenaient à peine plus que des séries de statistiques démographiques.

Mais, une fois qu’ils avaient été créés, des rédacteurs humains prenaient le relais et remplissaient les entrées avec des détails historiques, des informations sur la politique locale et les sites touristiques.

En 2008, un autre bot a créé des milliers de courts articles sur des astéroïdes, renseignants quelques lignes de données pour chacun à partir des bases de données de la NASA.

Aujourd’hui, la communauté Wikipédia demeure divisée quant à l’apport des bots aux articles. Certains administrateurs trouvent que de petits articles composés de quelques données n’ont que peu de valeur, d’autres trouvent que tout nouveau contenu est bon à prendre.

La peur des bots malicieux

Le résultat du débat a été que les bots ne sont désormais plus autorisés à écrire des articles entiers. Cependant, leur capacité à effectuer le plus gros de la maintenance libère les vrais contributeurs humains qui disposent alors de plus de temps pour effectuer une recherche, créer ou modifier un article et vérifier l’exactitude du travail des autres.

« Je ne pense pas que les gens réalisent quelle quantité de maintenance et de travail annexe sont nécessaires sur Wikipédia » dit Grant.

Certains administrateurs craignent les dégâts qu’un bot renégat pourrait un jour occasionner à l’encyclopédie. Pensez à Skynet dans les films Terminator.



Ces peurs sont infondées, d’après Grant.

Déjà, un robot n’est pas comme une automobile : si une partie d’une opération échoue, il s’arrêtera plutôt que de se fracasser quelque part.

« Il faudrait déjà que quelqu’un demande à un programmeur de rendre le bot fou et qu’il efface tout », dit Grant.

« Les bots avec les droits de supprimer des pages, bloquer des éditeurs, et prendre d’autres décisions drastiques ne peuvent être utilisés que par des contributeurs de confiance disposant de hauts privilèges administratifs », dit Grant.

Cependant, les bots aussi font des erreurs lorsqu’ils font face à des situations pour lesquelles ils n’ont pas été conçus. ClueBot NG, le bot anti-vandlisme, a cependant un très faible taux de faux positifs (lorsqu’il confond des articles légitimes avec du vandalisme). Étant donné que Wikipédia garde une trace des éditions, les erreurs peuvent être réparées presque aussi vite qu’elles surgissent, disent les administrateurs.

Les contributeurs humains ne craignent pas d’être un jour remplacés par les bots, disent les maîtres de bots. « Ecrire un article, citer ses sources, ou encore améliorer sa grammaire et son orthographe nécessiteront toujours le concours d’une personne », conclut Jorsch.

Crédit photo : Kristina Alexanderson (Creative Commons By-Sa)