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[PERSO] Syrie : Hypocrisie générale.

vendredi 30 août 2013 à 13:34

Que ça soit clair, ce billet est un point de vue entièrement personnel, si vous n’aimez pas ça, vous avez le droit d’aller lire autre chose ailleurs.

Je profite donc de ce billet pour faire le point sur quelques sujets qui m’agacent. Qu’on se le dise au passage, vous avez le droit de ne pas être d’accord, de penser ce que vous voulez penser, de danser nus enroulés dans du jambon autour des douze statuettes de Gladeulfeurha et de faire partie d’un complot de chats qui veulent dominer le monde.

Le premier point que je souhaite aborder est d’actualité puisqu’il s’agit de la Syrie. Ou plutôt des potentielles actions que nos gouvernements souhaitent mener à grand coup de bombes. Jeudi 29 aout, le premier ministre anglais, David Cameron, s’est mangé un refus d’entrer en guerre du parlement anglais, refus qui démontre que tout n’est pas si clair que ça dans, tant pour eux que pour l’opinion publique. Le président des États-Unis d’Amérique, quant à lui, va réfléchir à une potentielle intervention unilatérale des États-Unis, « dans l’intérêt des États-Unis ». La France, elle, bahh…. surprise. Je n’ai pas encore vu une opinion tranchée de notre président.

Personnellement, je suis absolument contre une intervention de ce type en Syrie.

Pour expliquer pourquoi, je vais planter un peu le décor : la Syrie est un pays en guerre civile, ce qui veut dire que ce n’est pas seulement une dictature, mais des gens, des syriens, qui s’entretuent les uns les autres, l’opinion du peuple sur Bachar Al-Assad est partagée, une part non négligeable de la population l’aime, l’autre part veut le voir tomber, certains veulent sa mort, d’autres qu’il soit jugé …

Ce n’est pas aussi clair que les « épisodes » Tunisie, Egypte et Libye où, pour résumer rapidement, la quasi totalité du peuple était unie contre le dictateur <ajoutez le nom d’un dictateur ici>.

Je ne suis pas pour une intervention à grand coup de bombes parce que, aussi évident que cela puisse-t-être, les bombes, c’est fait pour tuer.

Plus de 100 000 morts. 100 000. Est-ce que le sang n’a pas déjà assez coulé ?

Il faut rajouter, à ce manque de clarté, le flou de la rébellion. D’un côté il y a le peuple, celui qui se bat dans la rue pour manger, pour survivre, ces syriens que j’admire et qui méritent le plus grand respect de tous. Ces syriens qui arrivent à garder le sourire lorsqu’on parle avec eux et qui arrivent à positiver alors que j’en suis parfaitement incapable…

Puis il y a les autres. Les autres rebelles, pas forcément syriens, pas forcément rebelles d’ailleurs. Des mercenaires ou des partisans de groupes dont les actions sont à déplorer.

L’ASL, l’Armée Syrienne Libre, en est remplie.

Ces gens-là sont tout aussi dangereux que le gouvernement d’Al-Assad, parfois ils tuent pour tuer, parfois ils tuent des civils qui rejettent leurs actions, souvent ils se moquent des « dommage collatéraux » que peuvent représenter quelques vies.

Intervenir en Syrie, avec des bombes hein, c’est prendre parti pour un côté qui est soit mal, soit mal. Ce n’est ni bon, ni à faire et dans tous les cas, le peuple qui n’a rien demandé va se prendre des bombes en pleine face.

J’aurais aimé voir une intervention oui, mais pour un désarmement total de la région, de l’ASL, comme des pro Al-Assad, comme de l’armée. J’aurais aimé voir la communauté internationale réagir en proposant de l’aide, des moyens humanitaires… J’aurais aimé une communauté internationale qui agissait pour vraiment stopper Al-Assad, plutôt que de lui tapoter sur les doigts.

Au lieu de ça, des groupes militaires ont fait le déplacement en Syrie, des gouvernements ont fourni des armes, tantôt à un côté pour certains pays, tantôt à l’autre côté pour d’autres pays…

Une arme, et peu importe qui la tient, « bon » comme « méchant », c’est fait pour tuer.

