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L’alerte : état d’esprit versus État absent

jeudi 7 avril 2016 à 20:18

Mardi soir était diffusée l’émission de Cash Investigation dédiée aux #PanamaPapers, cette fuite de documents centrée sur l’évasion fiscale par le biais de société-écran, fraude orchestrée par des sociétés telles Mossack Fonseca au Panama.

La reportage est suivi d’une séquence plateau avec des invité·e·s. Parmi elleux, la lanceuse d’alerte Stéphanie G. qui a permis à l’Etat français de récupérer 12 milliards d’euros, mais qui est abandonnée par l’État qui lui tourne littéralement le dos. Après son job et son argent, elle risque son logement, le Minefi & autres ministères ne font rien pour elle, tout comme les autres lanceuses-eurs d’alerte, y compris quand elles/ils livrent bénévolement des informations aux pouvoirs publics. Peut-on vraiment faire pleinement confiance à ces services & pouvoirs publics ?

Le Ministre Des Finances et des Comptes Publics Michel Sapin était présent et a évoqué un projet de Loi contenant un « statut protecteur des lanceurs d’alerte » et une agence vers laquelle des lanceurs-euses d’alerte pourraient confier des documents, informations… sous couvert d’anonymat. Seule cette agence serait au courant de l’identité des citoyen·nes qui partagent ces injustices, délits ou méfaits. Voici l’extrait de l’émission, vers 2h 32min 02s :

[Lien direct si la vidéo ne marche pas.]

Il a formellement REFUSÉ de s’engager, à la moindre chose, ni pour la lanceuse d’alerte en question, ni n’a fait de promesse formelle pour les lanceurs & lanceuses d’alerte en général. Et de toute façon les député·e·s et sénatrices-eurs voteront très certainement contre cette loi. Ils et elles n’ont « rien à cacher » bien sûr, ne comprennent rien à Internet ou presque, elles & ils savent bien ce qu’iels ont à craindre de dénonciations populaires, que l’argent en France est un sujet tabou, même l’argent public. Surtout l’argent public. Ce projet de loi « Sapin II » n’a donc selon moi que peu de chances d’aboutir, ou alors amputé de telles dispositions. Ce n’est pas comme s’il y avait un moyen pour le Gouvernement de passer en force (49-3)…

Revenons sur cette fameuse « agence » : ne soyons pas dupes. La confiance envers le politicien·nes ou envers l’État baisse, et ce n’est pas les actuelles violences policières lors des manifestations anti-Loi Travail qui prouveront le contraire ou infléchiraient la tendance. Par ailleurs un État peut jouer double ou triple jeu en fonction des interlocuteurs, en mode « Officiellement je m’offusque, mais en vrai OSEF protégeons nos copains ».

De plus l’État français n’est de loin pas reconnu pour son expertise dans le Numérique (loi HADOPDI) ou la sécurité informatique (rares sont les fonctionnaires ou agent·e·s publics·ques aptes à chiffrer un mail, un entrepreneur a été condamné pour avoir trouvé via Google des documents mal protégés…) . Seule une poignée de parlementaires sont un peu conscient(e)s des enjeux de la cryptographie et ses bénéfices possibles pour l’intérêt général.

Réfléchissez-y deux fois avant de vous confier à l’Etat. Une BA n’est pas toujours récompensée… Protégez vos arrières avant tout. Apprenez à être anonyme voire à disparaître, naviguez discrêtement, brouillez les pistesdurcissez votre disque dur, tchattez avec authentification, effacez vos traces et laissez-en moins… En l’occurrence dans ces Panama Papers la source se sentait déjà menacée et a posé ses conditions avant de partager les documents : clavardage uniquement par communications chiffrées et aucune rencontre, jamais.

Alors donc, si vous êtes sur le point de balancer de telles infos à la Presse ou aux Pouvoirs Publics, ne jouez pas aux héroïnes/héros : soyez anonymes et restez-le à tout prix, de tout temps. Pas de poursuite-bâillon, donc des nuits tranquilles et une vie qui continue comme avant. Ne comptons que sur nous-même et tenons bon : une alerte s’inscrit dans la durée, ce n’est pas du one-shot (des journalistes peuvent vous contacter plusieurs mois après…).

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Classé dans:pouvoirs publics, Presse, procedure judiciaire Tagged: agence, alerte, anonymat, anonymous, chiffrement, citoyenneté, confidentialité, cryptographie, Etat français, France, identité, identité numérique, lanceur d'alerte, lanceuse d'alerte, Michel Sapin, Ministre de l'Économie, Ministre des Comptes Publics, Ministre des Finances, protection, sécurité, stress, TOR, VPN, whistleblower