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Sexisme et liberté d'expression

lundi 15 avril 2013 à 16:29

Il y a quelques semaines que mon cerveau s'est transformé en mini champ de bataille suite au billet de Mar_lard. Mais Je commence à y voir un tout petit peu plus clair...

Aucune remise en cause de la liberté d'expression

Je place cette liberté fondamentale au dessus de tout le reste. C'est une brique fondatrice, indispensable à la mise en place d'une véritable démocratie (non, pas celle que l'on nous impose actuellement...). Donc oui, cela ne fera pas plaisir à tout le monde, mais dans l'absolu j'aimerai que chacun puisse (pouvoir n'est pas devoir) insulter son prochain, et sortir les pires horreurs qui soient.

"On aurait jamais du abolir l’esclavage, les noirs sont bons qu'a ça" ou répondre à une fille qui vient te donner un conseil sur SF4 (même si ça doit surprendre la première fois...) "T'est gentille, mais retourne dans ta cuisine", sont des exemples qui, en résumé, sont à ranger dans la même catégorie.

Il est donc important de pouvoir afficher au monde l'épaisseur de sa bêtise crasse, l'étendue abyssale de sa stupidité, la preuve irréfutable de sa connerie profonde. La victime elle, (qui rappelons le ne sera que "moralement" blessée), aurait alors le devoir de faire circuler l'information. D'indiquer à un maximum de gens "regardez ce que cet abruti à osé me sortir". Dans un monde presque parfait l’agresseur pourrait, en quelques minutes, devenir la risée du web, le type avec qui plus personne ne veut être "ami" sur FB etc. Mieux, ceux qui défendrait ce genre de propos seraient rapidement classés ("crétins de même type"). La machine dont tout le monde rêve, le détecteur de connard existe, il suffit de l'allumer.

Les choses ne sont pas si simples

Malheureusement cela ne fonctionne que si une majorité de gens est déjà capable de reconnaitre les propos précédents comme injustifiés (et injustifiables). Ce que dénonce précisément Mar_lard et que la quantité d'abrutis serait tel dans le "milieu geek" que cela ne fonctionne pas. Au contraire, nous nous défendrions les uns les autres...

Et bien vous savez quoi ? Sur ce second point au moins, elle à raison.

Parce que si d'un coté il y a l'indéfendable, le totalement inadmissible (harcèlement physique ou par avatar interposé, réactions déplacées en conventions etc...) il y a, d'un autre coté, beaucoup de choses auxquelles il n'est pas question de renoncer.

L'exemple de joystick avec Tomb Raider

L'article de Joystick sur Tomb Raider par exemple, semble avoir choqué de nombreuses lectrices (et Mar_lard en particulier). Pourtant, ayant moi même pas mal joué au dernier TR, je ne peux que confirmer que ce que tentait d'expliquer ce journaliste. Oui, il est jouissif de voir Lara malmenée comme elle l'est dans ce jeu. Oui, savoir que la moindre erreur peut se traduire par une mort spectaculaire à un effet "excitant". Oui, on souffre parfois pour la belle et oui ces cinématiques violentes sont une des raisons pour lesquelles nous, garçons, on peut être attiré par ce jeu. TR est un "triple A" donc forcément soft, mais des jeux "pour homme" ou l’échec se traduit par le viol de l’héroïne, ça se trouve.

Après si vous voulez en conclure que tous les geeks sont des malades mentaux malsains, c'est votre droit. Personnellement je me sens plutôt bien dans ma peau. Surtout que, comme tout bon rôliste, je pense encore savoir faire la différence entre une fiction fantasmée et la vie réelle.

Donc oui, mesdames, nous avons des fantasmes. Et oui, beaucoup de jeux vidéos, de films et de livres les utilisent. Qu'attendez vous de nous au juste ? Qu'on fasse comme si on en avait pas ? qu'on les oubli, qu'on en parle pas ? Qu'on Interdise ce genre de jeu ? Je suppose que non. (Sinon il faudrait qu'on ai une petite discussion sur les notions de liberté, de censure etc).

Vous voulez vos propres produits geeks, adaptés à vos fantasmes ? (j'ai rien contre...). Vous voudriez peut être simplement pouvoir lire un magazine "grand publique" sans systématiquement vous sentir insultée et/ou transformées en objet sexuel ? Ce serait vraiment compréhensible. Il va donc falloir....

Trouver un compromis, ou compartimenter

J'essaye d'imaginer l'inverse. Si je ne pouvais pas lire un magazine ou regarder une émission de télé sans être dégouté, écœuré, sans me sentir insulté toutes les 30 secondes. (C'est exactement l'effet que la publicité a sur moi, et c'est insupportable).

La première réaction, c'est d’arrêter de regarder. Signalez votre dégout, boycotter les produits correspondants. Tout le monde doit avoir maintenant pris conscience du problème, les journalistes devraient être un peu plus "soft". Surtout, il doit être possible de mieux compartimenter. Je ne suis pas en train de dire qu'il faut un joystick (ou un EXP, ou un classé 18+) pour fille et un pour garçon. Mais peut être que certains tests, certains sujets, certaines "blagues" devraient être cantonnées à des "endroits" parfaitement identifiés comme étant "à destination des geeks mâles". Ceux la même qui fantasmaient déjà sur les dessins de Bellamy dans la presse informatique des années 80 et qui ne voient pas pourquoi, trente ans plus tard, il faudrait soudainement faire comme si la grande majorité des lecteurs n'étaient pas sexués.

Conclusion

Il me semble qu'il y a un effort à faire des deux cotés. Personne ne peut nier ou même ignorer que certaines fictions (jeux vidéos, livres...) véhiculent une "image dégradante de la femme". Mais la, pas touche. Liberté d'expression, tout ça. Parler de ces œuvres est évident couvert par la même liberté d'expression. En revanche aucun homme, geek ou pas, ne devrait tolérer les propos sexistes irl ou en ligne, pour les mêmes raisons qu'on ne tolère pas les propos xénophobes, antisémites ou que sais-je. Ce ne sont pas des raisons légales. Mais des raisons morales.

EDIT : Pour ceux qui, comme moi, découvre le féminisme, je vous conseil d'aller lire cette FAQ (merci Pierrecastor)