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10 Stages of Genocide

mardi 17 octobre 2023 à 22:31

Le génocide est un processus qui se développe en dix étapes prévisibles mais non inexorables. À chaque étape, des mesures préventives peuvent l'arrêter. Le processus n'est pas linéaire. Les étapes peuvent se dérouler simultanément. Logiquement, les étapes ultérieures doivent être précédées d'étapes antérieures. Mais toutes les étapes continuent à fonctionner tout au long du processus.

➔ 1. CLASSIFICATION : Toutes les cultures ont des catégories pour distinguer les gens en "nous et eux" selon l'ethnie, la race, la religion ou la nationalité : Allemand et Juif, Hutu et Tutsi. Les sociétés bipolaires qui n'ont pas de catégories mixtes, comme le Rwanda et le Burundi, sont les plus susceptibles de connaître un génocide.

 La principale mesure préventive à ce stade précoce consiste à développer des institutions universalistes qui transcendent les divisions ethniques ou raciales, qui encouragent activement la tolérance et la compréhension, et qui promeuvent des classifications qui transcendent les divisions. L'Église catholique romaine aurait pu jouer ce rôle au Rwanda si elle n'avait pas été déchirée par les mêmes clivages ethniques que la société rwandaise. La promotion d'une langue commune dans des pays comme la Tanzanie a également favorisé une identité nationale transcendante. Cette recherche d'un terrain d'entente est essentielle à la prévention précoce des génocides.

➔ 2. SYMBOLISATION : Nous donnons des noms ou d'autres symboles aux classifications. Nous nommons les gens "Juifs" ou "Tziganes", ou nous les distinguons par leurs couleurs ou leurs vêtements ; et nous appliquons les symboles aux membres des groupes.La classification et la symbolisation sont universellement humaines et n'aboutissent pas nécessairement à un génocide, à moins qu'elles ne conduisent à la déshumanisation. Lorsqu'ils sont associés à la haine, les symboles peuvent être imposés aux membres involontaires de groupes parias : l'étoile jaune pour les Juifs sous le régime nazi, le foulard bleu pour les habitants de la zone orientale du Cambodge des Khmers rouges.

 Pour lutter contre la symbolisation, les symboles de haine peuvent être légalement interdits (croix gammées en Allemagne), tout comme les discours de haine. Le marquage de groupe, comme les vêtements de gangs ou les cicatrices tribales, peut également être interdit. Le problème est que les limitations légales échouent si elles ne sont pas soutenues par l'application de la culture populaire. Au Burundi, les mots Hutu et Tutsi étaient interdits jusqu'aux années 1980, mais ils ont été remplacés par des mots codés. Cependant, s'il est largement soutenu, le refus de la symbolisation peut être puissant, comme ce fut le cas en Bulgarie, où le gouvernement a refusé de fournir suffisamment de badges jaunes et où au moins 80 % des Juifs ne les ont pas portés, privant l'étoile jaune de sa signification en tant que symbole nazi pour les Juifs.

➔ 3. DISCRIMINATION : Un groupe dominant utilise la loi, la coutume et le pouvoir politique pour refuser les droits des autres groupes. Le groupe impuissant peut ne pas se voir accorder la totalité des droits civiques, le droit de vote ou même la citoyenneté. Le groupe dominant est animé par une idéologie d'exclusion qui prive les groupes moins puissants de leurs droits.L'idéologie prône la monopolisation ou l'expansion du pouvoir par le groupe dominant. Elle légitime la victimisation des groupes plus faibles. Les défenseurs des idéologies d'exclusion sont souvent charismatiques et expriment les ressentiments de leurs partisans, attirant ainsi le soutien des masses. Parmi les exemples, citons les lois de Nuremberg de 1935 dans l'Allemagne nazie, qui privaient les Juifs de leur citoyenneté allemande et leur interdisaient d'être employés par le gouvernement et les universités. Le refus de la citoyenneté à la minorité musulmane Rohingya en Birmanie est un exemple actuel.

