Site original : Framablog
De nombreux donateurs s’inquiètent de savoir comment cela va se passer l’année prochaine pour les dons effectués à Framasoft en 2018 et le prélèvement à la source à partir de 2019. Pour une fois les choses sont très simples : rien ne change pour votre réduction d’impôt.
En 2019, les impôts seront prélevés à la source. Pour autant, la réduction fiscale demeure inchangée si vous faites un don à Framasoft : un don de 100 € en 2018 peut vous donner droit à 66 € de réduction fiscale, qui vous seront remboursés en août 2019.
Jusqu’à présent, vous faisiez votre déclaration au printemps en indiquant votre don ouvrant droit à une réduction d’impôt de 66 %, dans la limite de 20 % du revenu imposable. En fin d’année, les services fiscaux vous indiquaient le montant à régler en tenant compte d’une éventuelle mensualisation demandée de votre part.
À partir de 2019, vous allez faire des règlements mensuels dès le mois de janvier en fonction d’un taux déterminé par l’administration fiscale et des paramètres que vous leur aurez fournis. Ceux qui ont fait un don en 2017 recevront, dès le 15 janvier 2019, un acompte de 60 % de la réduction d’impôt dont ils ont bénéficié en 2018 au titre des dons effectués en 2017.
Vous ferez, comme chaque année, votre déclaration au printemps, vers mai-juin. Vous indiquerez alors le montant des dons faits à Framasoft en 2018 et pourrez, si demandé, joindre le justificatif que nous vous aurons fait parvenir vers mars-avril. C’est vers la fin de l’été que les impôts vous enverront votre avis, en tenant compte de ce don et d’un éventuel acompte versé de leur part en janvier. C’est alors que l’administration procédera à un recalcul de vos mensualités ou un remboursement, selon le cas et les montants. Les prélèvements mensuels se poursuivront ensuite pour ajuster vos paiements au montant de l’impôt dont vous devrez vous acquitter.
Et c’est tout. En gros, rien ne change pour votre réduction d’impôt pour les dons faits à Framasoft.
Avant |
Maintenant |
Camille a donné 100 € par carte bleue à Framasoft en octobre 2017 en passant par https://soutenir.framasoft.org.
En mars 2018, Framasoft lui a envoyé un reçu fiscal pour ce don de 100€. En mai 2018, Camille a déclaré ses revenus 2017, en précisant qu’elle avait fait un don de 100€ à Framasoft dans la case 7UF « Dons versés à d’autres organismes d’intérêt général ». En août 2018, Camille a reçu son avis d’imposition, qui indiquait prendre en compte une déduction de 66€ (100€ x 66 %). |
Fin décembre 2018, Camille donne 100€ à Framasoft. Elle le fait sur https://soutenir.framasoft.org comme l’an passé.
En mars 2019, Framasoft lui envoie son reçu fiscal pour un don de 100€. En mai 2019, Camille reçoit des impôts sa déclaration de revenus 2018. Elle déclare alors (sur papier ou en ligne) ses revenus 2018, et indique (toujours dans la case « Dons versés à d’autres organismes d’intérêt général ») un montant de 100€. En août/septembre 2019 (environ), les impôts envoient à Camille son avis d’imposition indiquant prendre en compte sa déduction de 66€ (100 € x 66 %). |
Son don de 100€ à Framasoft, après déduction, ne lui aura coûté que 34€ (100€ de don – 66€ de déduction). | Son don de 100€ à Framasoft, après déduction, ne lui aura coûté que 34€ (100€ de don – 66€ de déduction). |
Maintenant que vous voilà rassurés, nous ne pouvons que vous encourager à faire un don pour soutenir nos actions :-)
Hep ! — et si on remerciait une fois de temps en temps celles et ceux qui, dans les coulisses le plus souvent, créent, développent et maintiennent les logiciels et services qu’on utilise ?
Comme Moshe Zadka auquel nous empruntons les suggestions ci-dessous, vous utilisez chaque jour des logiciels de bonne qualité développés et maintenus par des gens qui ne demandent pas de paiement, qui respectent vos libertés et qui sont généreux de leur temps et de leur énergie. Alors on va dire que c’est la saison des remerciements. Voici dix façons parmi d’autres de le faire :
d’après Moshe Zadka, article original paru sur opensource.com
Le plus simple : en parler
1. Envoyez un courriel de remerciement aux développeurs. Soyez précis – expliquez-leur à quoi vous utilisez leur logiciel et en quoi il vous a été utile.
