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Re: le hollandais volant Cookie walls et autres tracking walls : légal, pas légal ?

lundi 12 avril 2021 à 21:06

Tellement d'approximation et de n'importe quoi dans ce billet qu'il faut recaler un peu tout ça dans le monde réel.

D'abord dans le monde réel, le choix se fait entre:

  • se faire collecter / profiler / analyser par l'écosystème de la publicité (et tous les autres acteurs associés aux données personnelles incluant l'écosystème du paiement)
  • payer 2€ se faire collecter / profiler / analyser par l'écosystème des paiements (et tous les autres acteurs associés aux données personnelles, incluant l'écosystème de la publicité)

Il faudrait être vraiment naïf pour croire que ces ecosystèmes sont cloisonnés de manière étanche, alors qu'on sait bien que les données collectées sont refilés à des intermédiaires du type databroker qui vont alimenter votre profil qui sera ensuite mis à disposition. Le succès de la carte bancaire a été une manne pour les banques à ce niveau. Car oui payer en ligne implique un moyen de paiement en ligne qui par définition est pistable et pisté.

Mais en plus, on a pu voir par l'exemple que le fait de payer pour échapper au pistage publicitaire ne garantit aucunement qu'on ne sera pas collecté, profilé et pisté par le site visité, je vous renvois aux analyses de pixeldetracking sur ce sujet. Et payer pour ce site n'aura aucun effet sur le pistage intégré au système d'exploitation (windows, android, ...), au navigateur (coucou chrome, brave,...), lié au fai, etc. créant une idée trompeuse qu'on ne serait plus pisté en payant.

Cette idée qu'en payant on pourrait s'affranchir du ciblage publicitaire a été débunkée depuis plusieurs années, (voir par exemple ici: https://zen.lk/2015/07/19/Why-you-will-never-escape-ads-by-paying-for-content/ ) tout simplement parce que quelqu'un qui paye pour du contenu est une cible particulièrement prioritaire pour l'écosystème publicitaire qui a tout intérêt a connaître cet élément qui fait du payeur une priorité.

Maintenant intéréssons à un point intéréssant, imposer le paiement implique que toute personne qui n'a pas de moyen de paiement à distance (jeune, pauvre, qui vit dans une zone blanche de téléphonie mobile, ou qui n'a pas de téléphone mobile, en déplacement à l'étranger, etc.) n'a pas accès à l'option du paiement. Cette contrainte renforce et agrandit des inégalité déjà présentes et problématiques.

Au problème que payer ne fait pas disparaître la surveillance (et même est un critère incitant à l'intensifier) s'ajoute celui de la discrimination. Et on pourrait facilement élargir encore à d'autres problématiques lié a enfermer les contenus dérrière des murs: comme celui de l'archivage, de l'accessibilité, de l'impossiblité de fédérer ou interopérer, etc.

Quand à l'idée qu'il a existé un jour un modèle du tout gratuit, c'est complètement aberrant. Il n'y a jamais eu de gratuité sur le web, alors même qu'il a été conçu pour être ouvert et pour partager les informations. Une présence en ligne a toujours eu un coût et la manière dont ce coût est couvert n'est pas nécéssairement reporté sur les visiteurs, ou pas sous forme de paiement direct, mais ce coût est une réalité.
Là dessus, vient se greffer une idéologie commerciale et capitaliste qui pense qu'on peut faire du profit en exploitant un site web qui ne propose que l'accès à de l information (qui la plupart du temps est fournie par les usagers ou des sources externes) dont le hollandais volant se revendique. La faiblesse de cette idéologie étant que la première personne qui obtient l'accès à cette information peut aisément la copier et la distribuer à un coût marginal (on se rappelera de l'affaire JSTOR qui a entrainé la mort d'aaron swartz, ou encore sci-hub qui libère la recherche scientifique du blocage imposé par un tel mur (article du guardian).

Puis on pourra remarquer que les seuls à se plaindre et à mettre en place ces cookiewalls sont en quasi-totalité les mauvais acteurs du web, ceux qui font du profit sur la base de mauvaises pratiques et qui ont comme seul objectif de faire du profit et qui sont amenés à disparaitre en même que les mauvaises pratiques sur lesquelles ils ont construit leur machine à profit.

Mais surtout cette vision étriquée et reductrice de la situation occulte la partie la plus redoutable: les conséquences de cette surveillance à l'échelle globale et à moyen terme. Et pourtant les effets du capitalisme du surveillance et de l'économie de l'attention sont les principaux moteurs qui nourrissent l'exploitation des mécanismes inconscient du cerveau et du corps pour créer l'addiction et les habitudes qui ont un effet particulièrement néfaste sur tout le monde mais en particulier sur les jeunes générations. (pour un état des lieux de la science sur ce sujet, je recommande la lecture de «Michel Desmurget, La fabrique du crétin digital. Les dangers des écrans pour nos enfants.»

En attendant que le hollandais volant décide que tant qu'on ne paye pas 2€, on ne pourra plus voir ses inepties se répandre sur la river, je vous souhaite à bientôt

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