La communauté internationale n’est pas bougé, ou très peu, alors qu’elle a très largement les moyens de le faire. Des associations se chargent d’envoyer des médicaments à l’arrache dans le pays, Médecins sans Frontière galère pour réussir à mettre un pied dans les zones militarisées, armée comme ASL… et ailleurs, des gens en costume trois pièces proposent d’envoyer des bombes sur la gueule d’un dictateur et de son peuple.

La vraie raison ce n’est pas la chute d’Al-Assad, c’est le contrôle de certains intérêts économiques ou stratégiques. C’est encore plus gerbant de savoir que tout ceci repose sur la « stratégie, l’économie, l’argent ».

Ensuite, parlons peu mais parlons bien : vous et votre putain d’indignation à géométrie variable.

Le conflit syrien ne date pas d’hier, ça fait plus de deux ans. Deux ans, c’est long.

  1. Le conflit a démarré : personne ne s’est indigné.
  2. Le gouvernement a commencé à balancer des bombes sur sa propre population : personne ne s’est indigné.
  3. Des catholiques se sont fait décapiter, des églises bruler, mais personne ne s’est indigné. Sauf des syriens, pas forcément catholiques, qui ont préféré protéger ce qu’ils pouvaient encore protéger.
  4. 100 000 morts. Le chiffre tombe. Tout le monde trouve ça horrible… puis ferme la page avant de retourner sur Facebook.
  5. Des armes chimiques.

DES ARMES CHIMIQUES !

DES ARMES CHIMIQUES !

Et là, magie. Nos gouvernement se réveillent, les gens s’indignent, des armes chimiques, « oh mon dieu, c’est horrible ! »

Oui, ça l’est. Ça l’est tout autant qu’une réaction pour réagir, le temps de cliquer sur un tweet, le temps de lire un article.

Hop, on s’indigne beaucoup d’un coup, comme ça on montre qu’on est humain, puis que c’est mal hein. Puis on ferme la page.

Nos gouvernements s’indignent parce que des protocoles sont signés et interdisent l’utilisation d’armes chimiques. Al-Assad le sait très bien d’ailleurs, ce n’est pas pour rien qu’il s’efforce à démentir cette utilisation de gaz…

Nos gouvernements trouvent une brèche pour justifier l’attaque de la Syrie et s’enfoncent dedans tête baissée, Cameron en est l’exemple. Il ne s’attendait sans doute pas au rejet de sa proposition d’intervention militaire…

Bref, indignation à géométrie variable, intérêts économiques, toussa… C’est assez gerbant. Comme la réaction de celles et ceux qui veulent cette intervention de nos gouvernements, comme la réaction de ceux qui, au fond de leur canapé, crient un coup avant de zapper.

Et qu’on ne vienne pas me dire que je n’ai aucune légitimité à m’exprimer sur le sujet syrien.

PS : si vous vous sentez blessé(e)s, vous êtes peut-être dans ce « tout le monde », désolé.

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Est-ce que ce monde est sérieux ?

mardi 20 août 2013 à 19:03

Dans la nuit du 20 aout 2013, j’ai appris que le GCHQ avait fait pression sur « The Guardian », journal presque mythique, inscrit dans le code génétique du Royaume-Uni…d’aussi loin que je m’en souvienne.

Pression pour détruire les documents relatifs à « l’affaire Snowden ».

Il semblerait donc qu’un gouvernement sans aucun rapport direct avec la NSA et les Etats-Unis ait pris ses libertés quant à faire pression sur un organisme de presse, un journaliste, un rédacteur en chef, le compagnon d’un journaliste…

Petites explications si vous n’avez pas tout suivi :

  1. Edward Snowden, que je ne vais pas présenter, a confié une partie non négligeable de ses documents au journal « The Guardian ».
  2. Gleen Greenwald, un journaliste pour le Guardian, a présenté quelques documents transmis par Edward Snowden dans le journal.
  3. David Miranda, le compagnon de Greenwald, a été retenu pendant presque 9 heures dans l’aéroport d’Heathrow, à Londres. Il a été relâché mais sans ses effets personnels en relation avec tout ce qui contient une puce ou de la mémoire. Tout ceci grâce à l’article 7 du Terrorism Act, qui autorise les forces de l’ordre du Royaume-Uni à « arrêter, fouiller et détenir n’importe quel voyageur dans les ports, les aéroports et aux frontières, afin de déterminer s’il s’agit d’un terroriste. »

Les suspects peuvent être détenus pour une durée maximale de neuf heures, au cours desquelles ils n’ont le droit ni de consulter un avocat ni de se taire, sous peine de prison. »

David Miranda arrêté, reste la question du « pourquoi ? ».