2. Utilisez votre plateforme de médias sociaux préférée et faites passer le mot.
3. Rédigez un billet de blog à propos de votre logiciel favori.
Donner de l’argent
4. Si vos projets préférés acceptent les dons, envoyez de l’argent.
5. Si vous êtes employé par une entreprise qui utilise des logiciels libres, voyez si vous pouvez convaincre la direction de parrainer certains des projets.
6. Offrez d’égaler les dons jusqu’à concurrence d’un montant déterminé. C’est incroyable ce que l’émulation peut faire !
Donner du temps
7. Aidez à la révision des correctifs (les développeurs et développeuses appellent ça des patches, hein).
8. Aidez à créer ou améliorer la documentation, à la traduire, au tri des bogues, etc.
9. Répondez aux questions des utilisateurs et utilisatrices sur l’IRC, les listes de diffusion et autres forums d’entraide.
10. Bonus : si comme moi, vous avez à un moment donné eu des mots déplacés (euphémisme) pour d’autres personnes dans la communauté, engagez-vous à faire mieux : communiquez avec bienveillance et ouverture. La meilleure façon de remercier est de faire de la communauté libre et open source un lieu où les gens se sentent à l’aise pour communiquer.
À propos de l’auteur
Moshe Zadka est impliqué dans la communauté Linux depuis 1998, en participant à des install parties Linux. Il programme en Python depuis 1999, et a contribué à l’interpréteur Python de base. Moshe a été un DevOps/SRE bien avant que ces termes n’existent, se souciant profondément de la fiabilité des logiciels, de la reproductibilité et d’autres choses semblables. Il a travaillé dans des entreprises aussi petites que trois personnes et aussi grandes que des dizaines de milliers – généralement quelque part où le logiciel rencontre l’administration système…
Voici déjà la traduction du deuxième chapitre de Google Data Collection, l’étude élaborée par l’équipe du professeur Douglas C. Schmidt, spécialiste des systèmes logiciels, chercheur et enseignant à l’Université Vanderbilt.
Il s’agit aujourd’hui d’une expérience d’usage quotidien ordinaire du numérique en milieu urbain et connecté, expérience qu’il n’est pas trop difficile de transposer de ce côté-ci de l’Atlantique, et qui permet de repérer les différentes sortes de collecte opérées par Google, directement ou non.
Traduction Framalang : badumtss qui a contribué à la traduction de l’infographie.
Remerciements particuliers à5.
Afin d’illustrer la multitude des interactions entre Google et un individu, ainsi que l’étendue des informations collectées lors de ces interactions, nous avons réalisé une expérience dans laquelle un chercheur utilise un périphérique Android1 pendant les activités d’une journée.
Afin d’éviter que des informations d’un utilisateur précédent ne soient associées au téléphone mobile, celui-ci a été réinitialisé aux valeurs d’usine2 et configuré comme un téléphone neuf 3. Un nouveau compte Google a été créé (nom d’utilisatrice : « Jane »), afin que Google n’ait pas de connaissances antérieures sur cette utilisatrice et qu’il n’ait pas associé de centres d’intérêts publicitaires à son compte. Le chercheur a passé une journée normale en utilisant son téléphone avec son nouveau compte Google.
6.
Les données collectées par Google ont été relevées par deux outils fournis par Google : « Mon activité » 4 et « Télécharger vos données » 5. L’outil « Mon activité » montre les données collectées par Google grâce à toute activité liée aux recherches, lors de l’utilisation des applications Google (i.e Youtube, Google Maps, Google assistant), par les visites sur des pages web tierces (lorsqu’on est connecté à Chrome), et les clics sur les publicités. L’outil « Télécharger vos données » fournit une information structurée concernant l’historique de toutes les données collectées par les applications Google (i.e cela contient tous les anciens courriels sur Gmail, toutes les recherches, l’ensemble des localisations et les vidéos YouTube consultées). Nous avons synthétisé les données collectées et nous les avons utilisées pour représenter les informations sur les événements clés dans l’infographie ci-dessous : « Un jour dans la vie » de l’utilisateur “Jane”.
7.
