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Antistress : Choisir un ordinateur portable : machine de guerre ou machine de liberté ?

lundi 27 janvier 2014 à 15:23

Homme descendant la rue dans un mini tank improvisé, saluant la foule clairsemée

Souvent, lorsque l'on effectue un achat informatique (PC du bureau, carte graphique, ordinateur portable...), on a le réflexe de se constituer « une machine de guerre », métaphore qui signifie que l'on a opté pour un matériel très performant. Après tout, si on ne renouvelle pas très souvent son matériel et que l'on souhaite faire tourner des jeux vidéos par nature exigeants en ressources matérielles, il faut voir loin et s'assurer que l'on aura les performances suffisantes pour les jeux et les années à venir.

Si ce raisonnement se vérifie certainement encore aujourd'hui pour les jeux vidéos, toujours plus exigeants pour appâter le chaland immerger le joueur, il est plus difficile à défendre pour la plupart des autres usages, de la consultation de sites Web au montage vidéo en passant par la bureautique. Pour ces usage, il y a longtemps que la performance requise est atteinte (et dépassée), et pour peu que les logiciels soient optimisés il n'y a pas de raison que ça change (même dans le cas d'un montage vidéo HD par exemple).

C'est ainsi qu'il y a moins d'un an ½ j'ai opté pour un processeur seulement dual core avec puce graphique intégrée (un Intel Core i3-3225, soit un processeur de la famille Ivy Bridge incluant un cœur graphique HD Graphics 4000 – un « Gen7 » dans la nomenclature d'Intel – pour environ 140€ à l'époque), très largement suffisant pour les usages cités à l'exclusion sans doute des « gros » jeux vidéos (je ne joue par sur PC mais sur console).

Du coup si le critère pertinent n'est plus la performance, d'autres critères d'importance deviennent plus visibles, telle la possibilité pour le matériel de tourner avec des logiciels libres. Intégralement.

Viser un système d'exploitation libre

Je l'ai déjà écrit dans ces colonnes, le premier réflexe à adopter lors d'un achat matériel et de s'assurer de sa bonne prise en charge native par le noyau Linux. Cela vous évitera bien des tâtonnements lors de l'installation.

Pouvoir faire tourner une distribution GNU/Linux sur son PC sans recours à des pilotes privateurs est non seulement une économie d'emmerdes et un gage de longévité de matériel mais aussi une grande satisfaction intellectuelle : votre système vous appartient, en toute transparence, sans rien vous imposer (les décisions des développeurs sont nécessairement prises dans l’intérêt des utilisateurs puisque ces derniers auraient tôt fait de forker le logiciel pour en purger les anti-fonctionnalités, c-a-d les fonctionnalités qui répondent à d'autres intérêts que ceux des utilisateurs. C'est ainsi qu'avec VLC vous pouvez passer les pubs, avertissements et menaces de vos galettes DVD, ce que votre lecteur de DVD de salon vous empêche de faire alors qu'il en est techniquement parfaitement capable).

Rappelons simplement à ce stade que le noyau Linux contient des blobs, c'est à dire des pilotes privateurs dont seule la redistribution est autorisée. Ceux-ci figurent dans un répertoire séparé des sources afin de bien les identifier. Debian, par défaut, utilise dorénavant une version du noyau nettoyée de toutes ces parties non-libres.

Vous l'avez compris, l'optimum est alors que votre matériel fonctionne nativement avec une version entièrement libre du noyau Linux.

Viser un logiciel d'amorçage libre

Pourtant, rappelons que techniquement le système d'exploitation et son noyau sont lancés après un autre logiciel qui a potentiellement la main sur le système d'exploitation : le BIOS – ou l'UEFI, son successeur désigné par l'industrie.

Traditionnellement les logiciels d'amorçage qui équipent les matériels vendus ne sont pas libres. C'est la raison pour laquelle Richard Stallman, le père des logiciels libres, utilise un vieil ordinateur portable Lemote Yeeloong : celui-ci fonctionne avec un logiciel d'amorçage libre.

Le projet Coreboot a justement l'objectif de produire un logiciel d'amorçage libre mais, ayant des moyens humains et financiers limités, le nombre de matériels pris en charge reste relativement restreint. Il reçoit la collaboration d'AMD, et récemment Google a participé au développement pour en doter ses Chromebooks équipés de processeurs Intel Sandy Bridge et suivants (Ivy Bridge, Haswell).

Techniquement, Coreboot propose une solution séduisante : il réduit le temps de démarrage de la machine au minimum en évitant les vérifications et initialisations qui font doublon avec celles du noyau Linux.

Politiquement, il permet à l'utilisateur de s'assurer qu'il contrôle bien sa machine puisque cette dernière n'exécute que des logiciels libres.

Si ma machine de bureau fonctionne avec un noyau Linux entièrement libre, elle n'est hélas pas prise en charge par Coreboot. En revanche il est possible d'acheter des ordinateurs portables pris en charge par Coreboot.

À noter que, de la même façon qu'avec le noyau Linux, le logiciel Coreboot contient un répertoire avec des blobs, et que l'optimum est de choisir un matériel ne nécessitant pas ces blobs (pas simple).

Ainsi, bien que le département graphique d'Intel soit très orienté open source (Intel développe les pilotes Linux pour ses puces directement en open source en même temps qu'il en publie la documentation technique), ce n'est pas le cas de tous les départements de cette société. De fait, les plateformes Intel Sandy Bridge et Ivy Bridge nécessitent un firmware MEI non libre, que l'on retrouve parmi les blobs de Coreboot, seulement autorisé à le redistribuer tel quel. De ce point de vue il semblerait qu'AMD soit plus ouvert.

D'ailleurs la FSF vous invite à écrire à Intel pour lui demander de lancer des portables avec un BIOS libre pour commencer.

La FSF précise à ce sujet :

The most uncooperative company is Intel, which has started a sham "open source" BIOS project. The software consists of all the unimportant parts of a BIOS, without the hard parts. It won't run, and doesn't bring us any closer to a BIOS that does run. It is just a distraction. By contrast, AMD has been cooperating by releasing major chunks of their BIOS source code and making their technical experts available.

Ce qui donne en français :

La société la moins coopérative est Intel, qui a commencé un projet bidon de BIOS « open source ». Le logiciel regroupe toutes les parties sans intérêt du BIOS, sans les parties importantes. Il ne fonctionne pas et ne nous aide en rien à obtenir un BIOS fonctionnel. Il s'agit juste d'une distraction. Au contraire, AMD s'est montré coopératif en publiant des gros morceaux du code source de leur BIOS et en permettant à ses experts techniques de nous aider.

En pratique, j'achète quoi ?

Sur libre.thinkpenguin.com par exemple, vous pouvez acheter des portables fonctionnant avec les distributions GNU/Linux. À vérifier cependant si ceux-ci fonctionnent avec un noyau Linux entièrement libre comme c'est le cas de celui des distributions Debian, BLAG Linux and GNU, Dragora, Dynebolic, gNewSense, Musix GNU+Linux, Parabola, Ututo et Trisquel.

Par ailleurs – et surtout – GNU.org tient une liste de sociétés proposant des matériels compatibles. On y trouve notamment un lien vers la boutique gluglug.org qui propose des portables équipées de Coreboot, comme le Gluglug X60 (un Lenovo ThinkPad X60 remis à neuf avec une carte WiFi moderne et une nouvelle batterie de 5200mAh, livré avec ou sans station d'accueil) : il s'agit tout simplement du premier portable certifié par la FSF comme fonctionnant sans aucun blob, donc avec des logiciels libres de A à Z !

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