La vraie raison de cette arrestation est sans doute là. Le Royaume-Uni veut envoyer un message à celles et ceux qui disposent des informations que Snowden a pu donner ici et là. Il veut leur faire comprendre qu’il ne plaisante pas avec ces fuites et qu’il est capable d’utiliser sa propre loi à des fins détournées, afin d’effrayer celles et ceux en capacité d’oser faire quelque chose.

C’est donc un fait, le Royaume-Uni n’est pas une démocratie, ses méthodes sont celles d’un régime totalitaire.

Je vais vous dire quelque chose : lorsque je vois tout ceci, ce n’est pas la peur qui m’envahit, c’est la détermination et, lorsque je vois la réaction de nos gouvernements, je me dis que j’ai raison.

Ce n’est pas tant le pouvoir que la peur qui fait qu’ils agissent ainsi.

Depuis toujours nos gouvernements espionnent, s’espionnent, nous espionnent, s’échangent des données, surveillent la population… Depuis au moins aussi longtemps, ils agissent pour récupérer des renseignements, soit par la récolte en source ouverte, soit par des moyens détournés. Et depuis toujours, ils savent rester relativement discrets. Pour moi, la pléthore d’erreurs commises, les scandales, les arrestations injustifiées, c’est une démonstration de la peur qui s’empare des gouvernements. Et c’est très bien, parce qu’il n’est pas question que ça s’arrête, un petit oiseau m’a raconté qu’il restait encore beaucoup d’informations à publier.

Mais revenons à nos espions, nous parlions tout à l’heure de la destruction de documents…

Le Guardian explique donc que le GCHQ l’a forcé à détruire des documents fournis par Edward Snowden.

Je vous invite à lire l’article du Guardian et celui-ci si vous préférez la langue de Molière.

La très sérieuse question qui apparait au grand jour ici est : et la liberté de la presse ?

Il faut être naïf pour penser que nos gouvernements ne font jamais pression sur des journalistes, n’utilisent pas la peur et la violence afin d’obtenir ce qu’ils souhaitent… il est en revanche plus rare de le voir, écrit noir sur blanc, dans un journal victime de ces pressions.

Donc, liberté de la presse dans un premier temps… et la vôtre ?

Oui, la vôtre.

Celle de vous informer. Celle de vous informer sur ce qui vous concerne, de près ou de loin, tout ceci vous concerne.

J’en vois déjà me répondre « je n’ai rien à cacher », à ces derniers je conseille cette lecture et cette vidéo, même si je ne suis pas un excellent orateur.

Maintenant, il va falloir se poser les bonnes questions. Les questions qui dérangent.

Qui est coupable de tout ceci ? Qui est responsable ? Nos gouvernements ? Snowden ? La NSA ?

Sans doute un peut tout le monde. Nos gouvernements sont responsables de cette envie de tout contrôler sur tout le monde. Snowden d’avoir fait éclater la vérité au grand jour et, pour ceci, on ne peut que le remercier. La NSA est les autres agences de renseignement sont tout autant responsables que nos gouvernements.

Mais il existe un autre coupable de tout ceci, dont personne ne parle : nous.

Nous sommes responsables de tout ceci car nous avons laissé le gouvernement agir, sans se soucier de ce qu’il faisait.

Nous notre seule réponse à tout ceci était « je n’ai rien à cacher », donnant les pleins pouvoirs à un gouvernement qui, pour vous « protéger », viole encore et encore votre vie privée.

Nous, vous, toi derrière l’écran, sommes responsables de tout ceci, au moins en partie. Non pas par nos actions, mais par notre inertie et notre confiance aveugle en ces gouvernements qui prétextent vouloir votre bien.

C’est désagréable à lire et ça l’est encore plus à écrire mais la réalité est ainsi faite. Nos gouvernements nous observent mais nous devrions, nous aussi, observer nos gouvernements.