Pour l’activité détaillée dans la figure 1, mais également dans le reste du document, les données collectées sont classées en deux grands groupes : actives et passives. Les données actives sont des données échangées directement entre l’utilisateur et un produit Google, là où les données passives sont définies comme une information transmise en arrière-plan sans notification évidente pour l’utilisateur. Par exemple, une collecte active de données est déclenchée lorsque Jane saisit un mot-clé dans l’outil de recherche et que cette requête est enregistrée par Google. Un exemple de collecte de données passives est l’envoi de la localisation de Jane à Google suite à l’enregistrement d’une requête.
8.
L’analyse des points de contact clés durant une journée normale dans la vie de Jane suggère que le nombre de données passives transmises est deux fois plus grand que le nombre de données actives (une décomposition détaillée des caractéristiques des données actives et passives est fournie dans le tableau qui figure en appendice, page 37 du document original).
9.
Google analyse les données collectées pour déterminer les centres d’intérêt des utilisateurs et utilisatrices, qu’il utilise ensuite pour les cibler avec des publicités adaptées. Par exemple, Google fournit une liste d’intérêts qu’il a déduits de l’activité d’un utilisateur, que l’on peut consulter sur la page « Les sujets qui vous intéressent » de la page de « Personnalisation des annonces » de Google 6. La figure 2 ci-dessous montre la liste que Google a associée avec le compte de Jane après une journée d’activité. Au total, Google a attribué 18 centres d’intérêts à Jane, dont 8 (entourés par une bordure rouge) qui correspondent précisément aux utilisations et activités de Jane7
10.
Bien que les outils « mon activité » et « Télécharger mes données » soient utiles pour estimer la quantité de données actives collectées lors des interactions d’un utilisateur avec les produits Google, ils ne dessinent pas une image complète de l’ampleur et de l’échelle de la collecte de données de Google. Comprendre cela requiert un passage en revue détaillé des clauses d’utilisation des produits en ce qui concerne la vie privée mais également l’analyse du trafic de données envoyé aux serveurs de Google pendant une session d’utilisation par un utilisateur de ces services. Les résultats de cette analyse sont présentés plus loin dans ce rapport.
Comme chaque lundi, un coup d’œil dans le rétroviseur pour découvrir les informations que vous avez peut-être ratées la semaine dernière.
L’approche autoritaire de la Chine se répand de plus en plus. Le Venezuela utiliserait la technologie chinoise pour créer son propre score de crédit social. Le gouvernement saoudien a surveillé Twitter pour identifier et punir les dissidents politiques – un effort dans lequel la société de conseil McKinsey pourrait avoir joué un rôle (peut-être par inadvertance). Les gouvernements mèneront la prochaine guerre froide avec la technologie, en grande partie contre leurs propres citoyens.
Il est surprenant de constater que de telles données sont en vente libre sur le web public. On s’attendrait plutôt à les trouver sur des marketplaces du Deep Web. Toutefois, USDate affirme que l’offre est totalement légale, et que les propriétaires de ces données ont donné leur permission en acceptant les conditions d’utilisation des différents sites de rencontre.
Pour l’ONG Tactical Tech, les internautes doivent se rendre compte que leur confidentialité est devenue une monnaie d’échange. Le modèle économique des applications gratuites repose sur le commerce de données personnelles, et Tactical Tech considère qu’il s’agit d’une forme moderne d’exploitation. Selon elle, il n’y a qu’en prenant conscience de cette réalité que les individus pourront lutter.
Si me faire livrer à domicile des machines de vote a été d’une simplicité choquante, il s’est avéré encore plus simple d’entrer à l’intérieur. Les vis « inviolables » ne fonctionnaient pas, tout le matériel informatique était encore intact et les disques durs n’avaient pas été effacés. Les informations que j’ai trouvées sur les disques, y compris concernant les candidats, les circonscriptions et le nombre de votes exprimés sur la machine, n’étaient pas chiffrées. Pire encore, les étiquettes « Property Of » du gouvernement étaient encore apposées, ce qui signifie que quelqu’un avait vendu en ligne, pas cher et sans conséquences, des biens du gouvernement contenant plein de données de localisation et d’informations sur les électeurs.
