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Shaarli - Les discussions de Shaarli

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Site original : Shaarli - Les discussions de Shaarli du 23/07/2013

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Ce que signifie la haine du 19 mars 1962 | Slate.fr

vendredi 20 mars 2015 à 23:16
Riff's Links 20/03/2015
A l'occasion du renommage par Ménard de la rue du 19 Mars 1962 (signature des accords d'Évian - fin de la guerre d’Algérie) en Rue du commandant Marc-Hélie de Saint Marc (officier partisan de l'Algérie française ayant participé au putsch des généraux de 1961), l'historien Nicolas Lebourg revient sur l'histoire du traitement des harkis par les autorités française et sur la façon dont se construit la mémoire historique d'un événement.

La conclusion de Lebourg  sur l'usage de cette mémoire et, de façon plus ou moins implicite, sur l'usage politique du racisme pour faire oublier des questions sociales et économiques :

"Néanmoins, l'articulation identité-autorité fonctionne pleinement au bénéfice politique de l'extrême droite. On comprend dès lors bien le positionnement de Robert Ménard, qui n'avait pas fait mystère de sa fibre pied-noir durant la campagne des municipales. Peu auparavant, il avait publié un ouvrage intitulé Vive l'Algérie française! Béziers est une ville en grande difficulté: comme nous le rappelions dans une note publiée avant les élections municipales, 33% de la population y vit sous le seuil de pauvreté. L'équipe élue ne change pas le vécu social. Elle se sert de signes d'identité et d'autorité: ainsi des buzz organisés autour de la crèche de Noël placée dans l’hôtel de ville, ou des provocatrices affiches quant à l'armement de la police municipale... ou de cette opération quant au 19 mars. L'absence d'impact du politique sur les réalités socio-économiques est ici clairement compensée par une offre de signes en charge de réassurer la cohésion du groupe ethno-national majoritaire.

L'usage politique de la mémoire, pointant ici du doigt les personnes originaires des mondes arabo-musulmans, poursuit la dynamique dont furent en fait victimes les harkis eux-mêmes: la mise à l'écart de groupes minoritaires au bénéfice de l'unitarisme autoritaire. Il y a là une logique, quant on songe que l'histoire d'un camp comme celui de Rivesaltes nous montre que l’ostracisme de communautés dont le sort indiffère la société permet de générer du consensus grâce à sa démonstration d'une puissance biologique régulatrice. Le lieu de l’ostracisme est un lieu «autre» qui permet la production d’un espace public «normal». L'admonestation publique des minorités a des finalités proches. Cette question-là balaye le social, réenchante la politique aux yeux d'une partie de nos compatriotes. Elle paraît réaffirmer un semblant de récit groupal et de volontarisme des autorités. C'est pourquoi, ces jours-ci, à Béziers et ailleurs, ils iront manifester contre le 19 mars. C'est pourquoi, ces jours-ci, à Béziers et ailleurs, ils iront voter Front national."
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