Nous réclamons la transparence, le respect de la vie privée, mais nous nous contentons d’outils et de réseaux, le plus souvent fermés, auxquels nous ne comprenons généralement pas grand-chose…

C’est très paradoxal, ça revient à déclarer sur Facebook qu’on souhaite protéger sa vie privée alors qu’il suffit de lire pour se rendre compte que s’inscrire sur ce site, c’est offrir son intimité à qui la veut…

Le scandale de PRISM permet de montrer au grand jour ce qui existe depuis des années, allons-nous enfin décider de faire changer les choses ? J’y crois, j’ai envie d’y croire, mais concrètement je n’ai que peu d’espoir.

Qu’allez-vous faire ? Continuer à vous indigner puis reprendre le contrôle de votre vie privée, ou agir pour faire changer les choses ?

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Vous n’avez peut-être « rien à cacher » mais vous avez quelque chose à craindre.

lundi 5 août 2013 à 22:20

L’article original provient du site MSNBC.com.

Au vu des récentes informations sur la NSA et l’espionnage des américains, j’ai été particulièrement choqué par l’argument « si vous n’avez rien à cacher, vous n’avez rien à craindre. »

Au premier abord, cet argument semble solide – après tout, si le gouvernement ne fait que mener une surveillance antiterroriste, les « non-terroristes » ne devraient pas être concernés non ? Mais si vous regardez de plus près, vous allez vous rendre compte que cette idée n’est pas sans failles.

Le « je n’ai rien à cacher » suggère, à tort, que la vie privée, l’intimité, ne sont les désirs que des seuls criminels. En fait, nous faisons énormément de choses en privé – chanter sous la douche, faire l’amour, se confier à sa famille, à ses amis – qui ne sont ni mauvaises, ni illégales. Qui ne serait pas gêné par l’exposition de ces détails les plus intimes de nos vies privées?

Les barrières et les rideaux sont des manières de conserver son intimité et non des choses révélatrices d’un comportement criminel. L’intimité est une chose fondamentale dans toute vie.

Ce « je n’ai rien à cacher » est aussi un grand pas en arrière lorsque ce dernier suggère que nous sommes tous suspects, jusqu’à preuve du contraire. Notre système judiciaire nous considère innocents jusqu’à ce que la culpabilité soit établie. Ceci s’applique chaque jour – autant qu’il s’applique dans une cour de justice. La tâche de démontrer qu’il existe une bonne raison d’être suspect incombe au gouvernement et non l’inverse. La rengaine « rien à cacher » ne devrait être ni l’excuse ni le prétexte des gouvernements pour justifier la surveillance de masse.

Même si vous pensez que vous n’avez rien à cacher, vous avez, en fait, quelque chose à craindre. Vous devriez vous inquiéter pour vous-même. Avec une façon de présenter les choses qui fait froid dans le dos, Kafka illustre ce problème dans « Le Procès« , la perspective d’un gouvernement vous poursuivant sans justifications est terrifiante.

Vous devriez également vous inquiéter pour notre société. Vivre sous l’œil permanent d’une surveillance de masse peut entrainer des préjudices sociaux durables : si les citoyens sont un peu plus craintifs, un peu moins enclins à collaborer les uns avec les autres, un peu moins rebelles – tout ceci peut refermer ce qui était autrefois une société ouverte.

La surveillance par nos gouvernements porte directement préjudice à d’autres – pensez aux militants des droits de l’Homme ou aux journalistes qui doivent travailler avec des personnes qui ont peur de cette surveillance, non pas à cause de quelque chose qu’ils auraient pu mal faire, mais pour des raisons politiques. Imaginez un groupe libéral qui déclare qu’au vu du récent scandale de l’IRS, ils n’ont rien à craindre car l’IRS ne s’intéresse qu’aux conservateurs. Cet argument serait imprécis et ignorerait totalement les risques évidents d’un gouvernement qui va trop loin. (Besoin de preuves ? l’IRS a admis qu’ils observaient aussi les libéraux.)