Ce logiciel gratuit, open source, et certainement pas approuvé par la FDA (Food and Drug Administration), est le produit de milliers d’heures de piratage et de développement par un seul développeur australien nommé Mark Watkins, qui a aidé des milliers de patients souffrant d’apnée du sommeil à reprendre le contrôle de leur traitement sur des médecins surchargés et peu investis. Le logiciel permet aux patients d’accéder aux données sur leur sommeil qui sont déjà générées par leurs appareils CPAP, mais qui restent généralement inaccessibles, cachées par des formats de données propriétaires qui ne peuvent être lus que par des utilisateurs autorisés (médecins) sur des logiciels propriétaires que les patients ne peuvent souvent pas acheter ou télécharger.
[…]
Les DRM et mesures de protection technique mis en œuvre pour empêcher les utilisateurs d’accéder à leurs propres appareils sont devenues courantes dans un grand nombre d’industries ; le problème auquel sont confrontés les utilisateurs de CPAP est similaire à celui auquel sont confrontés les agriculteurs qui veulent réparer leurs tracteurs John Deere, les propriétaires de machines à café Keurig qui ne préparent que des capsules de café autorisées et les professionnels indépendants de la réparation électronique qui sont de plus en plus bloqués par les iPhones, MacBooks, serveurs, systèmes de climatisation, aspirateurs et autres appareils IOT.
Je ne vous cache pas ma frustration : cela fait des années qu’avec des camarades libristes, on explique sur tous les tons aux gens qu’ils doivent faire attention à leur vie privée en ligne, qu’ils ne doivent pas poster n’importe quelle photo, que leurs comptes de réseaux sociaux ne doivent pas nécessairement être publics, sans grand résultat. En 5 minutes, Gérald Darmanin a réussi là où nous avons échoué pendant des années.
Je n’ai pas les chiffres, mais je serais prête à parier une fournée de petits moelleux au chocolat qu’un nombre non négligeable de personnes, suite à cette déclaration, ont verrouillé leurs comptes, fait le tri dans leurs photos voire ont carrément supprimé leurs profils.
On le savait déjà : en France, pour convaincre sur les sujets numériques et encore plus sur la vie privée, il faut parler au portefeuille.
Le T2 est une guillotine qu’Apple maintient au-dessus des propriétaires de ses produits. C’est parce que c’est la clé pour verrouiller les produits Mac en n’autorisant des pièces de rechange dans la machine que lorsqu’elles proviennent d’une source autorisée ; un processus que la puce T2 vérifie maintenant lors du redémarrage après réparation.
Les enquêteurs ont indiqué qu’ils avaient identifié la « collecte à grande échelle et discrète de données personnelles » grâce aux capacités intégrées de télémétrie d’Office. Ils disent aussi que cette collecte de données réalisée par Microsoft est effectuée sans en informer correctement les utilisateurs.[…] Microsoft a essayé de rendre Office conforme au RGPD en stockant les documents Office des utilisateurs de l’UE sur des serveurs situés dans l’UE. Mais le rapport constate que le système de collecte des données de télémétrie envoyait les données des utilisateurs néerlandais aux serveurs américains. De quoi rendre possible la saisie de ces informations par les autorités américaines.
Le gouvernement néerlandais est extrêmement inquiet de cette situation parce que des informations sensibles liées au gouvernement néerlandais auraient pu être collectées dans le système de collecte de données de télémesure. Et auraient pu être stockées sur ces serveurs situés aux Etats-Unis. Le gouvernement néerlandais utilise des applications Office sur plus de 300 000 ordinateurs, selon les dernières données publiques.
Il y a deux principales menaces. La première, c’est la question de la sécurité et du cyberpiratage du fichier en lui-même. Pour une raison simple : quand on a des bases de données à ce point centralisées, avec des données à ce point sensibles sur autant de personnes, ça devient une cible privilégiée très vite. Le Conseil d’Etat a fait valoir que les failles de sécurité pointées par les auteurs des recours auraient été corrigées. La preuve reste à faire. Et comme tout système de sécurité, dès l’instant où il y a une correction on trouve une nouvelle faille. C’est une course à l’échalote avec les pirates. Il n’y a aucune réelle garantie quant à la sécurité.
Le second problème, le plus dangereux selon moi, c’est la question des dérives potentielles. La finalité d’aujourd’hui n’est potentiellement pas la finalité de demain. Le texte juridiquement est flou et c’est simple d’amender le décret. Rien ne nous dit que demain entre les mains d’un gouvernement un peu plus dur, la finalité ne soit pas la surveillance massive pour un Etat autoritaire policier.
