PROJET AUTOBLOG


Shaarli - Les discussions de Shaarli

Archivé

Site original : Shaarli - Les discussions de Shaarli du 23/07/2013

⇐ retour index

Passé et présent de l'anarchisme - La révolution comme fin en soi : la communauté anarchiste selon Gustav Landauer | Le site du Monde libertaire

vendredi 5 juin 2015 à 14:22
Liens des pleutres 05/06/2015
Éloge de la "révolution permanente", à prendre au sens littéral, pas au sens de l'expression habituelle (https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volution_permanente).

Sur l'État (pris comme un *rapport social*) :
« Chez cet auteur, l’État ne se définit pas seulement comme un ensemble d’institutions, mais plutôt comme un rapport social spécifique : « L’État est une façon d’être, une certaine forme de relation entre les êtres humains, un type de comportement, que nous détruisons en adoptant d’autres relations, en agissant différemment les uns envers les autres… Nous sommes l’État, et nous persistons à être l’État jusqu’à ce que nous ayons créé les institutions qui constituent une communauté réelle. » Ainsi, l’État progresse à chaque fois que les individus s’en remettent à des lois qu’ils n’ont pas eux-mêmes énoncées, à des traditions qu’ils acceptent sans réflexion, et adoptent les comportements sociaux que l’ordre établi leur impose. L’État est partout où disparaissent l’autonomie, le libre arbitre et la volonté de faire en sorte que la société reste vivante.
Dans une association anarchiste telle que la conçoit Landauer, des lois peuvent évidemment être créées et toutes les traditions ne sont pas à refuser aveuglément. Mais si ses membres perdent leur désir d’être libres, de décider eux-mêmes de leur organisation mutuelle et abandonnent à d’autres, à un pouvoir extérieur, la maîtrise de leur environnement, alors ces lois et traditions se figent. Elles ne sont plus modelées et perfectionnées par l’esprit critique et par la raison humaine. Partout où les hommes abdiquent, se soumettent, ils participent à l’avancée de l’État. Pire, ils en sont eux-mêmes les piliers. […] L’État n’est pas qu’une puissance extérieure : il peut toujours réapparaître de l’intérieur. Dès que des individus cessent de se penser et de se comporter comme mutuellement libres et autonomes, dès qu’ils s’en remettent à une autorité supérieure pour déterminer leur conduite, alors l’État regagne du terrain. »

« les périodes d’ordre politico-institutionnel, appelées topies, sont considérées comme des moments inertes, gelés, de la vie sociale. Elles voient s’estomper l’énergie créatrice propre aux intervalles de transition. À l’inverse, c’est lors des phases de transformation que s’exprime au mieux la vitalité humaine, lorsque l’ordre existant est subverti et déstabilisé par des utopies, donc par « l’effort de créer une nouvelle réalité à l’aide d’un idéal » et de fonder une organisation socio-politique plus juste. Quand une société s’est pétrifiée en un régime réputé infaillible, intransgressible, l’irruption d’un nouvel horizon d’émancipation et les luttes qu’il génère ravivent la capacité fondamentale des individus à se mobiliser pour réinventer leurs relations sociales et leur environnement politique. Ce travail de l’utopie au cœur de la topie est la révolution. »

« L’idéal de la communauté anarchiste chez Landauer, même dans des conditions favorables, n’est donc pas celui d’une société aux lois et traditions immuables. C’est celui d’une association maintenant une vigilance constante face aux résurgences du pouvoir et prenant soin d’organiser la lutte contre le retour de l’État en son sein. Ainsi la réalisation de l’utopie n’est-elle pas la relégation de la révolution dans le passé. Elle passe au contraire par sa systématisation, par un effort pour l’instituer de façon que, régulièrement, selon des modalités acceptées par tous les membres, les lois, les traditions, la répartition des biens, les échanges économiques, le rôle de chacun, soient repensés, redéfinis. De cette façon seront endiguées l’inévitable réapparition du pouvoir, des inégalités, et la tendance des individus à abandonner leur libre-arbitre et à s’en remettre à des normes préétablies. L’originalité de l’anarchisme de Landauer, sa force, sa pertinence pour une réflexion quant aux modes d’organisation libertaires, résident dans cet apport fondamental : l’anarchisme est indissociable de la révolution, mais pas comme un simple moyen. Pour l’anarchisme, la révolution est bien une fin en soi. »

− Yvain
(Permalink)