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Vous n’avez peut-être « rien à cacher » mais vous avez quelque chose à craindre.

lundi 5 août 2013 à 22:20

L’article original provient du site MSNBC.com.

Au vu des récentes informations sur la NSA et l’espionnage des américains, j’ai été particulièrement choqué par l’argument « si vous n’avez rien à cacher, vous n’avez rien à craindre. »

Au premier abord, cet argument semble solide – après tout, si le gouvernement ne fait que mener une surveillance antiterroriste, les « non-terroristes » ne devraient pas être concernés non ? Mais si vous regardez de plus près, vous allez vous rendre compte que cette idée n’est pas sans failles.

Le « je n’ai rien à cacher » suggère, à tort, que la vie privée, l’intimité, ne sont les désirs que des seuls criminels. En fait, nous faisons énormément de choses en privé – chanter sous la douche, faire l’amour, se confier à sa famille, à ses amis – qui ne sont ni mauvaises, ni illégales. Qui ne serait pas gêné par l’exposition de ces détails les plus intimes de nos vies privées?

Les barrières et les rideaux sont des manières de conserver son intimité et non des choses révélatrices d’un comportement criminel. L’intimité est une chose fondamentale dans toute vie.

Ce « je n’ai rien à cacher » est aussi un grand pas en arrière lorsque ce dernier suggère que nous sommes tous suspects, jusqu’à preuve du contraire. Notre système judiciaire nous considère innocents jusqu’à ce que la culpabilité soit établie. Ceci s’applique chaque jour – autant qu’il s’applique dans une cour de justice. La tâche de démontrer qu’il existe une bonne raison d’être suspect incombe au gouvernement et non l’inverse. La rengaine « rien à cacher » ne devrait être ni l’excuse ni le prétexte des gouvernements pour justifier la surveillance de masse.

Même si vous pensez que vous n’avez rien à cacher, vous avez, en fait, quelque chose à craindre. Vous devriez vous inquiéter pour vous-même. Avec une façon de présenter les choses qui fait froid dans le dos, Kafka illustre ce problème dans « Le Procès« , la perspective d’un gouvernement vous poursuivant sans justifications est terrifiante.

Vous devriez également vous inquiéter pour notre société. Vivre sous l’œil permanent d’une surveillance de masse peut entrainer des préjudices sociaux durables : si les citoyens sont un peu plus craintifs, un peu moins enclins à collaborer les uns avec les autres, un peu moins rebelles – tout ceci peut refermer ce qui était autrefois une société ouverte.

La surveillance par nos gouvernements porte directement préjudice à d’autres – pensez aux militants des droits de l’Homme ou aux journalistes qui doivent travailler avec des personnes qui ont peur de cette surveillance, non pas à cause de quelque chose qu’ils auraient pu mal faire, mais pour des raisons politiques. Imaginez un groupe libéral qui déclare qu’au vu du récent scandale de l’IRS, ils n’ont rien à craindre car l’IRS ne s’intéresse qu’aux conservateurs. Cet argument serait imprécis et ignorerait totalement les risques évidents d’un gouvernement qui va trop loin. (Besoin de preuves ? l’IRS a admis qu’ils observaient aussi les libéraux.)

Vous êtes peut-être dubitatifs, pas convaincus. Vous êtes certains que vous n’avez et n’aurez jamais rien à cacher. Vous pensez que mes inquiétudes sur ces carcans qui entravent la liberté d’expression et nos principes démocratiques sont exagérées et vous êtes convaincus que ces problèmes d’intimité sont également exagérés, aucune chance que cela vous affecte vous ou notre société de toute façon.

Mais – et c’est la plus importante faille dans ce « rien à craindre, rien à cacher » – comment pouvez-vous en être certains ?

En fait, vous ne savez pas si vous avez quelque chose à craindre ou non parce que vous ne savez pas ce que le gouvernement fait des données qu’il collecte. Si ce gouvernement garde secret ce qu’il collecte sur vous et pourquoi, vous êtes dans l’incapacité de corriger les erreurs potentielles. Et si vous connaissez un tant soit peu notre système judiciaire, vous savez que les erreurs ne sont pas rares.

La transparence est en partie là pour s’assurer que les actions du gouvernement – ses résultats – sont évaluables, mais la transparence, c’est aussi s’assurer que les informations dont dispose le gouvernement – ses sources – sont exactes.

Lorsque ce gouvernement opère en secret, il devient compliqué de savoir quoi que ce soit et d’en être convaincu.

Cependant, il y a bien une chose dont nous pouvons être convaincus : nous avons besoin d’en savoir plus.

Nous avons besoin d’en savoir plus sur les informations que le gouvernement collecte sur des millions d’américains innocents. Nous avons besoin d’en savoir plus sur ces interprétations juridiques secrètes sur lesquelles notre gouvernement se base pour surveiller nos communications. Et nous avons besoin d’en savoir plus sur ce que le gouvernement fait de ces milliards et ces milliards de bits de données qu’il amasse dans ses fichiers. Nous avons besoin de ces réponses car, même si nous n’avons rien à cacher, ça ne signifie pas que nous voulons vivre dans une société ou rien n’est privé.

Traduction faite depuis http://www.aclu.org/blog/national-security/you-may-have-nothing-hide-you-still-have-something-fear

Je précise qu’aucune autorisation n’a été demandée et que cette traduction est de moi, le texte ne l’est pas, j’ai donc désactivé Flattr sur ce post, le principe étant de diffuser l’information.

PS : si vous êtes en train de vous dire « ce n’est pas nous, ça se passe aux États-Unis d’Amérique », alors c’est que vous n’avez pas tout compris.

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