Vous êtes peut-être dubitatifs, pas convaincus. Vous êtes certains que vous n’avez et n’aurez jamais rien à cacher. Vous pensez que mes inquiétudes sur ces carcans qui entravent la liberté d’expression et nos principes démocratiques sont exagérées et vous êtes convaincus que ces problèmes d’intimité sont également exagérés, aucune chance que cela vous affecte vous ou notre société de toute façon.

Mais – et c’est la plus importante faille dans ce « rien à craindre, rien à cacher » – comment pouvez-vous en être certains ?

En fait, vous ne savez pas si vous avez quelque chose à craindre ou non parce que vous ne savez pas ce que le gouvernement fait des données qu’il collecte. Si ce gouvernement garde secret ce qu’il collecte sur vous et pourquoi, vous êtes dans l’incapacité de corriger les erreurs potentielles. Et si vous connaissez un tant soit peu notre système judiciaire, vous savez que les erreurs ne sont pas rares.

La transparence est en partie là pour s’assurer que les actions du gouvernement – ses résultats – sont évaluables, mais la transparence, c’est aussi s’assurer que les informations dont dispose le gouvernement – ses sources – sont exactes.

Lorsque ce gouvernement opère en secret, il devient compliqué de savoir quoi que ce soit et d’en être convaincu.

Cependant, il y a bien une chose dont nous pouvons être convaincus : nous avons besoin d’en savoir plus.

Nous avons besoin d’en savoir plus sur les informations que le gouvernement collecte sur des millions d’américains innocents. Nous avons besoin d’en savoir plus sur ces interprétations juridiques secrètes sur lesquelles notre gouvernement se base pour surveiller nos communications. Et nous avons besoin d’en savoir plus sur ce que le gouvernement fait de ces milliards et ces milliards de bits de données qu’il amasse dans ses fichiers. Nous avons besoin de ces réponses car, même si nous n’avons rien à cacher, ça ne signifie pas que nous voulons vivre dans une société ou rien n’est privé.

Traduction faite depuis http://www.aclu.org/blog/national-security/you-may-have-nothing-hide-you-still-have-something-fear

Je précise qu’aucune autorisation n’a été demandée et que cette traduction est de moi, le texte ne l’est pas, j’ai donc désactivé Flattr sur ce post, le principe étant de diffuser l’information.

PS : si vous êtes en train de vous dire « ce n’est pas nous, ça se passe aux États-Unis d’Amérique », alors c’est que vous n’avez pas tout compris.

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Présentation de « The Guardian Project ».

vendredi 2 août 2013 à 20:04

J’avais depuis longtemps envie de parler de l’initiative et du travail de The Guardian Project.

Avant toute chose, une petite présentation s’impose.

The Guardian Project est une initiative qui a débutée en 2009 et qui s’efforce de créer des applications qui protègent un peu plus nos échanges privés sur des équipements Android.

Ce groupe se compose de développeurs qui souhaitent sécuriser nos communications avec un terminal Android, sans pour autant avoir besoin de compétences ultra poussées pour y parvenir. L’idée est de développer des applications simples et efficaces et, point important, open source.

Pour celles ou ceux qui ont passé 20 ans dans un grotte, petit rappel : l’open source est la mise à disposition du code d’une application. C’est une chose bénéfique car on sait comment l’application fonctionne et on peut donc la vérifier, ce qui évite les mauvaises surprise.

Pour faire simple, l’open source c’est la recette de grand-mère pour faire un gâteau au chocolat et l’inverse, le logiciel propriétaire, c’est coca cola. On ne sait pas entièrement et exactement de quoi le Coca-Cola est fait.

The Guardian Project mérite qu’on s’intéresse à eux et à leurs applications. Si vous êtes intéressé(e)s et que vous cherchez un peu plus d’intimité sur votre smartphone, ça peut vous intéresser.

J’ai décidé de vous présenter quelques applications développées par The Guardian Project, c’est parti.

La première des applications est « Orbot », qui permet d’utiliser Tor sur Android. Pour rappel ou présentation, Tor est un réseau acentré qui permet de transmettre des données de façon anonyme. Tor met également à disposition des services « cachés » qui peuvent faire la même chose que les services « non cachés », mais plus lentement. On peut par exemple trouver des sites Web via le réseau Tor (et uniquement via ce réseau), certains sont utiles, d’autres peu fréquentables et d’autres totalement illégaux.