Voir aussi : « Face aux Gafa, Emmanuel Macron tient le discours des faibles » (usbeketrica.com)
S’il n’y a pas d’intimité, il y aura des pressions pour que les choses changent. Certaines personnes reconnaîtront que leur moralité n’est pas nécessairement la moralité de tout le monde – et que c’est bien ainsi.
Mais d’autres commenceront à exiger des changements législatifs, ou à utiliser des moyens moins légaux et plus violents, pour forcer les autres à se conformer à leur idée de la moralité.
[…] Pour que les normes sociales changent, les gens doivent s’écarter de ces normes héritées du passé. Ils ont besoin de l’espace nécessaire pour essayer d’autres modes de vie sans risquer l’arrestation ou d’être ostracisés socialement. […] Les gens doivent pouvoir faire des choses que les autres trouvent déplaisantes, voire immorales. La minorité a besoin d’être protégée de la tyrannie de la majorité.
C’est l’intimité qui rend tout cela possible. Elle favorise le progrès social en donnant ce peu d’espace pour expérimenter à l’abri de l’œil vigilant de la majorité. Même si vous n’êtes pas personnellement refroidi par l’omniprésence de la surveillance, la société dans laquelle vous vivez l’est, et les coûts personnels sont sans équivoque.
Bien que Google et Facebook permettent aux utilisateurs de décider de ne pas visionner les annonces ciblées, il est impossible de décider de ne pas être suivi ou inclus dans les ensembles de données utilisés pour créer des algorithmes de ciblage. […] “vous pouvez supposer que si vous ne voyez pas une publicité ciblée pour des chaussures, ils ont cessé de vous tracer, mais ce n’est pas du tout le cas. Il existe des moyens technologiques pour prévenir un certain niveau de traçage, mais c’est comme prendre de l’aspirine pour guérir un cancer, cela peut vous aider à vous sentir un peu mieux pendant quelques heures, mais vous êtes toujours aux prises avec le cancer. La seule façon d’éradiquer le cancer de la publicité ciblée est la réglementation : l’Europe mène actuellement une superbe expérience avec le RGPD, que le reste du monde est en train d’observer.”
L’instrument est une chose, son maniement en est une autre. Le support compte finalement moins que la latitude qui lui est permise. Craint-on que l’intelligence artificielle n’en vienne bientôt à dépasser l’intelligence humaine ? Celle-ci ne pourra alors s’en prendre qu’à elle-même, à force de déléguer à la première comme l’apprenti sorcier à ses balais.
Retrouvez les revues de web précédentes dans la catégorie Libre Veille du Framablog.
Les articles, commentaires et autres images qui composent ces « Khrys’presso » n’engagent que moi (Khrys).
Mastodon a déjà deux ans, et il est toujours vivant, n’en déplaise aux oiseaux de mauvais augure. Il est inadéquat de le comparer aux plateformes sociales, et Peter 0’Shaughnessy nous explique bien pourquoi…
Mastodon a maintenant plus de deux ans et (pour emprunter une expression à Terry Pratchett), il n’est toujours pas mort. D’une manière ou d’une autre, il a réussi à défier les premiers critiques qui disaient qu’il « ne survivrait pas » et qu’il était « mort dans l’œuf ». Même certains de ceux qui postaient sur Mastodon à ses débuts doutaient de sa longévité :
Pari : le lien vers ce tweet ne fonctionnera plus dans deux ans – @jaffathecake@mastodon.social
Plus récemment, un article sur l’écosystème plus vaste qui comprend Mastodon, appelé La Fediverse, a fait la une de Hacker News : Qu’est-ce que ActivityPub, et comment changera-t-il l’Internet ? par Jeremy Dormitzer. C’est un bon argument en faveur de l’importance de la norme ActivityPub, sur laquelle reposent Mastodon et d’autres plateformes sociales. Cependant, il commet toujours la même erreur que ces premiers prophètes de malheur :
Le plus gros problème à l’heure actuelle, c’est l’adoption par les utilisateurs. Le réseau ActivityPub n’est viable que si les gens l’utilisent, et pour concurrencer de manière significative Facebook et Twitter, nous avons besoin de beaucoup de gens pour l’utiliser. Pour rivaliser avec les grands, nous avons besoin de beaucoup d’argent…
Des arguments similaires ont été présentés dans de nombreux articles au cours des derniers mois. Ils impliquent :
Mais tout cela est faux. Voici pourquoi…
Nous sommes tellement conditionnés de nos jours par le monde du capital-risque et des startups que nous pensons intuitivement que toutes les nouvelles entreprises technologiques doivent réussir ou faire faillite. Mais ce n’est pas la nature du modèle économique qui se cache derrière le Fediverse, qui est déjà durable, tout en continuant de fonctionner comme si de rien n’était.
