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Philippe Scoffoni : Les irréductibles gaulois passent à l’attaque version Framasoft

mercredi 8 octobre 2014 à 23:00

Degooglisons InternetCa y est la phase de teasing est terminée, Framasoft a enfin dévoilé son plan triennal pour (tenter de) faire tomber Google et consorts. C’est donc le cloud de cette nouvelle campagne. J’oserais dire que cela n’a rien de surprenant au vu des outils mis en ligne depuis de nombreux mois. Il nous manquait juste le comment et surtout l’impulsion.

Ce comment passe par un site dédié qui regroupe toutes les informations et la liste des services que proposera Framasoft dans les trois années qui viennent. Inutile de dire que la liste est longue. Toujours dans le comment se pose la question des moyens. Visiblement Framasoft compte sur nos dons et nos bras pour arriver à ses fins. L’embauche de permanents supplémentaire est également à l’ordre du jour avec un objectif de onze permanents pour 2017. Effectivement il faudra du monde pour administrer et faire fonctionner tous les services.

Il est positif de voir enfin le navire Framasoft indiquer une direction. Ces dernières années le bateau amiral francophone du libre avait bourlingué de port en port sans que l’on sache trop où il allait, refaisant les peintures par ci ou par là, mais sans impulser d’élan fédérateur. Il semble que cette période soit révolue.

J’ai beaucoup aimé le village libriste en village gaulois, l’image est bien trouvée. Toujours à se taper dessus, mais au fond ils s’aiment bien (ou pas). Sauf qu’historiquement les Gaulois sont restés sous domination romaine cinq siècles avant que les barbares de l’est (les Francs entre autres) ne viennent les chasser. L’image est moins glorieuse si on oublie le sympathique personnage de Goscinny et Uderzo. Espérons que nous n’aurons pas à subir cinq siècles de Google. Cependant l’idée est bonne et espérons que les jeunes générations (et les moins jeunes) y adhéront.

Le libre suiveur

Ce qui est dommage et Framasoft n’y peut rien dans l’absolu puisque personne ne s’y est attelé avant eux, car le cloud c’est mal, c’est que finalement ce projet ne vise qu’à refaire ce qui existe déjà. Du nectar pour les détracteurs du libre qui ne cessent de lui reprocher de n’être qu’un suiveur. Le libre non marchand et à destination du grand public est-il faute de moyen voué à suivre ou ne pourrait-il parfois être précurseur ? Le système monétaire est centralisé ne l’oublions pas, donc la monnaie va toujours aux mêmes poches en passant de moins en moins par les nôtres. Mais ce n’est pas une excuse pour ne par chercher l’innovation d’usage.

Je continue de penser que le libre ne pourra s’imposer que s’il est capable d’introduire une rupture dans des usages qui puissent toucher un maximum de monde. Refaire les services propriétaires est certes un pas en avant qu’il faut faire et soutenir, mais cela ne changera probablement pas beaucoup l’équilibre des forces en présence.

Le libre a raté pas mal d’occasion et continue de les rater faute de les anticiper et de s’organiser en conséquence. Ce que propose Framasoft a juste 10 ans de retard. Mais me direz-vous c’est injuste, personne ne pensait alors que Google, Facebook et autres prendraient une telle place. Pourtant, les briques existaient déjà à l’époque. Pour preuve, ce sont des briques libres dont se sont servis et se servent toujours les méchants du web…

En tout état de cause, comme je le disais il faut soutenir cette initiative, car il faut bien tenter de remonter la pente bien savonneuse qui a été descendue. Une pente qui ne concerne d’ailleurs pas que les particuliers. Les entreprises se sont elles aussi laissées entraîner et continue de migrer leur informatique en masse vers des services fermés. Je me bas au quotidien contre cela, mais c’est un combat épuisant et difficile à mener parfois.

Degoogler, les entreprises aussi

Le problème reste entier, l’absence d’alternative « crédible ». L’autre jour nous échangions sur la liste du PlossRA autour d’un appel d’offres passé par la ville de Meyzieu. L’objectif est de quitter les Google Apps pour une solution toujours en mode hébergé, mais assurant une réelle protection de l’accès aux données. Les principales fonctionnalités attendues sont les suivantes :

Évidemment toutes les briques libres sont disponibles, il faut « juste » unifier l’annuaire utilisateur et proposer une navigation confortable entre les applications sans parler d’une interface à peu près unifiée entre les applications pour éviter de perturber les utilisateurs par des ergonomies trop différentes.

Je ne sais pas qui va répondre à cet appel d’offres dans le clan du libre, mais je doute que le résultat ne coûte que 40 € par utilisateur et par an. La facture risque d’être salée. C’est là que l’on voit le rôle que l’état pourrait avoir dans l’affaire. S’il investissait ne serait-ce qu’une année de licence Microsoft, nous aurions un Google Apps français depuis longtemps.

Les entreprises d’une manière générale et celle du numérique libre aurait tout intérêt à s’allier à Framasoft en contribuant au développement des outils nécessaires au projet. Je ne saurais que trop les inciter à cela. Mais hélas à ce jour quand on parle d’innover d’une manière générale, les grands du numérique français (libre ou pas) restent à de très rares exceptions encroûtées.

Créer de nouveaux territoires

Une rupture dans les usages se profile que peu veulent voir, celle des environnements immersifs et de leurs périphériques, les objets connectés en tout genre. Google, Facebook (toujours les mêmes) procèdent à des rachats méthodiques de briques et se préparent à les assembler. Facebook annonce un environnement virtuel d’un milliard d’avatars prochainement. De nouveaux territoires vont être mis à la disposition des utilisateurs et ils ne seront pas portés par des services libres. Il ne faudrait pas grand-chose pour que ce soit le contraire, tout est là sous vos pieds y compris le comment faire avec un modèle économique éthique, social et solidaire. La porte est ouverte à ceux qui veulent savoir et l’idée progresse dans certains cabinets et têtes de rares politiques à la vue plus longue que d’habitude. Touchons du bois…

En attendant, soutenons Framasoft, car ce qu’il font doit être fait. Cela galvanise les volontés autour d’un unique acteur ce qui évite la dispersion. Il sera toujours temps de se réorienter.

Pour finir, je voudrais conclure sur trois points :

Tiens un mail en qui tombe en Spam au moment ou j’écris cet article : [SPAM] 75 € offerts sur Google AdWords avec l’aide gratuite d’un expert.

Oui on en est là…

PS : bravo à ceux qui ont tout lu jusqu’en bas :-)


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Article original écrit par Philippe Scoffoni le 08/10/2014. | Lien direct vers cet article

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