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La religion est-il un roman sexiste ?

vendredi 10 avril 2015 à 11:56
Choses vues, sur le web et ailleurs 10/04/2015
La Religion, ce super roman que j'évoquais ici : http://sammyfisherjr.net/Shaarli/?X5FNGQ est-il sexiste ?
Clairement oui. Mais c'est pas grave, on ne va pas foutre l'auteur au bûcher pour ça (je préfère tout de suite préciser ma pensée, pour pas qu'on m'accuse de je ne sais pas trop quoi)

Je ne sais pas pourquoi j'ai repensé à ça ce matin. Mais des éléments me sont revenus en mémoire post-lecture, et je me suis dit que ça pourrait être intéressant que je développe ma pensée.

J'avais concédé dans mon précédent shaare sur le sujet que le roman était sexiste, mais ne m'étais pas étendu plus avant ; je pressentais juste qu'il y avait "quelque chose" mais je ne voyais pas quoi. Après tout, les deux femmes principales -les seules à être clairement identifiées, tous les autres personnages féminins sont "les femmes", point qui mériterait également d'être développé- sont indépendantes, elles voyagent seules de l'Aquitaine jusqu'à la Sicile, semblent dans un premier temps très bien se passer des hommes et les limitations qui leurs sont imposées sont celles voulues par l'époque, pas par l'auteur.

ATTENTION JE VAIS SPOILER. Je ne dévoile pas d'éléments essentiels de l'intrigue, mais si vous ne tenez pas à savoir dès maintenant ce qu'il se passe au-delà de la page 50, arrêtez votre lecture ici.

Reprenons : femmes indépendantes, tout ça. Ok. Seulement par la suite, Mattias Tanhauser arrive, et :
- il tombe amoureux des deux,
- elles tombent toutes les deux amoureuses de lui,
situation absolument ordinaire et complétement banale, vous en conviendrez. La femme n'étant qu'un être faible soumis à ses passions, prête à tomber dans les bras viril du premier guerrier en rut qui passe sous ses fenêtres. Mais passons. Le triangle amoureux, c'est pour la tension dramatique.

Concrètement, une fois à Malte, la première se tournera vers le Christ, les malades, le dévouement... (tout en continuant à rêver du beau Mattias), pendant qu'il entretiendra des rapports sexuels (torrides et nombreux) avec la seconde. Vous ne voyez pas ? La maman et la putain. Je caricature, mais l'idée est là. On retrouve les deux rôles un peu schizo que tout homme (cisgenre, hétéro) rêve de faire endosser aux femmes. Il est là, le détail sexiste de l'Histoire.

Si on résume, nous avons dans ce roman deux personnages féminins, incarnant chacun un archétype machiste (la maman douce et dévouée, qui soigne les blessures et apporte la soupe, et la partenaire sexuelle décomplexée), et une foule de femmes anonymes, que l'on aperçoit comme de loin, et qui sont soit les épouses éplorées des morts et des mutilés, soit les courageuses matrones montant aux remparts lors d'un moment désespéré, et achevant les envahisseurs au couteau de cuisine. (Quand je vous dit qu'il est bien ce roman ^^) Alors qu'une multitude de personnages masculins secondaires sont nommés.

Voilà, c'était tout. Ça n'en rend pas le roman moins bon pour autant, j'ai toujours autant envie de lire la suite (Mattias et [héhé, devinez laquelle] se promènent à Paris le 24 août 1572), mais je trouve intéressant de creuser un peu les ressorts des intrigues, ce qu'elles nous disent au-delà de ce qui est raconté. Tim Willocks est sûrement quelqu'un de très bien, j'ai bien aimé son interview, et vraisemblablement n'est-il pas plus sexiste que la moyenne. Simplement, nous sommes une fois encore dans ce que Jaddo exprimait : le goutte-à-goutte, les clichés dont nous sommes **tous** victimes, que nous soyons lecteurs ou écrivain.
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