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FredericBezies

source: FredericBezies

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Le monde du libre actuel part en couilles ? Bonus n°4 : vouloir faire « cavalier seul », maladie du logiciel libre ?

dimanche 28 avril 2019 à 10:51

Attention, « article vieux con qui pensait que c’était mieux il y a une quinzaine d’années » à suivre. Maintenant que l’annonce a été faite, attaquons le coeur du problème.

Depuis une grosse quinzaine d’années, j’ai pu constater la montée en puissance d’un individualisme qui est contraire à un des fondements du monde libre : la coopération, remplacée par la concurrence à tout crin.

En clair, tout l’opposé qui avait permis au noyau Linux de connaitre sa première version en moins de trois ans après le lancement du projet. J’ai déjà eu l’occasion de parler ad-nauseam des forks compulsifs qui donneront naissance à des projets qui ne vivront parfois que quelques semaines ou quelques mois.

Un des articles que j’ai bien aimé écrire sur cette utilisation abusive du fork date de novembre 2014, auquel je vous renvoie donc la conclusion est la suivante, toujours aussi vraie plus de 4 ans et demi après.

Chacun voit midi à sa porte, et je continuerai de dénoncer les forks compulsifs. Ce n’est pas en ignorant un problème lié à l’abus d’une composante du logiciel libre qu’on le résoudra.

Mais, c’est vrai… Je ne suis que l’emmerdeur de base, l’utilisateur final, somme négligeable au final 🙂

Mais j’ai envie de parler d’une volonté qu’on peut voir de temps à autre, celle de vouloir faire cavalier seul contre le reste du monde libre en espérant imposer son point de vue par la force. Oui, en gros, faire son Microsoft.

Il y a une boîte qui a fait énormément de bien pour la démocratisation du libre qui est l’exemple même de cette politique de cavalier, c’est Canonical. Oui, la maison mère d’Ubuntu. Avant que certaines personnes ne sortent les haches, les torches et les cordes pour me lyncher, je tiens à préciser que j’ai apprécié ce qu’à fait la boite de Mark Shuttleworth durant les années 2004-2009. Depuis c’est moins le cas.

On peut citer au moins trois tentatives pour imposer ses solutions qui se sont viandées. Chronologiquement ?

  1. Upstart (2006-2014)
  2. Unity (2010-2016)
  3. Mir en tant que remplaçant de Wayland (2013-2017)

Revenons sur chacun d’entre eux. Pour upstart, c’était la volonté de remplacer le vieillissant sysVinit. Introduit avec ubuntu 6.10 en octobre 2006, il sera supporté par Canonical jusqu’à la version 15.04. Red Hat l’utilisera pour sa Fedora entre les versions 9 et 15.

Inutile de préciser quel système d’init a remplacé upstart… Bref, un échec cinglant pour Canonical.

Pour Unity, le problème venait du fait que c’était un environnement conçu pour être intimement lié à Ubuntu. Je vous renvoie à mes archives pour montrer à quel point la portabilité n’était pas prévue. Il suffit de voir le nombre de paquets qu’il fallait faire recompiler et rustiner pour faire fonctionner Unity sur Archlinux… Un article rédigé en juillet 2016 vous montre le bazar monstrueux que c’était à l’époque.

Parlons pour finir de Mir. Introduit par Canonical pour proposer son propre successeur à X11 et donc concurrencer Wayland début 2013, il n’avait quasiment aucune chance de s’imposer ailleurs. Si on regarde sur le github du projet, la première version du fichier README.md est claire. On est le 19 décembre 2012.

mir – cross-platform display manager

Mir is a display manager that provides efficient support for graphics coprocessors.

Est-il besoin de traduire ? 🙂

Après l’abandon d’unity pour la Ubuntu 17.10 et l’officialisation de Gnome à la place, et la sortie d’Ubuntu 18.04 LTS, en juillet 2018, le fichier README.md est fortement modifié.

On a alors droit à quelque chose qui montre une volonté de se raccrocher au train Wayland :

Mir is set of libraries for building Wayland based shells.

De concurrent de Wayland, Mir en devient une « implémentation », en quelque sorte. Sacrée descente aux enfers.

On va me dire qu’il y a eu d’autres projets de ce type qui ont existé depuis des années. Mais l’importance de Canonical dans le monde du libre depuis 2004 ont mis en avant les projets « maisons » qui n’ont pas fonctionné. On est loin du cimetière des services et technologies enterrées par Google néanmoins.

Faire cavalier seul dans le monde du libre, ça sert à rien !