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[LECTURE] Wood, R. T., Griffiths, M. D., Chappell, D., & Davies, M. N. (2004). The structural characteristics of video games: A psycho-structural analysis

vendredi 8 juillet 2022 à 09:33

L’article The structural characteristics of video games. A psycho-structural analysis de WOODS, GRIFFITHS CHAPPELL et DAVIS publié dans Cyberpsychology  & Behavior passe  en revue les principales caractéristiques des jeux vidéo. Les données ont été  obtenues à partir d’un questionnaire (N=382) de personnes âgées entre 14 et 50 ans (âge moyen 21.1; écart-type 4.75) permettant d’évaluer 15 caractéristiques. L’article est intéressant parce qu’il explore les caractéristiques des jeux vidéo mais aussi pour parce que la question de l’addiction aux jeux vidéo est en embuscade derrière cette recherche. 

Les caractéristiques suivantes ont été évaluées à l’aide d’un questionnaire  : sons, graphismes, background, durée du jeu, difficulté, avancement, humour, options de contrôle, dynamiques du jeu, gains et pertes, développement du personnage, marqué, option multijoueuse.

Le principal résultat de la recherche est l’importance donnée au réalisme par les joueurs. Ce réalisme concerne aussi bien les images, le son que le background. Les jeux vidéo rapidement maîtrisés et qui donnent un sentiment d’avancement sont également les mieux notés. Une durée de vie moyenne est appréciée. La capacité de sauvegarder les jeux pour éviter de recommencer tout un niveau est également un élément important cité par les joueurs. 

Les auteurs notent des différences entre les joueurs et les joueuses. Les joueurs aiment les jeux vidéo qui sont basés sur des événements réels, la compétition, les mouvements rapides, les thèmes qui impliquent la survie ou les actions violentes ce qui les pousse vers les images réalistes. Les joueuses préfèrent les jeux vidéo non-violents et  non-compétitifs.

Alors que rien ne le laissait prévoir, la discussion débouche sur l’addiction aux jeux vidéo avec comme raisonnement que les machines à sous ont des images de plus en plus réalistes et que ces images ressemblent de plus en plus à celles des jeux vidéo. Il faut dire que les auteurs de l’étude ont conduit de nombreuses recherches sur ce thème. GRIFFITHS, le second auteur, est même un des inventeurs de l’addiction aux jeux vidéo puisqu’il a été le premier à rapprocher les comportements abusifs ou problématiques associés au jeu vidéo (gaming) du jeu pathologique (gambling).  

L’idée selon laquelle un jeu vidéo serait d’autant plus “addictif” qu’il a des images réalistes est contestée 5 ans après la publication de cette étude avec l’immense succès de Minecraft  malgré une esthétique rétro éloignée du photoréalisme. Des titres Thomas was alone ou  Braid, Threes ou Dwarf fortress ne brillent pas non plus par leur qualité graphique. Pourtant ce sont des jeux très prenants. 

Il serait pourtant erroné de dire que le graphisme n’a pas d’importance. Toute une génération de joueurs de jeux vidéo a grandi avec comme horizon des graphismes de plus en plus poussés. Aujourd’hui encore, les joueurs apprécient les effets de lumière lorsqu’ils jouent à Call of Duty ou  l’immersion esthétique pure que constitue un jeu comme Abzu. Cela montre qu’il n’est pas possible de mettre en avant une caractéristique parce que les standards évoluent avec la puissance des machines. Un Alone in the dark était un sommet au niveau graphisme a sa sortie se retrouve au bas de l’échelle aujourd’hui 

En ce sens, en faisant des graphismes le pinacle des jeux vidéo et éventuellement du jeu vidéo problématique, WOODS et ses collègues pointent le doigt dans la mauvaise direction. Ils le reconnaissent d’ailleurs en partie puisqu’ils notent qu’il ne leur est pas possible de déterminer quelle caractéristique a le plus de probabilité d’augmenter le temps de jeu.  Leur étude montre que des dimensions comme l’exploration de nouvelles zones, la surprise ou le fait de réussir une quête font partie des grands plaisirs des joueurs de jeu vidéo. L’article se conclut tout de même par le constat que le fait que les jeux vidéo ressemblent aux jeux d’argent,  “Les coûts sociaux du jeu vidéo intensif ne sont pas comparables à ceux du jeu d’argent intensif”. Si l’on traduit, cela signifie que les troubles liés aux jeux vidéo ne sont pas un problème de santé publique, contrairement à ceux liés aux jeux d’argent et de hasard.