 La prévention de la discrimination implique que tous les groupes d'une société jouissent d'une pleine autonomie politique et de droits de citoyenneté. La discrimination fondée sur la nationalité, l'appartenance ethnique, la race ou la religion doit être proscrite. Les individus devraient avoir le droit de poursuivre l'État, les entreprises et d'autres personnes si leurs droits sont violés.

➔ 4. DÉHUMANISATION : Un groupe nie l'humanité de l'autre groupe. Les membres de ce dernier sont assimilés à des animaux, de la vermine, des insectes ou des maladies. La déshumanisation permet de surmonter la répulsion humaine normale contre le meurtre. À ce stade, la propagande haineuse dans la presse écrite et sur les radios haineuses est utilisée pour vilipender le groupe victime. Le groupe majoritaire apprend à considérer l'autre groupe comme moins qu'humain, voire étranger à sa société. Ils sont endoctrinés pour croire que "nous sommes mieux sans eux".Le groupe impuissant peut être tellement dépersonnalisé qu'on lui attribue des numéros plutôt que des noms, comme c'était le cas pour les Juifs dans les camps de la mort. Ils sont assimilés à la saleté, à l'impureté et à l'immoralité. Les discours de haine remplissent la propagande des radios officielles, des journaux et des discours.

Pour lutter contre la déshumanisation, l'incitation au génocide ne doit pas être confondue avec un discours protégé. Les sociétés génocidaires n'ont pas de protection constitutionnelle pour les discours compensatoires et devraient être traitées différemment des démocraties. Les dirigeants locaux et internationaux doivent condamner l'utilisation des discours de haine et les rendre culturellement inacceptables. Les dirigeants qui incitent au génocide devraient être interdits de voyages internationaux et voir leurs finances étrangères gelées. Les stations de radio haineuses doivent être brouillées ou fermées, et la propagande haineuse doit être interdite. Les crimes de haine et les atrocités doivent être rapidement sanctionnés.

➔ 5. ORGANISATION : Le génocide est toujours organisé, généralement par l'État, qui utilise souvent des milices pour nier la responsabilité de l'État (par exemple, le soutien et l'armement des Janjawids au Darfour par le gouvernement soudanais). (Le soutien et l'armement des Janjawids au Darfour par le gouvernement soudanais en est un exemple). Parfois, l'organisation est informelle (foules hindoues dirigées par des militants locaux du RSS pendant la partition de l'Inde) ou décentralisée (groupes terroristes djihadistes). Les États et les milices achètent des armes, souvent en violation des embargos sur les armes décrétés par les Nations unies, afin de faciliter les actes de génocide. Les États organisent des polices secrètes pour espionner, arrêter, torturer et assassiner les personnes soupçonnées de s'opposer aux dirigeants politiques. Une formation spéciale est dispensée aux milices meurtrières et aux unités spéciales de l'armée chargées de tuer.

 Pour lutter contre cette étape, l'appartenance aux milices génocidaires devrait être interdite. Leurs dirigeants devraient se voir refuser les visas pour les voyages à l'étranger et leurs avoirs à l'étranger devraient être gelés. Les Nations unies devraient imposer des embargos sur les armes aux gouvernements et aux citoyens des pays impliqués dans des massacres génocidaires, créer des commissions chargées d'enquêter sur les violations, comme cela a été fait au Rwanda après le génocide, et utiliser les systèmes juridiques nationaux pour poursuivre ceux qui violent ces embargos. 

➔ 6. POLARISATION : Les extrémistes séparent les groupes. Les groupes haineux diffusent une propagande polarisante. Les motivations pour cibler un groupe sont endoctrinées par les médias. Les lois peuvent interdire les mariages mixtes ou les interactions sociales. Le terrorisme extrémiste cible les modérés, intimidant et réduisant au silence le centre. Les modérés du propre groupe des auteurs sont les plus à même d'arrêter le génocide et sont donc les premiers à être arrêtés et tués. Les dirigeants des groupes ciblés sont les prochains à être arrêtés et assassinés. Le groupe dominant adopte des lois ou des décrets d'urgence qui lui confèrent un pouvoir total sur le groupe ciblé. Ces lois érodent les libertés et les droits civils fondamentaux. Les groupes ciblés sont désarmés afin de les rendre incapables de se défendre et de garantir le contrôle total du groupe dominant.