Nous devons cesser de juger la Fediverse comme s’il s’agissait d’une startup de la Silicon Valley en concurrence avec Twitter et Facebook.
Jeremy a raison de dire que la plupart des instances sont « créées et administrées par des bénévoles avec des budgets minuscules », mais il implique que cela doit changer, alors que la plupart des administrateurs et utilisateurs de Mastodon que je connais sont très satisfaits de ce modèle, qui nous libère des intérêts acquis et contradictoires des régies publicitaires.
C’est facile à dire pour moi, car je n’héberge pas ma propre instance et mon administrateur a gentiment refusé les offres de dons jusqu’ici. Cependant, dans la plupart des cas, il semble que tout se passe très bien, la plupart du temps grâce au financement participatif. Même si certaines instances ont été fermées à un moment donné (et c’est malheureusement le cas), il y en a d’autres qui se présentent à leur place. Malgré les fortes fluctuations à chaque nouvelle vague d’utilisateurs venant de Twitter, la trajectoire globale est à la hausse, et c’est ce qui importe — pas la vitesse de la croissance, ni l’atteinte d’un certain niveau de masse critique. Michael Mahemoff l’a bien dit :
« Mastodon est déjà « assez bon » dans sa forme initiale pour satisfaire plusieurs besoins de niche (les personnes qui veulent plus ou moins de modération ou des critères différents de modération, celles qui ne veulent pas de publicités, celles qui veulent des participant⋅e⋅s qui sont libres d’innover, celles qui veulent posséder et/ou héberger leur propre contenu, etc.). Comme Mastodon a un modèle de mécénat durable, il peut se développer au fil du temps et être capable de continuer à innover. »
En fait, si Mastodon se développait trop rapidement, cela pourrait avoir des conséquences plus négatives que positives. La croissance progressive permet aux instances existantes de mieux faire face à la charge et permet à de nouvelles instances d’émerger et de faire face à une partie du flux.
Lorsque j’ai rejoint Mastodon pour la première fois, j’ai été enthousiasmé par chaque nouvelle vague d’utilisateurs et utilisatrices venant de Twitter. Je voulais prêcher à ce sujet à autant de gens que possible et essayer d’amener autant d’amis que possible à « déménager ». Au bout d’un moment, j’ai pris conscience que je me concentrais trop sur la comparaison avec Twitter et que j’essayais d’en faire un remplaçant de Twitter. En fait, j’avais déjà un réseau précieux là-bas et suffisamment de raisons de le visiter régulièrement, même si j’ai continué à utiliser Twitter aussi.
Mastodon s’articule autour des communautés. Ces communautés peuvent être des réseaux spécialisés selon les sujets qui vous intéressent. Vous n’avez pas besoin de tous vos amis pour être au sein de ces communautés, pour trouver des gens intéressants, du contenu utile et des interactions intéressantes.
Comme Vee Satayamas l’a noté, si vous êtes un utilisateur de Twitter, vous le trouverez peut-être utile même si peu de membres de votre famille ou d’amis réels sont présents. Vous n’avez pas besoin que tout le monde soit disponible sur chaque réseau. J’ai récemment quitté Facebook et j’ai quand même pu entrer en contact avec mes amis, par courriel ou par texto. Ce serait bien mieux si davantage de mes amis étaient sur Mastodon, mais ce n’est pas un gros problème.
