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Des logiciels de flicage s’installent insidieusement dans les écoles

jeudi 10 janvier 2013 à 10:12

Bart Simpson NikopikAh le collège et le lycée, premiers moments de la vie où l’on commence à s’émanciper de nos parents en ne leur racontant pas forcément tous les évènements qui se déroule au bahut… O:-)

Sauf que ce genre d’époque risque bien d’être révolue, avec la mise en place à grande échelle d’un logiciel qui permet de surveiller chaque aspect de la vie scolaire des enfants, avec le lot de dérives potentielles que cela peut apporter !

Si à l’origine le logiciel Pronote a été conçu pour partager les agendas et notes en ligne entre les enseignants et les parents, l’usage de l’application a lentement dérivé pour maintenant couvrir les retards et absences, le repas de la cantine, les punitions,  les sorties et la moindre remarque comportementale…

Sam, collégien en 5e : « Quand tu rentres en cours, le prof fait l’appel sur son ordi et un projecteur montre un tableau avec le nom des élèves et les colonnes des observations, retards, exclusions… Du coup on voit tous ce qui est noté pour tout le monde. On a l’impression d’être fliqué par le collège, c’est comme s’il savait tout à l’avance. Comme si on voulait nous foutre tous dans le même moule ! Pronote se rappelle des vieilles choses. Par exemple, t’es à la fin de l’année et les heures de colle et observations du premier trimestre sont encore inscrites. »

« Au niveau de la réception par les parents, toutes ces observations produisent un effet d’accumulation, constate Raymond, enseignant. Ça coupe le vrai lien avec eux. »

Car oui, si toutes les informations passent par Internet chez les parents, ça coupe aussi la nécessité de communication entre enfants et parents, qui n’ont plus grand chose à se raconter à part « Alors comme ça tu as dit des gros mots en classe ? Ne mens pas, je l’ai vu sur ton compte Pronote ! »

Avec en sus une batterie d’indicateurs représentant la performance scolaire par des graphiques et des histogrammes, histoire d’être habitué aux pratiques des pires entreprises surveillant tout ce que font leurs employés…

Mais les élèves ne sont pas les seuls visés ! Les membres du corps enseignant ne sont pas en reste, avec pour eux aussi une surveillance accrue de leur travail :

Anne, enseignante, s’exprime : « Pronote, en tant qu’enseignant, il faut le remplir. Le plus possible. Sinon on dit que tu es feignant. C’est là-dessus que tu seras jugé par l’inspecteur. À la limite, c’est pas grave si tes cours sont de mauvaise qualité. »

Une autre prof et mère réagit sur son expérience avec Pronote : « Je suis prof et je souscris totalement au diagnostic du « poison lent » que représente l’ENT (Espace numérique de travail) pour la société de demain : le contrôle social généralisé. Il y aurait encore beaucoup à dire notamment (en vrac) : 

- l’éducation ne peut se construire que dans un rapport de confiance.
- que vient faire la « machine » dans le rapport parents/ enfants ? 
- ne pas laisser le choix à l’enfant le lieu, l’heure à laquelle il décide d’annoncer lui même la mauvaise ou bonne note va à l’encontre de sa construction dans son rapport à autrui.
- les profs qui soutiennent ce contrôle total des élèves doivent forcément accepter qu’il en soit de même pour eux par leurs supérieurs hiérarchiques. Les conséquences pour eux sont énormes mais également pour l’Education Nationale, qu’on équipe d’ailleurs à grand frais en soutenant ainsi la croissance les firmes privées avec l’argent public qu’il n’y a jamais pour créer des emplois « humains »…. Bon je m’arrête. Ne voyant aucune réaction syndicale, j’avais décidé l’an dernier de résister toute seule en refusant de renseigner Pronote (j’avais envoyé un courrier aux parents pour leur expliquer ma démarche). Cette année, me trouvant toujours bien seule, j’ai jeté l’éponge… »

De même que tout n’est pas rose pour les surveillants : « Avant pour faire l’appel, il y avait un pion qui faisait le tour des classes, un autre qui rentrait les données dans l’ordi. Depuis Pronote, les absences sont rentrées directement par les profs. Du coup, les administrations ont pu soit supprimer des postes de surveillants, soit comme dans mon bahut, nous affecter à la surveillance de la cour. Au final, les élèves se retrouvent doublement fliqués. »

Tous ces témoignages me font un peu penser à une sorte de Facebook mis en place dans le monde scolaire, pour contrôler les élèves, les enseignants et les surveillants.

Ne sommes-nous pas en train de nous habituer insidieusement à ce genre de contrôle et d’accepter la mise en place de systèmes que l’on n’aurait jamais pu envisager il y a de ça quelques années ?

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