 La prévention peut se traduire par une protection de la sécurité des dirigeants modérés ou une assistance aux groupes de défense des droits de l'homme. Les biens des extrémistes peuvent être saisis et les visas pour les voyages internationaux peuvent leur être refusés. Les coups d'État perpétrés par des extrémistes doivent être combattus par des sanctions internationales. Il convient de s'opposer vigoureusement au désarmement des groupes d'opposition. Si nécessaire, ils doivent être armés pour se défendre.

➔ 7. PRÉPARATION : Des plans sont élaborés pour les massacres génocidaires. Les dirigeants du groupe national ou de l'auteur de l'attentat planifient la "solution finale" à la "question" des Juifs, des Arméniens, des Tutsis ou d'autres groupes ciblés. Ils utilisent souvent des euphémismes pour dissimuler leurs intentions, en parlant par exemple de "nettoyage ethnique", de "purification" ou de "lutte contre le terrorisme". Ils construisent des armées, achètent des armes et entraînent leurs troupes et leurs milices. Ils endoctrinent la population en lui faisant craindre le groupe victime. Les dirigeants affirment souvent que "si nous ne les tuons pas, ils nous tueront", déguisant le génocide en légitime défense. Les actes de génocide sont déguisés en contre-insurrection en cas de conflit armé ou de guerre civile. La rhétorique incendiaire et la propagande haineuse augmentent soudainement dans le but de susciter la peur de l'autre groupe. Les processus politiques tels que les accords de paix qui menacent la domination totale du groupe génocidaire ou les élections à venir qui risquent de lui faire perdre sa mainmise sur le pouvoir total peuvent en fait déclencher un génocide.

 La prévention de la préparation peut inclure des embargos sur les armes et des commissions chargées de les faire respecter. Elle devrait inclure des poursuites pour incitation et conspiration en vue de commettre un génocide, deux crimes au titre de l'article 3 de la convention sur le génocide.

➔ 8. PERSECUTION : Les victimes sont identifiées et séparées en raison de leur identité ethnique ou religieuse. Des listes de morts sont établies. Dans les génocides soutenus par l'État, les membres des groupes de victimes peuvent être contraints de porter des symboles d'identification. Leurs biens sont souvent expropriés. Parfois, ils sont même séparés dans des ghettos, déportés dans des camps de concentration ou confinés dans une région frappée par la famine et affamés. Ils sont délibérément privés de ressources telles que l'eau ou la nourriture afin de les détruire lentement. Des programmes sont mis en œuvre pour empêcher la procréation par la stérilisation forcée ou l'avortement. Les enfants sont retirés de force à leurs parents. Les droits fondamentaux du groupe victime sont systématiquement bafoués par le biais d'exécutions extrajudiciaires, de tortures et de déplacements forcés. Les massacres génocidaires commencent. Il s'agit d'actes de génocide parce qu'ils détruisent intentionnellement une partie d'un groupe. Les auteurs de ces massacres observent si ces derniers suscitent une réaction internationale. Si ce n'est pas le cas, ils se rendent compte que la communauté internationale sera à nouveau spectatrice et permettra un autre génocide.

 À ce stade, l'état d'urgence génocide doit être déclaré. Si la volonté politique des grandes puissances, des alliances régionales, du Conseil de sécurité ou de l'Assemblée générale des Nations unies peut être mobilisée, une intervention internationale armée doit être préparée, ou une assistance lourde doit être fournie au groupe victime pour qu'il se prépare à l'autodéfense. L'aide humanitaire doit être organisée par l'ONU et les groupes de secours privés pour faire face à l'inévitable marée de réfugiés à venir.