En réalité, il y a quelque chose de positif dans la petite taille de mon réseau sur Mastodon. Je peux suivre ma chronologie, mon « fil », sans me sentir dépassé. C’est moins stressant d’y poster, comparé à Twitter, où chaque message que vous envoyez risque d’être republié par une horde géante ! Je suppose que c’est comparable à l’effet ressenti par les YouTubers, tel que détaillé dans cet intéressant article du Guardian, qui cite Matt Lees :
« Le cerveau humain n’est pas vraiment conçu pour interagir avec des centaines de personnes chaque jour… Lorsque des milliers de personnes vous envoient des commentaires directs sur votre travail, vous avez vraiment l’impression que quelque chose vous vient à l’esprit. Nous ne sommes pas faits pour gérer l’empathie et la sympathie à cette échelle. »
Pour moi, Mastodon offre un moyen terme heureux entre les conversations intimes des groupes WhatsApp, par exemple, et le potentiel sans limites de Twitter pour découvrir de nouvelles personnes et de nouveaux contenus.
D’après mon expérience, la plupart des utilisateurs actifs de Mastodon ne veulent pas qu’il ressemble davantage à Twitter — et ne ressentent pas le besoin que tous ceux qui sont sur Twitter les rejoignent. Par exemple, ces personnes apprécient le fait qu’il n’y a pas de publicitaires et très peu de marques. Pour les gens qui ne s’inquiètent que de leur « influence », alors c’est sûr, Mastodon n’aura pas autant de valeur. Mais la plupart de celles et ceux qui sont sur Mastodon ne regretteront pas trop de ce genre de personnes venues de Twitter !
Nous devons cesser de considérer Mastodon comme un substitut potentiel de Twitter. C’est différent, et c’est délibéré. Je comprends qu’on se plaise à imaginer que la Fediverse pourrait un jour écraser Twitter et Facebook, mais je ne pense pas que ce soit réaliste (du moins pas dans un avenir proche). Je pense que ce sera toujours l’outsider et c’est très bien ainsi, d’une certaine façon.
La Fediverse ne gagne pas seulement de la valeur à partir de la quantité d’utilisateurs, elle en gagne aussi à partir de la quantité de services. S’appuyer sur le standard ActivityPub implique que nous pouvons utiliser Mastodon, PeerTube (un service semblable à YouTube), PixelFed (un service semblable à Instagram) et beaucoup d’autres, qui peuvent tous interopérer. Cela donne à la Fediverse un avantage d’échelle par rapport aux plateformes propriétaires closes. C’est un point que l’article de Jeremy a bien fait ressortir :
« Parce qu’il parle le même « langage », un utilisateur de Mastodon peut suivre un utilisateur de PeerTube. Si l’utilisateur de PeerTube envoie une nouvelle vidéo, elle apparaîtra dans le flux de l’utilisateur Mastodon. L’utilisatrice de Mastodon peut commenter la vidéo PeerTube directement depuis Mastodon. Pensez-y une seconde. Toute application qui implémente ActivityPub fait partie d’un réseau social étendu, qui conserve le choix de l’utilisateur et pulvérise les jardins propriétaires clos. Imaginez que vous puissiez vous connecter à Facebook et voir les messages de vos amis sur Instagram et Twitter, sans avoir besoin de compte Instagram ni de compte Twitter. »
Cela signifie également que si nous avons l’impression que le service que nous utilisons ne va pas dans la direction qui nous convient (coucou, utilisateurs de Twitter 👋), alors nous pouvons passer à une autre instance et conserver l’accès à l’écosystème global.
La Fediverse s’accroît et c’est une bonne chose. Mais elle n’a pas besoin de davantage d’utilisatrices. Transmettre l’idée qu’on pourrait échouer sans une migration massive à partir d’autres plateformes sociales est une perspective trompeuse. Et défendre cette idée donnerait aux gens la fausse impression, lorsqu’ils rejoindront ce réseau social, qu’on devrait rechercher la quantité d’utilisateurs et utilisatrices, plutôt que la qualité de l’expérience.
Alors ne comptons pas trop le nombre d’inscrit⋅e⋅s sur Mastodon. Allons doucement en le comparant à Twitter. Arrêtons de le traiter comme s’il s’agissait d’une situation à la Highlander où « il n’y a de la place que pour un seul ». Et commençons à profiter de la Fediverse pour ce qu’elle est — quelque chose de différent.
Merci à Jeremy Dormit d’avoir été très gentil avec moi en critiquant cette partie de son billet de blog (qui m’a beaucoup plu par ailleurs) – voici sa réponse à mon pouet qui a mené à ce billet. Merci aussi à mes anciens collègues de Samsung Internet qui ont jeté un coup d’œil à une version antérieure de ce post.