Creposuke, le 10/09/2014 à 22:54
je n'ai pas pu m'empêcher de penser aux sketchs de dieudonné sauf qu'ici c'est plus intelligent. On se moque mais on stigmatise pas
(
Permalink)
Httqm > Creposuke, le 11/09/2014 à 00:39
(Entrée sur scène de Pierre Desproges)
On me dit que des juifs se sont glissés dans la salle ?
(éclats de rire dans le public)
> je n'ai pas pu m'empêcher de penser aux sketchs de dieudonné sauf qu'ici c'est plus intelligent. On se moque mais on stigmatise pas.
Non, désolé : rire aux blagues de l'un et traiter l'autre de tous les noms, c'est croire en l'histoire du bon chasseur et du mauvais chasseur. Une blague raciste / antisémite / sexiste / autre reste raciste / antisémite / sexiste / autre quelle que soit la personne qui la raconte. Sinon, ça voudrait dire que certaines personnes ont le droit d'exprimer certaines idées et d'autres non. Et comme on est tous égaux, cette idée-là me chiffonne un brin.
NB : je n'ai rien contre l'humour noir (sans vouloir faire un jeu de mots facile ;-). Certains trucs un peu "limite" me font marrer. Je pense qu'on peut rire de tout, même si certains trucs ne feront pas rire tout le monde (y compris moi, éventuellement)
Ok : Desproges a une certaine aura du fait de son habilité à jongler avec notre belle langue. Mais qu'on m'explique pourquoi ça fait marrer des gens si c'est lui qui déclame "On me dit que des juifs se sont glissés dans la salle ?", alors que d'autres seraient indignés d'entendre Dieudonné faire de même.
En googlant, je me rend compte que j'avais déjà réagi à un sujet similaire : "Je regarde des idées, pas ceux qui les ont !" (
http://shaarli.callmematthi.eu/?njwTCw)
(
Permalink)
@toto, le 11/09/2014 à 13:10
Pierre, tu es parti trop vite.
(
Permalink)
Sammy Fisher Jr > Httqm, le 11/09/2014 à 14:25
Je crois que c'est Kevin Mérigot qui expliquait que ce qui fait la différence de Desproges (ou Coluche) avec des gens comme Dieudonné, c'est qu'on sait d'où ils parlent, il n'y a pas d'ambiguïté. Quand Desproges fait un sketch sur les juifs, ou sur les épiciers arabes, on sait qu'il n'est pas du côté des racistes, et que ce n'est pas une attaque sous couvert d'humour. (Hop, retrouvé :
http://www.mypersonnaldata.eu/shaarli/?wE47nw)
Si c'était Dieudonné qui disait aujourd'hui "on me dit que des juifs se sont glissés dans la salle", cela ferait (peut-être) scandale, d'abord à cause de la personnalité (limite, pur ne pas dire plus) de l'intéressé. Voilà quelqu'un qui jongle avec des concepts antisémites, en tentant malhabilement de les habiller d'anti-sionnisme : ce genre de propos à double détente prendrait donc une toute autre "coloration" dans ce contexte.
D'accord avec toi pour dire qu'une blague raciste ou sexiste reste une blague raciste ou sexiste, quelle que soit la personne qui l'a raconte. Mais on ne peut pas taxer Desproges de racisme, de sexisme ou d'antisémitisme, sauf à l'avoir vraiment très mal compris. Ce n'est pas la possibilité laissée à certains et refusée à d'autres d'exprimer certaines idées qui est ici en cause, c'est la différence entre l'humour qui prend une catégorie de la population pour cible et l’humour qui joue avec les stéréotypes pour mieux les dénoncer...
Pour en revenir au sketch de Desproges que tu évoques, prends le temps de le lire ou de l'écouter. Il est sur le fil du rasoir tout du long, mais il ne franchit jamais la ligne rouge.
(
Permalink)
Kevin Merigot > Sammy Fisher Jr, le 11/09/2014 à 16:20
Oui, c'est moi que j'ai dit ce truc. En version longue ici :
http://mypersonnaldata.eu/shaarli/?wE47nw
La question, fondamentale, et qui fait toute la différence, c'est de savoir si l'humoriste rit AVEC ou DE quelqu'un. Dans ce sketch, effectivement subtile, Desproges ne rit pas DES Juifs, il rit AVEC les Juifs DES nazis. La nuance est subtile et, pourtant, fondamentale. Tout le long, il campe un antisémite-qui-holala-surtout-non-je-le-suis-pas pour s'en moquer. On rigole du personnage qu'il joue, et à travers lui des nazis. Il use des stéréotypes pour servir son absurde.
Dieudonné, lui, use des stéréotypes pour se moquer des stéréotypés. On est à des années lumières, sur la forme et dans le fond, de Desproges.
Et puis bon, sur un autre registre... "Il y a plus d'humanité dans les yeux d'un chien qui remue la queue, que dans la queue de Le Pen quand il remue son œil", on est aussi très loin du parrainage de son fils par Le Pen... Parce que, oui, ça contribue aussi à savoir "d'où on parle" ce genre de trucs...
(
Permalink)
Httqm > Sammy Fisher Jr, le 11/09/2014 à 18:08
Je saisis bien la nuance et je sais qu'elle est subtile : "'on sait d'où ils parlent, il n'y a pas d'ambiguïté."
Certes, mais ça revient à avoir un a priori sur ce que disent les gens, et ce, avant même qu'ils aient ouvert la bouche :
- Desproges ou Coluche raconte une blague raciste : "Ahah, quel sacré déconneur, celui-là !"
- Dieudonné fait la même chose : "Bouh le vilain !"
==> c'est l'histoire du bon chasseur et du mauvais chasseur.
Si on élargit ça à des cas moins tranchés que Desproges/Dieudonné (parce que dans ce cas-là, je pense qu'on est d'accord ;-), ça veut dire qu'à partir du moment où n'importe qui est connu pour être un "bon chasseur", il pourra dire tout ce qu'il veut sans problème, pendant que le "mauvais chasseur" se fera huer avant d'avoir ouvert la bouche.
Il y a _bien longtemps_, j'ai lu "Comment je vois le monde" (ou quelque chose comme ça), écrit par un certain Albert Einstein. On peut penser tout le bien qu'on veut de cet homme, rien n'empêche qu'il ait dit une fois ou deux des trucs idiots, ou des choses qui étaient vraies dans son contexte et fausses aujourd'hui. Et inversement (quitte à verser dans l'excès, allons-y franchement), peut-être même qu'Hitler a eu 2 ou 3 idées "pas si connes" concernant la politique, l'économie, ...
Ce qui me gêne avec ça, c'est l'abandon du sens critique : une fois les gens catalogués en gentils / méchants (et par qui ? la télé ?), on gobe ou on rejette tout en bloc. Ca me semble délicat d'accepter ou de rejeter une idée simplement d'après sa source.
C'est d'ailleurs pour ça que des stars sont achetées par des grandes marques pour vendre du café / des voitures / du shampooing / n'importe quoi : le produit devient sympathique parce que la star qui le promeut nous est sympathique. Alors qu'on n'a même pas goûté ledit café ni essayé la voiture ou le shampooing, on a déjà un a priori "plutôt positif".
(aussi en réponse à
https://www.mypersonnaldata.eu/shaarli/?YXzAIA)
(
Permalink)