Tor, et c’est là une grande partie de son intérêt, est un outil puissant de contournement de la surveillance et de la censure, le réseau protégeant ses utilisateurs dans une certaine mesure.

 

Orweb est un navigateur qui se veut plus respectueux et protecteur de votre intimité ? Il se combine à Orbot pour fonctionner et  permet de contourner la plupart des restrictions réseaux tout en vous garantissant un anonymat presque total.

Notez que le presque n’est pas lié au développement mais simplement au fait qu’il est impossible d’être 100% anonyme sur Internet, déclarer qu’une solution informatique vous protège à 100% est mensonger.

 

ObscuraCam est une application qui permet d’anonymiser vos images. L’application permet de flouter des visages dans des photos et des vidéos (mais il faut un traitement après coup pour les vidéos et je trouve que le traitement est un peu plus aléatoire).

C’est une application qui reste assez pratique pour masquer des personnes qui ne souhaitent pas être reconnaissables ou qui apparaissent sur vos photos de vacances par exemple.

 

Ostel est un logiciel de chiffrement des communications téléphoniques, il permet donc de passer des appels en ayant la garantie que votre opérateur ou autre ne pourra pas vous espionner.

L’application est disponible sous Android, Iphone, Blackberry, Nokia, Pc, Mac, et Linux, autant dire que la compatibilité est au rendez-vous.

Ostel permet de chiffrer une communication d’un bout à l’autre (end-to-end), cela signifie donc que vous et votre interlocuteur serez les deux seules personnes à pouvoir entendre et comprendre la communication.

Ostel est nécessaire des deux côtés, si vous souhaitez l’utilisez, il faudra donc que votre interlocuteur l’utilise également pour que l’application puisse fonctionner.

 

InTheClear (Panic !) est une application démarrée à l’initiative de The Guardian Project et reprise depuis par SaferMobile. L’application permet en « un clic » d’envoyer un sms d’urgence à des contacts définis au préalable et permet également d’effacer l’ensemble des données d’un téléphone. Il est possible d’éditer le message d’urgence et de choisir ce qui devra être effacé en cas de besoin. Il est enfin possible de faire l’un, ou l’autre, ou les deux d’un coup grâce à un énorme bouton PAN!C.

Cette application peut sembler inutile mais je lui trouve un côté rassurant, s’il se passe quelque chose de grave, si j’ai un accident ou pire, en une pression je peux envoyer un message d’alerte ou effacer totalement mon téléphone. Dans ce genre de situation, nous n’avons pas beaucoup de temps pour réfléchir, ni le temps tout court, InTheClear répond donc à un besoin existant.

J’ai également découvert des applications qui ne sont pas présentes sur le site du projet comme NoteCipher, qui permet de disposer d’un bloc note où les notes sont chiffrées avant d’être stockées, et protégées de facto par une clé de chiffrement.

PixelKnot permet de faire de la stéganographie, c’est-à-dire dissimuler un message dans autre chose, comme une image par exemple. Les utilisateurs de l’application choisissent une image, l’application insère le message secret de l’utilisateur et il faudra l’image et un mot de passe pour retrouver le message caché.

Il existe encore d’autres applications mais elles ont un usage encore plus particulier que PixelKnot, si vous êtes intéressé(e)s, je vous invite donc à les chercher par vous-même.

A l’heure où nous avons la confirmation écrite que quasiment tout est espionné, lu et surveillé, réussir à conserver un peu d’intimité dans ses échanges, messages & Co. devient compliqué pour beaucoup de monde, à moins d’être complètement parano et d’avoir des bases et quelques notions en informatique, sécurité, chiffrement…

The Guardian Project une réponse à tout ceci car c’est une façon simple et efficace de protéger une partie de ses échanges numérique.

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Le Royaume-Uni glisse vers quelque chose de bien pire que la censure.

vendredi 2 août 2013 à 19:51

A moins de vivre dans une grotte, vous avez sans doute entendu et probablement lu énormément de choses sur les propositions très démagogiques du gouvernement britannique, qui souhaite instaurer un filtrage « opt-in »* sur la pornographie.