➔ 9. L'EXTERMINATION commence, et devient rapidement le massacre de masse légalement appelé "génocide". Pour les tueurs, il s'agit d'une "extermination" parce qu'ils ne croient pas que leurs victimes soient pleinement humaines. Lorsqu'il est commandité par l'État, les forces armées collaborent souvent avec des milices pour perpétrer le massacre. Parfois, le génocide entraîne des vengeances de groupes les uns contre les autres, ce qui crée un cercle vicieux de génocide bilatéral (comme au Burundi). Les actes de génocide montrent à quel point les victimes sont déshumanisées. Les corps déjà morts sont démembrés ; le viol est utilisé comme outil de guerre pour modifier génétiquement et éradiquer l'autre groupe. La destruction des biens culturels et religieux est utilisée pour anéantir l'existence du groupe dans l'histoire. L'ère de la "guerre totale" a commencé avec la Seconde Guerre mondiale. Les bombardements ne distinguaient pas les civils des non-combattants. Les guerres civiles qui ont éclaté après la fin de la guerre froide n'ont pas non plus fait de différence entre les civils et les combattants. Elles donnent lieu à des crimes de guerre généralisés. Les viols massifs de femmes et de jeunes filles sont devenus une caractéristique de tous les génocides modernes. Dans certains génocides, tous les hommes en âge de combattre sont assassinés. Dans les génocides totaux, tous les membres du groupe ciblé sont exterminés.

 À ce stade, seule une intervention armée rapide et écrasante peut mettre fin au génocide. De véritables zones de sécurité ou des couloirs de fuite pour les réfugiés doivent être mis en place avec une protection internationale lourdement armée. (La brigade permanente d'intervention rapide des Nations unies, la force de réaction rapide de l'Union européenne ou des forces régionales doivent être autorisées à agir par le Conseil de sécurité des Nations unies si le génocide est de faible ampleur. Pour les interventions plus importantes, une force multilatérale autorisée par les Nations unies devrait intervenir. Si le Conseil de sécurité des Nations unies est paralysé, les alliances régionales doivent agir de toute façon en vertu du chapitre VIII de la Charte des Nations unies ou l'Assemblée générale des Nations unies doit autoriser une action en vertu de la résolution GARes. 330 (1950) de l'Union pour la paix, qui a été utilisée à 13 reprises pour une telle intervention armée. Depuis 2005, la responsabilité internationale de protéger transcende les intérêts étroits des États-nations individuels. Si les nations fortes ne fournissent pas de troupes pour intervenir directement, elles devraient fournir le transport aérien, l'équipement et les moyens financiers nécessaires pour permettre aux États régionaux d'intervenir.

➔ 10. Le DÉNI est l'étape finale qui dure tout au long du génocide et le suit toujours. Il est l'un des indicateurs les plus sûrs de la poursuite des massacres génocidaires. Les auteurs du génocide déterrent les charniers, brûlent les corps, tentent de dissimuler les preuves et d'intimider les témoins. Ils nient avoir commis des crimes et rejettent souvent la responsabilité de ce qui s'est passé sur les victimes. Ils bloquent les enquêtes sur les crimes et continuent à gouverner jusqu'à ce qu'ils soient chassés du pouvoir par la force et qu'ils s'exilent. Là, ils restent impunis, comme Pol Pot ou Idi Amin, à moins qu'ils ne soient capturés et qu'un tribunal ne soit créé pour les juger.

 La meilleure réponse au déni est la punition par un tribunal international ou des tribunaux nationaux. C'est là que les preuves peuvent être entendues et que les coupables peuvent être punis. Des tribunaux comme celui de la Yougoslavie, du Rwanda ou de la Sierra Leone, le tribunal chargé de juger les Khmers rouges au Cambodge ou la Cour pénale internationale ne dissuaderont peut-être pas les pires génocidaires. Mais avec la volonté politique de les arrêter et de les poursuivre, certains d'entre eux pourront être traduits en justice.  Dans la mesure du possible, les procédures locales doivent permettre d'entendre les preuves contre les auteurs qui n'étaient pas les principaux dirigeants et planificateurs d'un génocide, et offrir des possibilités de restitution et de réconciliation. Les procès rwandais du gaçaça en sont un exemple. La justice doit s'accompagner d'un enseignement dans les écoles et les médias sur les faits d'un génocide, les souffrances qu'il a causées à ses victimes, les motivations de ses auteurs et la nécessité de rétablir les droits de ses victimes.

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