Je ne vais pas vous faire perdre votre temps en expliquant les nombreuses raisons qui font que ces propositions sont parfaitement absurdes, elles ne permettront pas d’arriver à ce que le gouvernement prétend.

Non, je préfère me concentrer sur quelques indices perturbants sur ce qui pourrait se passer, sur ce qui pourrait arriver, et sur la nécessité de lutter contre ce genre de plan dès maintenant.

L’Open Rights Group a parlé avec les FAI sur ce que les nouvelles dispositions seront dans la pratique, voici ce qu’ils ont trouvés (anglais) :

Le détail le plus important est qu’ils partent du principe que vous souhaitez un filtrage activé sur un contenu très large, à moins que vous décochiez l’option, les filtres seront donc activés. Comme nous l’avons déjà expliqué de nombreuses fois, ce n’est pas juste un filtrage de la « pornographie extrême ».

Voici une liste des sujets susceptibles d’être bloqués par défaut, sauf si vous avez choisi de désactiver le filtrage :

Maintenant, il est important de comprendre que tout ceci n’est pas validé, pas encore du moins… mais ces choix soulèvent la possibilité que l’option par défaut rendra d’énormes parties d’Internet totalement invisibles pour beaucoup de personnes qui n’auront même pas conscience de ce qu’ils ne voient pas (forcément).

Notez que nous parlons ici de millions de sites parfaitement légaux qui seront concernés, sans parler des sites de vente en ligne (je me demande d’ailleurs jusqu’à quel point tout ceci va fera couler les revendeurs en ligne).

L’autre problème majeur est qu’il est facile d’étendre cette catégorie n’importe quand, pour y inclure les « sites politiques indésirables », par exemple… C’est réellement le danger principal de la censure : une fois que c’est enclenché, ça peut être étendu très facilement.

A celles et ceux qui diront – bien que nous ayons déjà  répondus (anglais) – « bah, tu n’as qu’à  activer que ce que tu veux, ou est le problème ? »

Le problème a été succinctement pointé du doigt par Mikko Hypponen sur Twitter, son tweet montre une représentation d’une case d’option permettant d’accéder à  des contenus extrémistes et terroristes, avec une toute petite mention à  la fin :

(Votre choix pourra être utilisé contre vous dans un tribunal)

Cela résume parfaitement bien le problème de l’opt-in : cela vous oblige à déclarer, sans réelle confidentialité, que vous souhaitez accéder à certains contenus, ces derniers pouvant être socialement inacceptables, c’est le moins que l’on puisse dire.

Lorsque ça sera utilisé devant les tribunaux – les cas de divorces semblent des cas assez pertinents – la plupart des gens commenceront à laisser certaines catégories de sites « douteux » bloqués, au cas où cela leur porte préjudice.

En d’autres termes, le schéma de l’opt-in menace de nous faire passer d’une censure rampante – déjà bien assez mauvaise en soi – à quelque chose de bien pire car inconscient : l’auto-censure.

C’est clairement le modèle chinois, où les utilisateurs savent que certaines lignes ne doivent pas être franchies et qui n’écrivent donc ou ne discutent jamais de certains interdits car ils ont intériorisés les restrictions imposées par le gouvernement.

La question est donc la suivante : est-ce que c’est vraiment la société que nous souhaitons créer au Royaume-Uni – un groupe de personnes constamment effrayé par la manière dont leurs choix pourraient être utilisés contre eux, un jour, et modifiant radicalement leur actions en conséquence ?

Pour quelques politiciens (pas de noms ni de punition collective ici) oui, mais je doute sérieusement que la plupart d’entre eux soient d’accord avec une conception des choses de cette façon-là.

Dans ce cas, nous devons combattre cette dangereuse et stupide idée de l’opt-in dès maintenant, indépendamment de ce que nous pensons du porno et de sa disponibilité en ligne.

Article rédigé par @glynmoody pour le site computerworlduk.com, article original disponible à  l’adresse http://blogs.computerworlduk.com/open-enterprise/2013/07/uk-risks-sliding-into-something-worse-than-censorship/index.htm

EDIT: (pour plus de clarté)*opt-in désigne ici le fait de décocher une option déjà cochée de base, l’auteur parlant d’opt-in lorsque l’on décoche une option de filtrage.

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